Taxe sur les billets d’avions : les élus ne la paieront pas !
Les parlementaires ont rejeté un amendement au texte sur la nouvelle taxe sur les billets d’avions prévoyant un prélèvement sur leurs indemnités. Ce refus de solidarité de la part des élus met à la longue en péril l’avion de la démocratie, au pilotage chahuté par le peuple. Faute d’un redressement à temps, il y a tout à craindre d’un crash politique, aux dégâts incalculables pour tous.
Comme le précise une dépêche de l’AFP, le député Lionnel Luca qui souhaitait que les élus bénéficiant de billets gratuits s’acquittent quand même de la taxe, n’a pas obtenu gain de cause...
C’est le détail qui passe inaperçu mais qui fait la différence, car il en dit long sur l’état d’esprit et la mentalité de ceux qui nous représentent à l’Assemblée nationale. Ceux-là même qui ont la gâchette facile pour nous accuser de faire de l’antiparlementarisme dès qu’ils trouvent la critique sévère... Mais il faut reconnaître qu’ils le cherchent, qu’ils donnent le bâton pour se faire battre.
Lionnel Luca, député UMP des Alpes-Maritimes, avait déposé un amendement qui prévoyait de prélever directement une taxe sur les indemnités « des représentants du peuple qui perçoivent des indemnités sur le budget de l’État ou des collectivités territoriales, chef de l’État, ministres, parlementaires, conseillers généraux et régionaux, maires, maires adjoints, délégués intercommunautaires ». M.Luca expliquait son initiative en rappelant que « les représentants du peuple ne sauraient s’exonérer d’une taxe dont l’objectif est l’aide aux pays les plus pauvres ». Une initiative qui, par l’esprit solidaire et la générosité qui l’animent, ne peut que recueillir un soutien unanime. Sauf chez nos chers représentants du peuple. En effet, cet amendement a été rejeté !
On ne peut que s’indigner devant cette fin de non-recevoir. Une attitude indécente, au regard du montant des indemnités de nos élus, surtout des parlementaires, très largement au-dessus de la moyenne nationale. On ne peut que s’indigner devant cette solidarité sélective. C’est ce type de comportement qui contribue à creuser le fossé entre les élus et les citoyens. Des sacrifices, des efforts, de la rigueur, voilà ce que nous rabâchent et exigent de nous les élus depuis trente ans. Un régime sec, toujours à sens unique.
C’est toujours aux citoyens de se serrer la ceinture pour redresser les finances de la France. Donc de payer pour les erreurs, et de corriger les excès de nos élus. Toujours au citoyen de mettre la main à la poche face aux souffrances et aux malheurs qui frappent des êtres humains, comme en témoigne la multiplication des opérations faisant appel à la générosité des Français. Une générosité désormais indispensable pour pallier les carences de l’État, alors que la recherche exige toujours plus de financement pour aboutir à ses fins. Sacrifices, efforts, rigueur... autant de mots qui ne s’appliquent jamais à nos chers élus. C’est un scandale, comme l’aurait dit George Marchais ! Un vrai !
Que nos élus ne s’étonnent pas, ensuite, de ce vent de contestation qui souffle à travers le pays et qui transcende les catégories socio-professionnelles. Qu’ils ne s’étonnent pas de cette grogne, de ce ras-le-bol général, qui s’amplifie et se traduit dans les urnes et dans la rue. Qu’ils ne s’étonnent pas de la crise de confiance entre eux et ceux qu’ils dirigent, qu’ils administrent. Qu’ils cessent d’afficher ces mines étonnées à chaque secousse, à chaque camouflet, à chaque revers sorti des urnes. Qu’ils cessent de jouer les vierges effarouchées, car ils sont les premiers artisans de leurs défaites et de cet état de rébellion larvée du peuple.
Ce geste montre combien nos élus ont oublié l’importance et la portée du soir du 21 avril 2002. Outre une solidarité sélective, nos élus ont une mémoire sélective, et courte. Ce qui n’est pas le cas des Français. Ce geste montre aussi que nos élus n’ont toujours rien compris aux messages, pourtant musclés, envoyés par les Français au soir de ce 21 avril 2002, et lors du rejet massif, en mai 2005, du Traité de constitution européenne. Ils disent comprendre le malaise. Mais, hélas, ils ne le vivent pas, ne le partagent pas. D’où leur résolution, jusqu’ici stérile, de se changer et de changer les choses fondamentalement. Que nos élus continuent à faire comme si. Comme si de rien n’était. Ils sont sur la bonne voie. La voie du divorce consommé entre élus et citoyens. La pire des voies pour une démocratie. Quand ses citoyens perdent confiance en leurs représentants, ils se tournent vers des voix, dites populistes, certes très critiquables, mais qui ont, au moins, le mérite d’avoir l’apparence d’entrer en résonance avec leurs préoccupations.
En refusant d’être solidaires de cette taxe, pourtant généreuse dans son intention, les élus prennent le risque, à un moment ou à un autre, de faire imploser en vol l’avion de la démocratie qui bat sérieusement de l’aile face à la multiplication des turbulences. Faute d’un redressement à temps, ils rendent inéluctable un crash politique, aux dégâts incalculables pour la France. Et pour tous.
24 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON