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Tartuffes au grand salon

Le salon de l'agriculture s'est ouvert cette année, avec pour moi, fils, plusieurs fois petit fils et neveu de producteur laitier, une saveur toute particulière que je n'avais curieusement jamais ressentie auparavant : le dégout et la colère. D'ailleurs, je me demande comment j'ai pu dormir tout ce temps et ne m'éveiller que si tardivement sur la réalité du monde agricole français et par extension, du monde politique, économique, financier, agro-industriel et agro-chimique qui le conditionne désormais entièrement.

C'est un commentaire tout à fait personnel que je livre ici, bien qu'il ait but d'analyse.
 
Bien qu’issu d'une famille très ancrée dans le monde agricole, jadis comme rentiers et propriétaires aristocrates, aujourd'hui comme travailleurs exploitants, j'ai longtemps vécu dans une certaine illusion et quoiqu'elle fut bien enfantine, je m'en rends compte à présent. J'ai longtemps vécu dans l'illusion de notre ferme, de notre village alsacien et du mythe des grands prés, des paysages des petites vosges du nord, de ces montagnes naines et de notre petite vallée qui animent encore à chaque pas mes souvenirs d’enfance, dans ce qui était encore à mes yeux actuels un autre monde. Je n’ai pourtant que 24 ans.
 
Bien qu'étudiant en relations internationales, j'expérimente actuellement la sensation classique de tout enfant de famille paysanne quant à la question de la reprise de l’exploitation familiale lorsque le père ou l’oncle fermier en vient à se rapprocher de la retraite bien méritée.
 
Il s’agit d’honneur familial, de tradition et de perpétuation mais aussi pour moi d'une sorte de geste hautement politique dans ce monde unique, cette Europe tenue par les pires intrigants et les pires assassins de la beauté nationale, dans cette France défigurée et endormie, anestesiée, où une moyenne de 40.000 fermes déclarent cessation chaque année (quasiment deux chaque heure), où la profession d’agriculteur semble tendre à se rapprocher de celle non plus de fonctionnaire comme on l'entendait dire parfoisdans les années 90, mais de simple employé d’un grand complexe agro-alimentaro-chimico-industriel. D'un sorte d'ouvrier agricole, travaillant dans un énième regroupement d'exploitations, avec 3, 4, 5 associés. Et demain combien d'autres ?
 
Je veux mener ma ferme moi-même avec ma famille et à la limite un bon associé. Tout ceci me fait penser à Gide voyageant dans l’URSS d’avant guerre et intrigué dans les Kolkhozes ou sovkohzes, où les groupements de paysans se voient attribuer des petites explitations par la bureaucratie, qu'il doivent gérer en commun et sont rétribués ainsi selon leur production.
 
L’année 2010 a été pour moi l’occasion de travailler plus longtemps que d’habitude sur l’exploitation familiale et de m’intéresser de très près aux problèmes du secteur et de son avenir, de mon possible avenir. Seulement, je vois bien l’orientation que prend le secteur, surtout avec l’échéance de la réforme de la PAC avec la fin des quotas laitiers, effectifs à l’an 2013.
 
J’étais justement l’autre jour à une réunion des producteurs laitiers de nos alentours, dans les locaux d'une célèbre coopérative régionale. Une première pour moi. Le président de la coopérative, lui même producteur laitier, arrivant dans son petit véhicule en sort et me voyant me dit : « Ah, un futur paysan ? ».
Avant de poursuivre : « Tu sais, il faut être un peu fou pour être agriculteur maintenant ».
 
J’hésitais alors à savoir comment traduire ses mots, le terme « fou » pouvant me paraître parfois comme vertueux, désignant une personne aimant les défis. Je compris quelque peu mieux en sortant de la réunion au cours de laquelle les deux dirigeants de la coopérative laitière nous affranchissèrent de la stratégie de l’entreprise par rapport aux changements provoqués par la réforme de la PAC.
 
Voici qui commença à mettre un sérieux frein à mon enthousiasme de m'en retourner au grand vert et de gagner noblement ma vie comme grand fermier. La stratégie présentée me parut alors fort intellegente et honorable. Seulement, le devenir de la filière et du secteur tout entier me parut alors d'une effrayante incertitude.
 
