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Souveraineté et progrès social

Serions-nous enfin en train de sortir de décennies d’hypocrisie à propos de la construction européenne ? Ce n’est pas que les dirigeants de Bruxelles le souhaitent, mais les réalités finissent par s’imposer. Suivant une formule consacrée : « On peut tromper tout le monde un moment, on peut tromper une personne tout le temps, on ne peut pas tromper tout le monde tout le temps ». 

Souvenons-nous des phrases que Jacques Delors, alors Président de la Commission européenne, prononçait avec vigueur. Selon lui, on devait faire d’abord l’Europe économique et le social suivrait, promis-juré. Le temps passant, les règles économiques se sont imposées, la concurrence libre et non faussée est devenue le dogme suprême, mais rien de social n’a suivi. Bien au contraire, la protection sociale s’est effritée, la cour de justice de l’Union européenne volant, au rythme des arrêts Viking, Laval, etc., au secours des intérêts privés contre les intérêts des salariés. De façon plus qu’insidieuse, la logique de Jean Monnet s’imposait qui consistait, à petits pas, à détruire la souveraineté des peuples en même temps que celle des États, au nom de l’efficacité, cela va de soi.

L’intervention récente de Pierre Moscovici, le mercredi 17 janvier, à la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale a eu le mérite de clarifier encore plus la logique bruxelloise. Chacun sait que le commissaire européen souhaite une harmonisation économique et fiscale de l’Union. Mais, au lieu de déclarer d’entrée de jeu, comme le font d’ordinaire les européistes les plus farouches, qu’il faut aller vers le fédéralisme, il se borne à regretter que les institutions ne permettent pas cette harmonisation tant que la règle de l’unanimité continue de prévaloir. S’en inquiétant, du moins en apparence, il laisse sous-entendre que le progrès social en dépend. 

Il faut reconnaître à ce discours d’apparence plus modeste qu’à l’habitude, une certaine habileté. Car dit-il autre chose que Jacques Delors ? S’il reconnaît que le fédéralisme semble plus difficile qu’on ne le pensait, il continue de proclamer qu’il est la condition nécessaire à une harmonisation. Laquelle ? Celles des traités type CETA ou TAFTA, bien peu démocratiques et pas du tout sociaux ? Celle des règles économiques et, en particulier, fiscales souhaitées par pas mal d’investisseurs ? Celles des garanties sociales ? Rien n’est moins sûr car la souveraineté populaire a toujours été nécessaire au progrès social.

André Bellon
Ancien Président de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale

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- Bon anniversaire à la construction européenne !


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2 réactions à cet article    


  • BA 22 janvier 2018 21:21

    Vous vous rappelez toutes les belles promesses au moment du référendum sur le traité de Maastricht ?

    - « Quand on dit que l’Europe de Maastricht créera des emplois, ça reste vrai. Il se trouve que le traité de Maastricht n’est pas encore appliqué. Lorsqu’il le sera, il est évident qu’il y aura une très forte croissance qui en découlera, car nous aurons un grand espace économique avec une monnaie unique. » (Jacques Attali, sur France 2, débat télévisé « Polémiques » animé par Michèle Cotta)


    - « Si le traité de Maastricht était en application, finalement la Communauté européenne connaîtrait une croissance économique plus forte, donc un emploi amélioré. » (Valéry Giscard d’Estaing, 30 juillet 1992, RTL)


    - « L’Europe est la réponse d’avenir à la question du chômage. En s’appuyant sur un marché de 340 millions de consommateurs, le plus grand du monde ; sur une monnaie unique, la plus forte du monde ; sur un système de sécurité sociale, le plus protecteur du monde, les entreprises pourront se développer et créer des emplois. » (Michel Sapin, 2 août 1992, Le Journal du Dimanche)


    - « Maastricht constitue les trois clefs de l’avenir : la monnaie unique, ce sera moins de chômeurs et plus de prospérité ; la politique étrangère commune, ce sera moins d’impuissance et plus de sécurité ; et la citoyenneté, ce sera moins de bureaucratie et plus de démocratie. » (Michel Rocard, 27 août 1992, Ouest-France)


    - « Les droits sociaux resteront les mêmes – on conservera la Sécurité sociale –, l’Europe va tirer le progrès vers le haut. » (Pierre Bérégovoy, 30 août 1992, Antenne 2)


    - « Pour la France, l’Union Economique et Monétaire, c’est la voie royale pour lutter contre le chômage. » (Michel Sapin, 11 septembre 1992, France Inter)


    - « C’est principalement peut-être sur l’Europe sociale qu’on entend un certain nombre de contrevérités. Et ceux qui ont le plus à gagner de l’Europe sociale, notamment les ouvriers et les employés, sont peut-être les plus inquiets sur ces contrevérités. Comment peut-on dire que l’Europe sera moins sociale demain qu’aujourd’hui ? Alors que ce sera plus d’emplois, plus de protection sociale et moins d’exclusion. » (Martine Aubry, 12 septembre 1992, discours à Béthune)


    - « Si aujourd’hui la banque centrale européenne existait, il est clair que les taux d’intérêt seraient moins élevés en Europe et donc que le chômage y serait moins grave. » (Jean Boissonnat, 15 septembre 1992, La Croix)



    • Ouam (Paria statutaire non vacciné) Ouam 23 janvier 2018 00:12

      F R E X I T  !
       
      Lorsque les mougons auronts compris... ca ira mieux...
       
      A l’inverse (si on reste) cela empirera...
      on ne fait boire un ane qui n’a pas soif smiley

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