Un accueil de chef d’Etat pour Mahmoud ABBAS
« C'est pas Yasser Arafat ? » dit l'un. « Sans Arafat, il ne serait pas là » dit l'autre, dans cette grappe agglutinée de journalistes et photographes ou cameramen, il y a une grande diversité de vues. Mise soignée dans un costume sombre de diplomate, le pas cérémonieux et lourd, lèvres serrées, le regard sombre, énigmatique, la main sûre pour signer le livre d'or du Conseil de l'Europe, Mahmoud Abbas s'applique et écrit lentement, concentré.
Mahmoud Abbas au Conseil de l'Europe, à Strasbourg, le 6 octobre 2011
« C'est de l'hébreu », dit l'un, au premier rang. (authentique)
« Mais non, c'est de l'arabe », dit l'autre. Et le chef de l'Autorité Palestinienne(AP) repart du même pas lourd, solennel, impassible, sérieux, grave, vers l'hémicycle pour prononcer son discours.
Dans l'hémicycle les parlementaires avaient tout dit, décrit, expliqué et analysé sur la base du rapport particulièrement complet et soigné du talentueux Tiny Kox, député néerlandais.
Ils avaient joué le premier acte en accordant à la Palestine ( la nation) le statut de « partenaire pour la démocratie ».
Le président de l'Autorité Palestinienne entre ensuite en scène pour un deuxième acte. Un réquisitoire après le rappel des épisodes chauds et froids :
De son côté le Conseil de l'Europe semble persuadé de l'utilité morale, symbolique, philosophique de son travail. M.Abbas en profite pour inviter les parlementaires des pays européens du Conseil de Sécurité de l'ONU à convaincre leurs gouvernements respectifs de voter pour l'adhésion. Quand ? « Maintenant, tout de suite, c'est le moment le plus favorable ».
Quelques paradoxes troublants.
« En fait, nous travaillons à la réconciliation nationale et nous nous félicitons de l'accord de réconciliation nationale signée le 4 mai au Caire. C'est un pas engagé dans la bonne direction, nous éloignant ainsi de ce qui a pu déchirer l'unité nationale. La pierre angulaire de cet accord est la création d'un gouvernement transitoire composé de personnalités nationales indépendantes qui représentent toutes les facettes de la vie parlementaire et locale ; cet accord devrait intervenir au plus tard en mai 2012.
L'accord de réconciliation est une réalisation positive qui permettra de relancer le processus de paix - et non le contraire - et il sera mis en œuvre pour conforter la démocratie. »
Chef d'Etat sans Etat, Mahmoud Abbas a réussi à obtenir l'adhésion de la Palestine à l'UNESCO. Hillary Clinton trouve le vote de cette organisation de l'ONU « confus et inexplicable », ce qui reste dans le droit fil de la position de son pays que le chef palestinien considère toujours comme ami en dépit du veto assuré. Il faut dire qu'une dotation de 200 millions de dollars est gelée par le Congrès !
Les Palestiniens ont manifesté pacifiquement dans la rue pour soutenir la demande d'adhésion. Est-ce là le printemps palestinien ? C'est contre quel tyran ? « Le tyran contre lequel lutte le peuple palestinien c'est l'occupation » répond l'interviewé.
Autre signe d'encouragement peut-être : Catherine Ashton, Haute-Représentante à la politique extérieure de l'Union Européenne, a fait un aller-retour express Bruxelles-Strasbourg pour le rencontrer. Tout va très vite.
Pour cela, chapeau ou keffieh bas, Monsieur Abbas !
(article également paru sur Médiapart)
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