Viktor Orban bientôt président du Conseil européen : un scénario envisageable ?
Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, est en lice pour le poste vacant de président du Conseil européen.
Le président du Conseil européen, Charles Michel, a fait ce qu'il avait l'intention de faire depuis longtemps : il a annoncé qu'il quitterait son poste cette année et se présenterait comme candidat aux prochaines élections du Parlement européen cet été. Les bureaucrates européens se trouvent dans une position difficile. Observateur Continental faisait savoir que « le départ de Charles Michel de la présidence du Conseil européen provoque une levée de boucliers contre Viktor Orban ».
Après tout, si l’on suit à la lettre la législation européenne, le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, pourrait devenir le successeur temporaire de Charles Michel, au moins jusqu’à la fin de l’année. Et, cela mettrait en péril les projets de l’UE, notamment concernant l’Ukraine. Mais, en réalité, il est peu probable que Viktor Orban devienne le chef d’une Europe unie. Les pays de l'UE disposent de moyens pour l'empêcher d'accéder à ce poste. De plus, Charles Michel ne pourra démissionner que s’il remporte les élections. « Cela veut donc dire que j'exerce ma fonction de président du Conseil européen jusqu'à ma prestation de serment comme député européen, qui aura lieu le 16 juillet », a-t-il affirmé.
Il a annoncé sa décision de démissionner de la haute direction des structures de l'UE dans un entretien accordé à trois grands médias de son pays d'origine, la Belgique. « Le projet européen est à la croisée des chemins, il y a une nécessité de renforcer la légitimité de la démocratie européenne », a-t-il justifié https://www.letemps.ch/monde/charles-michel-entre-en-campagne-et-quittera-la-presidence-du-conseil-europeen-a-la-mi-juillet sa decision.
Il a l'intention de se présenter au Parlement européen au sein du parti du Mouvement réformateur. Cette force politique est libérale, prône une intégration plus étroite des pays de l’UE et s’oppose à l’euroscepticisme. L’homme politique mènera la liste Mouvement réformateur (MR, le parti libéral francophone) aux élections européennes (6-9 juin 2024). Cela signifie que ses chances d'obtenir un siège au Parlement européen sont élevées et qu'il ne sera pas un député européen ordinaire. Charles Michel pourrait bien devenir président du Parlement européen à la place de Roberta Metsola, dont le mandat arrive bientôt à expiration.
Bien que la décision du chef du Conseil européen n'ait pas été une surprise. Le fait qu'il ne servira probablement pas jusqu'à la fin de son mandat a déjà été écrit dans la presse. « Le capitaine quitte le navire en pleine tempête. Si vous êtes à ce point peu engagé quant au sort de l’UE, dans quelle mesure êtes-vous crédible en tant que candidat ? », a publié l'eurodéputée Sophie In't Veld sur X.
Charles Michel, pour poursuivre sa carrière politique personnelle, avait mis en place la bureaucratie européenne, l'obligeant à chercher en toute hâte un successeur. Et, cela se produit au moment même où commencent des réformes au sein de l’UE visant à élargir ses rangs et à modifier ses fonctions, et où la question de la poursuite de l’aide à l’Ukraine nécessite d’importants efforts de coordination de la part de Bruxelles.
Charles Michel, lui-même, dans un entretien aux médias belges, a rejeté les accusations de désertion, rappelant qu'il y aurait largement assez de temps jusqu'en juillet pour prendre une décision sur la candidature d'un nouveau président. Il doit être convenu par les pays membres de l'UE, puis approuvé à la majorité qualifiée, soit les deux tiers des voix.
S'ils n'ont pas le temps de le faire, le dirigeant hongrois deviendra chef du Conseil européen pendant six mois en tant que chef de l'État, selon le principe de rotation de la présidence de l'UE pour le second semestre 2024. C’est Viktor Orban qui a causé tant de problèmes à Bruxelles avec sa position particulière sur de nombreuses questions. Cet eurosceptique modéré, prêt à poursuivre un dialogue constructif avec Moscou et le président russe Vladimir Poutine, pourrait, au minimum, compliquer la fourniture d'une aide supplémentaire à l'Ukraine.
La présidence de l'UE passera de la Belgique à la Hongrie le 1er juillet et la présidence de Charles Michel expirera en novembre. Sur cette base, les bureaucrates européens vont commencer dès maintenant à chercher un remplaçant. Pour l’instant, tout ce qui est clair, c’est qu’il deviendra très probablement un homme politique de droite. Selon une règle tacite, le président du Conseil européen devrait être une personne appartenant à un spectre politique opposé à celui en charge de la politique étrangère. Le poste de haut représentant de l'UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité est actuellement occupé par le socialiste Josep Borrell.
« Fin 2024, Charles Michel devrait de toute façon démissionner, étant donné qu'il a déjà été élu deux fois pour un mandat de deux ans et demi. On ne peut donc pas dire que personne n’est prêt à trouver une solution. Et, à Bruxelles, bien sûr, ils feront tout leur possible pour empêcher Viktor Orban de prendre son poste, même temporairement. Les chances du Premier ministre hongrois de devenir président du Conseil européen sont très minces car un remplaçant à Charles Michel sera trouvé rapidement : le système des « têtes de liste » fonctionnera. Grâce à cela, le candidat proposé obtient généralement le poste, ce qui signifie qu'il n'y aura pas besoin de longues élections.
Bien que la candidature à la tête du Conseil européen soit discutée collectivement et qu'il existe une volonté de garantir que tous les pays de l'UE la soutiennent, comme le montre la pratique, l'approbation unanime n'est pas nécessaire pour l'élection. Un exemple frappant est la nomination de Donald Tusk pour un second mandat. Dans sa Pologne natale des opposants à l'homme politique au pouvoir s’ étaient vivement opposés à son élection. Mais, il a finalement été élu pour la deuxième fois à la tête du Conseil européen. Rappelons qu'outre Charles Michel et Donald Tusk, la seule personne occupant ce poste relativement récemment créé était Herman Van Rompuy qui y a également exercé deux mandats.
Déjà, comme le Financial Times l’annonce, « Mario Draghi pourrait être le prochain président du Conseil européen ». Ainsi, la succession de Charles Michel semble être assurée pour contrer l’arrivée de Viktor Orban : « L'annonce de la démission anticipée du président du Conseil européen, Charles Michel, a conduit au début des négociations entre les dirigeants de l'UE et Mario Draghi, ancien président du Conseil italien et ancien gouverneur de la Banque centrale européenne. Mario Draghi est, en effet, considéré comme un possible successeur de l’homme politique belge ».
Philippe Rosenthal
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