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Accueil du site > Tribune Libre > Walt Disney à Nüremberg

Walt Disney à Nüremberg

Ratatouille indigeste de mauvaises intentions, d’hystéries individuelle et collective, de simagrées et de prêches imbibés, Tout le monde en parle est à l’image du service public : une insulte à l’intelligence, doublée d’une arnaque fiscale.

Samedi soir sur la Terre, et sur France 2. Après la télé de Sébastien, le fleuron du service public, au nom sans doute de la diversité culturelle ou de la nécessité de faire une télé différente de celle d’en face, (c’est-à-dire moins vulgaire, plus intelligente), nous propose... Thierry Ardisson. Tout le monde en parle. Ce soir-là, invités : Michel Blanc, Françoise de Panafieu, Lio, entre autres, et puis Muriel Cerf, Max Gallo, Arno Klarsfeld et Christophe Alévêque. Du tout et du n’importe quoi. De la diversité, très « service public ».

Blanc parle de son film, de Panafieu défend Sarkozy et ses expressions à l’emport- pièce, et puis Lio débarque, toute de robe dévêtue. C’est là que ça se gâte. La chanteuse, qui compte pas pour des prunes, renvoie d’emblée Walt Disney à...Nüremberg, pour avoir bercé d’illusions des générations entières de femmes, convaincues à tort (la faute à Blanche-Neige), selon la brune, que le Prince charmant existait, et que la vie ne consistait qu’à l’attendre.

Visiblement éméchée, sans doute un peu amusée par quelques cigarettes, la chanteuse s’énerve ensuite de plus belle quand Muriel Cerf arrive. Muriel Cerf, écrivain, qui, dans un livre récemment paru, tente de « justifier » voire de « comprendre » les gestes de Bertrand Cantat, coupable d’avoir tué sa petite amie d’alors, Marie Trintignant. C’en est trop pour Lio, ex-amie de Marie, qui nous déballe le rapport d’autopsie, 36 coups portés, nous dit-elle, trente six coups vous vous rendez compte, un visage détruit, tuméfié, bref l’habituel numéro de Lio la furia féministe, qui se fend même de quelques doigts d’honneur bien tendus envers ces artistes qui se proclament rockeurs, rebelles, et qui ne sont, selon elle, que les valets du système.

Muriel Cerf, finalement, s’en va, sonnée, marchant difficilement, elle presque tuée par son compagnon, aujourd’hui sonnée par une chanteuse banana split sur le retour, qui s’en prend à Bridget Jones, aussi, tant qu’on y est, pourquoi pas. (Cette réaction désabusée de Muriel Cerf, bouche-bée devant Lio déchaînée qui tente de placer un : « Mais qui parle de Bridget Jones, ici ? » totalement vain)

On vit un grand moment de télévision. Cette émission montée, ajustée, savamment dosée, vit là un de ses instants de gloire, quelques minutes pour le zapping de l’année, avec comme juge de paix, curé, psychiatre et surveillant général, un Ardisson plus roublard que jamais. Blanc s’en va, Lio reste, on parle clitoris, ascenseur, baise, on parle aussi mémoire collective, shoah, éducation, puisque Arno Klarsfeld arrive. Klarsfeld, le fils de l’autre, avocat en rollers qui aujourd’hui est chargé par Sarkozy de réfléchir au meilleur moyen d’enseigner l’histoire à l’école ; rien que ça. Ca s’engueule un peu, ça se frotte, Gallo est là aussi, venu parler du dernier livre qu’il a fait écrire, un roman sur les Romains.

Christophe Alévêque, comique Ruquier, arrive lui aussi dans la mêlée, ça vanne, ça fuse, Lio minaude, de plus en plus dévêtue, de plus en plus fatiguée. Manquait plus qu’un écrivain établi pour venir saupoudrer la pièce montée, c’est Sollers qui s’y colle, Philippe Sollers venu un peu parler de Nietzsche, un peu de Houellebecq, beaucoup même de ce dernier, on sent bien que le jaunissant Sollers en veut au Michel de son succès. On parle langue, baiser profond, on acquiesce, on se prend dans les bras, Baffie bâche, rien que de très normal dans cette maison de passes qu’est l’émission d’Ardisson.

Au bout du compte, tard dans la nuit, on a appris quoi ? Pas grand-chose. Que Lio sort un disque, Sollers et Gallo un livre, Blanc un film, que Blanc a vécu avec Lio, qu’ils se sont un peu engueulés, mais bon, jamais avec les mains, que Lio est pour la rédemption, oui, le Pardon, d’accord, que Sarkozy a quelques amis bien placés, que Stéphane Guillon ne sait pas où se trouve le clitoris, enfin des choses sublimes et fortes, belles et grandes. Et alors, me direz-vous ? Et alors rien, si ce n’est que toute cette salade composée, qu’on pourrait qualifier sans sourciller d’énorme merde, est une émission dite de service public, censée proposer autre chose que Cauet, que Courbet, que tout ce qu’on voit dans le privé. Parce qu’enfin, ne nous serine-t-on pas, à longueur de déclarations d’intention belles comme des promesses, que la télévision de monsieur de Carolis aujourd’hui va désormais nous montrer de belles choses, de belles images, des images qui ont du sens, vous savez, pas une succession de clichés tapageurs et racoleurs qui ne servent qu’à flatter certains instincts dits bas ? Au bout du compte, rien du tout, que de l’habituel, toujours ces animateurs producteurs, Delarue comme Fogiel comme Ardisson, qu’on finance sans pouvoir faire autrement. Comme Drucker qui, ce dimanche, proposait quelques longues heures avec la famille les amis les collègues de Mitterrand. N’importe quoi. Aucune recherche, aucun effort, rien d’innovant, rien de différent sur France 2 que sur TF1. De Carolis pas mieux que Le Lay. Tant qu’il n’aura pas réglé leurs comptes (en banque) à ces animateurs producteurs de télé-réalités nullissimes, qui nous infligent des débats de latrines aux heures de divertissement, alors, ce service public, si fier de ses « belles images » et de ses « grands moments », ne continuera en fait qu’à n’être que la pâle copie rapiécée du privé.

On n’est évidemment pas obligé de regarder, bien sûr, mais vous noterez que même sans regarder une seule seconde, on paie pour toute l’année. Un vrai scandale.


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15 réactions à cet article    


  • Chris (---.---.144.161) 9 janvier 2006 10:55

    Comme vous dites : on n’est pas obligé de regarder... Effectivement, sur une chaîne publique, on aurait pu s’attendre à plus de qualité, de réflexion, de recul sur les événements. Pour cela, il faudra se contenter d’Arte, qui reste à mes yeux, la seule chaîne vraiment intelligente. Mais faible audience pour la chaîne intelligente... C’est ainsi. Le public en redemande. Comme disait Coluche dans un autre contexte, mais l’idée reste la même : s’il n’y avait pas tous ces c... pour acheter, ça ne se vendrait pas ! Une lapalissade. Et bien oui, il faut croire que le télespectateur français aime le sang et le lynchage médiatique, la vulgarité et la provocation. Moi, j’ai choisi depuis longtemps : je fuis comme la peste les Fogiel, Ardisson, Cauet, Ruquier ou Delarue (pas vulgaire lui, juste voyeur...). Vous me direz : il ne reste plus grand chose ! Courage, avec la télé en P2P, tout cela va peut-être changer. Chacun sera libre de fabriquer ses progammes et de sélectionner ce qui l’intéresse. Mais reste à savoir si ce qui intéresse le public est moins exhibitionniste que ce que les chaînes nous proposent aujourd’hui... Si on a les politiques que l’on mérite... on a aussi la télé que l’on mérite !


    • Senatus populusque (Courouve) Courouve 10 janvier 2006 12:16

      L’émission n’est pas produite par France 2, mais par Ardisson, et France 2 vous renvoie à la société de prod de T.A. quand vous avez une réclamation à formuler, ce qui était mon cas lorsque Ardisson avait laissé Samy Nacéri agresser Salman Rushdie.

      Il n’est pas normal que F 2 dégage ainsi sa responsabilité sur un programme qu’elle diffuse.


    • BB (---.---.139.70) 9 janvier 2006 14:27

      Comme vous dites : on n’est pas obligés de regarder...

      mais on est pas obligé de payer non plus ! La bouillie audiovisuelle que la télé nous propose est savamment dosée, c’est un formidable moyen de contrôle, pas seulement des comportements de consommation, c’est le meilleur vecteur de transmission du prêt à penser, moral, politique...

      Pour ne pas laisser prise aux Ardissons de tous poils, aux directeurs de conscience, aux vendeurs de fausses réalités, débranchons nos télés. Quittons le statut de téléspectateurs assis ( couchés ?) et abêtis pour celui de citoyens conscients et debout !


