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Accueil du site > Tribune Libre > Une nouvelle façon d’aborder des questions qui nous concernent (...)

Une nouvelle façon d’aborder des questions qui nous concernent tous

Martine est militante active du mouvement ATD Quart Monde depuis des années. Elle est aussi mère de famille vivant dans un de ces quartiers défavorisés où les jeunes se sont révoltés, et voici ce qu’elle nous disait en décembre dernier :

« Mon milieu, mes sources, mes origines, c’est le monde de la misère, je ne le renie pas, je ne le renierai jamais car c’est lui qui m’a bâtie, m’a construite et c’est aujourd’hui encore mon milieu qui me porte et me donne les forces nécessaires pour continuer à avancer dans cette lutte contre la misère. Nous attendons d’être reconnus comme des êtres humains à part entière, capables de résistance et pas seulement comme des êtres passifs et sans volonté. Venez voir, vous qui parlez des valeurs, dans quelles conditions, avec quels moyens et dans quelle insécurité nous essayons, malgré tout, de vivre ces valeurs, de tenir nos enfants, de croire encore dans quelque chose ! Et si nous ne les vivions pas, ce ne serait pas quelques voitures qui brûleraient, ce seraient les villes qui seraient à feu et à sang. Pourquoi on ne nous invite pas à la table pour que nous puissions nous exprimer, parler avec les autres, réfléchir ensemble pour trouver enfin, non pas des nouvelles mesures sans vision du long terme, mais une nouvelle façon d’aborder ensemble des questions qui nous concernent tous, nos enfants et jeunes comme les autres ? »

Le cri de révolte de Martine est le nôtre aujourd’hui alors que, de partout, des voix s’élèvent pour demander que l’on sorte de l’impasse concernant le CPE. Une fois de plus, on n’a pas cherché à apprendre du combat de Martine et des siens. Une fois de plus, on ne s’est pas donné les moyens d’apprendre d’eux « une nouvelle façon d’aborder ensemble des questions qui nous concernent tous ». Au-delà d’un accord ou d’un refus sur un type de contrat que les uns qualifient de remède miracle et les autres de calamité, c’est bien de cela qu’il s’agit.

Les jeunes, tous les jeunes, veulent compter pour l’avenir de ce pays. Tous veulent accéder à un emploi qui ouvre à la reconnaissance et aux sécurités dont chacun a besoin pour se construire et construire son avenir. Certains redoutent de tomber dans la précarité et dénoncent un contrat qui la renforcera. D’autres vivent cette précarité depuis des années, voire des générations. Tous ont besoin, en particulier dans une économie qui oblige et obligera à s’adapter en permanence, d’être accompagnés dans un parcours qualifiant, rémunéré et sécurisé vers l’emploi. Ce parcours doit exister avec chacun, qu’il soit étudiant, chômeur ou travailleur. C’est le sens des propositions que, pour notre part, nous avions formulées en 2002 dans le cadre du rapport sur « l’autonomie des jeunes » remis au gouvernement par monsieur Jean-Baptiste de Foucault :

« Aujourd’hui encore, des milliers de jeunes n’ayant bien souvent connu que la précarité depuis leur enfance, sans éducation ni formation de base, se retrouvent dans l’impossibilité d’exercer le moindre choix par rapport à leur avenir. La précarité financière entraîne bien évidemment cette impossibilité de choix. Mais le manque de dispositifs de formation en alternance et d’insertion professionnelle, ambitieux et de qualité, ouvrant à un emploi et adapté à ces jeunes, est encore plus déterminant.

Au moment où le chômage est encore massif, et où l’on entre de plus en plus dans une économie de la connaissance, les jeunes les plus défavorisés affirment leur volonté de ne pas seulement recevoir, mais de pouvoir contribuer à notre société, et de trouver ainsi place et reconnaissance au milieu de tous.

Le mouvement ATD Quart Monde plaide donc pour un véritable droit individuel à la formation et à l’expérience professionnelle, ainsi qu’au soutien humain et financier nécessaire pour que ce droit soit accessible à tous les jeunes, y compris à ceux qui sont les plus éloignés de la capacité à formuler un projet ou qui ont à faire face à d’autres difficultés d’insertion (santé, logement, etc.). Ce droit individuel à une activité contractualisée (emploi, formation, parcours d’insertion) ouvrirait droit à une rémunération. »

Qu’a-t-on fait de ces propositions ?

S’il est un sujet autour duquel nos concitoyens sont prêts à s’unir, n’est-ce pas celui de l’avenir des jeunes, de tous les jeunes ? Nous ne gagnerons pas la bataille de l’exclusion (celles des enfants, des jeunes ou des adultes) tant que nous ne nous donnerons pas les moyens d’apprendre de ceux qui tentent de lui résister quotidiennement, et tant que nous ne réussirons pas à nous unir pour en faire la priorité.

