• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Une publicité commerciale à visée politique ?

Une publicité commerciale à visée politique ?

 On ne saurait trouver publicité plus sobre et même plus triste. Nulle photo de pays exotique pas plus que d’hôtesses aguichantes dans ce placard publié par un nouveau journal gratuit « Direct matin ! (1) L’annonceur, « transavia.com », une compagnie aérienne du groupe Air-France-KLM, se contente en milieu de page d’un simple commentaire prêté à un client :« La France je l’aime mais à ce prix là, je la quitte ! » Juste au-dessus, un avion au décollage confirme le moyen de transport. Et au-dessous, trois médaillons bleus ciel cerclés de blanc affichent le prix de trois destinations en aller simple à partir de l’aéroport d’Orly.

Même si un leurre, usé à force d’avoir servi, soustrait la dernière unité pour amalgamer la dizaine supérieure à la dizaine inférieure, 59 euros le voyage à Porto au lieu de 60, c’est donné, comme 79 euros pour Marrakech.

Une citation qui saute aux yeux

En faut-il davantage pour capter l’attention et déclencher un réflexe d’attirance ? On ne parle pas des prix mais du commentaire ! On retrouve dans le domaine des mots un procédé semblable à celui de l’intericonicité qu’on connaît dans celui des images et qui est désormais bien assimilé par certains lecteurs. Sous ses airs d’innocente redondance pour insister sur la modicité des prix, la citation politique ne peut manquer de sauter aux yeux d’un citoyen français. L’extrême-droite lepéniste en a fait son slogan des années durant : «  La France, on l’aime ou on la quitte ». Pour attirer son électorat avec le succès que l’on sait, lors de la dernière élection présidentielle, le candidat de la Droite l’a même repris à son compte. C’est vrai qu’il a la force probante de l’évidence, grâce à l’ambiguïté volontaire du mot « France » ! Mais dès que l’on commence à oser soupçonner que la France peut offrir des visages contraires comme le montre l’Histoire, ce slogan simpliste se révèle être un leurre.

Un paradoxe d’humour noir

Sans doute « transavia.com » le détourne-t-il , comme d’autres détournent une affiche en mettant des moustaches à un personnage. Elle en inverse la logique pour en tirer un paradoxe : 
la contradiction apparente entre amour de la France et départ doit être résolue par le coût dérisoire du transport qui encourage à s’expatrier. Mais est-ce suffisant ? Elle ne l’est, en vérité, que par l’humour - même noir - dont on veut bien créditer « transavia.com » : le départ allégué n’a ici rien de définitif, comme il l’est dans le slogan nationaliste, il n’est que provisoire, le temps de quelques jours de vacances.

Une dédramatisation d’un slogan inacceptable

Mais ne touche-t-on pas à la limite de l’acceptable ? Ce n’est pas que la stimulation du réflexe patriotique et/ou nationaliste par une entreprise soit répréhensible. La préférence nationale est souvent encouragée en sous-main par l’assortiment des couleurs du drapeau national. Et pourquoi pas ? Seulement, on soupçonne ici une autre ambiguïté volontaire : car même détourné, l’ultimatum nationaliste lancé aux immigrés n’en continue pas moins de contaminer le slogan de « transavia.com ». La compagnie aérienne se prêterait-elle à une campagne insidieuse d’imprégnation nationaliste des esprits  ?

On objectera avec raison que le paradoxe humoristique en ruine le sérieux par le rire de la blague. Mais justement n’est-ce pas aussi une façon de dédramatiser par le rire un slogan inacceptable et de le banaliser ? Revient, en outre, à l’esprit le mot de Pierre Desproges qui ressuscite ces jours-ci sur Internet : "on peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui". N’est-ce pas le reproche que l’on peut faire à « transavia.com », de vouloir, par voie d’affiche, de rire de tout avec n’importe qui ?

