Témoignage : « Mon père : ce français pourtant français... »
Ce témoignage nous éclaire.
D’abord parce qu’il montre comment la France a une conception inégale selon que l’on est français « de souche » ou pas.
Ensuite parce qu’il met en lumière les peurs, les phobies, les pulsions racistes qu’induit ce débat si funestement célèbre. Alors que l’extrême droite avait le monopole de ces préjugés, de ces refoulements xénophobes, l’on s’aperçoit qu’il y a un déplacement de ce monopole. Que l’UMP, à travers Besson et d’autres se réserve aujourd’hui le droit de poser des questions absurdes et stigmatisantes qui n’ont qu’un but : laisser des gens de côté, à la marge, et construire ainsi une identité nationale française… bien française.
Cette dernière n’est évidemment qu’illusion et manipulation.
Ce témoignage montre justement et simplement comment la perception de la société, d’une partie du pouvoir, peut affecter des individus. Elle révèle la triste démarche de certains français qui doivent se justifier, parce qu’ils ont eu le malheur de naître ailleurs…en terre pourtant colonisée.
Doit-on accepter que la société française soit divisée de cette façon ? Que certains, et hélas toujours les mêmes, en payent le prix ?
D.Perrotin

Parfois, il est de bon ton de ramener l’homme politique à la réalité, au terrain, au fait.
Le débat sur l’identité nationale nous offre un exemple de ce que l’absence de réalisme politique peut impliquer. La question principale (Qu’est-ce qu’être français ?) floue toute une réalité qui est bien plus intéressante.
Comme le dirait Monsieur Copé, je vais vous raconter une histoire...
Cette histoire débute le 9 décembre 1966, lorsqu’un enfant naît à Oujda au Maroc. Ce dernier a un père français (légalement) et une mère française (mais qui est née en Algérie lorsque celle-ci était une région française). Vers ses 6 ans, cette petite famille quitta le Maroc pour retourner en France, leur nation, leur pays. Quelques décennies plus tard, ce petit garçon est devenu un homme. Il a maintenant un peu plus de 30 ans.
Par malheur, sa carte d’identité est périmée.
Il engage donc des procédures pour la renouveler mais il se heurte à un problème majeur : on la lui refuse. Pourquoi ? Parce qu’il est né au Maroc ? Parce que sa mère est née en Algérie française ? Qu’importe en soi. On met des bâtons dans les roues d’une personne française, qui paye ses impôts, qui a fait son service militaire, qui participe à l’économie locale depuis plus de 20 ans et dont le grand père a été détenu pendant 5 années en Autriche pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Le plus drôle dans cette histoire est que cet homme a deux frères. Deux frères qui n’ont aucun problème pour renouveler leur carte d’identité. Quelle est la différence entre les deux frères et cet homme ? Lui est né au Maroc, et eux en France, des mêmes parents. Le fait qu’il soit né au Maroc est-il valable pour compliquer l’obtention de papiers alors que l’on est français ? J’en doute.
Après des centaines d’heures entre mairie, préfecture et autres représentants de l’Etat, après avoir prouvé sa bonne foi des dizaines de fois, après avoir appris à certains que l’Algérie était française pendant plusieurs années, il a obtenu sa carte.
Aujourd’hui, cet homme a 40 ans.
Il doit à nouveau renouveler sa carte mais il redoute le passage devant les institutions de son pays. Non qu’il ait peur de quoi que ce soit. Il redoute simplement de passer de nombreuses heures à s’expliquer, à se justifier d’être un français né à l’étranger. Cet homme, c’est mon père. Pourtant, je n’ai aucune complication pour obtenir mes papiers.
Il existe de nombreuses personnes dans ce cas en France. D’ailleurs, il serait intéressant de savoir si Mr Besson (né au Maroc d’une mère libanaise) connaît le même sort. Et Mme Yade (née à Dakar au Sénégal) ? Ces difficultés sont-elles partagées avec Mr Chatel (né aux Etats-Unis) ?
Ce récit n’a pas pour but de participer au débat sur l’identité nationale. Mais de montrer que l’identité française n’est qu’une histoire de carte d’identité. Quoi que l’on dise sur de prétendues compétences, un prétendu état d’esprit français ou autre, la France est entrée dans une spirale de peur de l’immigration, de peur de l’autre. Cette peur est tellement forte qu’elle pousse à douter de la bonne foi des français. Elle transforme la façon dont on aborde des personnes nées à l’étranger, bien que françaises. Le débat sur l’identité nationale est en cela inquiétant.
Ce n’est pas l’idée par essence qui fait peur mais ce qui en découle.
Le débat sur le débat est philosophique, culturel et moral. Il ne doit pas laisser indifférent. Il ne faut pas tout accepter par dépit, encore moins lorsque l’identité nationale est en jeu.
Arthur-Léo.P
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