Zohra Dati atteinte de la grippe H1N1 ? Quand l’info se fait estivale !
La fille de Rachida Dati est hospitalisée depuis 4 jours, disent les dépêches. Serait-elle atteinte de la grippe H1N1 ? Nous n’en savons rien et cela ne nous regarde pas. Mais avouez franchement qu’une info de ce type ferait un buzz sur le Net et surtout un sujet de choix pour les journaux télévisés se préparant à passer en mode estival d’ici une quinzaine de jours et donc en quête de remplissage.
L’été, l’info se met en vacance. D’ailleurs, tout le monde prend des vacances au mois de juillet et surtout au mois d’août qui voit nombre d’entreprises fermer alors que le reste du pays se met en activité réduite. Sauf dans les secteurs qui ne peuvent pas fermer. Les hôpitaux, les maisons de retraite et le commerce des biens de première nécessité par exemple. La vie est ainsi faite que les gens sont quand même malades en août, que les vieux restent vieux, que les petits et les grands mangent autant que le reste de l’année mais pas forcément au même endroit. Si bien que la grande surface toulousaine ou parisienne tourne au ralenti alors que les supers, à Arcachon, Palavas ou Royan, sont pris d’assaut par les touristes en short.
Et l’information ? Comme chacun l’aura remarqué, les journaux télévisés prennent des couleurs de vacance. La rédaction part se faire bronzer sur les plages ou alors en villégiature à la montagne, les stagiaires arrivent, le présentateur change, notamment pour le bonheur de toutes ces ménagères scotchées à TF1, séduites par le beau Harry et son sourire hollywoodien. Passé la fin juillet et surtout le début août, il ne se passe plus rien en politique. Dans le social, plus de grève. Pas d’agressions dans les écoles, les lycées. Presque pas de promo, car la vedette ne veut pas troubler ses vacances de star. Mais pas de bol pour la rédaction qui reste dans les chaînes, il faut boucler un JT dont la durée est la même que le reste de l’année. Alors, le chef de rédaction attend dans son bureau quelque nouvelle truculente pour donner de l’info. Un incendie, un accident d’avion, de bateau ? Et pourquoi pas une canicule ou alors quelques personnalités décédant au mois d’août. Ce qui est pratique parce que toutes les rédactions ont déjà une nécro à diffuser. Sinon, un bon orage, avec des grêlons gros comme une balle de golf et des torrents en furie. Mais cette année, si Sarkozy tient ses promesses, il n’y aura pas de commentaire sur ses vacances passées avec sa Carlita dans l’une de ses résidences. Peut-être au cap nègre. Et qui sait, avec la mobilisation des forces de l’armée et de la police. Ouf, de quoi satisfaire la plume de quelque rédacteur d’Agoravox spécialisé dans les sarkonades.
Certaines années, des événements donnant lieu à de mini scénarios se déroulent et peuvent faire le bonheur des rédactions. Avec chaque soir des précisions. On se souvient de l’année 1986, lorsque le Rainbow Warrior fut coulé dans un port néo-zélandais. Des supputations. Un enquêteur nommé, Bernard Tricot, dont la presse suit les déclarations alors que son rapport est établi pour le 26 août et remis au chef de l’Etat. Autre année qui restera un grand cru, 2003. La canicule, et Patrice Pelloux, figure en blouse blanche qu’on aurait dit échappée de la série urgence, alerte les autorités. Des vieux meurent sur le territoire. Que fait le ministre ? Les records de températures servent de chiffres alors qu’une comptabilité macabre additionne les cadavres du caniculathon. Et pour corser l’info, Bertrand Cantat ne se contrôle plus à Vilnius et on connaît la suite. Une affaire qui fit la une pendant une bonne semaine. Et voilà comment l’info d’août fut sauvée en cette année 2003 qui n’est pas bissextile. Contrairement à 2004 ou 2008. L’avantage de ces années étant la tenue des JO d’été ce qui permet d’alimenter les JT pendant plus de deux semaines. En 2005, l’ouragan Katrina a permis de fournir un sujet très « jitélévisuel ». Avec les prévisions météo, les images satellite, l’insoutenable suspense. Va-t-il y aller ou pas, dans la catégorie 5. Les files de voiture et le drame, les images spectaculaires de la côte des Etats-Unis frappée par vagues et vents, puis la Nouvelle Orléans inondée et une bonne polémique pour taper sur GW Bush.
Sinon, chaque année, il existe une info qui fait la une des JT mais seulement le week end. Ce sont les bouchons. Le sujet à traiter est simple. Aller à l’épicentre du bouchon sur l’autoroute. Pendant ce temps, à Rosny sous Bois, le journaliste, dans son bocal climatisé, reçoit les informations centralisées et peut délivrer les chiffres du bisonthon. 500, 700 kilomètres de bouchons, va-t-on battre un record ? Les envoyés spéciaux sont sur le terrain. Vont-ils interroger ce type qui vient de Lille, dans sa vieille caisse pourrie, pas climatisée, ayant subi sept heures de bouchons en plein cagnard, alors qu’il avait suivi les conseil de bisons futé, levé depuis 4 heures du mat ; les mômes derrière qui n’ont pas arrêté de brailler, le chien assoiffé qui ne cesse d’aboyer, les 45 minutes de queue pour faire le plein ; 15 heures de route au total ? Le type risque de faire la grimace ou d’envoyer bouler le journaliste. Mais dans le lot, y se trouvera bien quelque automobiliste mieux disposé pour répondre en souriant à la caméra. Des banalités du genre, mouais, il y a du monde mais on s’arrête, les enfants jouent et puis, ce n’est pas grave de souffrir quelques heures. D’ici ce soir, on oublie tout, on pense à autre chose, la mer, les glaces, le petit resto, chouette, on profite. D’ailleurs, tous les touristes interrogés disent qu’ils s’évadent, profitent, décompressent. Même s’il y en a qui s’emmerdent franchement en vacance. Il doit bien y en avoir mais il est interdit de les montrer ! C’est un sujet censuré. Il est officiellement interdit de s’ennuyer en vacances, il est proscrit d’être grincheux. Le mécontentement doit attendre la rentrée et ses grognes sociales habituelles ! Il est obligatoire d’être heureux en vacances et le journal télévisé doit le prouver !
Aussi paradoxal que cela soit, JP Pernaut sera en vacance alors que cette période est la plus riche en documentaires de terroir. Des randonneurs en marche sur un sentier des Alpes, des touristes attablés dans une paillote à la grande Motte, surveillant l’addition des rougets fris accompagné d’un Listel rosé, des férus de culture religieusement installés dans un cloître en Périgord pour se délecter d’une sonate de Bach, des enfants s’ébrouant dans la piscine du camping ou s’éclatant sur les toboggans d’un centre aquatique, des campeurs en Gironde, près du bassin, pour évoquer une fois de plus le lieu de tournage du film Camping, des pêcheurs à pied sur une plage bretonne, des badauds s’attardant le soir sur le vieux port de Saint Tropez en quête d’une célébrité daignant se montrer depuis son yacht, des vues imprenables sur les îles de Lérins et ses pingouins en tongs débarquant depuis Cannes, des mouettes virevoltant sur la baie des anges suivies de touristes en quête d’exotisme et couleurs locales arpentant les rues du vieux Nice pendant que les minettes ne sont bronzer sur les galets de la plage, que les dragueurs invétérés osent quelque stratagème pendant que les blondes russes compagnes de quelque industriel ayant fait fortune à Moscou se déhanchent sur la plage privée du Négresco en tenue bing bong, des stars sur la croisette à Cannes, des touristes en Grèce, des jeunes alcoolisés, titubant sur la plage d’Ibiza à dix heures du mat après de torrides nuits à s’agiter sur d’inaudibles boîtes à sons électroniques, sans oublier le reportage sur ces belges qui reviennent depuis 20 ans au même emplacement, dans le même camping, et retrouvent ces retraités ch’tis avec qui ils prennent l’apéro le soir en sortant le même rosé du frigo… Et voilà, les vacances sont achevées, les sujets plus sérieux attendent les Français qu’on aura filmé vers le 20 août dans les centres commerciaux en quête des achats de fournitures scolaires. Chaque année on y a droit ! Combien ça coûte ? Bonne rentrée !
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