Soyons réalistes, demandons le possible !
Soyons encore plus fous que nos aînés qui firent Mai 68 et demandons à Nicolas Sarkozy de faire le possible qu’il a promis dans son slogan de campagne : "Ensemble, tout devient possible !" Exigeons également l’application immédiate de l’idée contenue dans le mot "ensemble" ! Car, pour le moment, le président qui se targuait de "liquider Mai 68", ne sera parvenu qu’à liquider son propre slogan !

Le "Yes we can !" d’Obama remet au goût du jour l’idée que, lorsqu’on le veut vraiment, les choses deviennent possibles. Ce slogan met l’accent sur le possible au sens de ce que "nous" ("we") sommes capables de faire.
Le slogan du candidat Sakozy évoque au contraire plutôt un éventail de perspectives extérieures à nous mêmes. Il ne contient pas de pronom personnel. Si cela avait été le cas, c’est le "je" qui aurait emporté la décision du communiquant.
Quand on met dans la balance les deux idées, on voit que la formule d’Obama, "Yes we can !" est plus respectueuse du peuple. D’ailleurs, Obama ponctue ses discours d’un "nous" rassembleur qui marque le souci de travailler ensemble. La formule "ensemble" du slogan de Sarkozy est, elle, restée sans lendemain. Sans lendemain en effet, puisque le "je" est omniprésent dans les discours et dans les actes, "omniprésident" - dit-on désormais !- , et le "nous" totalement absent. On ne peut pas dire que Sarkozy applique son idée de travail collectif quand l’on voit qu’il occupe la double fonction de président et de premier ministre, qu’il gère de près l’UMP sans permettre l’émergence d’un chef de parti ou de courants d’opinions divergents, qu’il fait régner sans partage l’Exécutif au détriment du pouvoir des assemblées et des citoyens. On ne peut pas dire qu’il y a travail ensemble quand les lobbies sont préférés aux parlementaires.
Pour ce qui est du "ensemble", il faut se faire une raison et admettre que cela ne sera jamais...possible avec Sarkozy. Reste alors le deuxième élément clé du slogan : le "possible". Après tout, que les promesses soient rendues possibles par l’action d’un homme seul ou l’action collégiale importe peu si le résultat est bien là.
Mais, le résultat n’est pas là, et justement parce que le "travailler ensemble" a été sacrifié. Aucune homme, en effet, ne peut faire tout, tout seul.
Ainsi, nous en sommes là - et las - : un certain nombre de changements positifs étaient possibles et ne prendront jamais consistance dans la réalité. Trop souvent, les occasions de réaliser de belles choses ont été gâchées par la précipitation, le refus d’associer des personnes compétentes, et aussi, il faut bien le dire, un dogmatisme d’un nouveau genre. Voilà au moins trois facteurs de blocage du processus. Un exemple ? La réforme des institutions qui ne sera jamais qu’une réformette, une série de petits ajustements sans envergure ni ambition, très loin, bien loin des projets de 6ème République portés par Bayrou et le parti socialiste et même bien en-deçà des aspirations de Balladur qui présidait la commission de réforme des institutions. C’est dire !
Ce dogmatisme nouveau, propre à Sarkozy et qui se dégage nettement des dogmatismes déjà identifiés à gauche et à droite, se fonde sur des idées bien arrêtées comme : seul compte le pragmatisme (on ne pense pas, on agit), il n’y a pas d’alternative à ma politique, il n’y en a pas non plus au capitalisme, il faut toujours aller très vite, il faut toujours se calquer sur l’opinion publique (et sa perception des faits divers), on ne peut pas sortir des institutions de la Vème République, et bien d’autres présupposés et principes obtus qui minent tout espoir de rendre un jour possible ce qui, pour la plupart des personnes avisées, est objectivement considéré comme tout-à-fait réalisable. Ainsi, il ne serait pas possible de remettre en cause, même un peu, le bouclier fiscal, de voter un financement juste pour le RSA, etc. Ce sectarisme consistant à se fermer en autiste et à imposer des vues limitées, c’est bien de l’idéologie.
On ne peut trop s’étendre sur l’analyse, l’essentiel étant ici de poser le message pour avancer au-delà et dire, avec force, que le slogan "ensemble, tout devient possible" était finalement mensonger, un leurre pour électeurs, et qu’il serait temps de le prendre au pied de la lettre pour lui donner enfin vie et sens.
Les voies pour y parvenir, elles existent. Avant toute chose, le respect des parlementaires et de l’opposition s’impose comme une évidence. Ensuite la considération portée aux citoyens, au moyen éventuellement du référendum. Mais on sait comment Sarkozy considère le référendum, on a pu en juger lors du traité européen. Voilà pour l’aspect purement institutionnel et politique mais la société, aussi a besoin de respirer et pour que soit rendue possible la réalisation des attentes des individus, il faut favoriser un contexte de liberté, laisser libre cours à l’imagination, à la créativité, à l’initiative. Or, Sarkozy légifère dans tous les domaines de la vie civile : culture, croyance, loisirs...Pire ! Il s’est montré le champion des réformes de restrictions des libertés publiques. Il est à l’origine de 42 textes répressifs (21 lois et 21 décrets), en comptant son temps passé au ministère de l’Intérieur et son temps de présidence qui est loin d’être achevé. S’il avait choisi d’entrer dans l’Histoire comme chef d’Etat autoritaire, répressif et paranoïaque, il n’aurait pas agi autrement.
Pourtant "Ensemble, tout devient possible", enfin presque. Mais rendre possible, c’est commencer par ne plus s’imposer partout et avant tous les autres pour régler tout. Rendre possible, c’est laisser la démocratie et la société respirer et participer aux changements, en respectant le rythme de chacun. Impossible n’est pas français a dit Napoléon. Possible n’est pas français non plus sous l’omniprésidence oppressante de Sarkozy.
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