Cette disposition des cinq cents signatures ne date pas d’hier mais, sauf erreur, de 76. C’est la loi. Elle pourrait être révisée, bien évidemment, mais faut-il le faire sous la pression d’un parti qui veut changer la loi pour se faire élire ? On voit cela actuellement en Afrique où un chef d’état vieillissant a fait modifier des textes qui l’empêcheraient d’être réélu. Les Sénégalais démocrates apprécient peu, apparemment, ces sortes de bidouillages.
Déplaçons le problème :
Les élus qui ont refusé de signer pour une candidature FN aux prochaines présidentielles sont-ils de parfaits salauds ? D’abominables fascistes ? Faudrait-il demander au FN de publier les lettres de refus, afin qu’on pût traîner un jour devant des tribunaux populaires d’un nouveau genre ces ennemis déclarés de la démocratie, ces crapules fascistes capables de tout entreprendre pour empêcher une évolution de la France qui pourrait la rapprocher enfin de l’admirable modèle hongrois actuel ?
Je n’aurais pas parlé du camp d’Auschwitz si l’anniversaire de sa libération n’avait coïncidé avec un rassemblement dansant de gens pour qui tout cette affaire n’est qu’un « détail ». Si vous trouvez qu’il est « malsain » de ne pas accepter de passer l’éponge sur cette manière de commémorer et si elle constitue aussi pour vous un détail, je comprends mieux la suite de votre intervention.
Le « fait des 500 signatures » n’est une « entrave à la démocratie » que depuis peu de jours. Il a bien dû y avoir quelques protestations aux précédentes élections mais la chose n’a jamais pris de pareilles proportions. Toute la classe politique volant au secours du FN en 2012, c’est quand même quelque chose qui m’inquiète concernant la démocratie, justement, et plus encore le fait que plusieurs millions de Français aient été induits depuis plus de vingt ans, par une publicité tout à fait perverse, à trouver des grâces à une idéologie aussi détestable. Mais pendant qu’on assurait la promotion de ces idées, il est vrai qu’on s’acharnait aussi à détruire l’instruction publique. Ceci explique peut-être cela.
En ce qui concerne l’histoire allemande, ce n’est pas le pourquoi qui m’intéresse ici, mais seulement le fait bien réel et indubitable qu’on soit passé de la république de Weimar au nazisme avec une très large approbation du peuple. Pour tous les historiens, il y a là une tragédie, la même qui les intéressera aussi lorsqu’il s’agira d’étudier l’illusion lyrique du printemps arabe. Là encore, les media portent une lourde responsabilité : la suite était plus que prévisible mais on a préféré crétiniser les masses occidentales et se crétiniser soi-même (je parle cette fois des gouvernants) lorsqu’on a créé en Libye, par une politique de gribouille, les conditions d’une situation anarchique incontrôlable.
Si vous trouvez enfin dans ma prose quelque chose qui soit de l’ordre du populisme et témoigne d’une sympathie pour les idées du FN, je veux bien être coupé en six morceaux et pendu !
La démocratie est certainement le moins mauvais des régimes politiques mais ce n’est pas quelque chose de simple et il n’y a pas de penseur politique qui ne se soit penché sur les paradoxes ce ce système. C’est un peu comme les explosifs dans les travaux publics : ils rendent des services tout à fait inestimables mais encore faut-il savoir les utiliser intelligemment et éviter de s’asseoir dessus pour allumer sa pipe. Les exemples historiques démontrant que la démocratie peut accoucher des pires tyrannies ne manquent pas. Michel Foucault, que beaucoup considèrent comme un grand philosophe s’était enthousiasmé pour la révolution iranienne : après la disparition du shah, on allait voir ce qu’on allait voir. On a vu et ce n’est pas bien exaltant ! En Tunisie et en Egypte, les élections ont été dans l’ensemble assez démocratiques, mais c’est un long hiver théocratique qui risque bien de succéder au printemps « démocratique ». Ce que je veux dire, pour faire simple, c’est qu’il est assez facile de berner les peuples et que la plus extrême vigilance s’impose concernant les courants qui veulent profiter de la démocratie pour imposer ensuite des systèmes détestables.
Je vous ai répondu mais j’ai cliqué sur « réagir à l’article » et non sur « réagir à ce message », ce qui fait que ma réponse se trouve tout à fait en fin de page. Excusez-moi.
Le problème, c’est que la pertinence des idées, en politique, ne garantit absolument pas leur succès, même dans le cadre du débat démocratique. J’entends assez souvent débattre, sur France Culture, des universitaires qui ont longuement étudié l’économie et qui l’enseignent. Il arrive régulièrement qu’ils aient des avis tout à fait divergents à propos des conséquences de telle ou telle mesure politique. J’essaie de comprendre, mais comme je n’ai pas du tout leur compétence, cela m’induit inévitablement à une certaine modestie, au doute et à la prudence. Quand j’entends en revanche les déclarations du FN ou de Mélanchon, je comprends tout immédiatement : c’est très simple et très clair : les responsables sont désignés et les remèdes paraissent évidents. Il suffira de les appliquer pour voir arriver rapidement des lendemains qui chantent. Cette vision du monde extrêmement simplifiée et, il faut bien le dire très illusoire, n’est pas sans charme : tout le monde a envie de comprendre et de disposer immédiatement des solutions idéales. C’est cela que j’appelle la démagogie. Les suites en sont généralement tout à fait funestes.
Très intéressante, cette réaction :
Je ne pensais pas du tout, écrivant cet article, et bien que je sois très soucieux de justice sociale et plutôt critique par rapport au système dans lequel nous vivons (plus que ce qui continue, à tort et dans toutes ses variantes, à vouloir se définir comme « la gauche ») exprimer des idées d’un extrémisme scandaleux : ma conclusion pourrait même paraître tout à fait d’un conservateur puisque je préconise, du moins sur ce point, de laisser les choses en l’état.
Qu’on puisse observer dans le fonctionnement des institutions des structures qui fassent penser au féodalisme, je serais le premier à l’admettre, mais de là à dire que nous sommes dans le fascisme, c’est quand même un peu brouiller les cartes, tout le monde en conviendra. En tout cas, je vois mal quel remède on pourrait attendre, concernant le « fascisme » que vous dénoncez, d’un parti qui, de tous ceux que nous connaissons, en est quand même le moins éloigné et dont, par votre intervention (mais vous n’êtes pas le seul) vous venez de prendre la défense.
Un dernier point : vous paraissez être assez dur et insultant avec une proposition simplement conservatrice et vous l’êtes beaucoup moins, apparemment, avec l’extrémisme du FN. Permettez-moi de trouver ça un peu rigolo.
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