L’utopie n’est pas un rêve : Villa El Salvador
Jean-Michel Rodrigo, documentariste, a vécu au Pérou plusieurs années et nous présente un film, témoignage d’une expérience singulière : la naissance et 30 ans de la vie de Villa El Salvador. Création urbaine de nécessité, de solidarité et du travail collectif, cette cité s’est édifiée sur des bases sociales et politiques qui nous interrogent.
Tout commence en 1971. La population pauvre du Pérou envahit des terrains de la ville de Lima, puis le centre ville. Repoussés par l’armée dans des bidonvilles, les jeunes Péruviens se battent pour obtenir un territoire et le droit d’exister.
À la même époque doit se tenir une réunion de la Banque Mondiale à Lima. Le gouvernement, pour nettoyer sa ville, concède alors un terrain aux insurgés.
Nulle part ailleurs
À 30 kilomètres de Lima, décor de sable à plus d’une heure de route d’un point d’eau, un vaste morceau de désert “accueille” la population ouvrière à laquelle viennent s’ajouter les victimes paysannes d’un tremblement de terre andin. En une semaine, ils sont près de 100 000 et ont tout à construire. Trois mois plus tard, leurs enfants sont scolarisés.
Démunis mais loin de se résigner, ils mettent tout en œuvre pour donner vie à leur rêve commun ; créer une ville reposant sur le collectif et l’égalité.
Portés par une foi syncrétique, le syndicalisme révolutionnaire, une culture andine très forte et le désir d’exister, ils bâtissent en quelques mois une petite ville de paille aux principes égalitaires puis des maisons et jardins de mêmes dimensions, des cantines collectives, des écoles et plantent des arbres.
Démocratie participative
Les projets avancent à base de décisions prises à l’unanimité après discussions mêlant toutes les générations, et la participation de tous tant au point de vue humain que financier.
Tout est prévu à long terme ; des terrains sont réservés pour les parcs, les hopitaux et les universités. En avance de quarante ans sur leur temps, ils imaginent et mettent en œuvre la campagne à la ville en réservant une zone agricole afin de nourrir la population. Ils n’ont pas encore l’argent, ils feront tout pour en trouver et fabriqueront ce qu’ils ne peuvent acheter.
Et c’est grâce à cette force collective qui les anime, que la ville grandit et s’organise.
De grandes aspirations au quotidien
En moins de quarante ans, les habitants de Villa el Salvador ont réussi leur pari : ne pas renoncer à leurs aspirations au motif de leur pauvreté. Aujourd’hui la ville compte 300 000 d’habitants et rejoint la mégalopole Lima, d’où ses fondateurs avaient été chassés. Villa el Salvador est maintenant organisée en quartiers, équipés chacun d’un parc, de sa bibliothèque et de ses écoles. Les routes sont goudronnées, une station radio et de télévision a été créée ainsi qu’un lac artificiel. Les jeunes y sont formés non seulement aux métiers d’aujourd’hui mais aussi aux disciplines artistiques. Le respect de l’autre quel que soit son âge, son origine est un fondement qui se transmet de génération en génération.
« Parce que nous n’avons rien, nous ferons tout » est la devise de ces habitants, qui ont su avancer malgré les drames et les difficultés qui les touchaient en restant soudés. Cette solidarité les a sauvé et leur a permis de donner vie à leur rêve en plein désert. Un bel exemple à méditer…
Jean-Michel Rodrigo, témoin concerné
C’est cette formidable expérience que nous racontent Jean-Michel Rodrigo qui a vécu au Pérou dans les années quatre-vingt à l’époque où la ville n’avait qu’une dizaine d’années, et Marina Paugam, sa compagne. Il y est retourné en 2008 pour savoir ce que cette utopie géante était devenue. Tout en restant à bonne distance de son sujet, il retrace avec témoignages et images d’archives la vie des habitants de Villa el Salvador de sa création à aujourd’hui.
Historien de formation, photographe, journaliste, réalisateur et producteur de documentaires, Jean-Michel Rodrigo s’attache depuis toujours à informer le public sur l’évolution du monde actuel. Il est également l’un des fondateurs de la société « Mécanos productions » ; ses nombreux films documentaires sont diffusés par les chaînes de télévision, mais aussi dans les réseaux associatifs. Ses films nous invitent à nous interroger sur notre conception du monde et les moyens de le faire évoluer.
Le voir
Projections : le 14 septembre au cinéma Utopia de Bordeaux, multi-projections au cours de l’été dans les centres de loisirs de la CCAS, le 10 octobre à la 3ème Rencontre du Documentaire de la solidarité Internationale et du Développement, et les 9 et 10 octobre 2009 à Salies-de-Béarn (Pyrénées Atlantiques).
D’autres projections seront programmées à la télévision et annoncées sur le site, où
l’on peut également acheter le DVD.
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