Trop virtuel pour être vrai ?
Après un XXe siècle difficile, l’homme est rentré de plain-pied dans l’ère de la virtualité et de la facilité. Mais est-ce vraiment pour son bien ?
L’ère du numérique semble souffler comme un grand vent de liberté dans les petites chaumières. Désormais pour une somme que l’on qualifiera de raisonnable, nous pouvons avoir accès à cette grande bibliothèque de savoir, toute l’information à portée de clic. Notre jeunesse s’engouffre à grand renfort de blog et de tchat dans cet univers passionnant qu’est internet, allant jusqu’à y passer des soirées (voir des nuits). Au-delà du tableau idyllique et des couleurs chatoyantes des concepts du web 2.0, ne faut-il pas avoir une vision plus grise et plus réaliste de ces univers virtuels ?
Aujourd’hui, c’est quasiment devenu un réflexe. Quand on est connecté et que l’on a besoin de chercher une information, on va sur Google, on saisi le mot-clé ou notre phrase : une liste de réponses nous est renvoyé très rapidement. Après quelques clics et quelques minutes, nous tombons sur ce que nous cherchions : nous sommes comblés. Facile, tellement facile qu’un enfant de 7 ans y arriverait. D’ailleurs internet et ses moteurs de recherche deviennent un outil qui s’affirme de plus en plus chez les jeunes en quête d’information. Et dire qu’à mon époque on était obligé de lire et de chercher dans un dictionnaire, voire, ultime supplice, d’arpenter les couloirs de la bibliothèque municipale. On n’arrête pas le progrès.
Certains s’interrogent, peut-être à juste titre : la difficulté ne doit-elle pas faire partie intégrante de la recherche ? Si tout est toujours trop facile, notre esprit ne va-t-il pas prendre un mauvais réflexe ? J’entends déjà les voix qui viendront démontrer qu’une recherche peut durer des heures, même sur internet. Il me semble que tout le monde n’a pas la même notion de difficulté, selon les âges, selon les générations.
L’un des grands dangers de la virtualité, c’est que tout y est facile. Etant proche de certaines personnes qui travaillent dans le monde éducatif, on ne s’étonne plus de voir la chute vertigineuse du niveau scolaire de nos chères petites têtes blondes. Non pas que Google (et consorts) soit responsable de ce fléau qui va toucher notre début de siècle, tout au plus il y participe, au même titre que certains autres médias et loisirs. Simple constat, le niveau scolaire baisse, alors que l’on dispose de toute l’information à portée de main. Etrange paradoxe que celui de la facilité.
On est aussi en droit de se poser la question du crédit de l’informatique libre. Les joies du copier/coller sauvage et de la modification communautaire des textes, finissent parfois par porter un coup fatal à la véracité et à l’intérêt des informations recueillies. Tout le monde dit ce qu’il veut, sans contrôle de quoi que ce soit : c’est la liberté mon frère. Le pouvoir de l’information est désormais à ceux qui savent bien référencer. Avoir le sens critique de ce que l’on lit semble même avoir disparu de l’esprit de certains internautes, qui prennent pour argent comptant tout ce qui est écrit sur la moindre page web. Faut-il s’inquiéter de la profusion de l’information "n’importe quoi" ?
Il fut un temps en France où l’excellence était récompensée par un livre. Aujourd’hui quand on travaille bien à l’école, on hérite d’une console de jeu ou d’une paire de Nike. On lis de moins en moins, on se cultive moins. D’un autre côté, on va de plus en plus sur internet, on joue de plus en plus à toute sorte de jeux. Il paraît que c’est logique, nous sommes en plein dans une société de loisirs. Ce changement dans les mentalités se fait-il vraiment sans incidences ? Internet est-ce tout d’abord un loisir ou un moyen d’information ?
En un clic, nous nous inventons une personnalité, une aura... La frontière entre l’amusement et la réalité est parfois mince, il suffit de voir des sites comme Second Life où des milliers de nouvelles vies se créent chaque jour. C’est l’apparence qui est la règle, ce qui brille est forcément or. Là encore on dénote un vrai décalage avec notre réalité. Ce besoin d’évasion est de plus en plus pressant, parfois on est tenté de baisser les armes pour se créer une autre vie, meillleure, virtuelle. Oublié nos défauts, fini les difficultés. L’homme laid devient playboy, la femme mariée célibataire, le sans-études expert en informatique, etc. N’y a-t-il pas dangers à s’inventer de nouvelles vies ?
Ce sont les hommes et les femmes de notre pays qui font ce que sera notre pays demain. Quelle société sommes-nous en train de construire en rendant les choses toujours plus faciles d’accès, plus virtuelles, plus irréelles et parfois plus fausses ? J’ai l’impression que le fossé entre les générations se creuse à vitesse grand V. Les uns dépassés par une technologie qu’ils ne maîtriseront jamais, les autres aveuglés par les sirènes d’un monde peut être trop irréel pour être vrai.
4 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON