Uber vs Taxis, ce qu’on aimerait nous faire croire
Le 22 mai, le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision concernant les trois points de contestation de la loi Thévenoud soulevés par Uber. Il n’en fallait pas plus pour que les médias déclarent les taxis victorieux dans la bataille qui les oppose aujourd’hui aux VTC, et plus particulièrement à la société californienne. Une lecture des faits légère et un peu rapide car à regarder de plus près les conclusions rendues par les Sages, Uber reste plus que jamais dans la course.
Des médias à la botte des taxis ?
C’est une décision que beaucoup attendaient. Qu’allait bien pouvoir statuer le Conseil Constitutionnel dans le combat qui se joue depuis de nombreux mois entre les taxis hexagonaux et la société de transport avec chauffeur Uber ? La France du corporatisme ronronnant contre des Etats-Unis qui avancent à la vitesse du progrès ?
Une décision attendue dont le retour dans les médias fut des plus orientés, ne tenant clairement pas compte des décisions dans leur entièreté et traduisant davantage le parti pris d’un système médiatique français en faveur des taxis plutôt que la réalité claire et simple.
Non, par leurs décisions, les Gardiens de la Constitution n’ont pas « recadré » Uber, et non, les taxis ne sont pas en train d’enterrer les VTC comme il est possible de le lire ou de l’entendre ça et là dans les médias, tous supports confondus.
Si le gouvernement avait déjà par le passé fait quelques appels du pied aux taxis, en votant notamment la loi Thévenoud sous la pression de leur puissant lobby, ce sont désormais les médias qui donnent l’impression de céder aux klaxons des chauffeurs dont le souhait est de tout bonnement supprimer une concurrence trop dérangeante.
Cela donne donc des gros titres qui préfèrent épingler l’envahisseur américain et conforter les taxis dans leur position de « victimes » triomphantes, un arrangement avec la réalité qui veut nous faire croire à un remake de David et Goliath et nous livre au passage une libre interprétation de l’arbitrage rendu par le Conseil Constitutionnel.
La liberté d’entreprendre consacrée, la loi Thévenoud censurée
Depuis l’apparition des VTC sur le marché du transport individuel, les taxis français mènent une lutte sans relâche pour les faire disparaître, et pour cause. En très peu de temps, ces nouveaux services ont réussi à séduire les usagers en masse. Présent dans six villes françaises, Uber revendique déjà 1 million d’utilisateurs dans l’hexagone, un véritable succès.
Il n’en fallait pas plus pour que les taxis crient à la concurrence « déloyale », dépassés par ces nouveaux entrants sur un secteur jusqu’ici verrouillé par la profession. Censée protéger les taxis, la loi Thévenoud peu à peu se craquèle face aux revendications d’Uber et aux principes de liberté d’entreprendre.
Sur les trois questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) formulées par Uber auprès du Conseil Constitutionnel, l’article du code des transports qui garantit aux seuls taxis la tarification horokilométrique a été invalidé. « Le Conseil constitutionnel a jugé que cette interdiction de recourir à certaines méthodes de fixation des prix des VTC porte à la liberté d'entreprendre une atteinte qui n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général en lien direct avec l'objectif poursuivi par la loi » a expliqué l’institution par voie de communiqué.
Une victoire pour Uber qui sera désormais libre d’offrir un service tarifé sur la base du temps et de la distance, à l’image du process en place chez les taxis, et ne seront plus dans l’obligation d’informer le client du prix de la course au moment de la réservation, comme ordonné jusqu’ici par la loi.
La décision du Conseil concernant « le retour à la base », autre point de contestation soulevé par Uber, tend à mettre encore une fois le VTC et les taxis sur un même pied d’égalité. Bien qu’il soit prévu que les VTC doivent continuer de revenir à leur garage entre deux courses, le Conseil Constitutionnel émet une réserve qui impose que la disposition s'applique également « aux taxis lorsqu'ils se situent hors de leur zone de stationnement et qu'ils sont ainsi dans une situation identique à celle des VTC ».
Enfin, même si l’interdiction de la géolocalisation est bien considérée comme constitutionnelle, on doit encore attendre son interprétation devant la Cour d’appel. Les VTC sont par ailleurs autorisés à informer de la localisation de leur véhicule s’ils ne communiquent pas simultanément leur disponibilité. Un autre signal positif qui n’apporte certainement pas pleine satisfaction à Uber mais permet à la société d’entrevoir de l’espoir pour les mois qui viennent.
Certains journaux ont beau avoir prématurément trouvé un vainqueur dans l’affaire des taxis contre les VTC, les éléments du dossier qui occupaient le mois dernier le Conseil Constitutionnel ont tendance à faire mentir cet enthousiasme chauvino-médiatique en faveur de nos taxis. Uber garde pied et les récentes décisions concernant la société lui permettent de continuer son activité sans nuire à son développement. Et pour les taxis qui célèbreraient la fin d’UberPop un peu tôt, l’arbitrage concernant la poursuite de l’activité de ce service vient d’être ramené devant la Cour d’appel de Paris et la Commission européenne. So wait and see !
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