Vincent Peillon contre Martine Aubry : un éléphanteau du PS, ça trompe énormément !
Quelle mouche a donc piqué Vincent Peillon, un des éléphanteaux du PS, sur les antennes de BFMTV lorsqu’il y a trompeté à tous vents, ce vendredi 14 octobre 2011, que Martine Aubry était désormais dépositaire, pour avoir osé dire publiquement que François Hollande était le « candidat du système » en ces primaires socialistes, du « label Marine Le Pen » ?
Ne s’est-il donc pas rendu compte, ce fougueux partisan de François Hollande, qu’il avait ainsi fait là, en plus de se montrer d’une intolérance dont la véhémence à l’égard de sa patronne politique n’a d’égale que sa servilité envers son champion électoral, un magistral cadeau à ce FN qu’il prétend pourtant pourfendre ?
Car accoster ainsi, de manière aussi indue et caricaturale, Martine Aubry et Marine Le Pen, équivaut à rapprocher, en fait, le PS du FN : un cadeau empoisonné pour le PS, une aubaine inespérée pour le FN et, pour corser l’affaire, une UMP qui, n’en attendant pas tant de la part de ses adversaires, finira peut-être, face à cet indigne spectacle ainsi livré en pâture aux électeurs, par récolter, in extremis, les marrons du feu !
Mais il y a plus consternant, encore, en ces propos aussi maladroits, politiquement, qu’inadmissibles, moralement, de la part de l’injuste Vincent Peillon.
Car de deux choses l’une : ou son parti était dirigé jusqu’ici, fût-ce à son insu, par la pire des droites idéologiques, auquel cas tous ces socialistes nous auront ainsi lourdement trompé (ce qui n’est guère étonnant de la part d’éléphants qui, on le sait, trompent énormément !) ; ou alors, non moins grave, la critique n’est désormais plus possible, comme au temps des vieilles méthodes staliniennes et autres pratiques dictatoriales, dans le camp de la gauche.
Bref : c’est un piètre stratège idéologique, en même temps qu’un médiocre penseur politique, que Vincent Peillon, dont on avait déjà pu constater les navrantes limites de la réflexion dans son essai très emphatiquement intitulé « La révolution française n’est pas terminée » (paru, en 2008, aux Editions du Seuil), vient de donner à voir, sur les antennes de BFMTV, de façon aussi lamentable et même, pour tout dire, honteuse.
Davantage : ce n’est très exactement là, ce travers comportemental décidément récurrent au sein des élites françaises, que ce que l’admirable Julien Benda avait déjà stigmatisé, dès 1927, en sa célèbre « Trahison des Clercs » lorsqu’il y dénonçait ce fait que les intellectuels, embrigadés qu’ils étaient dans « le jeu des passions politiques », se mettaient désormais à privilégier leur intérêt personnel - dans le cas présent, celui de François Hollande - au détriment de l’intérêt général - en l’occurrence, celui du Parti Socialiste.
Morale de la fable ? Que le PS prenne donc garde à ses trop impétueux éléphanteaux : à force de barrir à tort et à travers, ils pourraient bien faire résonner, lors des élections présidentielles de 2012, les trompettes, par ailleurs non moins discordantes, de la droite… y compris, hélas, non républicaine.
Ce serait alors là, en ce triste cimetière des éléphants, le malheureux mais définitif glas, très probablement, de la gauche social-démocrate à la française.
DANIEL SALVATORE SCHIFFER*
* Philosophe, écrivain, auteur de « Les Intellos ou la dérive d’une caste - de Dreyfus à Sarajevo (L’Age d’Homme), « Grandeur et misère des intellectuels - Histoire critique de l’intelligentsia du XXe siècle » (Editions du Rocher) et « Critique de la déraison pure - La faillite intellectuelle des ‘nouveaux philosophes’ et de leurs épigones » (François Bourin Editeur).
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