Toutes ces dégradations de tombes, là, vous ne trouvez pas ça bizarre ?
A chaque élection, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais on a des cimetières profanés. Juifs ou mulsulmans, pour la plupart. Parfois, comme à Lille, l’enquête démontre que l’individu qui a commis le crime n’est qu’un homme un peu déboussolé, qui ce jour là en prime avait bu plus de coutume, et qui en est arrivé là par pur désœuvrement. On raye des voitures et on incendie des poubelles pour les mêmes raisons, tout aussi ridicules, tout aussi irresponsables. Oui mais là, le nombre élevé de profanations à l’imminence d’un choix crucial ne peut pas être fortuit .
En résumé, cela doit bien vouloir dire quelque chose. Oui, ça signifie bien quelque chose. Et ce quelque chose n’est pas reluisant à découvrir. Derrière, il y a l’inexorable montée en puissance des idées d’extrême droite. M. Sarkozy se vante d’avoir "décomplexé" la vie politique française. Il ferait bien de se rendre compte qu’il décomplexe également les extrémistes, avec ces propos outranciers et son appel du pied à l’électorat extrémiste.
Le MRAP les connaît bien, les auteurs de ces actes ignobles. Ils ont tous écouté ou lu des paroles et des textes rédigés par d’autres.
L’histoire se passe le 11 juin 2005. Un employé de la Poste, dans les Pyrénées-Atlantique, quitte sa maison à 6h30 pour se rendre à son travail, il est guichetier. Marié, deux enfants, la bouille rondouillarde, ce monsieur tout le monde, marié, deux enfants... tombe sur trois policiers en uniforme, de la brigade antiterroriste, qui l’embarquent aussitôt. L’homme est Denis Greslin, il est arrêté à la suite d’un enquête sur des menaces de mort proférées sur le Net envers... Jacques Chirac, qui date du 11 févier 2003 et intitulée finement "Il faut abattre Ben Shirak". Il n’a pas été trop difficile de le trouver : son nom figurait dans un autre site, appellé SOS-Racaille, un site d’extrême droite (http://www.transfert.net/d59). Oui, vous avez bien lu le même mot que moi. Le vocable n’est pas apparu par hasard dans la bouche de M. Sarkozy. C’est le langage de l’extrême droite, rien d’autre.
Un site remplaçant de SOS Racaille (http://www.transfert.net/Pour-les-anciens-de-Sos-Racaille) où en un an et demi, 450 000 articles, pas mois ont été publiés. Du racisme ordinaire en passant par le négationnisme, on trouve de tout. Chez Greslin, on perquistionne sa maison, fouille son ordinateur... et l’individu ressort libre le lendemain. Pour créer aussitôt dans la foulée un autre site internet, "Occidentalis", toujours actif, au programme simplissime : "Occidentalis est une association "Loi 1901", née d’un site internet, et qui souhaite regrouper des gens "ordinaires" qui ouvrent les yeux sur ce qu’est en train de devenir la France. Son objet est d’assurer la défense et la promotion des valeurs de l’Occident,(...). Occidentalis utilisera tous les moyens légaux pour mener à bien sa mission. Nous souhaitons briser le tabou de l’islamisme, nous voulons être le grain de sable qui va bloquer l’engrenage de la machine à broyer l’Occident (...) Son slogan : islamovigilance". C’est dit, ça a le mérite d’être clair, le site est islamophobe avant tout. Violemment islamophobe. Parmi ces adhérents, des personnes témoignent le soir du premier tour : beaucoup préconisent un vote blanc, mais on trouve aussi d’autres avis. Ils se résument tous à "plutôt Sarko que Ségo"... :
"Le petit Nicolas devrait être élu, mais attention à l’hypermédiatisation et à la mise en image de l’institutrice dans toute la presse, car c’est son image imprimée qui a terrassé les éléphants". "Bien que sensible aux idées du MPF, j’ai voté UMP direct car je ne voulais absolument pas retrouver la madone du PS en tête. Je confirmerai au second tour". "Un petit commentaire sur les résultats... j’ai vu les résultats d’un sondage selon lequel le vote musulman serait de 64% sur Ségo et ... 1% sur Sarko ! On voit les résultats de la création du conseil musulman et de l’idée de financer les moquées... toutes ces contorsions en leur faveur... Si Sarko ne comprend pas, c’est qu’il est ... et indigne d’être président".
Entre deux réponses à ce forum, l’auteur du site menace de l’arrêter : la défaite de Le Pen déboussole et lui fait perdre des lecteurs. En réalité, il lui faut du temps de libre pour se présenter aux prochaines législatives. Il a déjà adhéré au FN, en 1986, soit à 13 ans seulement, et a été candidat de 93 à 98, année où Mégret fait sa scission. Il quitte le mouvement en 2002 car Greslin est aussi pro-israélien, pro-sioniste, ce qui en fait un cas à part (mais un proche de Goasguen par exemple !). Il rejoint De Villiers en 2006, le baron prônant la lutte contre "l’islamisation". Pour le second tour, c’est évidemment Nicolas Sarkozy qu’il soutient, avec comme joli prétexte "de faire barrage à la gauche socialo-marxiste" une idée toute neuve chez l’extrême droite. D’autres témoignages encore, sur son forum :
"Je me trompe peut-être, je suis probablement naïf, mais je maintiens qu’un Sarko vaut mieux qu’une Sego, et je suis content que Villiers ait fait ce choix". "Outre les risques judiciaires (et autres) accrus si les rouge-brun-verts passent , pourquoi continuer à sacrifier tant de notre vie pour être si peu entendus ? ... ou n’être entendu que par des "consommateurs d’informations" qui bougent, de plus, si peu dans la vie réelle ... Je ne dis pas cela pour nos nombreux adhérents, qui, eux, au moins, nous financent .... Je ne dis pas que nos idées ne se sont pas largement diffusées depuis quatre ans ... y compris au sein de certains partis politiques ...".
Tout y est, là : l’aveu de soutiens financiers directs, l’intrusion des idées au sein des partis politiques de droite, mais aussi le manque d’écho ailleurs, à savoir dans la population "de gens ordinaires", jugée inerte. Tout se passe en effet comme si l’extrême droite avait gagné auprès des politiques, mais pas obligatoirement au niveau des électeurs... ce qui est difficile à imaginer, les premiers étant le fruit des seconds. En fait, ce sont les idées qui se sont massivement répandues... (http://votemonpote.blog.20minutes.fr/tag/profanations) des actes, il y en a peu, comme ces profanations... mais les idées sont désormais bien ancrées dans l’électorat : Le Pen, bien que battu, a gagné son pari. Chez un des profanateurs d’Arras, l’aveu est clair : « Je suis devenu raciste il y a un an environ, je suis devenu raciste envers les Maghrébins. ». Il y a UN an seulement : son histoire n’est pas à relier à la montée en puissance de M. Le Pen... en 2002.
La pensée de M. Greslin se résume en effet à un amalgame complet entre ce qu’il peut voir à la télévision, et la moulinette de sa pensée... "unique" : "Ecoutez, je regardais hier le journal du soir sur BFM. Je n’ai plus l’ordre exact des reportages en tête, mais les sujets suivants ont été évoqués : "le policier assassiné à la foire du Trône par un ou plusieurs « jeunes » d’une cité voisine ; Ghofrane lapidée par un ou plusieurs « jeunes » de la cité qui la considéraient comme trop « indépendante » ; le bus incendié par des « jeunes » de la cité, sans mobile apparent, sinon la volonté de détruire et de tuer ; Sophie, jeune fille étranglée à Nantes a priori par un réfugié bosniaque ; l’Iran qui veut se doter de la bombe nucléaire ; les attentats en Irak, au Maroc ; les otages français en Afghanistan... Tout ceci a rempli 80% du journal, il ne restait guère que le sport à la suite et la météo ... Or, quel est le point commun de tous ces titres ? L’islam ! Alors soit je suis vraiment parano, soit il y a vraiment un problème en France et dans le monde avec la religion de Mahomet !".
