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Accueil du site > Tribune Libre > Un résistant qui a dit non : Franz Jägerstatter

Un résistant qui a dit non : Franz Jägerstatter

Est légal ce qui est conforme à la loi positive ou civile : le légal est le fruit de décisions humaines qui peuvent changer au cours de l’histoire.

Est moral ce qui est conforme à la loi morale commune à tous les hommes : le moral est l’expression de la nature intime de l’homme, et qui par conséquent ne change pas selon le temps et le lieu.

Ce qui est moral n’est pas nécessairement légal tout comme ce qui est légal n’est pas nécessairement moral. Ceci pose la question de l’obéissance aux lois civiles que nous jugeons contraires à la dignité humaine.

Un exemple de l’antagonisme possible : Franz Jägerstätter (1907-1943)

Modeste paysan autrichien, après une vie quelque peu errante, il épouse Franziska (1936), évènement qui marque une évolution dans sa vie. Le couple entame alors une croissance spirituelle. Franz devient sacristain de sa paroisse et s’astreint à l’étude afin d’approfondir sa foi et aussi pour comprendre les graves évènements auxquels ils allaient être confrontés. En 1933, son évêque Mgr Gföllner mettait en garde les fidèles contre l’idéologie nazie. En 1937, Pie XI rédige Mit brennender Sorge en soulignant qu’on ne pouvait à la fois se prétendre chrétien et épouser cette idéologie. En 1938, la confusion règne dans les esprits et la hiérarchie catholique autrichienne appelle finalement à voter oui au référendum de ratification de l’Anschluss (réalisé par la force quelques mois auparavant). Franz Jägerstatter fut le seul de son village à voter contre.

En 1940, il est appelé sous les drapeaux et participe à une rapide formation militaire. C’est à cette période qu’il entre dans le Tiers-Ordre de Saint François. Il décide alors, en accord avec sa femme, de ne pas rejoindre l’armée allemande s’il était rappelé non sans demander conseil à son curé. Le remplaçant de ce dernier qualifia ce projet de suicide. Voulant avoir l’opinion de son Evêque, il reçut comme conseil le devoir de sa charge de famille et de ne pas s’interroger sur les ordres des autorités légales. Rappelé en février 1943, il refuse d’incorporer une unité combattante (mais acceptait une unité médicale). Le 6 juillet 1943, il est condamné à mort pour atteinte au moral des troupes et incitation à la désertion et guillotiné le 9 août.

Durant sa détention, il écrit des notes qui expriment ses réflexions et ses scrupules. « Y a-t-il quelques chose de pire que d’être requis s’assassiner et de piller des gens qui défendent leur patrie, simplement pour aider un pouvoir antireligieux à obtenir la victoire et à établir un empire mondial… sans foi en Dieu ? ». Comme Thomas More, il ne juge personne. « Il appartient à Dieu seul de juger les hommes et de les condamner. Quant à nous autres, nous sommes frères et sœurs devant Dieu ».

La vie Franz Jägerstatter a été racontée par Mgr Thomas Roberts, archevêque de Bombay, lors d’une session du Concile Vatican II. Son exemple a nourri les réflexions autour du thème du rôle de la conscience dans un système injuste lors des débats préparatoires à la rédaction de la Constitution Gaudium et Spes. Franz Jägerstatter a été béatifié le 26 octobre 2007 par le cardinal Schönborn en présence de son épouse Franziska. Sa vie illustre le conflit possible entre le légal et le moral et comment la conscience morale, à la suite d’une réflexion et de prises de conseils, est amenée à refuser d’obéir à une loi civile inique.


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11 réactions à cet article    


  • Jean J. MOUROT Jean J. MOUROT 15 décembre 2014 10:29

    Ils sont rares, aujourd’hui, les catholiques de cette trempe !
    Y aurait-il aussi des musulmans à se conduire semblablement dans les républiques islamiques, acceptant de se faire égorger plutôt que d’égorger au nom du « jihad » ?


    • Jean J. MOUROT Jean J. MOUROT 19 décembre 2014 15:01

      J’ai posé la question pour les république islamiques...

      Peut-être que les sunnites récemment massacrés par Daesh étaient de la même trempe que cet autrichien...

      Quant aux 80 000 musulmans morts pour la France, ils ne prouvent rien dans le cas qui nous occupe. D’autant que certains musulmans « morts pour la France » ont été exécutés ou tués au combat par leurs coreligionnaires en Algérie, par exemple !
      Cela dit, je ne suis pas plus islamophobe que christianophobe ou judéophobe. Je suis un athée laïque, c’est tout.


