Villepin se rêve en Bayrou. En 2012, faite vos courses, ya de l’offre politique !
Cette fois, Dominique de Villepin a officialisé la création d’un mouvement politique. Attention, le diable est logé dans les détails. Villepin a bien précisé que c’est un mouvement, et donc, pas un parti politique. Car si tel avait été le cas, cet événement aurait été considéré comme une marque de défiance face à l’UMP et à son chef suprême Sarkozy. Un mouvement, ça laisse la porte ouverte à toutes les braves âmes, c’est pratique, c’est un bon outil politique, alors qu’un parti peut être un boulet. Ce ne fut pas le cas de l’UDF pour Bayrou fait faut-il préciser que l’UDF était enraciné dans le paysage électoral français, local et national, alors qu’un nouveau parti, c’est tout autre chose. Il faut des adhérents, un bureau, bref, du lourd qui ne sied pas vraiment à l’agilité de Villepin, homme de bonne tenue, sorte de Al Gore français avec la taxe carbone en moins et dont les Français peuvent être fiers pour son discours à l’ONU contre la guerre en Irak. Même pas un prix, alors qu’Al Gore a reçu le Nobel pour avoir escroqué le monde entier avec un film.
Revenons au sujet Villepin, un homme dont les résonances historiques sonnent comme celle de Bayrou. Les deux, ne l’oublions pas, sont férus d’Histoire et même de poésie. Bayrou, bien qu’il ne lise pas vraiment les Villon et autres Rimbaud, sait être poète à sa manière, un poète de terroir, croqué avec l’image canonique d’un paysan du coin soucieux de ses bêtes et montant son cheval avec soin. C’est ce qui manque à Villepin, homme affable, d’une bonne prestance, mais à qui il manque indiscutablement ce qui ferait de lui un présidentiable venant à la rencontre des Français, ce trait spécial que l’on trouvait chez Mitterrand, l’art de porter un pantalon marron en velours côtelé, des chaussures de marche et le déplacement éclairé dans un lieu boisé, à la recherche d’espèce végétale, tout en maniant avec dextérité le bâton en bois du pèlerin des terroirs. Mais sur ce point, Villepin a su montrer qu’il voulait changer et qu’il ne rechignerait pas à tacher un vieux costard de quelque déjection de fumier pour incarner la ruralité. On l’a vu au salon de l’agriculture faire copain copain avec les paysans et jouer de jeu de la photo avec quelque animal de la ferme. Et ma foi, ça faisait plus authentique qu’Aldo Macione donnant à bouffer aux gazelles dans une ferme en Afrique.
Maintenant, passons au discours, aux intentions. On retrouve les mêmes ficelles que Bayrou, cette propension à s’écarter des offres traditionnelles partagée entre l’UMP et le PS tout en restant dans sa famille de pensée et en voulant jouer légèrement au centre mais avec un peu plus de hauteur, comme pour surplomber l’échiquier politique. Les mêmes thèmes sont labourés par Bayrou et Villepin, critique de la gouvernances actuelle, souci de sortir des cadres stricts et des formes, se faire souple et ouvert, prétendre donner à la France un nouvel élan, une direction nouvelle, la préserver du déclin et surtout, jouer la carte de l’homme de conviction qui n’est pas là pour jouer une carte personnelle mais bel et bien pour servir la France. Voilà une formule canonique, héritée de Napoléon puis de la Troisième République. Le serviteur de la France, grand homme historique dont les meilleurs spécimens siègent au Panthéon. Villepin se met ainsi en mesure de se présenter si son mouvement avance, et de disputer aux Verts la troisième place tel un Bayrou venu de la droite gaulliste, puis qui sait, être qualifié au second tour.
Nous n’en sommes pas là. Je ne vais pas me faire l’avocat du diable qui est logé dans les détails mais quel symbole ! Villepin n’a pas choisi innocemment la date officielle de naissance de son mouvement alternatif de droite. Le 19 juin carrément, clin d’œil à l’appel du général prononcé le 18 juin 1940 et dont on va célébrer le soixante-dixième anniversaire.
Les périodes de crises sont propices à ces mouvements tactiques, ces stratégies, ces positionnements nouveaux tendant à déplacer les lignes. Le NC veut faire renaître un centre droit aussi prestigieux que l’UDF, Corinne le Page a quitté le Modem, le PC fait alliance avec le FG, l’extrême-gauche n’a plus la cote, Patrick Braouzec a quitté le PC, et voilà l’entrée en scène de Villepin, alors que Patrick Sébastien se voit en Hulot de terroir pour créer un cahier de doléance et demander allégeance aux parti, comme si Sébastien avait une quelconque légitimité à représenter les Français, et pour finir, Daniel Cohn-Bendit qui invente la coopérative politique. L’impression générale, c’est que les hommes politiques appliquent la tactique du marché et tentent de proposer des figures et des partis de la même manière qu’un industriel tente d’occuper un segment avec un produit nouveau que les concurrents ne fabriquent pas. Tout ça fait désordre, un peu big bazar, la politique devenue tel un souk médiatique occupé par des figures, à l’instar des logos de firme se disputant les places sponsorisées. La politique va mal et l’on se demande si ces ficelles pourront résoudre les souffrances, réduire la sous-France et surtout attirer les jeunes car on ne l’a pas assez souligné, la tranche des 18-30 s’est abstenue au trois quart. Ce phénomène mérite une attention. Une partie de l’abstention supplémentaire en 2010 s’explique par cet effet de glissement générationnel. Les vieux appliqués au vote républicain s’en vont et les jeunes désabusés viennent bouder les urnes.
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