L’analyse de cette pensée réductrice nous explique beaucoup mieux une autre, que l’on vient d’entendre tout le long de cette campagne : les "cités de banlieue" sont donc remplies exclusivement d’islamistes qui brûlent tout (tous arabes, M. Greslin n’y voit pas de noirs), ce sont tous des jeunes, les immigrés sont par principe tous dangereux, les attentats terroristes dans d’autres pays vont être importés un jour ou l’autre, l’holocauste nucléaire nous attend en Iran... On croirait entendre Nicolas Sarkozy en meeting électoral ! Ou en interview au journal La Croix : "Les problèmes de terrorisme, on les a dans les caves et les garages. Pas à la Grande Mosquée de Lyon ou de Paris !" (27/04/07). Greslin ne dit rien d’autre dans un "sondage" plutôt orienté (http://www.occidentalis.com/pollBooth.php?op=results&paollID=13&mode=&order=&thold=).
L’islamophobie a donc fait son chemin jusque dans la tête d’un futur président français : au secours ! On peut aussi en faire une autre analyse, d’ordre purement psychanalytique (http://www.betapolitique.fr/spip.php?article0522). On savait la pensée d’extrême droite réductrice : c’est une pensée bouc émissaire. Si ça ne va pas, c’est la faute des Arabes ou des Noirs, tous les étrangers sont potentiellement dangereux, et l’origine de leur dangerosité, à tous, c’est leur religion, l’islam, etc. Ce qu’on ne savait pas, c’est qu’un président de la République putatif pouvait tenir les mêmes propos et avoir la même démarche intellectuelle. Evidemment, sur le site de M. Greslin trône un super logo "Non à l’entrée de la Turquie"... en fait une carte postale "islamiquement incorrecte". Le verso, de bien meilleur goût, parle de "république islamïque française", un maire ayant sur sa table une statue de "Fatimarianne". A ce stade-là de veulerie, on ne peut que s’inquiéter.
Bien entendu, sur le site de M. Greslin, en ce qui concerne les profanations, on nie les responsabiilités : "Occidentalis condamne sans aucune ambiguïté le saccage du cimetière militaire musulman d’Ablain-Saint-Nazaire. Ceux qui n’ont pas le courage de combattre à visage découvert les vivants, et préfèrent s’en prendre aux morts, ne méritent que notre plus profond mépris". On a beau trouver chez les auteurs des ouvrages nazis et des ordinateurs remplis de sites négationnistes ou d’extrême droite tels qu’Occidentalis, il n’y a aucun rapport (http://www.lefigaro.fr/france/20070424.FIG000000032_la_vogue_des_profanations_inquiete.html). Bien sûr. La réponse de M. Greslin ressemble mot pour mot à celle de M. Sarkozy sur son site de campagne (http://www.sarkozy.fr/news/?lang=fr&id=290).
Attiser la haine et s’en laver les mains en cas de problème, voilà une attitude bien lâche, mais qui n’est pas tellement différente de celle d’un ministre de l’intérieur qui jetait de l’huile sur le feu lors de émeutes de 2005 plutôt que de chercher à calmer la situation. En fait, la montée de cette droite extrême est passée inaperçue dans le médias. Seules des personnes sensibles aux discours extrêmes ont pu reprendre ces arguments de pacotille : le staff proche de Nicolas Sarkozy, dont on redira encore ici la dangerosité politique, en raison des ses liens passés et actuels avec la pensée d’extrême droite. Au gouvernement, on cherche à minimiser les profanations, bien entendu (http://www.bladi.net/forum/24190-recensement-profanations-cimetieres/).
