Sexisme 2 : répartition n’est pas guerre des sexes
Il fallait qu’un texte fondamental scelle une réalité tout aussi fondamentale : l’égalité des hommes et des femmes. L’égalité des humains légalement majeurs. L’égalité de droits et de valeur. Il fallait cela : 150 ans de code Napoléon avait exclu les femmes de la vie sociale, même si elles étaient déjà entrées dans l’économie depuis longtemps.
L’économie, elles y étaient pour la plupart. Dans les sociétés rurales, comme au Moyen-Âge, elles participaient à la vie de l’exploitation familiale. Seul les travaux les plus pénibles étaient réservés aux hommes. Les femmes faisaient les foins avec les hommes, s’occupaient du bétail, tenaient des commerces, s’occupaient de l’habillement et de la maison, de l’éducation.
Politiquement, selon les régions d’Europe et la période, elles dépendaient du mari. Mais les maris étaient assez souvent absents : guerres, commerce, location de sa force de travail à des propriétaires parfois éloignés. Les femmes avaient donc souvent la maîtrise de l’économie et des décisions importantes pour leur maisonnée ou le domaine familial. Elles recevaient aussi une partie des biens du mari, biens dont elles disposaient.
Elles restaient en principe subordonnées aux décisions du mari. Cependant, dans les faits elles étaient des partenaires de vie et des partenaires économiques. Le mariage était soit le fruit d’un consentement mutuel, donc une union contractée librement, soit arrangé - en particulier dans la classe possédante où se marier était unir des domaines et des biens. Dans ce cas les sentiments et le consentement passaient à la trappe : les mariages étaient arrangées quand les filles avaient 12 ans et les garçons 14 ans.
Dans le système qui prévalait, soit la répartition des tâches et de différenciation des rôles, l’homme gérait tout ce qui était politique, possiblement parce que lié à l’expansion ou la préservation du territoire et donc à la guerre. Les femmes ne faisaient pas la guerre, sauf à de rares occasions, par exemple lors de révoltes paysannes. Dans ce système la femme avait moins de droits politiques qu’aujourd’hui, et l’homme avait moins de droits sur l’éducation et la maison. La maison, du latin domus, a donné le terme domestique. L’activité domestique était le socle sur lequel la société se construisait. Un homme sans famille, sans maison, sans terre, était déclassé socialement. L’homme seul n’était pas le bienvenu. Tout ce qui était domestique touchait aux points fondamentaux que sont : la santé, les relations sociales, l’éducation, la cellule familiale. Loin d’être un esclavage l’activité domestique était un pilier, et les femmes qui géraient ce pilier n’étaient pas mésestimées. Au contraire : c’était le lieu de pouvoir des femmes.
A la fin du Moyen-Âge il s’est produit une vague de misogynie et un dénigrement du mariage. Les femmes ont été victimes de ce dénigrement, car de même qu’un homme seul était mal vu, une femme seule n’existait pas socialement. De cela on a pu dire que la femme existait socialement à travers sa famille. C’était vrai pour l’homme aussi. Et si l’homme avait un pouvoir décisionnel sur la famille, il était tenu de prendre de bonnes décisions, dans l’intérêt de tous. Imaginer que ce pouvoir ne servait qu’une volonté de domination masculine et de dénigrement systématique et systémique du féminin n’a aucun sens. La femme avait d’autres lieux de pouvoirs que le politique. L’attribution massive de la garde des enfants à la mère après un divorce est une survivance culturelle de ce pouvoir féminin sur l’éducation.
On ne doit pas oublier qu’il y a eu aussi au Moyen-Âge des femmes écrivains, artistes, des reines ou régentes, et donc qu’elles étaient aussi parfois reconnues comme légitimes dans le pouvoir politique. Cela se passait aussi du temps des Celtes.
Cette répartition des rôles, des tâches et des lieux de pouvoirs entre l’homme et la femme était codifiée. Les lois imposaient des contraintes aux deux parties, et des sanctions en cas de non respect de ces lois. On imagine parfois le Moyen-Âge comme une époque sordide, avec des hommes saouls ou des criminels à chaque coin de rue, et des violeurs impunis dans chaque rue. Or le viol était puni soit de mort soit d’un très lourd dédommagement à la victime. La violence dans le couple était également sanctionnée. Et quand un homme se faisait battre par sa femme (et oui, cela existait déjà !) il était ridiculisé en public. Le stéréotype sexiste de l’homme fort existait déjà. Il n’a pas diminué.
Tout cela pour dire que l’image d’une femme esclave, dominée, écrasée depuis des milliers d’années dans une guerre des sexes ou un rapport de force univoque est l’histoire que l’on raconte aujourd’hui, mais une histoire inexacte. Cette image sert à développer la misandrie à un point rarement vu. L’homme prédateur, l’homme violeur universel, l’homme violent par nature, n’ayant eu d’autre intérêt et volonté que de dominer et écraser les femmes, est un mythe. La répartition des rôles avait pour but une organisation de la société et une division des lieux de pouvoir. Pas une guerre des sexes.
Deux féminismes se rejoignent pour affirmer que l’homme serait violeur, harceleur : l’essentialiste qui suppose une nature masculine violente, et l’indifférentialiste qui affirme que la violence est masculine par construction sociale du masculin. Cécilia Attias, l’ex-épouse de Nicolas Sarkozy, a déclaré hier à New-York : « Les femmes sont très attirées par le pouvoir. Des femmes approchaient de Nicolas Sarkozy pour lui donner leur numéro de téléphone alors que j'étais juste à côté ». C’est du harcèlement, une forme de harcèlement sexuel. Des femmes comme des hommes en sont capables, et qui plus est aussi ouvertement et sans scrupule que Madame Attias le décrit. Mais dire que toutes les femmes sont harceleuses est du sexisme misogyne, comme dire que « Les hommes sont des violeurs » est du sexisme misandre.
(Sexisme 1 : - Article précédent).
A suivre
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