The Fabelmans : le film de trop pour Spielberg ?
Quelle déception que ce nouvel opus de Steven Spielberg. En me rendant au cinéma UGC des Halles à Paris vendredi dernier, je pensais passer un bon moment d'aventures, d'émotions, de suspense comme le réalisateur de Rencontre du 3ème type nous avait habitué par le passé. Payer quatorze euros pour deux heures trente de fiction, c'est un investissement que l'on ne regrette pas, en général, quand c'est en compagnie d'un récit de Spielberg.
Pour autant, je n'ai pas aimé E.T quand j'étais gosse. Je n'aimais pas le cinéma pour enfants. J'ai adoré son premier long-métrage, l'introuvable Duel, mélange d'action et de suspense, avec un scénario percutant. D'autres films, parfois discutables comme La liste de Schindler avaient au moins le mérite de se laisser regarder, et surtout d'être bien réalisés.
Vous l'avez compris, The Fabelmans est très loin d'être un chef d'oeuvre. Malgré des critiques élogieuses de la presse (qui témoignent peut-être du conformisme et de la servilité de ces milieux) et de la majorité des spectateurs d'Allo ciné, ce biopic insipide ne mérite ni oscars ni golden globes. On peut se demander, en bons complotistes, si les "spectateurs" en question sont d'authentiques cinéphiles ou des gens payés pour l'être, un peu comme ces agences immobilières qui paient pour mettre de faux avis positifs sur Google. Car les réactions de mes nombreux compagnons d'infortune à la sortie de la séance étaient très contrastées. Beaucoup ont été trompés par le titre, qui évoque vaguement les "hommes fables"...
Une fois dehors, après avoir réveillé le couple de petits vieux qui s'étaient endormis à côté de moi, j'ai essayé de penser aux moments forts de ce film, sans les trouver. Pour résumer, Speilberg nous raconte sa vie, son enfance, ce qu'il aurait pu faire en une demi-heure. Le ménage à trois de ses parents aisés, avec l'oncle Benny qui est l'amant de sa maman, ses soeurs qui jouent dans le jardin, la fête juive d'hanouka, le papa ingénieur en électronique qui invente un des premiers ordinateurs, son épouse qui joue du piano avec ses ongles trop longs, le pique-nique en famille, le déménagement en Californie et la première idylle du jeune héros. Les passages censés être drôles ne le sont pas, car Spielberg se fait plaisir et pour une fois il oublie les spectateurs. Digne d'un mauvais nanar français financé par le CNC, aucun suspense, aucune émotion. On ne voit qu'un gosse de bonne famille s'initier au cinéma amateur avec les premières caméras que peu d'américains pouvaient d'aileurs se payer ; car l'enfance de Steven ne fut pas difficile vue l'aisance de ses parents. On est loin du "rêve américain" d'ascenseur social, ce fameux mythe de celui qui part de rien pour devenir célèbre.
La seconde partie du film, l'arrivée en Californie, est plus énergique. Notre cinéaste en herbe se retrouve dans un lycée de vilains grands blonds racistes et antisémites (on repassera pour l'originalité). Loulou est harcelé par ces méchants "aryens wasps" qui lui demandent même... de s'excuser d'avoir assassiné Jésus Christ (authentique !). Puis il tombe amoureux d'une nana de sa classe, une illuminée évangéliste qui veut le convertir. Elle a des portraits du Christ partout dans sa chambre. On ignorait que les californiens étaient violents, fanatiques et hostiles aux israélites, maintenant nous le savons grâce à Spielberg...
Puis c'est la consécration pour Steven qui réalise le film des vacances au bord de la mer de ses camarades, tournant en dérision les vilains grands blonds. A la fin, il finit par être remarqué et rencontre un producteur d'Hollywood qui lui présente John Ford, très méchant lui-aussi, cassant et laid. Puis Steven file vers son destin... Un pied de nez à l'Amérique "raciste et conservatrice" de la Californie et des westerns, une manière de dire que notre génie a balayé le vieux cinéma traditionnel et ses clichés (pour en imposer d'autres) ?
Un opus convenu, sans surprise et même ridicule, avec une touche communautaire grotesque en prime. Spielberg le gosse d'une famille de la bonne bourgeoisie n'a aucune leçon à nous donner en matière de discriminations. Il nous présente un navet nombriliste sans intérêt où oublie ce qui a fait son succès par le passé : produire du rêve et de l'émotion pour les autres. Le film de trop ?
En attendant, votre narrateur n'a pas perdu son temps dans le quartiers du forum des Halles. Si vous passez par là-dedans, allez à la nouvelle médiathèque d'histoire du cinéma (François Truffaut). C'est libre et gratuit, avec une marée de documents à disposition (dont sans doute des bouquins sur les oeuvres de Spielberg). Côté film, j'ai apprécié contre toute attente Babylon, un peu lourd au début mais finalement très prenant avec d'excellents acteurs. Vaincre ou mourir est encore présent dans quelques salles, ce n'est pas un chef d'oeuvre mais c'est bien réalisé et loin des accusations anti-républicaines des "spécialistes" de la presse et l'Allo ciné. D'ailleurs les persécutions envers les paysans vendéens qui refusaient la conscription bidonnée et les massacres de Vendée méritent aussi l'attention des réalisateurs de fiction. Tiens, pourquoi d'ailleurs notre Spielberg n'aurait pas produit ce film, lui qui prétend lutter désormais contre les discriminations, le harcèlement et la violence ?
Pour finir sur une note positive je vous laisse une photo et les coordonnées de la médiathèque dont je vous ai parlé :
Horaires : https://www.paris.fr/lieux/bibliotheque-du-cinema-francois-truffaut-3371
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