Cette unité, c’est une éthique de l’action, et en premier lieu pour tous ceux qui militent. Faut-il rappeler que les associations ont montré ce chemin d’unité en se rassemblant dans le collectif Alerte il y a plus de dix ans maintenant ? Faut-il également rappeler combien les Conseils économiques et sociaux sont de ces lieux où se construit patiemment l’unité entre partenaires sociaux ? Ils ont amplement fait la preuve de la qualité de leurs propositions pour lutter contre l’exclusion. Le gouvernement les a-t-il sollicités ?

Cette unité, c’est aussi une éthique de gouvernement ; celui-ci doit savoir s’appuyer à la fois sur les représentants de la société civile (« la démocratie participative ») et sur les représentants élus (« la démocratie représentative »). Qu’en est-il aujourd’hui dans la politique pour l’accès de tous les jeunes à l’emploi ?

Pierre Saglio, Président d’ATD Quart Monde


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9 réactions à cet article    


  • Raz le Bol (---.---.178.150) 4 avril 2006 13:16

    Tout d’abord, je voudrais présenter tous mes respects au Président d’ATD Quart Monde, ainsi qu’à toutes celles et tous ceux qui se dévouent à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion, et toutes actions sociales pour le bien être de notre pays et du monde.

    Je me permets toutefois de dire qu’il ne faut pas mélanger les choses pour être simple et pour me faire comprendre :

    Il y a effectivement des jeunes, des moins jeunes, ou tout simplement des personnes qui sont réellement pauvres, exclues, qui ne demandent qu’à avoir ce droit et ce privilège de recevoir une formation, un emploi, un logement, sinon un peu de nourriture chaque jour.

    Il y a aussi celles ou ceux que j’appelle des enfants gâtés qui crachent dans leur soupe la bouche pleine, tout en réclamant, ni le droit ni le privilège de travailler, mais toujours plus, car ils font déjà parti des privilégiés, et je ne disserterai pas sur cela d’avantage.

    Parlez vous du droit de travailler, d’être formé, d’avoir un logement décent, alors commençons par simplifier notre vision du monde et posons les questions suivantes :

    Pourquoi y-a-t-il des centaines de milliers d’emplois non pourvus dans notre pays alors qu’on gesticule dans la rue contre ce malheureux CPE ? Il a fait quoi ce CPE ? Qu’on manisfeste contre le chômage, je le conçois, mais contre une tentative pour favoriser l’insertion dans le monde du travail, aussi mauvaise qu’elle soit ??? Cherchez l’erreur.

    Pourquoi a-t-on tant d’étudiants, de lycéens, des génies de tout genre, alors qu’on manque de plombiers, de menuisiers, de constructeurs de travaux, de la main d’oeuvre dans le bâtiment, d’infirmières si dévouées, de docteurs, de chirurgiens.... La liste est longue n’est ce pas ? On avait promis de faire 80% ET PLUS, de bacheliers après le Lycée et alors ! Jamais le niveau de connaissance de notre langue française, parléee et écrite, n’a été aussi catastrophique ! Et mon Dieu, Claude ALLEGRE disait que le Mamouth était énorme et il a pris du poids depuis certainement, n’est ce pas ?

    Pourquoi tant de sans abris, de logements insalubres, de problèmes de logement, alors qu’il y a des casernes, usines, terrains désaffectés non exploités... On a construit une bibliothèque nationale, une arche, fait la moisson sur les champs élysées, un porte avion nucléaire, mais on n’a pas de maisons de retraites, de centres spécialisés pour handicapés, pour les personnes atteintes d’Alzeimer, et encore moins pour des mères de famille, des employés mmunicipaux qui ne peuvent pas avoir un logement !

    Jamais les supermarchés, les magasins de toutes sortes, ont été aussi bien achalandés, les restaurants du coeur se remplissent, les légumes et fruits sont jetés dans les voies publiques et écrasés aux tracteurs, les ecologistes arrachent les « OGM », Vous avez vu comme moi tous ces spectacles navrants et débiles à la Télé.

    Dois je aller plus loin ?

    Une pensée taoiste disait :

    C’est par le bien faire que se crée le bien être !

    Alors, il est temps que nous arrêtions de palabrer, de réunions en réunions, de négociations en négociations, d’un parti politique à un autre,....de gesticuler, casser, bloquer tout un pays au nom de la liberté et l’avenir !