En effet, de quoi sera fait l’avenir ? Bien sûr, mes proches tendent à me rassurer et estiment qu'une gestion sérieuse et qu'un endettement moindre (notamment par une reprise familliale) limiteront largement les risques qui s’annoncent. Cela est juste. L'incertitude est en fait placée bien en amont :
 
Ce sont certains dirigeants, certaines élites, des groupes de pression, des lobbyistes, certaines grandes multinationales, certaines organisations supranationales politiques ou économiques . Tous ceux-là et d'autres encore sont sources d’inquiétude et d'incertitude. Remarquez que je reste par trop mesuré dans mes termes.
 
Des places financières, des mises en concurences sans frontières et sans barrières, un système économique planétaire en fait plus que jamais une jungle de grands fauves, cyniques et sans pitié pour certains, fous et déclinants pour d'autres. Je ne peux que donner raison au premiers.
 
En France, les gens que l'on entend beaucoup parler, influer ou décider des grandes lignes de l’agriculture nationale ou ce qu'il en reste, sont souvent maheureusemet réduits à quelques figures qui cachent peu leur accointances avec certains milieux, certaines idéologies, économiques notamment. Certains députés et anciens ministres jugent acceptable de discuter et de recevoir les lobbies du secteur, bien sûr en toute transparence.
 
C'est aussi une grande inquiétude que de savoir que nos élites politiques, de la droite libérale-sociale à la gauche sociale-libérale, semblent défendre aussi mal l’agriculture nationale que ce qui reste des interêts de la Nation elle-même. C'est la seule cohérence que l'on peut leur accorder, comme en bien d'autres domaines d'ailleurs.
 
Comment croire notre président lorsque vendredi dernier, il parlait aux agriculteurs au SIA 2011 et leur assurait de la façon qu'il allait employer pour défendre l’agriculture française alors que la reforme de la PAC signe déjà un sorte de retour en arrière de 50 ans au moins, avec une soumission au marché plus que jamais directe sur les agriculteurs, sans la moindre protection face aux modèles lointains ou proches . Nos amis allemands, comme pour l'industrie jadis nous dament à présent le pion, profitant de leur domination sur le carcan de la monnaie Euro et de leur habile politique salariale.
 
Je suis exeptionnellement mesuré par rapport à ma critique de la politique agricole du mandat Sarkozy, car justement il s'agit là d'un secteur essentiellement vital à un pays, même si ce dernier est depuis longtemps mais spécialement depuis quelques années, vidé de sa substance de Nation, de Terre, soumis qu'il est aux influences atlantistes ou européistes, ultra-libérales et rétrogrades forcenées, à leurs réseaux et leurs avocats. Mais comment croire que sur ce point même, l'on puisse s’en remettre à des élites qui ont largement trahi et manqué à une réelle défense des interêts nationaux supremes dans tant d’autres domaines, à commencer par l’abandon de la politique étrangère française ?
 
Ne me prenez pas non plus pour un patriote forcené et aveugle. C'est une caricature employée si souvent. Je trouve pour ma part que plus qu'autre chose, l'agriculture, l'environnement et oui même l’écologie sont des pilliers naturels, essentiels, charnels de la Nation, de la Terre. La paysannerie, la campagne, le pré que l'on aime tant à caricaturer, à ridiculiser, à en faire une image désuete et rétrograde, idéale pour les cartes postales et les séries rurales de TF1 et France 2, ou encore pour le salon de l'agriculture, qui comme Périco Lagasse l’a si bien écrit, sera le salon de la bonne conscience agricole. Ce sont pourtant là des éléments charnels et à priori vitaux. Ce sont des éléments du visage d'un pays, son ventre, son sang et ses ressources. Le paysage, c'est bien le visage d'un pays. Ce paysage est garanti par les agriculteurs, les paysans, pour peu qu'on garde au sommet, une cohérence.
 
En ce cas, l'inquiétude est également de mise quand on sait quelles élites décident du devenir de nos espoirs . Il ne faut donc se faire aucune illusion, si l'on sait tout ce qui fut déjà abandonné dans d'autres domaines.
 
A ce propos, un petit scandale a secoué le monde agricole, coincidant avec l'ouverture du SIA 2011, le collectif FNE (France Nature Environnement) ayant publié une série d’affiches au visuel très interpellant, qui n'a pas manqué de soulever les cris d’orfraie de quelques avocats et lobbyistes qui protestant contre ces affiches choquantes, éclairent nos recherches en nous faisant montre de leur inconstance.
 
L’affiche montrant un jeune enfant, sur une plage bretonne pateaugeant dans une marée d’algue vertes fut assurément celle qui retint le plus l’attention. Elle fut dénoncée et raillée à plusieurs reprises sur le site de La France agricole, où l'on s'offusque de cette campagne qui insulterait la profession, qui « veut faire passer les agriculteurs pour des pollueurs aux yeux des français », etc.
 
Un sondage éléctronique en ligne indique même que 47% des Bretons se disent hostiles à cette campagne d’affichage. Etonnant.
 
Bruno LeMaire, ministre de l’agriculture, a justement répondu au député de la Manche Gatignol au cours d'une récente séance à l’Assemblée à propos de cette campagne d’affichage (à laquelle FNE renonca d'ailleurs). Voici que le ministre acquiesce sans hésitation à la question téléphonée et hypocrite de Gatignol et le voilà qui dénonce également une campagne d'insultes intolérable envers les agriculteurs, prétendant que le but est là de les présenter comme des monstres responsables de la pollution et de « casser » tous les efforts accomplis depuis tant d’années...
 
Quelle honte, alors que tous renversent l’attaque pour se poser en sauveurs de l’agriculture et de la paysannerie, eux les avocats de l’agro-industrie et de l’OGM à tout va ?
 
Peu importe que le ministre ne supporte pas la vue d'une photo certes potentiellement choquante, c'est son droit d'être sujet aux vertiges. Mais comment comprendre qu'il n'ait même pas un mot sur le problème que soulevait cette affiche ? Un problème dont les agriculteurs sont les premières victimes, et les élites les premiers coupables. Assurément, il ne pouvait pas parler autrement car il s’adressait aux agriculteurs qu'il tient sans doute pour un éléctorat à particulièrement carresser dans le sens du poil.
 
Le reste de son intervention commencait pourtant à me plaire quand il parlait d’harmonisation européenne, qu'il fallait que les mêmes normes notamment environnementales soient appliquées partout en Europe afin que nos agriculteurs ne soient pas pénalisés de ces déséquilibres hallucinants entre les réglementations françaises et celles en Pologne, en Allemagne ou en Roumanie. Soit, ce la est juste mais dans ce cas il faudrait commencer par vraiment défendre cela face à des allemands qui m'écoutent plus les français.
 
Puis surprise de taille, le ministre fustige alors les frontières grandes ouvertes où entrent sans protection des produits d'hors d’Europe. Voici la belle parole ! Seulement, votre gouvernement est une somme de suppots du mondialisme et de son systeme ultra-libéral qui n'a jamais eu le courage de défendre les interêts nationaux ni à l’OMC, ni à Bruxelles. Vous savez pourtant ce qu'il est lieu de faire pour résoudre bien des problèmes et retrouver une ambition, une efficacité.Personne dans vos rangs n'ose même y penser.
 
Dans les gradins, Christian Jacob aquiesse largement. Il est également dans l’actualité pour sa petit phrase à propos de Mr Strauss-Kahn. Je ne peux qu'être d'accord avec le simple constat de Mr. Jacob, j’aurais peut être l'occasion dans un autre billet de dire tout le mal que je pense de Mr. Strauss-Kahn et du danger qu'il représente pour les interets français, alors même que médias et prote-couteaux ne perdent aucune occasion pour faire sa promotion auprès de français hypnotisés.
 
Mais je ne me trompe pas à propos de Mr. Jacob et je me prends même à sourire de l’outrecuidance dont il fait preuve en se targant de parler de terroirs et de la campagne alors qu'il est objectivement au grand minimum un agent des fossoyeurs de l’Agriculture paysanne française, celle là même qui est le visage de ce terroir qu'il prétend défendre. Un sens du cynisme qui me ferait presque sourire et me plairait s'il s'agissait d'une pièce de théatre, une outrecuidance qui ne trouve son égale que dans l’inconstance des propos de Mr. Lemaire, de Mr. Gatignol, supporter mordicus des OGM et du président de la république Sarkozy dont les traitrises politiques envers le peuple français se suffisent plus d'une main pour être comptées.
 
Pour ceux là qui n'ont pas manqué de fustigier hypocritement la campagne FNE qui dénonçait outre les algues vertes de Bretagne, le fait que la catégorie socio-professionelle est la première touchée par les suicides d’agriculteurs qui se chiffrent à environs 400 cette année est encore un tabou dont ils ne se hasardèrent pas à parler, bien conscients qu'ils sont que la brosse qu'ils utilisent sur la bête doit toujours aller dans le même sens.
 
D’ailleurs, un récent sondage Terre-Net / BVA que je viens de lire, m’étonne aussi peu qu'il me désespère. Un sondage réalisé pour le site internet agricole par l’institut BVA nous donne quelques tendances des intentions de vote des agriculteurs pour 2012.
 
En 2007, ceux ci avaient voté à 78% pour Nicolas Sarkozy. Sur ce coup, je ne leur en voudrais pas outre-mesure étant donné le nombre de gogos s’étant fait et continuant aujourd'hui à se faire plumer par cette funeste décision (certains ne s'en rendent d'ailleurs toujours pas compte).
 
Hé bien à en croire ce sondage, les agriculteurs retiendraient fort peu de leçons quand on voit que 55% d'entre eux se disent favorables à Dominique Strauss-Kahn, qui fort de sa position au FMI, « aurait les connections pour défendre l’agriculture française ». Pure folie.
 
Cela se passerait de commentaire si ce n'était aussi grave : les observateurs avertis savent bien que Nicolas Sarkozy n'est qu'un apprenti ultra-libéral atlantiste en comparaison de DSK qui ne cacha pas jadis son mépris pour la France. Tout ceci me désespère. Heureusement qu'il s’agit là d'un énième sondage commandé, dont on connait très bien le dessein manipulatoire que constituent ce genre « d'études » habituellement en politique comme en bien d'autres domaines.
 
Plus drôle encore, Bruno Lemaire, ministre de l’Agriculture recueuille 64% de bonnes intentions auprès des interrogés. Un panel décidément bien docile.
 
Tout ceci me pousse à tendre l’oreille vers un syndicat que je tenais jusque là pour un repaire de bobos ruraux nommé la Conféderation Paysanne. Sans doute l’image de José Bové, aujourd'hui plus que jamais écornée après son livre de confessions face à l’inquisiteur eurobéat Quatremer, y contribua. Aujourd'hui c'est moi qui me repend honteusement et qui écoute ce qu'a à dire Phillipe Colin, porte-parole du deuxième syndicat agricole français.
 
Phillipe Colin est justement monté à Paris dénoncer un gigantesque plan de cessation d’activité que le gouvernement d’appreterait à « sortir du placard », alors qu’éleveurs laitiers, porcins et bovins viande continuent à petit feu de remplir les rangs des 4 millions de chômeurs de France.
 
Son syndicat prone une politique agricole véritablement ambitieuse qui pourrait ramener le pitoyable chiffre de 460.000 agriculteurs à 1 million, ce par un soutien puissant de l’Etat, ce qui pourrait réduire le chomage de certains jeunes souhaitant se lancer, de revitaliser des zones rurales desertées mais à mes yeux aussi et surtout de donner les moyens à l’agriculture française d’atteindre l’efficience, la performance, le plein rendement qui obnibule tant les portes paroles des grands groupes agro-industriels. Les rétrogrades ne sont jamais ceux que l'on croit.
 
L'un d'eux, Mr. Olivier Picot, représentant du CNIEL (Centre National Interprofessionnel de l'Economie Laitière) était justement l’autre soir l'invité de BFM Radio où il a pu juger «  ridicules  » les propositions de l’APLI qui milite pour le prix de la tonne de lait fixé à 398 euros. Pour lui, seul le marché doit justifier et former le prix des denrées et l’Europe « dans sa grande sagesse » (SIC !) a heureusement suivi ce précepte naturel...
 
Quand on vous dit que le protectionnisme est une hérésie. Elle ne l'est pourtant pas pour les puissances qui dirigent vraiment le monde. Eux ne s’enquièrent pas de cette bétise qui étreint le pouvoir de Bruxelles, qui se croit tellement en avance sur ses masses hébétées.
 
J’ai lu plusieurs critiques de la situation de l'agriculture et de la paysannerie française ces derniers jours, je les ai trouvées fort justes et certaines magnifiquement écrites. Celle de Périco Lagasse, mais aussi celle, virtueuse, de « Félix Nietsche » du Petit Quimonte illustré.
 
Je sens bien une grande liberté chez eux, une liberté que j’envie, peut être parce qu'il ne sont pas vraiment les deux pieds dans le milieu agricole. Tandis que moi, je ne peux qu’avouer mon apréhension même à trop critiquer « le génocide paysan » narré par Félix, connecté comme je le suis, au réel agricole, sur lequel je sens comme une chape, une censure automatique qui pour certains s'est depuis longtemps transformé en une sorte d’aveuglement ou de refus de voir, bien plus pratique pour éviter toute répercussion sur son activité, une activité bientôt rendue, redevenue si fragile qu'il m’apparaît presque logique de ne pas faire trop de bruit.
 
