Valérie Trierweiler la diabolique ou la vengeance d’une femme
Je crois avoir été l'un des premiers et rares intellectuels français à avoir défendu Valérie Trierweiler, alors encore première dame de France, lorsqu'elle fut attaquée de toutes parts, y compris par le Président de la République et son Parti Socialiste, lorsqu'elle afficha publiquement, lors de son fameux tweet, son soutien à Olivier Falorni, dissident socialiste qui menaçait de battre Ségolène Royal lors des législatives.
Voici, à ce propos, le lien électronique vers cette tribune, intitulée « Pour Valérie Trierweiler, que le site du « Point » me publia le 13 juin 2012 : http://www.lepoint.fr/politique/pour-valerie-trierweiler-13-06-2012-1472740_20.php
LA DANDY DE LA REPUBLIQUE
Ce que j'y défendais, chez celle que j'avais appelé là, pour sa distinction naturelle comme pour son caractère rebelle, « la dandy de la République », c'était, avant tout, son indomptable esprit de liberté.
Cet esprit d'indépendance, je l'avais illustré à travers ce qu'en écrivit, tout en finesse et nuances, ce grand écrivain du XIXe siècle que fut Jules Barbey d’Aurevilly dans le superbe tableau qu’il brossa, en son essai sur le dandysme, de Lord Brummell : « Ce qui fait le Dandy, c’est l’indépendance. Autrement, il y aurait une législation du Dandysme, et il n’y en a pas. », y stipule Barbey.
Aussi pertinent qu'impertinent, il en infère : « Ainsi, une des conséquences du Dandysme, un de ses principaux caractères (…) est-il de produire toujours l’imprévu, ce à quoi l’esprit accoutumé au joug des règles ne peut pas s’attendre en bonne logique. (…). C’est une révolution individuelle contre l’ordre établi, quelquefois contre nature (…) Le Dandysme, (…) se joue de la règle et pourtant la respecte encore. Il en souffre et s’en venge tout en la subissant ; il s’en réclame quand il y échappe ; il la domine et en est dominé tour à tour : double muable caractère ! » Il conclut : « Tout dandy est un oseur ». Autant de prérogatives dont peut se prévaloir aujourd’hui Valérie Trierweiler !
FRANCOIS HOLLANDE, LE GRAND MECHANT MOU
Cette rare et précieuse insolence, Valérie Trierweiler la réitéra, plus audacieuse encore dans la mesure où elle s'opposa également, par la suite, à un certain Manuel Valls, alors Ministre de l'Intérieur, lors de la tristement célèbre affaire Leonarda : ce qui ne fit qu'aggraver son cas, au grand dam de ce grand méchant mou qu'est François Hollande, aux yeux des bien pensants et autres cols blancs de ce médiocre socialisme à la française.
C'est dire si cette insigne femme dandy des temps modernes en a affolé plus d'un parmi ces cerveaux compassés et bustes engoncés de la République, faisant trembler jusqu’aux ors de l'Élysée.
C’est du reste là, insistais-je dans ladite tribune, la plus profonde et juste des définitions que l’on ait jamais donnée du dandysme : « le dandysme est le dernier éclat d’héroïsme dans les décadences », établit Baudelaire, maudit d’entre les maudits, dans une critique d’art ayant pour titre Le Peintre de la vie moderne.
OSCAR WILDE : « L'ÂME DE L'HOMME SOUS LE SOCIALISME »
Quant à savoir si l’autorité du Président Hollande avait été ainsi, par cet intempestif tweet de Trierweiler, écornée, remise en cause ou malmenée, c’est là une question dont un dandy, libertaire et subversif par définition, n’a que faire : « La désobéissance, pour qui connaît l’histoire, est la vertu originelle de l’homme. C’est par la désobéissance que le progrès s’est réalisé, par la désobéissance et par la révolte. », affirme Oscar Wilde dans cette utopie anarchiste que représente ce petit livre programmatique qu’est le bien nommé L’âme de l’homme sous le socialisme. François Hollande, ancien Secrétaire général du PS, devrait, théoriquement, en être ravi !
Mais ce que je mettais alors surtout en exergue, dans mon article, c'est qu'il restait à espérer que Valérie Trierweiler, dont ses ennemis se mirent à être alors toujours plus vindicatifs tout autour d'elle, n’aurait pas à payer un jour le trop cher prix de cette liberté qu’elle osait ainsi s’accorder à l’ombre de l’Élysée, mais sous la lumière des projecteurs. Car c’est pour ce type d’impudence que Lord Brummell fut naguère renvoyé par le Prince de Galles, à qui il s’était permis de tenir effrontément tête. Il fut même banni sans ménagement, sous les huées et quolibets des courtisans de Londres, de Buckingham Palace, jusqu’à son exil forcé en France, où, vaincu, il mourut seul et misérable.
Certes le lumineux Paris du XXIe siècle n'est-il pas le sordide Londres du XIXe. Mais il n'empêche que si l'on n'y coupe certes plus les trop fortes têtes, on sait néanmoins encore comment y abattre les trop grandes gueules.