    Regardons un peu plus loin que le bout de notre nez. Connaissez vous les principes fondamentaux de la Qualité ?

    ECRIRE CE QUE VOUS ALLEZ FAIRE FAITES CE QUE VOUS AVEZ ECRIT ET PROUVEZ QUE VOUS LE FAITES !

    Et on verra après !


    • Jojo (---.---.158.64) 4 avril 2006 13:38

      « Pourquoi a-t-on tant d’étudiants, de lycéens, des génies de tout genre, alors qu’on manque de plombiers, de menuisiers, de constructeurs de travaux, de la main d’oeuvre dans le bâtiment, d’infirmières si dévouées, de docteurs, de chirurgiens... »

      Ben, je préfère un chirurgien qui a été lycéen et étudiant plutôt qu’apprentis boucher...


    • ifelhim (---.---.126.76) 4 avril 2006 14:14

      Un apprentis boucher peut très bien devenir un « maitre boucher » et mieux gagner sa vie qu’un chirurgien. De même ne pas faire des études longues n’est pas synonyme de manquer de culture... Je connais un cas de plombier qui a suffisament bien reussi pour pouvoir avoir une maison de campagne sur la cote d’azur, un bateau (remplacé tous les trois ans) et rouler en « Behème » (neuve, changée tous les ans) ainsi qu’un cas de maçon devenu millionnaire... La vraie réussite est celle obtenue par l’effort (et ceux là ne l’on pas compté)... il y a un gros problème en France vis à vis des métiers dit manuels, qui sont injustement dévalorisés, ainsi que vis-à-vis de la notion d’effort, assimilée à tort à la compétition.


    • Raz le Bol (---.---.178.150) 4 avril 2006 14:18

      Bonjour Jojo,

      Expliquez nous pourquoi vous préféreriez être un chirurgien plutôt qu’un apprenti boucher.

      Quelle est la différence entre un chirurgien et un apprenti boucher ?

      Pour moi, il n’y a aucune différence, à part le cursus et le parcours professionnel. Par contre, ils ont beaucoup de points communs :

      Ce sont tous des gens courageux qui ont retroussé leurs manches pour y arriver,un en passant des heures devant ses livres, puis ses pratiques, l’autre en apprentissage pour grimper lentement dans sa qualification, pour avoir plus tard peut être sa boucherie, ou son rayon. Ils passent tous les deux des heures au travail. Dans tous les cas, l’un a besoin de l’autre et vice versa. De même que le chirurgien aura besoin de l’apprenti mécanicien, de l’infirmière...

      Est ce stupide comme réponse ? Amicalement.

      PS : Je suis universtaire diplômé de 2 maitrises, économie et informatique, et je travaille encore à 56 ans. Mes enfants ont tous un métier manuel et ils travaillent depuis l’âge de 19 ans après avoir galéré 2 ans en faculté après leur Bac.


      • Kouig (---.---.182.253) 4 avril 2006 15:08

        Mr « Raz le Bol » Question de syntaxe : Jojo ne dis pas qu’il préfère être chirurgien plutôt qu’apprenti boucher !

        Ce qu’il dit, c’est qu’il préfère qu’un chirurgien ait passé quelques années sur les bancs du lycée et de la fac (en passant par l’hopital j’espère smiley afin justement de ne pas être considéré comme un morceau de viande par ce chirurgien !

        Cela ne me semble en rien dénigrer la profession de boucher, mais seulement montrer que pour accèder à certaines professions, il faut bien des années d’études ! Si vos enfants n’ont pas perséverés, c’est qu’ils avaient sans doute envie de faire autre chose et s’ils en sont maintenant heureux, c’est tant mieux pour eux.

        Cependant ce n’est pas le cas de nombreuses personnes, qui elles n’ont pas ce choix.

        Alors à mon tour, Mr le Président d’ATD Quart Monde, je vous rends hommage et j’espère que votre appel sera entendu.


      • Jojo (---.---.158.64) 4 avril 2006 15:57

        C’est exactement ça. Il y a une certaine tendance, surtout avec ce gouvernement, à dévaloriser les études. En gros, être apprenti c’est aussi bien que docteur. Il ne faut pas oublier que la formation scolaire ou universtitaire, si elle n’est pas indispensable pour exercer un métier, est bien utile quand même quand il s’agit de comprendre des choses un peu compliquées. Je pense qu’un bac + 2 en n’importe quoi pourra après une courte formation faire un excellent plombier, s’il est un peu adroit. Je fais moi même la plomberie de ma maison, sans formation autre que livresque. Le jour où on verra un plombier sans formation exercer rapidement un métier de technicien supérieur, c’est pas demain la veille.