Seulement, je puis encore profiter de ma relative éxtériorité pour tenir quelques propos. Cela ne sera peut être plus le cas dans quelques années, quand les quotas auront complétement disparus et que la paperasse envahissante, les pressions bancaires, les regroupements, la contractualisation et autres petits tracas m’auront mis plomb dans la tête et fait renoncer à mes envolées de jeunesse. Pourrais-je alors encore rever ma vie de paysan comme je le faisais jadis, ou serais je devenu l'un des 300.000, puis 200.000 « agents de production agricole » chapeauté par une grande industrie que aura englouti notre belle coopérative régionale, dont je mesure aujourd'hui la chance inouie que nous avons par chez nous d'en avoir encore une telle, indépendante et restée très proche de ces actionnaires agriculteurs et de ces consommateurs.
 
J’entends pourtant des signaux et des conseils bien plus encourageants, des chemins que j'aurais regardé avant avec un bête mépris. L’agriculture biologique apparaît peu à peu comme une alternative sérieuse pour des productions et des revenus valorisés, mais encore mieux, l'on voit apparaître des nouveaux réseaux entiers, de « nouvelles » formes de circuits de distribution pris en main par les producteurs, laitiers, bovins, maraichers et autres, au nez et à la barbe de la grande distribution et de ses innombrables marges. Voilà une chose qui me plait, mais qui ne manque pas de risques. Au moins est un espoir d'un retour vers un honneur et une excellence agricole et paysanne que des concitoyens toujours plus nombreux réclament, si tant est que l'on parvienne à leur offrir des prix à faire s’effondrer les arrogantes certitudes des grands distributeurs.
 
En attendant la campagne-usine totale, je puis encore dans mon coin de campagne, m’évader de la ville et du monde, marcher sur les chemins et les forêts où allaient les chevaux des ancêtres, encore admirer les vieux batiments crachant à la figure des siècles, des pillards, des bombardements et des mises au normes européennes. Je puis encore m’imaginer le troupeau que père, oncles et tantes cherchaient au pré avant et après la classe, traversant le village pour les mener à la traite, sans que personne ne tint cela pour une étrange folie. Bien sûr, aujourd'hui le troupeau est bien trop grand et l'on nous dit qu'il devra l'être encore plus si l'on veut survivre, mais je m’émerveille encore lorsqu'il faut aller chercher la génisse au petit pré et la faire marcher dans la rue 30 mètres pour la mener à l’étable. C'est alors un spectacle pour tout le voisinage, pour les petits enfants qui comme moi, n'ont pas assez connu l’ambiance de jadis, d'un passé pourtant très proche. Certains voisins venus de la ville, collants et baskets de joggin, piscine dans le jardin, regardent tout ceci d'un air étrange que je tiens pour une sorte de mépris, d'incompréhension. Cette vache a-t-elle une assurance au moins ? J’espère et pense me tromper. De toutes façons, je sais qu'au fond d'eux, les gens des villages dans leur grande majorité, sont fiers de cela, ils ont des ancêtres paysans et sauront, je l’espère, après encore 5 ou 10 de Sarkozy ou Strauss-Kahn, se reveiller pour de bon, et exiger le retour de la paysannerie française. J’espère encore, que ce soulèvement, rendu peu probable par le confort excessif dans lequel se vautre la France aujourd'hui, touchera bien d'autres milieux et d'autres secteurs.
 
Si tel malheur est nécéssaire.
 


Bruno Lemaire incompétent en agriculture ? (le 22 février au Grand Journal) par AgoraVoxFrance 


Moyenne des avis sur cet article :  4.74/5   (46 votes)




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23 réactions à cet article    


  • alberto alberto 24 février 2011 11:50

    Mon pauvre monsieur, ils sont tous fous !

    Et maintenant voilà un ministre de l’Agriculture (originaire de Neuilly, comme par hasard...) qui ne sait même pas ce qu’est un hectare, qui à vaguement entendu parler de vaches, de fruits, de tracteurs, mais sans savoir exactement quel lien peut réunir entre eux ces entités qui ne sont pour lui que des concepts...

    Quant à l’autre agité de l’Elysée sur la photo, il n’a jamais mis une paire de botte de sa vie, et ne sait même pas que ça existe ?

    Et tout ça vient faire le malin au salon, parader devant les caméras, dents blanches et beaux costumes...et rien à foutre pourvu que ça dure : appartements de fonction, voiture-chauffeur, frais de représentations et petits business entre copains.

    Et vous voudriez qu’il y ait une politique agricole cohérente ? Oubliez ça !


