La considération du vote dans la Vème République
Le 4 octobre 1958, la constitution de la Vème république est adoptée par référendum. Emplie d’espoirs démagogiques et, telle une Bible ou un Coran, soumise à toutes les interprétations des plus ubuesques aux plus extrêmes, elle s’impose néanmoins par sa réhabilitation du principe de l’homme fort, absent de la gouvernance française depuis la fin du Second Empire.
Le Général de Gaulle, considéré aujourd’hui par beaucoup comme le dernier grand homme d’état français, désirait mettre en place un exécutif fort, moins soumis aux tergiversations de l’Assemblée que dans les constitutions précédentes. En cela, il dût légitimer d’avantage le président de la République en le faisant élire par suffrage universel direct. Son projet, à terme, devait donner plus de stabilité à un pays qui venait de traverser une première moitié de XXème siècle plutôt agitée, la IIIème République ayant indirectement mené à la défaite de 1940 et la IVème fonçant dans le mur en Algérie, en cause un pouvoir exécutif souvent bridé par une Assemblée où une majorité peinait à se constituer.
La Vème République n’a qu’un seul grand défaut : C’est qu’elle est taillée de manière à ce qu’elle ne puisse correctement fonctionner et être appliquée qu’avec un homme intègre à sa tête, ayant dans l’idée le souci du peuple et de la France. Elle a été rédigée dans l’optique de donner un futur à un pays trop longtemps soumis aux intérêts personnels de ses serviteurs qui ne voyaient pas plus loin que la fin de leur mandat, en témoignent les « grenouillages » qu’évoque De Gaulle dans ses mémoires.
Avec le temps, la Proportionnelle mise en place à l’époque pour faciliter l’apparition d’une majorité à l’Assemblée et accessoirement empêcher les communistes d’accéder au pouvoir s’est vue perçue par les citoyens comme un système antidémocratique, bloquant l’arrivée dans l’hémicycle de partis comme le Front National, ce qui n’est pas pour déplaire à nos élites désintéressées.
Bien entendu, il serait aisé de décortiquer point par point chaque phrase de la Constitution pour démontrer qu’elle a entièrement perdu tout son sens et qu’elle n’est brandie en bouclier ultime que quand cela arrange les intéressés, néanmoins, il est nécessaire de s’attarder sur quelques idées fondatrices : Le principe et la devise.
Gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple.
Tout d’abord, il faut savoir que le mot « Peuple » désigne littéralement un ensemble d’individus partageant un territoire, des mœurs, une culture ou un système de gouvernement. Littéralement, ça implique donc absolument tous les français, de l’Enarque millionnaire au chômeur longue durée. Littéralement, il n’y a rien à redire, le pouvoir est actuellement du peuple, par le peuple et pour le peuple, même si c’est plus pour le peuple d’en haut que le peuple d’en bas. Sauf que dans la langue française, le mot « peuple » désigne péjorativement les individus appartenant à la couche moyenne de la société. Si l’on prend donc le terme de manière péjorative, le gouvernement est objectivement seulement par le peuple. Combien d’ouvriers, de petits patrons ministres ? Combien de mesures destinées aux classes moyennes autrement que par le biais du « Je donne pour mieux reprendre » ?
Liberté, Egalité, Fraternité
Ne riez pas, c’est officiel, ces trois mots se trouvent être la devise de la France. Nous avons donc une Liberté très largement encadrée, ce qui est un charmant oxymore, une Egalité qui fonctionne par couche sociales (Grossièrement, tous les français aisés sont égaux entre eux devant la Loi et l’Impôt et tous les français moyens sont égaux entre eux devant les mêmes institutions, mais pas de connexions possible entre les deux mondes), et une Fraternité…Qui fonctionne un peu comme l’Egalité, la Fraternité marche, mais seulement entre nous, « Nous » désignant à peu près toutes les mouvances opposées entre elles de la société. Fraternité par castes, donc.
Il n’est pas sans dire qu’un Président de la République se doit de faire son possible pour que la Constitution qui l’a fait élire soit appliquée, en commençant par calquer ses décisions sur les principes de bases, qui n’ont rien de compliqué. Depuis que Georges Pompidou, ancien employé de la banque Rothschild, a vendu les intérêts français aux banquiers, on assiste à un total mépris des Présidents de la République successifs pour les français et leurs valeurs, dont le degré s’est aggravé depuis la disparition du dernier qui faisait l’effort d’essayer d’avoir l’air d’un homme d’Etat, Jacques Chirac.
Par définition et dans son contexte de rédaction, la Constitution n’est pas démocratique, mais elle n’en demeure pas moins dans la forme bien intentionnée et désireuse du bien commun. Néanmoins, à la manière des djihadistes interprétant une faute d’orthographe dans le Coran comme un message divin les intimant à guerroyer en dépit des Commandements basiques (Le principe de la jurisprudence appliqué aux livres de Religion), le gouvernement français joue sur les mots et les formulations pour piétiner les institutions tout en restant dans la légalité.
Face à cela, l’impuissance du citoyen demeure, dans la mesure où il est peu probable qu’un coup d’Etat ait lieu en France au vu du fait que les prétendants au pouvoir s’entendent très bien entre eux, et s’amusent d’une alternance qu’ils ne prennent même pas la peine de masquer. Un peu comme si deux amis jouaient au tennis, adversaires le temps de la partie, mais le match terminé, ils s’en vont bras dessus bras dessous boire un café en terrasse discuter cinéma. Nous n’assistons malheureusement qu’à la partie de tennis.
La Constitution, à la manière de l’ONU, est là pour la parade. A la manière d’un pot de fleur qui égaille une pièce, sans réelle utilité dans le fond mais parfait pour la forme. Et dès qu’il devient trop encombrant, on le change de place, on le change de couleur, de forme, on l’adapte. Au final, on appelle toujours ça un pot de fleur sauf qu’au gré des modifications, c’est devenu une niche pour chien.
Certes, le vote Front National apparaît comme une alternative. Mais la Constitution fait que, même si par un miracle le parti arrivait au pouvoir, il ne pourrait pas gouverner et voter les solutions miracles qu’il prône car il n’a pas la structure nécessaire pour obtenir une majorité à l’Assemblée, perdant donc toute crédibilité. Le FN a tout intérêt à être un parti fort, car plus un parti est fort et plus il touche de subventions de l’Etat, mais le pouvoir détruirait son socle d’électeurs « dégoutés du système », c'est-à-dire une très large majorité, car il rentrerait justement « dans le système ». D’autant plus que dans ce système, il a le rôle du catalyseur de la grogne qui monte. Le FN fait 20%, les français ont l’impression d’être entendu, ils ont l’impression que voter à une incidence alors que le système est bloqué de telle manière que rien ne peut changer sans modification radicale de la Constitution. Les partis ne servent qu’à eux-mêmes, ils sont les intermédiaires entre le peuple et le pouvoir et remplissent très mal leur rôle. En démontre le comportement de certains députés socialistes en désaccord personnel avec une loi quelconque qu’ils votent quand même !
Non, la France, ce n’est pas de la démocratie, c’est la dictature des partis. Et ce n’est pas en allant voter justement pour un parti, même s’il se prétend hors du système, que les choses vont changer. Le FN, comme le FDG et consort, sont semblables à des cochons qui se prétendent sauvages, passent la journée en pleine nature à courir dans tous les sens, mais dès que la nuit et la faim viennent, ils se ruent dans la bergerie républicaine bouffer aux râteliers et dormir bien au chaud, légitimés par le vote du peuple, lui-même bouffi de culpabilité à l’égard de son choix et désireux de transformer tout cela en une bonne poêlée de lardons.
Il n’y a pas de bon choix. L’acte civique est justement de garder sa voix pour soi. Effectivement, quand nous sommes minoritaires dans cet optique, ce sont les autres qui choisissent. Une voix silencieuse au milieu de millions de voix qui hurlent tour à tour « Bleu ! » « Rose ! » « Rouge ! » ne se fait pas entendre. En revanche, si une pauvre voix esseulée hurle « Bleu ! », et que des millions de voix silencieuse l’accompagnent, ça change la donne. Le silence est plus puissant que n’importe quel cri.
Un pouvoir, pour se maintenir, doit se rendre légitime. En cela, il est logique qu’aux dernières élections les citoyens qui aient voté pour Hollande soient aussi responsable de son élection et surtout de son maintien que ceux qui ont voté pour Sarkozy. Voter, même contre, c’est légitimer.
Le crime parfait reste impuni. La dictature parfaite se fait passer pour une démocratie.
Un pouvoir « élu » avec 95% d’abstention, même si la Constitution ne prévoit pas d’invalidation des élections à ce niveau, perdra en légitimité aux yeux du peuple. Moins il pourra ramener de suffrages dans ses poches gonflées d’arrogance, moins il sera assuré de son impunité. C’est par l’abstention que l’on reprend le pouvoir. Le vote n’a de sens que s’il est pris en compte, et pas manipulé et passé à la machine mathématique à la manière de la Proportionnelle pour donner le résultat escompté.
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