Vive le libéralisme ?
Que voilà un titre provocateur pour un pays où le mot libéralisme n’a pas bonne presse ! « Vive le libéralisme », doctrine dont le mot se réfère à « libération », et qui a libéré l’individu de l’absolutisme et qui le préserve des excès de pouvoir ? « Vive le libéralisme » quand, sur le plan économique, il s’oppose au capitalisme, mot formé sur le « capital » et qui est la recherche toujours plus grande de profits au détriment souvent du respect de l’individu et de la planète entière ?
C’est à tort que souvent en France nous confondons libéralisme et capitalisme. A l’origine, le mot "capitalisme" a été inventé par Karl Marx comme repoussoir « dialectique » au socialisme. Aujourd’hui encore, le but recherché continue son effet mais, par un amalgame mal fondé, la gauche rejette dans le même mouvement le capitalisme et le libéralisme comme si ces deux modèles d’économie étaient identiques.
Voyons en quoi le libéralisme peut être vu comme quelque chose d’acceptable par opposition au capitalisme, et par opposition aussi au conservatisme. Et prenons dans l’actualité toute récente des exemples pour éclairer le propos.
1 - Libéralisme et capitalisme :
Le libéralisme est une philosophie qui veut limiter le pouvoir par le pouvoir. Il défend les libertés des individus. Il s’étend aussi au champ politique tandis que le capitalisme se retreint au seul domaine économique. Par ailleurs, le capitalisme n’est pas tant le défenseur des libertés que le défenseur de ses propres intérêts.
C’est au nom du libéralisme authentique que l’on peut critiquer les abus du capitalisme des Etats-Unis ou de la Chine, par exemple. Ainsi, le fait pour les Etats-Unis de fausser le libre jeu de l’économie mondiale. En ce moment, c’est surtout la Chine qui est montrée du doigt. L’Union européenne critique violemment ce pays dont l’excédent commercial envers l’Europe est directement dû à des mesures protectionnistes. Or, le protectionnisme n’est pas conforme au libéralisme. L’OMC pourrait donner à son tour de la voix sur ce dossier. Autre illustration des excès dangereux du capitalisme : l’exploitation du travail pouvant aller jusqu’à la résurgence de formes d’esclavage. Ainsi, en Chine toujours, la police dit avoir libéré, le 14 juin, 217 personnes, dont 29 enfants, qui étaient exploitées comme des esclaves dans des briqueteries du centre du pays. A l’approche des jeux Olympiques, un rapport révèle l’exploitation des ouvriers et d’enfants de 12 ans sur les chaînes de montage (de produits qiu seront vendus lors des JO de Pékin en 2008) dans des conditions très dures, proches de l’esclavage. L’esclavage ou le quasi-esclavage ne renaît pas seulement en Chine et il n’est évidemment pas conforme à l’idée de libération des individus propre au libéralisme.
Le capitalisme est un régime économique fondé sur le développement des capitaux et, de ce fait, il favorise toujours le meilleur profit des entrepreneurs et des actionnaires. On en voit les dérives en France aussi. Une étude, réalisée en 2006 par le cabinet de conseil en ressources humaines Hay Groupe et publiée par La Tribune le 12 juillet 2006, montre que les indemnités de départ des patrons français (les "parachutes dorés") sont les plus élevées d’Europe alors que leurs revenus se situent dans la moyenne européenne. Cette forme de compensation octroyéesaux grands PDG et les autres formes que sont les OPA (options d’achat d’actions) et les retraites dorées montrent un système qui privilégie la sécurité des plus riches et sacrifie celle de salariés.
2 - Libéralisme et conservatisme :
"Libéral" est traditionnellement antinomique de "conservateur". Nombre de conservatismes existent en France et sont le fait du patronat qui se recroqueville sur des privilèges qu’il ne veut pas remettre en cause. La grande frilosité des entreprises à recruter même quand elles sont subventionnées, leur timidité à investir dans la recherche, sont des traits typiques de leur conservatisme. Mais, en face, les syndicats de salariés et certains secteurs manifestent aussi leur conservatisme par la défense radicale de certains privilèges considérés par eux comme des droits acquis : les régimes spéciaux de sécurité sociale, les services nationalisés. D’un point de vue libéral, les privilèges non justifiés de certaines catégories ne sont pas admissibles ni les nationalisations non fondées sur des raisons supérieures d’intérêt général. Pas davantage l’abus du droit de grève. Le monopole est également contraire à l’idée libérale. Enfin, l’Education nationale est emblématique du blocage français : véritable "mammouth", elle s’oppose idéologiquement au libéralisme qu’elle méconnaît, et pour cause, c’est un corps de fonctionnaires qui ignorent tout du monde de l’entreprise. Sans lui jeter la pierre, car c’est nous qui l’avons voulue ainsi, elle porte en son sein des résistances qui sont autant de conservatismes aussi. Le CPE (qui était un mauvais projet imposé selon une mauvaise méthode) a jeté les enseignants dans la rue et avec eux des enfants qui ne comprenaient rien aux enjeux. L’idéologie des deux côtés s’est montrée paralysante.
Tant que le Medef s’arc-boutera sur ses positions liées à une vision toute particulière du libéralisme à la française, tant que la droite et la gauche s’opposeront dans une bipolarisation destructrice, la France ne sortira pas de ce cul-de-sac.
La question débattue ici est riche en discussions. On peut par exemple trouver du bon dans le conservatisme. On doit aussi reconnaître qu’opposer au capitalisme le libéralisme ne pare pas ce dernier pour autant de toutes les vertus. Il y aurait beaucoup à dire à l’examen de l’actualité. Ainsi la TVA sociale est-elle bonne ou mauvaise ? Ce n’est pas si simple, la question a connu deux écoles lors des débats internes à l’UDF. Pour cette raison, il sera intéressant de la traiter à part dans un prochain article.
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