Un vote socialiste historique

Ségolène Royal a raison de déclarer que ce vote n’est pas anodin. Il est bien évident que, face à l’élection de Barack Obama à la présidence des États-Unis, le vote des militants du PS manque terriblement de "glamour" aux yeux de nos médias.

On peut à ce propos souligner l’inconséquence de ceux qui ont choisi une date pareille pour le vote des socialistes. Cependant si nos médias, tout occupés à ne pas se souvenir que Sarkozy "l’Obamaniaque" était il y a peu un inconditionnel de George W. Bush, ne le soulignent pas du tout, il n’en reste pas moins que le vote de ce soir aura une grande importance dans la vie politique de notre pays.

Ce vote va déterminer en grande partie la nature de l’opposition à M. Sarkozy et à sa politique, ce vote va donner une nouvelle forme au principal parti de cette opposition, il va influer de manière fondamentale sur la construction d’une alternance.

Ce congrès socialiste dont on aime se moquer un peu partout dans un mouvement un peu navrant d’auto-flagellation ("oh la la que le PS est moins formidable que le Parti démocrate !! oh la la que c’est moins bien en France, il n’y a pas de formidable clip avec les stars de Hollywood, comme c’est ringard") sera le premier pas d’un renouveau de l’opposition.

Le parti qui fournira probablement le candidat qui aura le plus de chance d’incarner l’alternative à Nicolas Sarkozy se trouve aujourd’hui à un moment fondamental de son histoire. On aura beau le trouver ridicule et s’en moquer encore et encore, il n’empêche que le PS est le premier parti d’opposition en France et donc, ce soir et dans les prochaines semaines, c’est un peu du destin de la France qui va se jouer. Alors oui, c’est moins exaltant que les primaires démocrates, mais pour le quotidien de nos concitoyens ça n’en est pas moins fondamentalement important.

Le PS va devoir choisir entre un socialisme d’accompagnement et un socialisme du renouveau. Il va devoir choisir entre cette social-démocratie qui a conduit à leur perte toutes les gauches européennes, et l’invention d’un nouveau et ambitieux modèle social.

Lionel Jospin (représentant de cette social-démocratie qui "ne voulait pas que son programme soit socialiste" pendant l’élection de 2002, à tel point que les électeurs ont choisi des candidats qui savaient ce qu’étaient leurs programmes) revendiquait un "droit d’inventaire".

Comme le propose Ernst Hillebrand, suivons-le : "C’est précisément d’un tel droit d’inventaire que la gauche européenne doit maintenant faire usage à propos des projets de réformisme technocratique de la décennie passée. Un débat critique s’impose pour savoir ce qu’il faut en garder, ce qui ne correspond plus au contexte d’aujourd’hui, ce qui est dépassé et ce qui doit être remplacé par de nouvelles idées politiques. La bonne vieille vertu social-démocrate du révisionnisme réformiste doit être appliquée elle aussi face aux projets de la troisième voie".

Cela ne signifie en aucun cas un retour à un modèle totalement étatiste qui n’a plus vraiment de sens aujourd’hui. Cela signifie, d’un point de vue pragmatique, la nécessité de redevenir un parti de masse, populaire, ancré dans le réel et, du point de vue du fond et de l’élan, d’être un parti innovant dans ses propositions. Des propositions réformistes à la fois pragmatiques et radicales toujours portées par une volonté de mettre l’humain au cœur de la société, de le respecter, de ne pas l’abandonner, de le soutenir sans l’écraser, de le laisser libre sans l’enfermer dans une société de surveillance et de peur.

C’est pour cela que, ce soir, je voterai en faveur de la motion E.