Terre de convergence « … c’est vraiment la bonne voie* »
Le bilan n’est pas fait, toute la vaisselle n’est pas lavée, la fatigue est encore là et comme elle, les impressions demeurent. Nous étions, il y a peu, au bord du Gardon à Attuech (30) pendant six jours, du 13 au 18 août, à mille et plus tous les jours, à nous croiser, nous rencontrer, nous retrouver, nous étonner, nous enrichir, nous réunir pour parler, nous projeter vers les projets qui nous tiennent debout dans ce monde ébranlé.
Un climat fraternel
Avant qu’arrivent les éléments tangibles d’un bilan partagé on peut comme ça évoquer l’instant, survoler les choses. Il y a eu beaucoup de sourires, beaucoup d’ouverture et beaucoup d’embrassades. C’était facile d’entrer en relation avec les personnes présentes, le climat sur les bords du Gardon était à la fraternité. En sept jours passés sur zone, pour ce que j’en ai vu je n’ai pas le souvenir de tension. L’esprit de la non violence a de tout évidence fait son nid dans ce monde la. Monde éphémère certes mais monde précieux où l’être humain montre sa capacité à se tenir bien avec ses semblables et avec la nature.
Précieuse ombre des arbres
Avec la nature aussi on s’est bien comporté. Pendant six jours, on a économisé l’eau, on n’a pas utilisé nos voitures, notre nourriture était bio, on a utilisé des toilettes sèches, on n’a pas mangé de viande… des panneaux ici et là sur le terrain nous présentaient les oiseaux, bergeronnettes, tourterelle des bois, guêpiers, pic vert… vivants dans ce lieu. Par moment l’après midi c’était amusant de se rendre compte que c’étaient, comme en Afrique, les arbres, précieux arbres, qui décidaient du lieu des réunions, c’est à leur ombre que nous étions le mieux.
D’où ça vient ?
Moi, les organisateurs de ce moment particulier, je les ai rencontrés il y a presque un an, c’était le passage du tour Alternatiba à Montpellier on disait alors : « Terrien sans la terre t’es rien ». A Grabels au parc du château, ils avaient alors fait la cuisine pour les visiteurs du village des alternatives qui se vivait sur le thème : « faisons le nous-même et ensemble ». Inscrit comme bénévole, j’avais donné un coup de main à la cuisine et avais bien apprécié l’ambiance mêlant un sens élevé de l’accueil et une belle efficacité. Tout le monde avait mangé et c’était bon. Je les ai retrouvés lors des manifs pour le climat, là ils tapent avec enthousiasme sur des tambours, avec les manifestants par milliers dans les rues de Montpellier. La ressourcerie du pont qu’ils ont créé au Vigan, je l’ai découverte en mai, lors d’un WE de préparation de Terre de convergence pour les bénévoles. Il n’en fallait pas plus pour me convaincre qu’on était sur du sérieux, du solide. Je me suis inscrit pour la cuisine.
De beaux soutiens
Edgar Morin a apporté son soutien à l’évènement par le biais d’une vidéo dans laquelle il parle d’un élan, d’un changement de voie. Puis c’est dans l’hebdomadaire « La Gazette de Montpellier » qu’il s’excuse de n’être pas venu : « je regrette beaucoup de ne pas participer à Terre de convergence, c’est vraiment la bonne voie… dis aux amis qui animent Terre de convergence que je les rejoindrai dans leur marche ». Le ministère de la transition écologique lui aussi soutien l’évènement financièrement.
« Très bons les repas, merci »
Pendant sept jours à la pluche, à la vaisselle, aux fourneaux, au service… on a constitué un petit groupe solidaire et bien sympa du coté des cuisines. Les repas étaient bios et végétariens et vraiment très bons, les retours ont été nombreux et toujours positifs. Tous les jours des participants de l’éco rencontre venaient nous prêter main forte pour deux heures, souvent ils restaient plus, tant l’ambiance était bonne. Nous avons bien mangé et très peu jeté. Pendant toute la rencontre la gratitude était de mise. Souvent, à l’occasion du croisement d’un(e) particpant(e) des mots de reconnaissance venaient, ils étaient bons à recevoir, c’est vrai qu’on bossait. A terre de convergence le participant lambda n’est pas ingrat.