    • Gaillus le Jeune Gaillus II 24 février 2011 12:25

      J’ai regardé la vidéo de Lemaire au grand journal un peu trop tard, je l’aurais mis avec l’ article.
      C’était jouissif d’un coté, mais vraiment vraiment honteux et même j’ étais mal à l’aise pour lui sur le plateau. Voilà on l’on en est. Un ministre qui s’avère n’y rien connaitre et se fait ridiculiser par une bande de bobos parisiens.
      Je suis sûr qu’il sy connait très bien en tendances financières par contre.


    • alberto alberto 24 février 2011 13:15

      Gaillus : bien d’accord avec ton article et il y aurait tant d’autres choses à dire...

      Mais ce qu’il y a de désespérant, c’est que l’Industrie de notre pays tombe dans le même état de déshérence que l’Agriculture

      Comment pourrait-il en être autrement puisque de plus en plus on a à faire avec des politiciens qui n’en ont plus rien à foutre de rien, pourvu que leur business rapporte beaucoup et tout de suite.

      Mais dis moi, Gaillus, ton clavier postillonne, ou quoi ?

      Bien à toi.


    • Gaillus le Jeune Gaillus II 24 février 2011 13:43

      Il n’y y a pas d’autre mot que désespoir en effet. Bien sûr, comme nous sommes dans une société largement confortable, la misère matérielle comme morale n’apparait pas toujours évidente à certains, malgré l’évidence de la gravité de la situation.
      —> Alberto : En effet, non seulement j’ai un clavier assez capricieux et peu ergonomique. Mais je remarque et m’excuse de nombreuses fautes de frappe apparaissant dans le texte. Mauvaise correction de ma part.


    • captain beefheart 24 février 2011 17:16

      Mr.le Président a dit aux agriculteurs qu’ils continueront à exister ,mais sous une autre forme. A mon avis ,il sait exactement ou il veut amener les paysans français ,en le transformant en ouvriers agricoles sur leurs anciens exploitations ,qui seront propriétés des banques ,notamment Crédit Agricole .Vous pouvez continuer à travailler 10 à 14 heures par jour ,selon les saisons ,vous lever la nuit pour surveiller les velages et agnelages , tout en touchant le smic ,( encore que...) . Peut-être
      vous n’aurez pas à payer le loyer de votre habitation ,dont vous étiez propriétaire ,mais ce loyer va rajouter à votre revenu imposable comme bénéfice en nature . Bonne chance.


    • foufouille foufouille 24 février 2011 17:45

      certaines regions sont en contrat aides pour les employes


    • Yvance77 24 février 2011 12:29

      Salut,

      Moi ce qui m’a fait abimer les accoudoirs de mon sofa c’est la saillie présidentielle bien relayée, par tous les lèches-fions de TF1, France 2, iTélé, ou Calvi... lorsque Pipole 1er parler aimablement à un agriculteur lui disant à peu près cela :

      « qu’il ne faut pas désespérer, car l’on aura besoin des agriculteurs français étant donné que demain il y aura 9 milliards de personnes à nourrir »

      Quel beau foutage de gueule n’est-ce pas.

      À ce jour, nous sommes 7 milliards et la majorité crève la faim. Il y a du taf pour nos producteurs apparemment, c’est logique et imparable.

      Pourquoi ceux-ci vivent-ils dans une misère absolue alors ?

      Pauvre con de président qui veut nous faire prendre des vessies pour des lanternes.

      Et pendant ce temps, le monde qui spécule lui vit très très bien.

      Merci pour eux, et j’espère qu’ils reprendront un peu de caviar, faudrait pas qu’il vienne à manquer pour ces salauds-là !


      • epapel epapel 24 février 2011 16:24

        Pour nourrir les très pauvres qui vont être de plus en plus nombreux, il faut produire à très bas coût d’où les revenus de misère des agriculteurs qui ne peuvent pas le faire.


      • Yvance77 24 février 2011 19:22

        Epapel,

        Faut cesser les conneries deux minutes. Sorti des champs de production, le kilo de poires est à 0.17 € cts. Les mecs, ils sont déjà en slip à ce prix là. Plus bas c’est gratuit qu’ils bossent.

        Pourtant à la revente la culbute est phénoménale et, ils (les agriculteurs) ne ramassent que dalle, saud ces putains de fruits.

        Il y a clairement un souci dans la redistribution logistique et revente entre les divers marchés.

        Mais en fait, ce qu’il faudrait remettre au gout du jour, c’est le contrôle des prix. Mais là chuuuuuuuuut c’est un gros mot dans la bouche d’un libéral (je ne vous traite pas de libéral entendons nous bien c’est en général).