      • Suzette Jones (---.---.6.182) 9 janvier 2006 16:55

        Hé bé ça charcle à tous les étages ! C’est la première fois que je lis un de vos articles et c’est franchement marquant. Je ne regarde pas Ardisson ou Fogiel, parce que ça m’énerve à chaque fois et je voudrai éviter un ulcère à l’estomac. Faut pas se faire du mal comme ça ! Je vais faire gaffe à Lio aussi, parce que mon surnom sur le Net c’est Suzette Jones... au plaisir de vous relire.


        • (---.---.242.162) 9 janvier 2006 22:43

          Rien à redire à cet article. Un conseil quand même (d’un fouineur de librairie) : lisez Sollers, parlez nous en après l’avoir lu !

          Et, pourquoi pas, écoutez Véronique Rivière !


          • Helmet (---.---.238.94) 10 janvier 2006 01:23

            En rapport aux premiers commentaires, il ne faut peut être pas, à chaque emission bidon qui est diffusée, crier à la manipulation du téléspectateur qui se fait abuser psychologiquement, financièrement, etc... L’émission de samedi dernier etait franchement mauvaise, en particulier à cause de Lio qui a monopolisé la parole et tué le peu de débats qui semblaient intéressants. Et s’il est vrai que c’était une émission selon moi ratée, j’ai pu me faire un avis définitif sur cette espèce de chanteuse hystérique qui crie halte au machisme mais qui joue les putes pour séduire le maximum d’hommes (de futurs acheteurs de son album ??). Sacrés contradictions. Enfin passons. Simplement, ce n’est pas pask’une emmission est nulle qu’on y apprend rien, telle sera ma conclusion. Et encore bravo pour votre article, Lillian.


            • Grég (---.---.251.41) 10 janvier 2006 10:00

              Merci, je croyais être le seul halluciné à moi aussi avoir eu la bouche grande ouverte comme Muriel Cerf face aux ramassis d’inepties débitées par une Lio en string, caressée allègrement par la caméra de Tout le Monde en Parle... Je suis passé ce soir là de la révolte à l’amusement. Certes je n’ai pas vu, à regrets, l’envolée lyrique de la brune qui ne manque pas une occasion de faire dans le pathos dès qu’elle a un « livre » ou un « disque » à vendre, à propos de Disney, j’ai pris le show en cours à la sortie du cinéma. Mais ce que j’en ai vu m’a d’abord blessé puis écoeuré, puis amusé. Elle était simplement ridicule.


              • yaarg (---.---.111.163) 10 janvier 2006 10:42

                 smiley smiley smiley smiley smiley smiley smiley smiley smiley

                J’ai beaucoup de plaisir à lire des articles et des commentaires sur des émissions de télévision QUE JE NE REGARDE J-A-M-A-I-S... Cela me rassure et me conforte : « Ouf, je n’ai pas perdu mon temps à regarder des conneries »...

                Ben oui mes amis, je me permets gentiment de vous rappeler que dans la vie, il y a peut-être des choses mille fois, un million de fois plus importantes à faire que de perdre des heures, assis, vautré dans un fauteuil à s’abreuver d’images débilitantes.

                En vrac, on peut rencontrer des amis et discuter philosophie, politique, se raconter des blagues, lire des ouvrages d’enrichissement personnel, que ce soit un livre sur les plantes médicinales ou sur la grèce antique, écouter ou faire de la musique, aller au théâtre, faire du bricolage, peindre, sculpter, faire l’amour, préparer un bon repas, jouer aux cartes devant un feu de cheminée, raconter des histoires aux enfants, lire Charlie-Hebdo, le Canard enchaîné, le rapport Lugano de Suzan George, aller sur internet et lire les articles d’Agoravox, etc. etc. etc.

                Bon sang, comment peut-on trouver du temps pour regarder la télé alors qu’il y a tant de choses enrichissantes à faire pour avoir une vie pleine et épanouie ???

                TUEZ LA TÉLÉ AVANT QU’ELLE NE VOUS TUE !

                <>


                • (---.---.14.25) 10 janvier 2006 11:43

                  A propos de cette émission d’Ardisson avec Lio, lire ma chronique « Un poison nommé Wanda », dans METRO du 10 janvier 2006. Dominique-Emmanuel BLANCHARD


                • L'équipe AgoraVox L’équipe AgoraVox 10 janvier 2006 14:27

                  l’article de Métro est disponible ici (page 6).


