Big Brother perspective
Cette brève fiction, suivie d’un questionnement sur la situation et les tendances actuelles, pose la perspective d’un monde où la surveillance à l’image de ce qui se fait en matière de vidéo surveillance est omniprésente. Un monde où l’Etat devient policier pour le bien de tous, un monde qui malheureusement n’est pas si improbable que cela. En effet, on mesure que technologiquement, elle est réalisable sous peu d’années.
La lecture d’un article du journal Le Monde ainsi que la tendance actuelle à vouloir tout surveiller, tout contrôler, devrait conduire le lecteur à se poser plus d’une question.
Dépêche : le gouvernement approuve la loi sur la sécurité (fiction)
Le gouvernement a décidé d’approuver le projet de loi visant à "pucer" l’ensemble des citoyens à l’aide d’une RFID afin de remplacer les papiers administratifs en tout genre (passeport, carte vitale...), mais aussi sous la pression du gouvernement de droite et l’attentisme de la gauche, il a amendé le projet pour y inclure la proposition de "fusible anti-crime".
Petit rappel.
Face à la difficulté des policiers, et malgré leur nombre, à interpeller des suspects ou les hommes déjà condamnés, la société BioSecure Initiative a développé une puce RFID à agent actif. Cette puce, à la différence des autres, inclut deux petits réservoirs contenant des produits toxiques brevetés, qui ont chacun une fonction : plonger le truand dans un coma artificiel pour faciliter l’interpellation, ou encore pour les plus dangereux, libérer une toxine dérivée de la toxine botulique afin d’empêcher définitivement l’individu en question de nuire.
La libération des agents actifs dans le sang du patient se fait à l’aide d’un signal crypté contenant l’identifiant unique et "secret" de la puce, envoyé à la puce RFID par un émetteur portatif ou alors par n’importe laquelle des nombreuses bornes de contrôle d’identité automatiques disséminées sur le territoire national et dans certains pays de l’union. Dans ce second cas, lorsque la borne, qui est dissimulée dans les trottoirs, identifie un criminel, elle accède à une base de la police qui lui indique quelle substance libérer pour l’individu concerné.
Le ministre de l’intérieur ainsi que l’ensemble du gouvernement se félicite de cette avancée spectaculaire en matière de criminologie, permettant enfin de mettre un terme instantanément aux actions des nombreux criminels et voyous dans la société (leur nombre ayant explosé de plus de 400 % depuis le durcissement des lois). "D’un simple clic de bouton nous serons en mesure de mettre quasiment instantanément hors d’usage n’importe quel fuyard, et sans mobiliser de policier, ce qui nous permet de substantielles économies", a annoncé hier soir sur TV France le ministre de l’intérieur.
La firme BioSecure Initiative, quant à elle, annonce travailler avec acharnement sur la révision B de la puce (qui sera la version implantée aux citoyens) afin d’y intégrer des mesures anti-biopsie. En effet l’un des points faibles de la révision A réside dans le fait que la puce peut être retirée, ce qui la rend inefficace. Ce problème n’est pas sans rappeler celui des DRM qui furent imposés en 2006 pour mettre fin au piratage. Ainsi BioSecure se targe d’avoir inventé le DRM universel.
Dans les faits, pour empêcher toute élimination de la puce RFID, l’applicateur qui posera la puce injectera parallèlement une solution dont la composition est tenue secrète. Dans les faits, ce que l’on sait du système est que la puce est recouverte d’un catalyseur qui transforme certains éléments naturellement présents dans le corps humain en inhibiteurs d’une toxine qui est libérée par un virus issu du génie génétique et qui se trouve dans la solution injectable. Comme cet inhibiteur est dégradé, puis éliminé par le corps humain, si une puce venait à être retirée (après un accident, une défaillance ou pour des raisons criminelles afin d’échapper au contrôle des bornes automatiques), il existera un délais de 3 jours pour poser une nouvelle puce. Sans cette intervention facturée 100 euros et remboursée à 50% par la Sécurité sociale, la toxine, libérée en continu par le virus, provoquera une paralysie progressive conduisant sous 48h à l’asphyxie et au décès de l’individu. Délai jugé suffisant pour intervenir sur n’importe quel individu honnête.
Un tel système, annonce BioSecure Initiative, n’est certes pas infaillible, mais elle estime que le prix unitaire d’une intervention pour retirer définitivement la puce coûterait la bagatelle de 70 années de salaire d’un cadre moyen dans le cas le plus pessimiste, rendant ainsi les fraudes, déjà improbables, statistiquement nulles. En effet, il faut développer puis fabriquer un agent actif contre le virus dont on sait aujourd’hui, selon les dires de la société, que la composition et les moyens nécessaires ne pourront être ramenés en-deçà de l’estimation pessimiste donnée. Le tout sans compter sur la très délicate intervention chirurgicale nécessaire afin d’ôter la puce, qui sera vraisemblablement logée près du cerveau en passant par un orifice derrière l’oreille.
Précisons que pour des raison stratégiques, les membres du gouvernement seront exemptés de la révision B de la puce et seront seulement "équipés" de la révision A moins contraignante.
Vivrons-nous enfin dans le monde idéal, de paix et de sécurité ? Tout le laisse croire...
Note : ce texte est une pure fiction et la firme BioSecure Initiative ne donnant aucune réponse sous Google (taper guillemets compris ’’BioSecure Initiative’’) est aussi une pure imagination.
C’est en lisant l’article du journal Le Monde intitulé « Big Brother sur la route » (http://www.lemonde.frwww.lemonde.fr/web/article/0,1-0,36-783392,0.html du 14 juin 2006) que j’ai ressenti le besoin d’écrire cette nouvelle qui se veut, au regard des tendances actuelles, comme un avertissement aux lecteurs, de ce qui, avec une probabilité toujours plus grande, nous pend au nez. En effet, sous le leitmotiv « Puisque je n’ai rien à me reprocher, je n’ai rien à craindre », la plupart des gens sont prêts à accepter n’importe quoi, quitte à donner des armes redoutables aux futurs dictateurs.
Qu’importe, diront certains, « On n’est pas prêt de laisser s’installer un dictateur aux commandes », mais alors faut-il rappeler le choc du 21 avril, qui aurait au moins été un pas de géant de plus dans cette direction ? Faut-il encore se souvenir qu’il n’y a quelques années seulement, les systèmes de vidéo surveillance auraient soulevé une indignation à faire démissionner n’importe quel gouvernement ? Aujourd’hui on compte près de 100 000 caméras de vidéo surveillance en Angleterre et leur nombre sur le sol français ne cesse de croître... Ces faits étant établis, cette fiction restera-t-elle vraiment une fiction pour longtemps ? La question doit être posée.
Et est-ce réellement de la naïveté que de croire que des systèmes de contrôle omniprésents et ne laissant aucune chance à la vie privée et à l’anonymat et offrant un tel pouvoir d’intimidation sur les gens, y compris sur les leaders d’opinions contraires aux desseins d’un gouvernement, seront utilisés bien sagement ’’uniquement’’ dans le but officiel ? Face à un pouvoir absolu sur chaque individu, c’est une tendance naturelle et implacable qui poussera toujours plus loin les gens de pouvoir, capables d’échapper au système, à l’utiliser pour leurs besoins qui, il faudrait être plus que naïf pour le croire, ne sont certainement pas dans l’intérêt d’autrui et encore moins dans l’intérêt du bien collectif. Ne comptons pas sur les trop rares exceptions à la règle pour assurer un équilibre et servir de garde-fou.
N’est-ce pas le cardinal Richelieu qui a dit un jour : « Donnez-moi six lignes écrites par le plus honnête des hommes et je trouverai dedans de quoi le faire pendre » ? Effectivement, aussi honnête que l’on puisse être, on encourt toujours la probabilité de ’’fauter’’ un jour ou l’autre, et sans dire que les pouvoirs changeant, la ’’légalité’’ parfois votée mais toujours issue du pouvoir change de même. Ainsi, ce qui est aujourd’hui parfaitement normal sera peut-être demain puni par la loi.
Il faut bien mesurer les dangers de tels systèmes de surveillance généralisée, tels les Big Brothers de la route, bien réels eux. Ainsi par exemple, si par malheur un dirigeant ’’pétait’’ les plombs ou si, démocratiquement élu, il se mettait à faire tout autre chose que ce qu’il a promis, quelle armes aurions-nous alors pour nous défendre, alors qu’au moindre instant, au moindre geste, toutes nos actions sont soigneusement consignées, traitées, filtrées, utilisées...
De même que le ’’Carnet de comportement’’ pour les jeunes enfants leur collera à la peau, nous vivrons alors dans un monde où toute action légale à l’époque ou inconsciente du fait de l’innocence de la jeunesse ou de la méconnaissance d’une loi bien particulière, sera conservée et pourra (pour ne pas dire qu’elle le sera) être utilisée contre nous le jour où nos actions, même légales et sans nuisance, gêneront certaines personnes de pouvoir (politiques, financiers ou mafieux).
Ce jour, déjà entamé, que nous restera-t-il de notre liberté, et de la plus fondamentale d’entre elles : la vie privée ? Serons-nous alors tous des esclaves d’un système duquel on ne peut s’échapper, nous trouvant aux mains des pouvoirs politiques, des grandes multinationales et des mafieux suffisamment riches en argent et en connexions pour tourner le système en leur avantage, et l’utilisant pour mettre « hors circuit » tous ceux qui oseraient dénoncer le système et les abus ?
Il faut bien comprendre les dangers et les effets ’’oubliés’’ de telles mesures, et il ne faut pas beaucoup d’imagination pour voir ce qui peut se passer avec un système comme celui décrit dans la fiction de cet article. De même, sans beaucoup d’imagination et sans réel obstacle, l’article du Monde lui aussi permet d’identifier de nombreuses dérives possibles et potentiellement catastrophiques, pour ce système lui déjà bien réel. Mais pour autant il ne faut pas non plus négliger la surveillance absolue qui est aujourd’hui en constante progression en matière d’informatique et plus particulièrement en France avec la loi DADVSI. Cette dernière impose entre autres (si votée en l’état actuel) l’installation de systèmes de filtrages sur tous les ordinateurs. Ou encore faut-il se rappeler les logs (enregistrements de toutes les actions effectuées à partir d’un ordinateur sur Internet) de connexions qui d’abord prévus pour une durée limitée après les attentats du 11 septembre, sont dorénavant devenus permanents sans que personne n’en soit réellement informé.
Le point commun à tous ces systèmes de surveillance, y compris pour cette fiction ? L’informatique !
Oui, tous les systèmes de surveillance de masse reposent sur l’informatisation qui permet de ficher, traiter, filtrer, surveiller un nombre quasiment infini d’actions et de personnes. Ainsi il est vital de comprendre que notre liberté de demain se joue au niveau de notre liberté dans les domaines de l’informatique et de l’Internet. Pour nous le rappeler : il faut être conscient de l’inévitable tendance de fond à l’informatisation de toutes les choses qui font notre liberté : tâches administratives, facturations, amendes, radars automatiques, communications téléphoniques et e-mails, échanges de données (films de vacances, documents...) pour ne citer que ceux-là.
Face à
ces faits réels et ces dangers bien présents, n’est-il
pas temps de s’intéresser un peu plus à ces sujets que
sont la DADVSI, les systèmes de vidéo surveillance, le
fichage de l’utilisation d’Internet, etc. ? Bref, au fait que nous
vivions de plus en plus dans un Etat policier, un
autre nom pour une dictature ou une oligarchie, et dont les policiers
sont de plus en plus des ordinateurs, car incapables de conscience et
de bon sens, donc de se révolter contre ce qu’on leur fait
faire car c’est immoral et dangereux ?
Souvenez-vous : « Le chemin vers l’enfer est pavé de bonnes intentions... »
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