        A peluche


      • Yvance77 24 février 2011 12:30

        * Pipole 1er parlait


        • alberto alberto 24 février 2011 13:04

          Yvance : Et que dire des meilleures terres à blé d’Europe (Beauce et Brie) actuellement objets de spéculations foncières (business entre copains) pour y construire des bureaux avec le bétonnage, les infrastructures et les spéculateurs qui vont avec...

          Je te dis : y sont tous fous !

          Bien à toi.


        • pastori 24 février 2011 13:07

          si les petits agriculteurs ne votaient pas en masse pour ceux qui soutiennent les gros qui les laminent , et la grande distribution qui les étranglent !


          aucun stage de stratégie politique dans les exploitations ?
          même plus le bon sen paysans ?

          • epapel epapel 24 février 2011 16:22

            Voter en masse ne leur sert à rien : 400.000 voix en comptant les épouses sur un total de 40.000.000 d’électeurs soit 1% autant dire rien.


          • pastori 24 février 2011 20:30

            si chirac leur faisaient la cour c’est qu’il avait une raison.


            et puis 400.000 voix c’est pas grand chose, mais :
            -ajoutées à celles des petits artisans, commerçants, qui se font de la même façon laminer par la même grande distribution qu’ils soutiennent indirectement par leur vote 
             -ajoutées à celles des professions libérales, 
            -ajoutées à celles de nombre de fonctionnaires qui votent pour la droite qui veut réduire leur nombre et rêve de les supprimer en privatisant tout
            -ajoutées à celles des milliers de nécessiteux qui votent pour les riches en acceptant un petit, service, quand ce n’est pas un chèque
            -ajoutées à celle des ânes qui vénèrent les puissants ou espèrent le devenir
            ajoutées...................

            et c’est comme ça que le parti des riches qui représentent moins de 10% de la population parvient à se faire élire et se maintenir au pouvoir tout en tapant sur les pauvres.

            ça vous parait anodin ? nous sommes un peuple de masos.

          • Alpo47 Alpo47 24 février 2011 13:10

            Beau témoignage ...
            Je suis moi aussi fils... petit fils... arrière ...

            Les agriculteurs peuvent et doivent marcher la tête droite, ils sont ceux qui ont nourri le pays, et ce depuis toujours. L’évolution du monde, cette mondialisation qui les met en péril, est le fait des financiers. Pour leur seul profit, tout doit être mis en concurrence ; produits, salaires ... Elle leur a été vendue comme profitable, alors que tous savaient qu’il allaient être condamnés.

            Il reste, encore, une petite fenêtre d’action pour les agriculteurs restants, pendant laquelle ils ont le pouvoir d’influer sur les décisions. Mais il leur faudrait passer par des actions d’envergure de blocage. Et le faire en dehors du syndicat majoritaire, qui n’a pour seul objectif que de soutenir les gros producteurs céréaliers et défendre les intérêts de l’industrie agroalimentaire en étouffant toute revendication, et encore plus si elle est légitime.

            Ou bien les agriculteurs se retrouvent et agissent, avec une grande détermination, ou bien ... nos campagnes seront bientôt parsemées d’usines qui produiront des aliments totalement industrialisés, insipides ou infects, probablement avec des ouvriers agricoles Polonais payés 300€/mois.

            Mis à part les « gros » céréaliers ou industriels, tous les agriculteurs sont mécontents, se pose donc pour eux la question d’agir ou de disparaitre...

            Qu’ils le sachent, tout le pays est derrière eux .


            • BOBW BOBW 24 février 2011 16:00

              Totalement « À fond la caisse avec votre article. »

              Quel journal s’est engagé dans ce sens et défend les mêmes positions ? :

              Ma réponse à leur article : 
              « Bravo à l’Huma
              Soumis le 23 février, 2011 - 20:43 par Colvert-Spartakoïd.

              pour cet article à la gloire et à la défense (Surtout des petits producteurs) de la vrai richesse de notre pays face aux prédateurs et aux grosses sociétés qui nous affament .
              Résistons au systême et au gouvernement hypocrite qui nous détruisent ! »

              -----------------------------------------------------------------------------------------------------------


              Mais sur le vrai fond du problème : Chut la plupart des médias imitent les 3 petits singes de la camora :
              yeux et oreilles bouchés— bouche cousue.



              • captain beefheart 24 février 2011 17:26

                En effet . Le fait que les anti-vaccination pour Fièvre Catarrhale Ovine (FCO) ont eu gaine de cause et ne seront pas poursuivis ,n’est même pas relayé dans les médias nationaux .


              • french_car 24 février 2011 16:05

                Je ne comprends même pas qu’il y ait encore un ministre de l’agriculture et une horde de fonctionnaires pour distribuer les subventions.
                L’agriculture est un secteur industriel comme un autre et les PME agricoles ont les mêmes hauts et bas que les autres PME.
                Elles sont un peu plus protégées certes que les autres vis à vis de l’hyper compétitivité - si l’on peut appeler cela comme cela - des pays étrangers, et elles sont un peu moins contraintes que les autres du point de vue de la règlementation environnementale hélàs.


                • BOBW BOBW 24 février 2011 16:07

                  Erreur de manip et de lien : « Bravo à l’Huma et Colvert-Spartakoïd- »

                  Malheureusement impossible d’éditer le post pour corriger ! smiley

                  • Thierry 24 février 2011 20:10

                    Tout à fait d’accord, Gaillus II !
                    Il faut enfin que tous réalisent quelles sont les vraies priorités !

                    La première de ces priorités, n’en déplaise aux technocrates bruxellois, parisiens, et autres citadins bobos, c’est de se nourrir sans s’empoisonner !
                    Pour ce faire, il nous faut des paysans.
                    Non, ma chère, ce ne sont pas des culs-terreux destinés à disparaître parce qu’ils font tâche dans le paysage !
                    Oui, ma chère, ce sont les gens qui te maintiennent en vie jour après jour. Des gens qui, par leur travail, entretiennent ce superbe parc national où tu adôôôres te délasser pendant tes vacances !

                    Mais ces paysans doivent avoir la possibilité d’être RESPONSABLES, afin de ne pas être obligés de tuer leur environnement (et le nôtre) pour tenter de survivre.
                    Être responsables suppose de leur part une INDEPENDANCE vis-à-vis des producteurs de pesticides, d’OGM et d’engrais d’une part, et de celle de la grande distribution d’autre part.
                    Ne pas subir la loi mondialiste de la productivité à tout crin est LA condition pour que nous puissions enfin nous nourrir sainement et, accessoirement, diminuer considérablement les dépenses de santé.
                    Pour cela, une seule solution : assurer la survie de nos paysans, car nos paysans assurent la nôtre.


                    • Blé 25 février 2011 08:55

                      Il y a une émission que je recommande vivement sur France-Culture tous les samedi matin de 7h à 8h où on peut entendre des paysans, des écolo, des chercheurs, des scientifiques, des économistes, bref, beaucoup de personnes qui apportent un autre son de cloche et qui vont dans le même sens : il est possible de nourrir tous les humains sans saccager la terre et son environnement. Cette émission est à peu près la seule qui donne le temps aux invités d’expliquer, d’approfondir toutes les questions vitales pour la France et dans le monde.

                      Le problème dominant, pour l’ instant, ce sont les industriels agro alimentaires, les transports qui coûtent moins chers que de faire produire localement (par exemple le mouton de Nouvelle Zélande moins cher que le mouton français) mais aussi les producteurs de machines agricoles, les banques, les états complices. Pour tous ces gens, les humains et la terre ne sont qu’une ressource à exploiter.

                      Je souhaite vivement que les gens des villes prennent conscience de l’ avenir agricole en France car c’est aussi l’ avenir des jeunes générations, et soutiennent sans faille toutes les personnes qui se battent pour garder leur ferme, leur élevage, leur production céréalière, etc...


                      • silversamourai silversamourai 27 février 2011 14:27

                        Au secours !!

                        AV est envahit par les hippies !


                        • Kevorkian 27 février 2011 21:42

                          Excellent article, d’une lucidité et d’un désespoir hélas bien légitime, on sent que vous réprimez votre colère. Il y a une véritable volonté des politiques de détruire ET l’agriculture ET l’éducation, deux fondements d’une société cohérente et tout ça au nom de quoi... ? Il faudrait intégrer dans les programmes scolaires des notions sur le monde agricole pour que chacun prenne conscience de l’importance de ce secteur, mais on est est très loin de voir ça arriver, on s’éloigne.

                          Il faudra peut-être attendre que le peuple crève de faim pour qu’il comprenne enfin d’où vient la bouffe qu’ils achètent au supermarché et à quel prix elle est produite. A ce moment seulement on pourra éventuellement envisager une révolte contre ceux qui nous ont conduits là. Et ces cyniques viennent parader encore, sans honte.

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