Vidéo par Internet : le téléchargement en question
Un accord vient d’être signé pour promouvoir la Video On demand (VOD). Vous connaissez ? Il s’agit soit des films que les internautes pourront regarder en streaming par Internet (téléchargement non définitif), ce qui correspond à une location dématérialisée, soit des films que les internautes pourront télécharger définitivement par Internet et sans support matériel (achat dématérialisé). L’industrie cinématographique accepte que les plates-formes de téléchargement légales puissent mettre en ligne les films 33 semaines après leur sortie officielle au cinéma. Le téléchargement illégal via les réseaux P2P devrait être en revanche davantage contrôlé.
Mardi 20 décembre, Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture, vient d’entériner l’accord concernant la diffusion des œuvres cinématographiques sur Internet (via la location ou la vente dématérialisée -VOP, vidéo à la demande) avec les différents partenaires : les organisations professionnelles du cinéma français (BLIC, BLOC, ARP, SACD), l’Association des fournisseurs d’accès à Internet (AFA), les groupes audiovisuels Canal+ et France Télévisions, France Télécom et l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA) -TF1 ne fait pas partie des signataires de l’accord. La question était épineuse, et il a fallu plus d’un an de négociations et de tergiversations pour aboutir à cet accord.
La question de la chronologie des médias était au centre des négociations. Les professionnels du cinéma réclamaient que les opérateurs de VOD ne puissent pas diffuser de films pendant les 9 mois qui suivent leur sortie au cinéma, les fournisseurs d’accès à Internet demandaient, quant à eux, 6 mois (il s’agit de la période déjà effective pour les locations des vidéos et des DVD).
En quoi consiste l’accord ? Il fixe à 33 semaines, après la sortie en salles de cinéma, la diffusion des œuvres cinématographiques sur Internet, soit sous forme de location (streaming), soit à la vente (dématérialisée). En revanche, seuls les films qui sont sortis des salles de cinéma depuis plus de 36 mois (films dits de catalogue, et qui peuvent donc avoir déjà été diffusés à la télévision) pourront être commercialisés via un abonnement à un service de cinéma à la demande ; il s’agit en effet d’une concession de la part de l’industrie cinématographique qui ne souhaitait pas au départ que des formules d’abonnements soient réalisables en VOD. Ainsi, les chaînes de télévision gratuites ont réussi à préserver leurs intérêts, puisqu’elles ne peuvent pas non plus diffuser de films pendant 36 mois après la sortie en salle (cette règle ne s’applique toutefois pas aux chaînes qui ont signé des accords de partenariat de production avec lesdits films : dans ce cas, les chaînes gratuites peuvent diffuser le film coproduit au bout de 24 mois).
Les plates-formes Internet qui proposeront un téléchargement légal VOD auront à leur disposition différentes formules : paiements à l’acte, offres groupées ou abonnements seront possibles.
Mais quelles sont les contreparties que les prestataires Video On demand (VOD) devront fournir ?
A priori, l’accord, qui fixe la sortie des films en Video On Demand à 33 semaines (8 mois environ) après leur diffusion dans les salles obscures, propose que les prestataires VOD financeront en partie les œuvres cinématographiques françaises et européennes. Les fournisseurs d’accès Internet (FAI) s’engagent donc par le biais de cet accord à contribuer financièrement au développement « de la production d’oeuvres cinématographiques européennes et d’expression originale française ». Du côté des chiffres, les opérateurs de cinéma à la demande devront reverser 5% de leurs revenus (quand ceux-ci se situent dans la fourchette suivante : 1,5 et 3 millions d’euros), pourcentage qui peut monter jusqu’à 10% (quand les revenus des opérateurs VOD dépassent 5 millions d’euros).
Toutefois, précisons que cet accord n’est valable que pour une période de 12 mois, et que de nouvelles négociations seront entamées afin de décider de la poursuite ou non de ces principes.
Cet accord intervient dans un contexte difficile : le développement et l’impact économique du téléchargement et du partage des oeuvres culturelles via le réseau P2P (peer-to-peer) sur Internet vont faire l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale. Il s’agit du projet de loi DADVSI. Il propose de protéger davantage la diffusion des œuvres à caractère culturel. Autrement dit, le projet de loi DADVSI souhaite rendre illicites le partage et l’échange de contenus culturels, que ces échanges soient réalisés au titre de la copie privée ou non.
Les différentes organisations professionnelles du secteur cinématographique saluent toutefois cet accord, une « alternative légale à la piraterie », selon les propos de la Chambre syndicale des producteurs de films (CSPF). Cette signature est une première avancée vers des principes d’une offre légale de cinéma à la demande, elle est toutefois vraisemblablement la contrepartie de la « riposte graduée » que le gouvernement souhaite mettre en place : cette riposte graduée consiste en l’envoi de messages préventifs aux internautes qui échangent par réseau P2P, avant que des sanctions ne soient prononcées.
Cet accord doit montrer qu’Internet pourrait devenir un formidable outil de promotion de la cinématographie d’origine française dans le monde et en Europe, si une régulation intelligente est mise en place.
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