Pour autant, quand bien même « transavia.com » jouerait double jeu, on ne lui en voudra pas. Car un malheureux lapsus lui a échappé qui retourne à son insu le slogan contre la cause nationaliste peut-être défendue. Le départ de France d’un esprit cocardier, sinon nationaliste, n’est-il pas lié au profit escompté ? «  À ce prix-là, je la quitte », est-il clamé ! Il est si vrai que tant de nationalistes ombrageux qui, en plus, ont le culot de temps à autre de revenir faire la leçon dans les médias à leurs compatriotes, ont le cœur en France et le porte-feuille à l’étranger pour des raisons fiscales. Faut-il donner des noms ? Paul Villach

 (1) Quotidien dont l’actionnaire principal est M. Vincent Bolloré.

 
 
 
 
 
 





 


Moyenne des avis sur cet article :  2.91/5   (44 votes)




Réagissez à l'article

12 réactions à cet article    


  • foufouille foufouille 20 septembre 2008 12:14

    le prix est hors taxe et supplement
    uniquement en promo a/r


    • Walter SALENS Walter SALENS 20 septembre 2008 12:22

      Tout cela pour ça !

      Je doute que 99.5% des passants/lecteurs qui voient cette pub, se plongent aussitôt dans une analyse aussi sophistiqué que la vôtre


      • Gilles Gilles 21 septembre 2008 09:28

        Non mais dés que j’ai lu le slogan le lien avec le slogan nationaliste, d’abord LePenique puis rabaché par Sarkozy m’a sauté aux yeux et rendu mal à l’aise

        Quand je vois que le quotidien appartient à Bolloré ... aie aie aie bien que ce soit Transavia qui fasse la pub et pas Direct matin

        Ce qui serait intéressant serait de savoir si cette même pub apparait aussi dans des medias non Sarkoziquement corrects, ou si l’annonceur est de mèche avec le journal, pour appâter le lecteur en le leurrant avec ce slogan et in fine banaliser le concept repris par le Grand Ami de Sarkouille



        • sisyphe sisyphe 20 septembre 2008 13:41

          plagiaires ? plagistes ? 


        • Paul Villach Paul Villach 21 septembre 2008 11:20

          @ Sisyphe
          Où est le plagiat ? Que je sache, même si vous signalez cette affiche, vous n’en faites pas une analyse comme celle que je propose. Paul Villach


        • grangeoisi grangeoisi 20 septembre 2008 14:30


          Juste au moment où ça commençait à être intéressant !


          Des noms ! Des noms !

          Pffft... rien !


          • polmeuris 20 septembre 2008 15:15

            Article à moins 75 % d’opinions favorables, ça fait quoi un Villach qui chute ? Rien même pas de bruit.

            On dirait qu’il chante et chute plus silencieux que Carla. C’est qu’il a un petit instrument pour trouver les arguments. MDR !


            • sisyphe sisyphe 20 septembre 2008 17:22

               Ca fait quoi, un polmeuris qui écrit ? 

              Un déferlement de haine, de bétise, de mépris, qui schlingue le petit frustré. 

              Gerbant.


            • Iroquois Iroquois 20 septembre 2008 16:41

              Ryan air avait fait des pubs plus provocantes, dans le seul but de provoquer des procès et de là devenir un sujet médiatique.
              Ici, le détournement d’un slogan qui était une provocation à la base, à plutôt tendance à banaliser cette affirmation, simplement parce que c’est la 1re personne du sujet qui est utilisée. On ne fait pas référence à une catégorie de personnes et à des jugements subjectifs. On revient à ce qui n’est pas choquant, hors du contexte ; si on n’est bien quelque part, pourquoi partir ? Évidemment pour les tenants du politiquement correct, ceci sera choquant, surtout qu’ils aurait vite fait le parallèle entre cette phrase, le contexte auquel il renvoie et puis les avions pouvant symboliser les expulsions des clandestins.


              • pissefroid pissefroid 20 septembre 2008 18:36

                Ce slogan sous entend que les français sont d’accord avec le slogan du candidat de l’ump à l’élection présidentielle. Je suis pas responsable d’être né en france. Je suis donc libre de ne pas aimer ce pays, ou plutôt de ne pas aimer le président que les français ont élu. Aimer ou ne pas aimer son pays n’a pas de sens, c’est notre environnement naturel. Par contre n’être pas fier de son président (du président de la france) a un sens.


                • chmoll chmoll 21 septembre 2008 10:00

                  un allez simple pour moi

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès