Y a-t-il une avocate dans l’avion ?

Mme Renée Rabinowitz, 81 ans, une avocate à la retraite qui a subi les persécutions nazies quand elle était enfant, poursuit en justice la compagnie aérienne nationale israélienne El Al pour discrimination : elle avait été invitée à changer de siège parce que son voisin, un Juif ultra-orthodoxe refusait d’être assis à côté d'une femme. Elle est soutenue par le Centre d'action religieuse d'Israël (IRAC), un mouvement qui a déjà mené une campagne contre les pressions exercées par les ultra-orthodoxes pour imposer la séparation des hommes et des femmes et retirer les images de femmes des panneaux publicitaires.

Près de 7 500 e-mails ont été adressés à El Al objections pour protester contre ces demandes faites aux passagères de changer de place.

Mme Rabinowitz est juive, elle fréquente la synagogue et respecte les pratiques casher. Elle a déclaré au Guardian : "Cet homme n'a pas d'autre grief que mon sexe - et c'est une discrimination illégale. C’est comme si une personne d'une autre religion avait dit : « Je ne veux pas être assis à côté d'une Juive. ' Or, je ne crois pas que El Al aurait demandé à la personne de se déplacer dans ces circonstances ».

Le 2 Décembre de l'année dernière, Mme Rabinowitz était installée dans son siège en classe affaires sur un vol El Al de New York à Tel Aviv. Son siège était séparé du voisin par un écran.

Peu de temps avant la fermeture des portes de l’avion, le passager à qui avait été attribué le siège à côté de Mme Rabinowitz est monté à bord. L'homme d'âge moyen, qui portait une tenue « ultra-orthodoxe », a appelé un stewart et lui a parlé en hébreu.

Le stewart a alors offert à Mme Rabinowitz ce qu'il a présenté comme un meilleur siège, dans la rangée centrale. « Je ne comprenais pas. Ce n’était pas un meilleur siège ", a répondu la passagère qui a d'abord refusé de se déplacer, mais l'agent de bord insista et comme l'avion attendait sa décision pour décoller, elle a eu le sentiment de ne pas avoir le choix. En s’aidant de sa canne, Madame Rabinowitz le suivit.

 »J’ai alors demandé à l'agent de bord si c’était l'homme assis à côté de moi qui avait demandé que je sois déplacée, et il a répondu oui. Je suis alors retournée bers cet homme et lui ai dit : « Je suis une femme de 81 ans, quel est votre problème ? » Il m’a dit que cela était interdit par la Torah . Je l' ai interrompu et lui ai répliqué que la Torah ne disait rien sur un homme assis à côté d'une femme. Il a concédé que j'avais raison, mais a dit qu'il y avait un principe général selon lequel une personne ne doit pas se mettre dans une situation dangereuse. J’ai alors réfléchi rapidement. Pour moi il avait tort, mais nous nous apprêtions à un vol de 11 heures, et il est pas très agréable d'être assis à côté d’une telle personne. J’ai donc décidé de me déplacer ".

Quand l'avion a atterri à l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, la vieille dame attendait à bord pour une assistance en fauteuil roulant, le commandant est sorti du poste de pilotage. Elle lui a expliqué ce qui était arrivé, et a dit qu'elle se sentait insultée d’avoir été obligée de se déplacer simplement à cause de son sexe. "Il m’a répondu qu'il ne fallait pas m’en prendre au personnel, mais que c’était la politique de l'entreprise", a déclaré Rabinowitz.

De retour à Jérusalem, Mme Rabinowitz a assisté à une réunion publique au cours de laquelle Anat Hoffman, directrice de l'IRAC, a évoqué le succès de la campagne pour mettre fin à la ségrégation des sexes dans les autobus publics d'Israël comme l’avaient demandé les ultra-orthodoxes. Depuis que l’IRAC a gagné un procès sur cette question, les bus affichent des avis bien visibles informant les passagers qu'ils peuvent s’asseoir où ils souhaitent.

"Mme Anat a dit que leur mouvement voulait lancer une action similaire pour le transport aérien. Je lui ai donc expliqué ce qui m’était arrivé", a raconté Mme Rabinowitz.

Mme Rabinowitz et l’IRAC demandent 50.000 shekels (11 500 €) en dommages et ainsi que la publication de directives claires d’EL Al aux membres de son personnel concernant leur obligation d'agir d'une manière égalitaire, notamment en mettant l' accent auprès des équipages de l'entreprise sur le fait qu'ils doivent défendre les droits des femmes à occuper le siège qui leur a été alloué, et en expliquant clairement aux agents de bord qu'ils peuvent ne pas accéder aux demandes de passagers qui souhaitent changer de place uniquement pour des raisons de sexe.

IRAC est en attente de la déclaration officielle de la défense d'El Al, qui doit être soumise dans les 30 jours du procès en cours de dépôt. Mais dans une lettre à l'avocat de Rabinowitz, la société a affirmé qu'il n'y avait pas de discrimination entre les sexes sur les vols El Al.

L’avocat dit avoir enquêté sur l'incident, et constaté que l'agent de bord avait traité Mme Rabinowitz poliment et avec sensibilité, en précisant que Mme Rabinowitz n'a pas été obligée de se déplacer. Pour prouver sa bonne volonté, El Al a offert Mme Rabinowitz un bon de 200 $ pour son prochain vol. « Ce n’est pas une question d’argent, mais une question de principe", a déclaré Rabinowitz.

Mme Hoffman estime que la pratique d’El Al qui cède à la demande de déplacer passagères est un nouvel exemple des exigences des extrémistes ultra-orthodoxes qui n’ont rien à voir avec le judaïsme

Dans un communiqué, la compagnie El Al a déclaré qu'elle maintenait le plus haut niveau d'égalité de traitement et de respect pour tous les passagers. « Nos employés dans les appareils et au sol, en Israël et dans le monde entier font tout leur possible pour écouter et apporter des solutions aux préoccupations ou demandes de nos clients quels qu'ils soient, y compris les demandes de sièges sur l'avion ".