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Sommes-nous des « veaux » ? Paul Biya vient de violer la Constitution et le Code électoral à Maroua…

 

Une fois de plus, Paul Biya vient de fouler nos valeurs républicaines, ce 29 septembre 2018 à Maroua, lors du lancement officiel de sa campagne dans le grand Nord. Est-il président ou candidat à sa succession ? C’est la question que tous les observateurs se posaient. Le décor planté, s’apparentait à une tournée triomphale, pour remercier ses électeurs : Une haie d’honneur lui a été faite par les éléments de la garde présidentielle, l’escorte de la police, de la gendarmerie et des armées ont accompagné son cortège. Tous ces égards combinés pour un candidat, font croire que l’élection est déjà gagnée. Si la compétition est loyale, légale et équitable, j’ose croire que le Conseil constitutionnel et Elecam (Elections Cameroun), sauront prendre leurs responsabilités.
 
La bêtise, le suivisme et l’égoïsme de nos élites dans cette fanfaronnade organisée avec les moyens de l’Etat, créent l’effondrement des valeurs républicaines et démocratiques auxquelles nous sommes attachés. Ceux qui essaimaient la tribune érigée en l’occasion des orgies de campagne, sont pourtant des juristes, des parlementaires, des diplomates. Personne d’entre eux n’a éprouvé la moindre gêne.
 
Cette bravade à l’encontre du peuple souverain, alimente un climat de défiance de l’autorité publique. On n’a pas besoin d’une grande instruction, d’avoir des connaissances juridiques, pour comprendre qu’il y a tromperie et abus de pouvoir.
 
Paul Biya, candidat d’une autre époque et d’un autre genre, croit que c’est encore le Cameroun de 1962 quand il débuta sa carrière administrative et politique. A cette époque là, la mode était aux pantalons pattes d’éléphants, aux lunettes à la Beatles, aux chaussures à talonnettes, à l’assassinat des subversifs et à la convergence vers le parti unique. Erreur ! Nous sommes en 2018, le parti unique est terminé, la radio unique est terminée, le monde est ouvert, internet existe.
 
C’est ce constant mépris du peuple, qui a instillé la guerre dans la zone anglophone. C’est cette arrogance permanente, qui a installé les foyers du radicalisme dans la partie septentrionale du Cameroun. Si Paul Biya considère que le Cameroun est sa chasse gardée, et veuille agir à guise, les Camerounais reprendront la voie du maquis.
 
Aujourd’hui à Maroua dans un style qui lui est familier, il est allé déverser un discours fleuve, tandis que, tous les indicateurs tant politiques, juridiques, qu’économiques, nous dressent un bilan catastrophique de 36 ans de pouvoir sans partage.
 
 
 UN PAYS MORT ECONOMIQUEMENT
 
Le bilan du Cameroun, est semblable à celui d’un pays déchiré par la guerre. L’entreprenariat de ce pays est incapable, après 36 ans de gabegie et d’immobilisme, de se libérer des vestiges du féodalisme. L’économie est gouvernée par des dynasties claniques, par des prébendiers, par des fonctionnaires à la solde du parti-Etat. Avant 1982, il était formellement interdit aux fonctionnaires de faire des affaires et de la politique. Sous les oripeaux d’un libéralisme de rente, Paul Biya a permis aux fonctionnaires non seulement de faire des affaires, mais aussi de faire de la politique, avec ce résultat qu’on connaît : Ce pays est tributaire des importations à 80%, l’industrie camerounaise c’est 2 % du PIB.
 
Le Cameroun fleuron de l’Afrique centrale avant 1982, avec une économie où les cultures industrielles et vivrières permettaient à ce pays, de ne pas dépendre de ses ressources fossiles. Toutes les entreprises d’Etat qui soutenaient le monde agricole et rural, ont mis la clé sous le paillasson : L’ONCPB (Office national de commercialisation des produits de base), a été dilapidé par les fonctionnaires politiciens. La MIDEVIV (Mission de développement des industries vivrières), a été mise en banqueroute par des fonctionnaires politiciens. Le FONADER (Fonds national du développement rural), a été dynamité par les fonctionnaires politiciens.
 
Depuis 1986, le Cameroun dépend des plans d’ajustement de la banque mondiale et du FMI. Le Cameroun, c’est l’histoire de la plus grande punition d’un pays en temps de paix. Il n’y a guère d’exemple d’un pays soit disant démocratique subissant, sans guerre, une telle chute de son revenu -70% depuis 1984. Un chômage des jeunes de 80%, c’est-à-dire une génération sacrifiée. Peut-on imaginer la rancœur qui s’installe pour des décennies dans ce pays, cultivant le ressentiment et le sentiment d’être victime de l’histoire depuis 36 ans ?
 
 
 LA JUSTICE DES FORTS
 
Aujourd’hui, le Cameroun alimente nombre de fantasmes sur le respect de la Constitution, et nourrit bien des craintes sur la protection des libertés individuelles. Pourtant, cela n’empêche pas le pouvoir en place de continuer à étaler son incurie à la terre entière. C’est sans retenue que les fonctionnaires politiciens et autres renégats déballent leurs sentiments de grandeur et de suffisance sur les réseaux sociaux. Alors pourquoi redouteraient-ils, de se voir rendre la politesse par les sans-voix ? La morale de l’histoire camerounaise, c’est bien : « Selon que vous serez puissant ou misérable, Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »
 
Le Cameroun est gouverné, instrumentalisé, supporté, par des fédayins au service du parti-Etat et de celui qui l’incarne. Le pacifisme que les affinés du pouvoir brandissent à tort et à travers, est une pacotille. Ils oublient que la paix a pour pilier : la justice sociale, l’éducation équitable, la santé équitable, etc.
 
Le slogan de cette campagne du candidat Biya : « la force de l’expérience », slogan utilisé jadis par feu Omar Bongo du Gabon, est la démonstration de l’absence d’inventivité d’un pouvoir et la faiblesse de créativité des prétendus connaisseurs qui louangent leur créateur à longueur de journée. L’expérience du pouvoir, interdit de violer la Constitution dont il est le garant.
 
Le général De Gaulle disait des Français qu’ils sont des veaux. En est-il de même des Camerounais ? Il est temps que la grande muette suspende cette Constitution !
 
Aimé Mathurin Moussy

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2 réactions à cet article    


  • B.S.A. 30 septembre 2018 18:17
    Bonjour,

    Je soutien l’unique correspondant d’agoravox au Cameroun !

    Merci de nous détailler spontanément tout ces acronymes dont nous n’entendons pas souvent parler. Merci d’avoir utilisé des titres, et choisis un chemin narratif chronologique pour nous mettre en contexte.

    Merci merci. Cela dis, le mainstream camerounais est très accessible vu que francophone, et on sais que vous étes dans le même blob médiatique que nous par-ce-qu’il repostent de l’AFP quotidiennement.

    On as eu la fraude médiatique, la fraude électorale, un président basé sur 26% d’expression et 18% des citoyens, la farce d’un parlement basé sur 48% des listes et 34% des citoyens en droit de voter.

    Il fait ce qu’il veux, il enchaine provocation sur provocation et domine toujours le paysage médiatique, effacant les gréves, les guerre et les réformes, le président en vélo, le président en bateau.

    A putain il vas neiger bientôt « il neige ! » sur 14 chaines. Le président est moins populaire que la neige.

    ++

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