Sous la pression de Bruxelles, Emmanuel Macron lâche Thierry Breton
Le déclassement de la France
Pour amadouer Ursula Von der Leyen, Emmanuel Macron a limogé Thierry Breton et placé son fidèle Stéphane Séjourné à la Commission européenne.
Le président continue de naviguer à vue sur tous les sujets. Après la dissolution de l’Assemblée que personne dans son camp ne voulait, est venu le tour de l’Union européenne. On dirait un gamin qui joue dans la cour de l’école et qui tout à coup a une idée en tête et fonce…
Le sabordage entrepris par Emmanuel Macron avec la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024 s’est prolongé à Bruxelles. Cédant au chantage de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen (VDL), il a désavoué le commissaire français Thierry Breton, qu'il avait pourtant officiellement reconduit fin juillet. Macron s'est incliné devant l'autoritarisme de l'Allemande.
En colère, Thierry Breton a démissionné immédiatement. Formellement désigné fin juillet par Emmanuel Macron pour effectuer un second mandat à Bruxelles, il a claqué la porte de la Commission européenne. Un choix net puisqu’il s’agissait, selon ses mots, d'« une démission à effet immédiat ».
Il a donné d’ailleurs les raisons de son retrait dans la lettre au vitriol envoyée pour l’occasion à la présidente de la Commission et qu’il a lui-même postée sur X. « Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom – pour des raisons personnelles que vous n’avez en aucun cas évoquées directement avec moi », déplore-t-il, avant de vanter « l’honneur qui fut le sien » de « faire progresser le bien commun européen ». « À la lumière de ces derniers développements – un autre témoignage d’une gouvernance douteuse – je dois conclure que je ne peux plus exercer mes fonctions au sein du Collège », assénait l’ex-ministre[1].
Sous couvert d’anonymat, un eurodéputé français déclarait « Cette décision est hallucinante. Que von der Leyen obtienne d'un président de la République de retirer la candidature de celui qu'il a nommé, c'est irréel ».
Depuis Jacques Delors, la Commission prend de plus en plus d’importance dans la gestion de l’UE et l’épisode avec Thierry Breton en est la preuve indiscutable : un grand pays membre s’incline devant la Commission. L’évolution des institutions européennes donne de plus en plus d’importance à la Commission. A moins d’une révolution (mais de qui viendra-t-elle ?) l’exécutif européen aura un rôle déterminant dans l’avenir de notre continent. Et vue la tournure des événements, Berlin a gagné une manche.
Thierry Breton était le seul commissaire à tenir tête à la très autoritaire Ursula Von der Leyen. Ce n'est pas un mystère que ces deux-là ne pouvaient se souffrir. Thierry Breton était allé jusqu'à critiquer publiquement la candidature de sa « boss » à un second mandat, affirmant qu'elle était « en minorité » dans son propre parti, le PPE conservateur.
Cependant, au-delà des relations personnelles entre lui et la présidente de la Commission c’est la France qui est traitée comme un pays de seconde zone ; Merci Macron !
Enfin, on ne va pas faire de procès d'intention à Stéphane Séjourné, qui saura peut-être, lui aussi, tenir tête à la Kommissionsleiterin. Mais son parachutage à Bruxelles donne la fâcheuse impression que le président en perdition cherche à recaser ses proches. Après s'être fait prier pour reconduire VDL, Emmanuel Macron se plie à ses ordres, l'aide à régler ses comptes et encourage son dirigisme. C'est peu dire que l'épisode ternit le prestige de la France. Voilà le champion de « l'autonomie stratégique » du continent ouvertement traité à Bruxelles comme un « petit » pays, d'autant moins respectable qu'il ne tient pas ses engagements budgétaires. L'Allemagne peut s'en passer pour gouverner l'Europe.
Où va la France d’Emmanuel Macron ?
Ursula von der Leyen est une femme aussi pragmatique que méthodique. Tant qu’elle avait besoin du soutien de Paris pour s’assurer un second mandat, elle a laissé Emmanuel Macron exposer ses ambitions. Une fois sa reconduction assurée, après le vote du 18 juillet à Strasbourg, elle a attendu patiemment son heure pour mettre un terme à la carrière européenne de Thierry Breton, avec lequel elle entretenait des relations exécrables et dont elle souhaitait le départ[2].
Ce n’est pas tout. Les États-Unis, que la très transatlantique Ursula von der Leyen a toujours eu à cœur de ménager, n’ont pas apprécié la régulation numérique qu’a portée Thierry Breton durant son premier mandat et ils n’étaient pas favorables à la perspective de le voir continuer à présider à la destinée de ce secteur en Europe. Et le conflit du commissaire français avec Elon Musk, le patron de X, a renforcé cette position des américains.
De même, sur la scène européenne, l’Allemagne, ne souhaitait pas voir Thierry Breton poursuivre son mandat ; il était notamment opposé à la conclusion d’un accord avec le Mercosur (la communauté économique des pays de l’Amérique du Sud).
Dans ce contexte, Ursula von der Leyen a bien choisi son moment. Au moment où le président français était empêtré dans ses recherches d’un futur Premier ministre.
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