                • Alceste (---.---.60.138) 11 janvier 2006 06:29

                  DEB, ton article est à la con. Pas besoin d’être un pudibond pour condamner l’apologie du meutre de filles à coups de poing !


                • LePiou (---.---.22.230) 12 janvier 2006 16:37

                  QUI PASSE CHEZ ARDISSON ? POURQUOI ?

                  Détestant son émission, il m’arrive de la subir chez des membres de ma famille tv-addicts. Les « invités » n’y passent que pour vendre, qui un livre, qui un disque, qui un film. Cela fait partie des plans médias incontournables. La règle est donc : « je dis du bien de ton livre que je n’ai pas lu et tu dis du bien de mon CD que tu n’a pas écouté. Surtout être positif. S’auto lobotomiser les fonctions critique du cerveau. Avoir prévu une anecdote salace si on passe après 22 heures. Etre prêt à sa répondre sur la fréquence et la puissance de ses orgasmes,

                  Je boycotte ce genre d’émission à trois niveaux : l’émission, les invités, les annonceurs.

                  Je ne la regarde pas, je zappe rapidement. Les invités sont en général des gens hyper médiatisés issu de la petite caste des « people ». Des écrivains parisiens qui ne quittent Le Marais que pour les hôtels de la cote Marocaine nous font des romans où ils nous expliquent la Vie, la Vraie. Parfois il y a des invités de qualité, mais, quand je ne les connais pas, le fait d’être ici me donne un a priori négatif. Des gens comme Higelin se sont fait sans passer par ces « latrines » ou leur équivalent à l’époque. La chanson française déborde de petits groupes sympah, avec des musiques créatives et des paroles intelligentes. Mais le système des vedettes impose que nous n’ayons qu’un petit groupe connu, et pas forcément les meilleurs. Pour les livres, j’ai confiance en mon libraire, un vrai libraire.

                  Enfin cette émission est enveloppée et entrelardée de longues séquences publicitaires. La basse qualité de cette émission rejaillit sur l’image que j’ai de ces produits, pour l’achat desquels le gourou Thierry nous a lavé le cerveau. J’oriente ma consommation, là ou c’est possible, vers du non « vu à la télé ». Je vais sur les marchés, je prends ma brioche chez le pâtissier, etc..... Car ce système de conditionnement des consommateurs vers les marques et la grande distribution tue aussi les petits producteurs, les artisans, ceux qui font de l’original au quotidien, aussi sûrement qu’il tue les petits romanciers ou groupes musicaux originaux .

                  D’ailleurs, le titre même de son émission « Tout le monde en parle » est révélateur de cette mentalité d’incitation au suivisme . Regarde cette émission car tout le monde la regarde, achète les CD des invités car tout le monde les écoute, achete les livres car tout le monde les lit, va voir ce film car tout le monde y va, achète ces surgelés car tout le monde en mange.....

                  STOP


                  • (---.---.0.86) 13 janvier 2006 16:48

                    En bref, c’est TELE-ACHAT


                  • Thucydide (---.---.101.9) 12 janvier 2006 18:40

                    Je suis comme Yaarg, qui parle d’or, j’ai des choses mille fois plus intéressantes à faire que passer des heures à regarder des stupidités, et je n’irai pas me faire de la bile parce que d’autres n’arrivent pas à s’en dé-scotcher. Même pour la redevance que je paie pour rien, je me suis fait une raison ; c’est un peu comme la vignette auto en son temps : un truc bizarre qui ne rime à rien, mais qu’on est obligé de traîner parce que les déficits de l’état sont abyssaux.

                    Néanmoins, je remercie beaucoup Lilian Massoulier, grâce auquel je me suis payé une tranche de franche rigolade sous forme d’un petit intermède de voyeurisme vicelard condensé, que j’irai confesser demain, et pour lequel il ne m’a fallu que cinq minutes au lieu des heures que dure ce type d’émission (ou, pire, les semaines interminables de ceux qui se cognent l’intégralité des ébats des lofteurs ou des staracadémyciens).


                    • alainterieur (---.---.221.74) 2 mars 2006 14:06

                      Belle analyse de cette merde qu’on nous sert de plus en plus souvent en guise de culture. Habitant en Alsace, j’ai la chance de pouvoir regarder la télé allemande qui présente sur la télé française un gros avantage : c’est en allemand et je n’y comprend rien. Alors pour la télé française j’ai trouvé la solution : couper le son et c’est tout de suite beaucoup mieux, comme un aquarium avec des pirhanas. Et je sais maintenant pourquoi je paie une redevance.

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