Ce fut là le tragique cas, ainsi que je l'avais prédit, de Valérie Trierweiler, elle aussi répudiée, sans égards ni tact, sans le moindre geste d'élégance ni de clémence, par un homme que, s'il n'était pas Président de notre respectable République, avant même d'être ce très peu aimable mixte de goujaterie et de cruauté, l'on pourrait aisément qualifier, au vu de son exécrable machisme envers les femmes, de mufle.
FRANCOIS, LE HOLLANDAIS VOLANT, SINON VOLAGE
François, ce hollandais volant tant il apparaît volage aux yeux de la gent féminine, ne sait décidément pas se comporter, surtout pas - comble du paradoxe pour le néo social-démocrate qu'il se prétend être - envers les plus faibles ou les plus démunis, quand ils ne sont pas ses impuissantes victimes !
Cette souveraine mais détestable once de mépris que Hollande n'a de cesse de distiller sournoisement à l'égard de bon nombre de ses concitoyens, Valérie Trierweiler vient de la mettre en évidence, sans tabous ni complexe, dans le livre-confession, sobrement mais ironiquement intitulé « Merci pour ce moment », qu'elle publie ces jours-ci aux Éditions Les Arènes : les « sans-dents », ne craint-il pas d'appeler les pauvres de l'Hexagone !
Ce très peu flatteur portrait de François Hollande, Valérie Trierweiler le complète en en faisant un être froid, cynique, cassant, calculateur et démesurément ambitieux. Bref, déshumanisé : le comble pour l'humaniste qu'il se targue d'être !
LA VENGEANCE D'UNE FEMME : DIABOLIQUE !
Certes la charge s'avère-t-elle dévastatrice pour l'image comme pour la crédibilité du Président, déjà mal en point dans les sondages et l'opinion publique. Mais ce qui transparaît surtout là, c'est que la belle Valérie, c'est aussi, par cette impitoyable et sulfureuse estocade qu'elle lui porte, la beauté du diable.
Jules Barbey d'Aurevilly, dont on a déjà vanté l'acuité de l'analyse quant aux caractéristiques du dandysme, a eu un mot resté célèbre, au sein de l'histoire de la littérature, pour dépeindre ce genre de dangereuse, si ce n'est ravageuse, beauté : diabolique !
C'est précisément dans son livre le plus fameux, « Les Diaboliques », recueil de six fascinantes nouvelles, que Barbey a inséré son récit le plus apprécié. Il a pour emblématique et, surtout, très actuel titre : « La vengeance d'une femme ». Tout un programme, que Valérie, à l'évidence, ne renierait donc pas ! D'autant que, pour hardie qu'elle soit en ces incendiaires lignes, elle se situe probablement encore, ne fût-ce que par simple pudeur, en-dessous de la vérité : cette « vérité rarement pure et jamais simple », comme l'énonça jadis le cher Oscar Wilde, dont je m'apprête par ailleurs à publier ce 18 septembre 2014, aux Éditions de La Martinière, une biographie illustrée ayant pour titre Oscar Wilde - Splendeur et misère d'un dandy (http://livre.fnac.com/a7255162/Daniel-Salvatore-Schiffer-Oscar-Wilde-splendeur-et-misere-d-un-dandy).
Voici donc ce que Barbey écrit, d'entrée de jeu, en sa redoutable et pourtant si lucide « Vengeance d'une femme » : « J'ai souvent entendu parler de la hardiesse de la littérature moderne ; mais je n'ai, pour mon compte, jamais cru à cette hardiesse-là. Ce reproche n'est qu'une forfanterie... de moralité. La littérature, qu'on a dit si longtemps l'expression de la société, ne l'exprime pas du tout, - au contraire ; et, quand quelqu'un de plus crâne que les autres a tenté d'être plus hardi, Dieu sait quels cris il a fait pousser ! »
PREMIERE DAME, AVANT D'ÊTRE LE PREMIER DRAME, DE FRANCE
Ainsi, que Valérie Trierweiler, ancienne première dame de France avant d'être le premier drame de la République, se console donc face à ces cris d'oiseaux, du style « indigne » ou « pathétique », dont l'accablent ces jours-ci ses nombreux ennemis, comme d'ailleurs ceux de François Hollande, en (dé)raison de ces récentes révélations quant à sa douloureuse idylle avec le Président, auquel elle redit par ailleurs là (un sensationnalisme médiatique de mauvais aloi l'a trop peu noté !) son admiration, non pas certes au niveau humain, mais bien sur le plan politique.
DOUTES
Reste à savoir si les propos d'une amoureuse éconduite, séduite puis abandonnée, et folle de jalousie de son propre aveu, sont fiables, dignes que le lecteur leur accorde ce bénéfice du doute qu'ils ne méritent peut-être pas. On peut, légitimement, se poser la question !
DANIEL SALVATORE SCHIFFER*
*Philosophe, auteur de « Philosophie du dandysme - Une esthétique de l’âme et du corps » (PUF), « Oscar Wilde » (Gallimard - Folio Biographies), « Manifeste dandy » (François Bourin Éditeur). A paraître ce 18 septembre 2014, aux Éditions de la Martinière, dans la catégorie « beaux livres » : « Oscar Wilde - Splendeur et misère d'un dandy ».
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