Stiegler : un autre monde
Dans une discussion parfois cacophonique, il a pu à deux reprises poser clairement et succinctement la problématique face à laquelle nous sommes, la fin du capitalisme construit sur le consumérisme, dans la ligne de ce que nous avons appelé le fordisme.
Nous somme passé de la notion de consommation facteur d’un développement de bien être produit d’une demande, à une consommation de production source d’emploi et de ressource exigeant la production de bien jetable et renouvelable.
Pour lui son incidence se répercute dans le champ des relations sociales transformant celles-ci sous sa pression en relation jetable.
Ce fut la valse des divorces par exemple, le développement de la précarité et de la flexibilité, ce sont les interactions inévitables.
Arrivé à son apogée, c'est-à-dire en surcapacité de production dans les états riches, le capitalisme qui concentre les capitaux grâce au plan comptable dans quelques structures et fonds financiers, se cherchent par ses capitaux disponibles une consommation virtuelle au travers de l’endettement et des placements financiers. Ces masses de monnaies importantes, faute de grands projets d’investissements capables de maintenir une croissance sur des activités durables, se jettent dans la spéculation.
Et nous savons que l’excès de monnaie se détruit par l’explosion de bulles, et que la paralysie de l’économie se cherche des zones d’expansions par la colonisation et la guerre.
Ceci dit, le plus surprenant était le décalage entre Stiegler et les autres intervenants, particulièrement avec Philippe Manière consultant, Stiegler tourné vers l’avenir, Manière penché sur son présent.
Il est naturel que de leur activité en découle une vue du monde divergente, mais à l’évidence seul Stiegler avait la capacité d’entendre les autres, et s’il ne déniait pas la nécessité de s’occuper du présent, il en disait que celui-ci représentait une catastrophe future si nous n’avions pas compris que le consumérisme ne représentait plus le futur, et peine perdu de lutter contre la spéculation si nous n’étions pas capable de trouver à ces masses financières un investissement social (j’entends le travail qui débouche sur une activité sociale) par de grands projets, au-delà de nos classiques, qui exigerait d’être monétisé.
Je rejoins totalement Stiegler dans son analyse, pour ceux qui lisent mes articles, j’ai souvent évoqué la nécessaire transformation du capitalisme, le choix d’une activité durable et le développement de nouvelles sources de revenus, comme l’enseignement pour adulte rémunéré.
Manière lui en est encore resté à l’axiome d’Adam Smith qui est devenu obsolète pour tracer le futur.
Dans un essai de 1999 après avoir indiqué que nous retirions les bienfaits de notre existence du Savoir, je fais le constat qu’il est en panne dans sa distribution en créant une fracture entre ceux qui en disposent pour être capable de lire la complexité du monde et ceux qui n’attendent de lui que le moyen de produire et de consommer le consumérisme.
Or tout système trouve un terme, nous sommes dans celui du consumérisme, certes ce n’est pas pour demain, car avant ils nous faut épuiser toutes les ressources, mais nous allons être assez nombreux pour cela.
Par contre les cerveaux disponibles pour sortir de cette fin programmée sont l’apanage que de quelques-uns. Nous les trouvons surtout chez nos élites, mais dans tous les niveaux de la classe sociale, ce sont ceux qui poursuivent leur enseignement soit par des systèmes de formation soit de manière autodidacte.
Parmi c’est cerveaux, certains essaient de trouver dans les systèmes qu’ils ont mis en place, leurs pérennisations parce que leurs pouvoirs se sont élaborés autour, et proposent des solutions par les modèles qui ont créé les maux dont nous nous plaignons, fracture sociale, chômage, délinquances, inégalité des revenus, dettes exorbitantes, insécurité.
Ils s’enferment de fait, dans une organisation déterministe par une immensité de réglementations qui les asphyxiera, et ils en mourront ou cela explosera, car il y a dans ce domaine comme ailleurs, non une vérité, mais un seuil de tolérance qui ne se décrète pas.
D’autres essaient d’innover, et il y en a sauf que personne ne les écoute. Ils n’ont que peu d’audiences, si ce n’est que ponctuellement ou en lisant des revues spécialisés à hauteur de tout juste 3% des citoyens
La démocratisation de l’enseignement interrompu depuis une quinzaine d’années constitue un handicap majeur, car elle est une clé pour comprendre le monde, qui véhicule une quantité d’informations exponentielles. Ne pas en disposer nous exclut de l’évolution et fait de nous des freins réactionnaires et conservateurs. Ne pas à confondre ceci avec ceux qui considèrent que l’évolution est renoncer à des avantages sociaux et de bien être acquis, parce que les masses monétaires considèrent que ce n’est pas un secteur rentable mais une charge, sauf pour ceux qui en vivent à titre privé. Souvent cet amalgame est fait pour inciter a la rigueur et d’ailleurs Manière l'a parfaitement utilisé avec des justifications valables que nous lisons et entendons tous les jours, mais elles ne sont valables qu’au regard du modèle capitaliste.
Alors de fil en aiguille par une succession d’observations m’a germé l’idée de faire du développement et de l’acquisition du Savoir une source de revenu pour atteindre deux objectifs. Accrocher les populations à la complexité du monde présent, et nourrir d’information les cerveaux humains, parce que nous savons que toutes information recueillies réorganise la penser et qu’il germera forcément dans le cerveau de certain l’imaginaire de demain.
La mise en place de ce que j’ai appelé un enseignement rémunéré pour adulte actif ou non complémentaire de l’activité productive ne présente aucune difficulté particulière que nous ne soyons capable de réaliser.
Nous sommes capables de bien plus difficile que cela.
Sans m’étendre sur l’aspect psychique, l’aspect industriel, entre la construction d’universités pour adulte, la formation d’animateurs enseignants, les fournitures de fonctionnements, l’estimation minimale s’élevait à 1500 milliards d’Euros.
Sur le plan des rémunérations l’inscription à ces enseignements ouvrerait droit à une rémunération permettant à un adulte sans revenu de vivre décemment. Sans aller plus loin.
C’est une porte ouverte aux investissements et une solution partielle à la délinquance
Ceci est un exemple de rupture avec le consumérisme.
Un autre, la lutte contre la pollution dans le circuit marchand traditionnel se trouve confrontée, non à notre savoir faire, mais au surcout de sa mise en place revendu à une clientèle toujours à la recherches de prix bas. Ce paradoxe que nous connaissons est certes un moteur d’innovation, mais aussi un frein aux situations d’urgences, or nous sommes dans l’urgence, tant au niveau de la production des énergies à partir du nucléaire, à parti du pétrole, à partir de toutes les particules en suspension, et de la pollution chimique.
Impossible de faire face à cela à temps sur la base de nos structures de comptabilisation actuelle. Il faut donc sortir un certains nombre d’activité dépolluante de ce modèle et y adjoindre un modèle comptable parallèle et complémentaire en comptabilisant une activité économique de sauvegarde de la vie non commercialisable, mais source de consommation créatrice d’emplois et de revenus injectables dans l’économie
Pour réaliser cela il nous faut sortir du schéma capitaliste, en sortir n’est pas le détruire, n’est pas détruire les aspects positifs, paradigmes de nos propres comportements, car en le détruisant nous détruirions également l’homme.
Aussitôt il reconstruirait les mêmes modèles sous une autres appellation, mais le compléter pour que les « vices » qu’il développe ne soient pas suicidaires.
Ceci ne peut pas venir du marché, mais d’une décision politique, cela ne peut venir que d’une vue à long terme d’une vision du monde basé sur la perception de la réalité présente et de notre imaginaire en quête d’Eden.
C’est deux exemples ne sont pas des utopies nous avons les moyens techniques et humains pour les réaliser. Leur seul handicap est leur monétisation que refuseront tous ceux à qui nous avons confié le pouvoir, car ils le retirent du consumérisme y compris les citoyens qui le réclament à grand cris car ils y sont accros.
La subsidiarité de cette absence de projet est que devant le consumérisme qui change de place pour continuer ses excès ailleurs plutôt que de s’ancrer dans la consommation des populations, nous nous ne vivons qu’autour du risque, c’est lui qui rythme nôtre existence et c’est lui qui perdra la démocratie, car nous en avons fait un substitut au consumérisme dont il est en partie la conséquence.
Alors devant tout cela j’ai trouvé Stiegler un peu seul comme un homme d’un autre monde.
Nous sommes loins des harangues de Marine le Pen et du commerce de la mort de l’UMP.
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