    • cathy30 cathy30 15 décembre 2014 11:31

      Oui le Christ est clair sur cette question, celui qui prendra l’épée mourra par l’épée.


      • pierre 15 décembre 2014 11:50

        ah vous en avez trouvé un de gentil ! c’est bien, lisez le « franciscain de Bourges » vous en aurez un autre, et « l’espion de dieu » et encore un voilà.


        • Le p’tit Charles 15 décembre 2014 12:37
          • De 1933 à 1939, 225 000 personnes sont condamnées pour motifs politiques à des peines de prison plus ou moins longues et 1 000 000 d’Allemands et d’Allemandes sont envoyés dans les camps de concentration pour les mêmes raisons.
          • Pour la seule année 1933, le journaliste Curt Bley compte 100 000 personnes ayant exercé une activité antinazie réelle.
          • Au cours de l’année 1941, 11 405 opposants de gauche sont arrêtés par la Gestapo4.
          • En 1944, environ 500 000 personnes sont arrêtées, dont une forte proportion d’étrangers.
          • De 1933 à 1945, 32 500 personnes sont condamnées à mort et exécutées, la plupart du temps pour motifs politiques.[réf. nécessaire]
          • Pour la seule période allant du 30 janvier 1933 au printemps 1936, 1 359 personnes sont assassinées par des agents du régime nazi.
          • Vers 1935-1936, la Gestapo estime qu’il existe 5 708 centres clandestins diffusant des tracts, affiches et brochures...Oui des Allemands ont résisté aux nazis..bien plus qu’en France sous Pétain...c’est étrange.. ?

          • Hermes Hermes 15 décembre 2014 14:57

            Merci pour ces infos.

            Cela nous rappelle combien les étiquettes sont réductrices de la réalité. Il y a toujours la même proportion d’hommes justes et de fous partout, mais c’est la position des ventres mous, les hésitants et indécis sans conviction particulières qui fait la grande différence de tendance. Ceux-ci vont osciller dans des cycles historiques dans un sens ou dans l’autre. Si on veut influer sur l’histoire, ce sont eux qui doivent nous préoccuper. Si on veut une influence durable, il faut comprendre ce qui les empêche d’être des justes, sinon ils resteront soumis à une oscillation.

            Pour comprendre celà il faut d’abord le comprendre chez soi : nous sommes tous concernés.

            Cdt.


          • Ouallonsnous ? 16 décembre 2014 10:33

            J’ajouterais à cet article qui à le mérite d’éclairer d’un autre jour la problématique des persécutions nazies qui furent bien autre chose que ce que veux faire croire la propagande de la « Shoah » ;

            "La discrimination entre la légitimité et les lois est directement dépendante du ressenti par les « législateurs » de leur respect de l’homme, de ses valeurs propres à l’état de nature et du contrat social ( le légal) auquel il souscrit pour les combiner harmonieusement avec les contraintes imposées par la vie collective,« 

            J’ajouterais également que c’est là l’origine de la crise de notre société soi disant démocratique mais en réalité , »furieusement totalitaire", ayant rélégué l’humain hors de ses caractéristiques de nature !


          • Ouallonsnous ? 18 décembre 2014 18:27

            Oh Massada, tu trainais par là avec deux hasbaristes de tes relations ?


          • Diogène diogène 15 décembre 2014 16:35

            La morale (du latin moralitas, « façon, caractère, comportement approprié ») désigne l’ensemble des règles ou préceptes relatifs à la conformation de l’action humaine aux mœurs et aux usages d’une société donnée.


            Elle change autant que le légal selon le temps et le lieu

            •  C BARRATIER C BARRATIER 15 décembre 2014 20:11

              Il a eu un comportement de RESISTANT, d’HOMME. Des résistants unis dans l’Humain, désobéissant à leur parti, à leurs chefs religieux. « Celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas » qui des deux est meilleur ? Les deux, deux justes.

              La résistance est en train de renaître

              Résistants d’hier et d’aujourd’hui pour sauver la République

               

              http://chessy2008.free.fr/news/news.php?id=194


              • Ruut Ruut 16 décembre 2014 08:09

                Dans les 2 camps trop d’humains sont mort assassinés par leur propre patrie pour de mauvaises raisons.
                Le pire est qu’aucun responsables des décisions ces assassinats ne fut condamné par la justice.

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