« À situation exceptionnelle, ne faut-il pas ouvrir de portes exceptionnelles ? »
Plusieurs ami(e)s de la belle démocratie sont passé par Attuech pour participer aux débats, ils étaient bien à leur place, il a souvent été question de Saillans dans les discussions. La thématique « Décider et agir ensemble » est au cœur du processus général. Ici la question de la méthode est prise au sérieux. J’ai eu la chance de vivre une rencontre de trois heures avec quatre élu(e)s locaux, nous étions une trentaine ou plus réunis sous une tente berbère pour discuter avec eux. Des échanges s’est dégagé un climat de sincérité plutôt rare en de telles occasions. Nous avons parlé utile, c’est de toute évidence. Le dialogue est réel et constructif entre ceux de l’association « Rd’ Evolution » et les élus du territoire. On a entendu : « Les gens quand on leur demande de participer, on les voit heureux », « on veut le voir dans nos vies, ce qu’on dit », « l’idée de transition s’ancre dans tous les esprits, elle est forcement solidaire », « c’est une approche plus féminine », « à situation exceptionnelle, ne faut-il pas ouvrir de portes exceptionnelles ? », « si vous doutez de votre pouvoir, vous donnez du pouvoir à vos doutes ». Des soins ont été apportés à la méthode tout au long du séjour, du coup tout le monde pouvait s’exprimer, on pouvait facilement se sentir bien lors des débats.
L’art partout présent et tout le temps
Il y a des couleurs, il y a des formes, il y a des sons, il y a des mots … et toujours la recherche d’harmonie. La beauté est invitée d’honneur ici, elle est reine. C’est comme pour la participation, c’est une marque de fabrique. La musique était présente comme le chant et la danse, les ateliers d’animation pour les enfants étaient tous plus créatifs les uns que les autres. Le cinéma avait sa place Mélodie Tribourdaux nous a présenté « Les Graines Libres Education en transition » et Frédérique Plénard « Le lien » des débats intéressants s’en sont suivis. Du coté des artistes j’ai eu le bonheur de retrouver Adi la crieuse de Lasalle qui nous offre à chaque fois, un sans faute de vitalité et d’improvisation. Il y a eu aussi Maria Amanita Libera de l’association Humanly - Naissance intime, elle nous a bien amusé avec madame ocytocine, c’était drôle et plein de sens. Il y a eu les bals folks, les concerts… et la journée durant, des guitares, des accordéons nous appelaient à l’ombre des arbres… On ne peut pas tout voir de la fenêtre de la cuisine.
La diversité était là.
Il y avait des enfants, des tout petits et des plus grands, il y avait des jeunes et des jeunes adultes, il y avait des gens de plus de soixante dix ans, il y avait des femmes autant que d’homme, elles avaient toute leur place dans les assemblées. Il y avait ceux qui aiment les tipis et les roulottes, d’autres en dreadlocks, il y avait les amateurs de do in ou de yoga, celles qui aiment les pierres ou le travail du cuir, il y avait des artistes, des nomades, des enseignants, des paysans, des cadres, des engagés des luttes sociales et écologiques… Il faudrait parler de la place donnée aux peuples premiers et à la toute nouvelle monnaie locale cévenole l’« aïga », il faudrait évoquer toutes ces langues qu’on entendait parler.. . La diversité était là.
Avoir une terre
Sur le long terme le projet c’est de trouver les moyens pour acheter une terre et là pouvoir enfin innover un peu plus, tant sur le plan social qu’écologique. Surtout peut-être, ce sera un lieu de rencontres ouvert à celles et ceux qui s’engagent dans la transition. « Il sera une Terre… pour vivre ensemble en créant des liens… pour sortir de la marge et créer une nouvelle histoire… pour croire en un futur possible… » C’est ce qui est écrit sur la quatrième de couverture du « carnet de bord » donné au participant à son arrivée à l’éco rencontre.
Projet de long terme
Il y a mille choses à améliorer certainement. Pourquoi pas un pôle « éducation à la transition » quand nous avons les pôles : « Décider et agir ensemble », Alimentation durable », « Energie Ethique », « Accès à la terre », « Préserver la biodiversité », « Solidarité internationale »… On pourrait avoir droit à plus de rigueur sur les lieux et les heures des différents évènements, réfléchir encore à l’usage de la cigarette et du feu en août dans le Gard et aussi à la prohibition de l’alcool, sauf bar ouvert de 18h à 20h … la mémoire d’ancienne pratiques, le souvenir d’anciens excès nous tiendraient il prisonnier ?
« J’en ai appris plus sur moi, sur qui je suis, ce que j'aime et ce que je suis capable de faire »
Au commencement est la rencontre. C’est fondamental de donner à toutes et tous l’occasion de vivre des moments comme ça. Deux jours après l’évènement sur la page facebook d’une jeune de moins de trente ans : « Après une semaine passée à l'eco rencontre Terre de Convergence, je reviens ravie. Je ne pensais pas possible de vivre une si belle semaine, avec tant d'émotions si intenses. J'y ai fait de belles découvertes et très belles rencontres. Le lien avec les gens était le plus important là bas et je me suis rendu compte à quel point j'aime ça. Je me suis aussi trouvée là bas, j'en ai appris plus sur moi, sur qui je suis, ce que j'aime et ce que je suis capable de faire. Cette éco-rencontre m'aura fait grandir. Je n'ai qu'un mot à dire pour tout ça : Merci » C. Rien à ajouter !
*Edgar Morin
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