        Pour en revenir au fond, le CPE vise le gros des jeunes chomeurs, sans formation, en espérant les intégrer au milieu du travail. Le problème, c’est qu’ils touche aussi ceux qui ont une formation et les rend plus vulnérables.

        J’allais oublier, Bravo à ATD Quart Monde pour son boulot.


      • Raz le Bol (---.---.178.150) 5 avril 2006 09:23

        A M. Kouig,

        Je n’ai pas compris sincèrement votre remarque suivante : « Ce qu’il dit, c’est qu’il préfère qu’un chirurgien ait passé quelques années sur les bancs du lycée et de la fac (en passant par l’hopital j’espère smiley afin justement de ne pas être considéré comme un morceau de viande par ce chirurgien ! »

        En ce qui concerne celle ci : « Cela ne me semble en rien dénigrer la profession de boucher, mais seulement montrer que pour accèder à certaines professions, il faut bien des années d’études ! Si vos enfants n’ont pas perséverés, c’est qu’ils avaient sans doute envie de faire autre chose et s’ils en sont maintenant heureux, c’est tant mieux pour eux. »

        Je suis d’accord avec vous tout en ajoutant que Persévérer ne veut pas dire s’entêter, car comme je disais, à part la différence entre le cursus universitaire et le cheminement de l’apprentissage professionnel, un des points communs est la persévérence.

        Il ne s’agissait pas pour mes enfants de dire qu’il fallait persévérer en continuant dans la même voie pendant des années puis à la sortie, il fallait qu’on leur trouve du travail, tout de suite et à durée indéterminé....parce qu’ils avaient décroché un diplôme universitaire.

        Ils avaient vu qu’ils allaient droit dans un mur, que cette voie n’était pas la bonne pour eux, et ils avaient la persévérence de recommencer à Zéro, aussi parce qu’ils avaient cet immense privilège d’avoir accès à des formations autres que l’université, à condition d’aller les chercher. Leur nouveau apprentissage leur a pris autant d’années que les études du Chirurgien !

        Quant à être heureux, c’est une autre occasion pour papoter ensemble, n’est ce pas ? Rires ! Pour vivre heureux, prenons le temps de papoter ensemble !

        Amicalement


      • (---.---.63.52) 4 avril 2006 15:20

        Bonjour, c’est Yves.

        Pour en revenir au contenu de l’article, et sortir du débat boucher-chirurgien, je dirai que je suis plutôt d’accord avec le commentaire de Raz-le-bol (le premier). Il n’est pas très agréable, ni très sain pour la pensée finalement, de constater que partout on accepte l’idée CPE=précarité. Ce serait plutôt le contraire en fait, la précarité vient du chomage plus que d’autre chose, et le CPE à mon sens y remédie. Mieux vaut être en période d’essai qu’à l’ANPE, pour faire clair.

        Malheureusement, le devant de la scène médiatique est occupé par les anti, comme toujours en France, et il y a un manque d’explication très net sur ce sujet. C’est la porte ouverte à toutes les mauvaises interprétations d’une part, et à tous les mensonges d’autre part.

        Il y a quelque temps, j’ai été obligé de faire des recherches sur le net pour répondre à des amis persuadés de deux choses : pas d’indemnité chômage si l’on est viré en CPE, pas de possibilité de louer ou de prendre un emprunt pendant le CPE. Ces deux erreurs, parmi tant d’autres, sont faciles à demonter, mais peu le savent et personne ne le dit. Ce qui pose un problème d’importance : autour de quoi tourne le débat aujourd’hui ? les fantasmes des imbéciles, ou la réalité ?

        Hélas, je crois que la deuxième proposition n’est pas la bonne....

        C’était Yves.a


        • decurion (---.---.182.7) 4 avril 2006 16:12

          Vous citez l’une de vos militantes. Ensuite,c’est vous qui prenez la parole.C’est bien, c’est pour une bonne cause. lorsque vous écrivez, « Une fois de plus, on ne s’est pas donné les moyens d’apprendre d’eux « une nouvelle façon d’aborder ensemble des questions qui nous concernent tous ». », il n’y a rien à rajouter, mais trés vite vous tombez dans un travers bien connu.Vous mélangez vos militants et les autres, et vous parlez en leurs noms. Là, commence la corruption de l’esprit, et le fait de plaider pour une bonne cause ne change rien à l’affaire. Vous avez parfaitement le droit d’avoir une opinion sur les solutions à mettre en oeuvre, compte tenu des situations que vous connaissez, mais « tous veulent », il faut laissez celà à ceux qui disent « les français veulent ». On peut trés bien etre en accord sur les buts visés, pas forcemment sur les étapes imposées.

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