Ségolène Royal, arbitre attitrée ?
"Les sondages montrent que vous êtes loin derrière Martine Aubry et François Hollande dans la course à l'investiture, vous persistez à y croire ?"
"Pour qui appellerez-vous à voter au soir du 1er tour ?"
Il faut observer avec soin les regards condescendants et amusés que s'échangent les "experts de la politique". Il faut remarquer leur façon de surjouer la perplexité lorsqu'elle redit son ambition pour saisir l'insidieuse violence du traitement réservé à Madame Royal depuis quelques temps déjà. D'aucuns m'objecteront qu'il ne s'agit que d'un cinglant retour de bâton proportionnel à l'intensité de son "idylle" avec les médias en 2006. Ils auront en partie raison. Attraction malsaine à laquelle succède un rejet brutal, voilà résumée ici la frivolité des éditocrates qui brûleront sans états d'âme demain ce qu'ils encensaient hier.
Ils voudraient que nous nous positionnions en fonction de leurs pronostics. Ils voudraient que nous nous répartissions entre Aubry et Hollande. Ils voudraient raconter l'histoire d'un match au sommet, d'un duel fratricide entre héritiers Deloristes dont ils pourraient nous narrer au jour le jour les rebondissements, avec de somptueux gros titres, à coups de sondages manipulés. Ils feront passer en première position tantôt l'un, tantôt l'autre en laissant invariablement Royal à 13%, en une position subalterne et essentielle à la fois, celle d'arbitre ! Ingénieux...
Ces pratiques sont, à mon sens, scandaleuses, car elles visent à cantonner sournoisement les dits "petits" au rang de faire-valoir sans grand intérêt, niant presque leur droit fondamental à se présenter, occultant au passage la teneur du message qu'ils veulent faire passer. Message pourtant éclairant à bien des égards.
Sur quelles bases se fait cette différence de traitement médiatique ? Sur deux arguments aussi spécieux l'un que l'autre.
1- La "préservation" de l'unité.
On joue bien volontiers sur la peur d'une ultime défaite dont le parti socialiste ne se remettrait certes pas pour dénier à certains leur droit à la parole, à l'expression de leur idées. Comme si désaccords et confrontations amèneraient forcément le déferlement public de haine des "héritiers du pouvoir " observé en 2007. Arrêtons de feindre d'être choqué par la violente lutte pour l'accession au pouvoir. Le combat sera rude, il l'a été de tout temps, A l'ère de l'immediateté, des chroniques lapidaires, des pathétiques "oui ou non" des messages assassins en ligne aussi haineux qu'anonymes, notre parole citoyenne doit peser, ne nous laissons pas voler notre libre expression, notre vote.
2- Les sondages
Je veux dire ici mon indignation face aux sondages actuels. Et face à l'utilisation qui en est faite par certains médias. Comment peut-on accorder, de bonne foi, le moindre crédit à ces sondages sur la primaire dont nous sommes abreuvés sans interruptions ? Alors même que ces éléctions sont inédites en France. Que les instituts "habilités" à faire la pluie et le beau temps ne savent strictement rien ni du nombre de votants ( entre 500 000 et 5 millions...), ni des idéaux politiques de ceux-ci. Voilà une belle fumisterie qui a de quoi questionner sur les motivations réelles des patrons d'instituts comme des grands groupes de presse . Tenter d'influencer le choix du candidat de la gauche et faire de l'argent pour les uns, vendre du papier et capter des téléspectateurs pour les autres. Il est plus que temps de rompre avec ces pratiques malhonnêtes qui, en se donnant l'objectif de manipuler l'opinion, jettent de fait l'opprobre sur la démocratie toute entière.
Il faudra trouver la parade pour contourner les vicissitudes d'un système bien rodé. Résister face à ceux qui auront tôt fait, à la lecture des constats que je viens de dresser, d'invoquer la paranoïa, la démagogie, la démence, le fanatisme aveugle ou que sais-je encore ?
Il faudra, enfin, dépasser les rancoeurs du passé, les amertumes du présent, lorsque les urnes auront livré leur verdict. Et se rendre utile à la nécessaire victoire de la gauche en 2012, quel que soit le candidat désigné.
Je me battrais, pour ma part, avec toute l'énergie qui est la mienne, pour la candidature de Ségolène Royal. Ni dans les habits d'un supporter, ni même dans ceux d'un militant, mais dans la peau d'un citoyen engagé. Le socialisme du XXIème siècle est à inventer à l'échelle d'un monde qui marche sur la tête. Nous avons à nous battre pour cet idéal qui nous dépasse de beaucoup.
C'est un défi monstrueux, complexe. Et beaucoup ne manqueront pas de moquer, au mieux par désenchantement, au pire par cynisme, les "doux rêveurs" qui donneront d'eux-même dans cette difficile entreprise. En France, Ségolène Royal a mieux que quiconque compris cette profonde aspiration du peuple à se battre pour l'inatteignable, l'égalité. Notre république, à l'heure actuelle, ne tient pas les promesses qu'elle a faite à tous ses enfants. Pour beaucoup, le champ des possibles est même anéanti. Comment vivre lorsque l'on a du mal à survivre ? Comment ne pas se résigner lorsque l'on sait ses enfants condamnés à l' avance par un marché du travail qui les cantonnent à des métiers précaires. Comment ne pas être indigné par le fait que certains touchent en un mois ce que d'autres mettront toute leur vie à accumuler péniblement ? Comment accepter de ne pas pouvoir sortir de chez soi après 20h dans certains quartiers ? Comment ne pas être désenchanté lorsqu'après avoir travaillé toute sa vie, l'on s'aperçoit que notre retraite ne nous permet qu'un repas par jour ? Comment accepter que les banques aux bénéfices annuels colossaux refusent de faire leur métier en finançant l'économie réelle et continuent à spéculer sur les marchés financiers ? Est-ce tenable ? Est-ce juste ? Est-ce sérieux ? NON
Il ne s'agit pas, en affirmant cela avec force, de se cantonner à l'incantation ou de s'enfermer dans l'invective stérile de cette droite arrogante, captive des grands patrons, amis du petit Nicolas. Il s'agit de dire pourquoi nous voulons le pouvoir. Pour qui nous voulons remettre de l'ordre dans une société pourrie par "la tyrannie de l'argent".
Ségolène Royal a beaucoup travaillé. C'est indéniable. Et c'est la raison pour laquelle elle entre dans l'arène aujourd'hui avec nombre de principes et de propositions concrètes qui, à mon sens, fondent sa légitimité. Elle est la seule à faire cette synthèse nécessaire entre les valeurs traditionnelles et le progrès social, entre la responsabilité individuelle et les sécurités collectives. Elle est aussi la seule à proposer des alternatives à l'assistanat et aux augmentations d'impôts qui feraient payer la crise à ceux qui n'y sont pour rien et freineraient durablement la croissance. C'est, à mon sens, le seul chemin qui vaille pour la gauche.
Vous remerciant de m'avoir lu.
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