Un bol d’air en Cévennes, loin des clichés et des radars
Rien que de commencer par ce verbe relève de l’utopie, je le sais, ce verbe n’a plus cours ou si peu…
Mais quand même, imaginez un lieu où les gens se sourient sans se connaître. Je sais aussi que c’est difficile, mais qui s’engage à lire peut faire ce petit effort.
Un lieu où des conteurs content, simplement contre le gîte et le couvert, avec pour seul objectif, celui de narrer des histoires sans queue ni tête, sans tête ni queue. Ces conteurs entament une ronde au cœur d’un Pays reculé des routes fréquentées donc fréquentables, et prennent des chemins tracés par des bisons, qu’ils soient futés ou non. Hors, futés, ils l’étaient car à la saison chaude, ces animaux anciens (pas les conteurs) montaient en estive sur les plateaux élevés en passant par les crêtes, plus tard appelées drailles par les bergers qui eux aussi, allaient prendre le frais avec leurs troupeaux, et aujourd’hui utilisées par la marche des conteurs ((1), pour une semaine en Pays Cévenol.
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Pour accueillir cette ronde, le village s’était mobilisé, avait organisé un marché de producteurs, fait venir des auteurs, des musiciens… A cela rien d’extraordinaire, tous les villages le font, mais pour penser comme cela, il ne faut jamais être monté, car le décalage, ici n’est pas horaire, il est dimensionnel.
Un début à cette histoire
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Assis sur un banc de bois, à côté du muret qui cernait la place, je ne m’attendais pas à faire des rencontres, si belles, passionnées, curieuses.
Saluée par des gens qui semblaient des amis, une jeune femme s’est écriée :
- Non, ce n’est pas vous que je suis venue voir, c’est ce monsieur. Monsieur Lin, je suppose… ?
- Oui…
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Je l’ai arrêtée dans ses excuses car, sans le savoir, elle me faisait un cadeau sans nom. Les angles écornés, la tranche défaite un peu, une tache sur le côté, son exemplaire regorgeait de vie, de sensations. L’alchimie des impressions de lecture avait donné une nouvelle identité à ce livre. Les livres neufs alignés sur la table me parurent bien fades, trop propres, comme des habits qu’on aurait pas encore porté.
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Partager, partager, comme si ce village ne savait faire que ça ! Un repas, avec les conteurs fraîchement débarqués qui furent invités à gouter des plats de légumes fraîchement cueillis dans des jardins à quelques pas de là, du vin, âpre il est vrai, trinqué entre amis de peu ou de toujours.
Pays de savoir-vivre, certains, ceux qui n’avaient pas en charge l’organisation, allèrent faire une sieste, attention, pas sous un tilleuil, au risque de prendre froid !
Des mots, par milliers
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Au loin, la tour — à l’histoire qui l’a ruinée et que certains conteront peut-être un jour —, continuait de laisser le temps passer. Derrière, les collines de chênes verts, de pins et de châtaigniers, ne bougaient plus depuis des siècles. Seules les cîmes des arbres se balançaient dans le vent, aujourd’hui du sud et porteur de pluie espérée pour la terre et les jardins, ou sous le vent du nord, compagnon du ciel limpide et du beau temps.
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Revint encore la joute des conteurs. C’était à celui qui conterait avant l’autre, pour rire, pour se défier par les mots, par l’ingéniosité du sens caché, de l’image.
Après une nuit courte et un petit déjeuner pris en commun, ils durent repartir pour Saint Roman de Codière, un autre village accroché à la colline, posé sur des murettes, où ils se rendirent à pieds. A nouveau, un accueil les attendait, chaleureux, attentif et attentionné, pour la deuxième étape de cette ronde de ces trente conteurs qui va, de village en village pendant sept jours, faire danser les esprits. Ils s’embrasseront en se rencontrant comme nous nous sommes embrassés en nous quittant.
Retour aux sources
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Après une heure de marche, j’ai pu caresser des yeux ses toitures, de la main ses portes de châtaignier. J’ai pu noyer mon regard dans l’immensité de la vallée et la pureté du ciel. J’ai pu fouler ses murettes, ses aires de battage oubliées, ses anciens jardins, envahis d’herbes folles de joie de s’ébattre sans être obligées de s’aligner, de produire ou de séduire.
Imaginez, …
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D’ailleurs, suis-je même monté à Soudorgues ? Allez savoir…
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