Il n’y a pas que le site de Greslin, en effet, il y a aussi Liberty Vox (http://www.transfert.net/Liberty-web-rassemblait-l-extreme), ou L’observatoire de l’islamisation de Joachim Véliocas, André Dufour, qui pour parler du drame de Clichy met un manuel d’électricité comme illustration (la honte n’effleure jamais l’extrême droite) à Jean-Gérard Lapacherie, universitaire, spécialiste de la langue française, qui dans un reportage dans une émission de Ruquier sur une maternité, un extrait filmé avec un portable, "affirme c’est d’abord une technique nouvelle et éminemment moderne mise au service d’une propagande haïssable : dans l’Allemagne nazie et au Rwanda, la radio ; sur France 2, la fonction vidéo des téléphones mobiles. Les jeunes sont friands de vidéo. C’est avec leur mobile qu’ils filment des agressions gratuites, des ratonnades racistes ou des viols en bande. La fonction vidéo de ces mobiles met l’image fruste ou le message simplifié à la portée de tous, comme la radio, technique moderne dans les années 1930, donnait une forme d’avant-garde à des messages anciens." Quelques mois plus tard la loi "anti happy-slapping" été votée. La droite extrême semble écoutée en haut lieu, ces derniers temps. Nulle idée chez moi de soutenir le procédé, je remarque simplement que les personnes qui ont soulevé le problème au départ ne sont pas de gauche, mais bien de droite. Or cette interdiction sert aussi un pouvoir fort, en limitant la circulation des exactions policières, par exemple. Désormais, certains peuvent agir en toute impunité, comme à la Gare du Nord où on a bien assisté au passage de nervis, au milieu des jeunes banlieusards casseurs.
Le même Lapacherie ayant une vision assez , euh... particulière des émeutes de banlieue : "Combien de litres d’essence faut-il acheter pour brûler dix mille voitures, deux cents autobus, vingt écoles, des gymnases de cinq cents mètres carrés, des églises, des poubelles, de grandes et de petites surfaces, des boutiques, deux synagogues ? Dix mille, vingt mille, cent mille ? À plus d’un euro le litre, mettre le feu aux banlieues coûte très cher : ça exige investissements, logistique, modes d’approvisionnement sûrs, qui sont hors de portée des pauvres. Seuls les nantis peuvent s’offrir autant de litres d’essence. Quand ils se pavanent devant les caméras, ils arborent les signes de la richesse : vêtements griffés et casquettes de marque". Je résume : les banlieues en 2005, ce sont des émeutes de riches ! Sidérant, comme analyse, mais écrit noir sur blanc. Et ce monsieur enseigne en université (espérons que ce en soit pas en économie ou en sociologie) !
On y trouve aussi sur le site de M. Greslin, des ouvrages, tel que "L’Islam sans complaisance" de Bernard Antony, ancien lui aussi d’Occident, et de Tixer Vignancourt, ancien responsable du CNIP, devenu frontiste et député européen et très engagé religieusement, tendance catholique traditionnel. Lui a des vues assez particulières sur l’héritage de mai 68 : "Observons au préalable qu’on ne les a pas interrogés sur une politique du respect de la vie. On sait que sur ce plan (loi Veil-Pacs-Euthanasie), Ségolène Royal va très loin aux antipodes des valeurs de la morale chrétienne et naturelle. Nicolas Sarkozy dans sa campagne n’a rien dit sur cela qui puisse entraîner notre assentiment". Catho, tendance réac, donc. Un homme qui accorde son soutien à Sarkozy du bout des lêvres : "Avec quel corps enseignant procèdera-t-il à un renouveau de l’Education nationale ? "Avec quelle magistrature mènera-t-il la lutte contre une racaille qui n’est pas seulement dans les banlieues mais au cœur même d’un système marchand dégagé de tout scrupule moral ?". Des propos qui, pourtant, font bel et bien écho aux saillies de Nicolas Sarkozy sur Mai 68 et sur les banlieues.
En fait, les gens de l’extrême droite en sont déjà à demander davantage que ce qu’ils pourraient avoir avec M. Sarkozy au pouvoir ! Et pour faire monter la pression rien de tel qu’un ou deux saccages. Ça maintient la pression sur le candidat, ça lui rappelle... sa nouvelle base électorale. Avec laquelle il va devoir maintenant composer, s’il parvient au pouvoir. On lui souhaite bien du courage. Finalement, 2002 ce n’était que le galop d’essai d’un droite dure qui, sans doute, va hériter ce week-end du pouvoir, de façon "décomplexée". On peut TOUT craindre, à partir de là. Y compris le grand retour des pogroms. M. Sarkozy, en accédant à la présidence, risque fort de lâcher les chiens.
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