La place des pères dans la société française : un statut d’exclusion
NDLR de LPLM : un texte qui résume la vision humaniste et citoyenne de l’association [ les papas = les mamans ] avec cet état des lieux, sans concession, du poids de tous les milieux de pouvoir en tant que générateurs de disparités croisées et d’exclusion dans les questions de genre et de parentalité, s’opposant à une véritable révolution anthropologique en cours.
ÉTAT DES LIEUX
L’implication paternelle : une déferlante sociale
80 % des pères assistent à l’accouchement, 70 % prennent leur congé de paternité, les mères se sentent aidées ou très aidées, lors du congé de paternité, dans 80 % des cas.
70 % des pères souhaitent prendre une année sabbatique pour être auprès de l’enfant, 20 % sont partant pour un congé parental de trois ans ou plus.
Les pères assument 40 % des tâches éducatives et soins aux enfants alors que les hommes travaillent à plein temps dans 95 % des cas.
73 % des pères se lèvent la nuit si l’enfant en a besoin. 80 % des pères se libèrent pour faire face à un imprévu de l’enfant (pédiatre, école). Les cadres français, traditionnellement inféodés aux contraintes professionnelles, réclament depuis peu du temps pour se consacrer à leur famille.
68 % des pères et 62 % des mères se plaignent du manque de disponibilité des pères.
Le monde du travail : des disparités qui chargent l’assignation des femmes à l’enfance... et se « justifient » par la maternité
80 % des femmes travaillent dont 30 % à temps partiel avec un ratio de 70 % environ de temps partiel contraint. La flexibilité imposée au travail frappe en premier les femmes jeunes et les mères seules.
Le salaire féminin moyen est en moyenne inférieur de 20 % environ à celui des hommes. La justification implicite de ces disparités salariales est la perte de productivité occasionnée par la maternité et les charges de l’enfance. Tout comme pour le faible taux féminin de postes à haute responsabilité.
98 % des congés parentaux sont pris par les femmes sous la contrainte budgétaire (le contexte d’effondrement du pouvoir d’achat ne peut qu’aggraver la situation) nonobstant des représentations sociales prégnantes de hiérarchie parentale où la mère est supposée prééminente.
Les femmes sont renvoyées aux doubles contraintes enfance /profession, les hommes à travailler plus et voir moins leurs enfants. Annexe : la disparité de revenus dans l’improductivité due à l’âge.
Les femmes vivent en moyenne sept ans de plus que les hommes et gagnent 40 % de moins à la retraite.
Le poids des institutions : des résistances massives tous azimuts à l’égalité des sexes et des places parentales
L’hégémonie juridique des femmes sur la fécondité : « l’empire du ventre ». Une femme peut avorter sans en informer son conjoint. Un homme peut subir une recherche ADN en paternité de la part d’une femme ou d’un enfant, mais n’a pas le droit d’en obtenir une s’il la sollicite. La juriste féministe Marcella Iacub a notamment travaillé sur la question.
Périnatalité : une affaire exclusive de femmes. La préparation des hommes à l’accouchement et à l’accueil du nouveau-né tarde à se mettre en place. En région Paca, seul un groupe de pères fonctionne sur cinquante maternités. Il est pourtant reconnu que le taux d’anxiété des hommes est important lors de la gestation et que cela peut nuire à l’implication paternelle. Le syndrome de couvade est devenu la figure emblématique de cette anxiété. Quelques études pilotes démontrent l’effondrement du taux d’anxiété paternelle grâce à des groupes de paroles. Les sages-femmes sont quasi exclusivement des femmes, tout comme les puéricultrices.
La place des hommes dans l’accueil de la petite enfance : la suspicion pédophile comme prétexte à l’exclusion du champ masculin. Les travaux de Laurence Gavarini et de Nicolas Murcie (prix CNAF 2004) illustrent cette tendance nette. 3 % des emplois de la petite enfance sont masculins.
Choix sémantiques officiels : toujours exclusivement « maternels » ou féminins pour la prise en charge de l’enfant jeune. Le métier de « sage-femme » ne se conjugue pas officiellement au masculin, non plus que celui de « puéricultrice ». Les métiers de la petite enfance (0-3 ans) s’intitulent « assistantE maternelle ». Après quoi l’enfant fréquente l’école « maternelle » jusqu’à 6 ans. On reconnaît l’inféodation de l’enfance à un environnement maternel ou au pire exclusivement féminin, équivalent de substitut maternel.
Education nationale : un environnement très féminisé en primaire qui « omet » souvent les pères, voire les éconduit. Les professeurs des écoles primaires sont quasi exclusivement des femmes, d’autant plus que les enfants sont jeunes. Le droit d’information aux pères séparés n’ayant pas de contact direct subit de fréquents dysfonctionnements. En région Paca, les cadeaux pour la fête des pères sont très fréquemment « oubliés » (des articles de presse relaient régulièrement la question, « pas le temps » ou « il y a beaucoup d’enfants issus de familles séparées » servent de prétexte à cette secondarisation symbolique) alors que les cadeaux de fête des mères sont toujours faits. Des dissuasions fréquentes pour que des pères n’accompagnent pas les enfants lors de sorties scolaires sont à déplorer (on reconnaît le spectre implicite de la figure pédophile). Après avoir véhiculé des stéréotypes sexistes dans les années 50 (« papa fume la pipe, maman fait la vaisselle »), l’Education nationale continue d’entretenir une vision maternaliste excluant le père.
Le travail social : des représentations péjoratives de l’image paternelle. On doit notamment à Gérard Neyrand, sociologue, d’avoir pointé cet aspect. Un travail pilote pour lutter contre ces représentations a été mis en place dans la ville de Marseille, sur le modèle canadien. Michel Dugnat, célèbre pédopsychiatre, investi dans l’évolution de la périnatalité et de la place de l’enfant fait observer que ces programmes n’ont malheureusement pas été proposés auprès des professionnels de l’obstétrique qui restent strictement materno-centrés. En cas de placement d’enfant pour maltraitance maternelle, on recherche rarement si le père pourrait accueillir l’enfant.
Divorces et séparations : production d’exclusion et norme maternaliste unique imposée par une corporation judiciaire souveraine quasi exclusivement féminine.
Les séparations touchent 30 % de la population en zone agricole, 40 % en ville et 50 % en grande agglomération. 80 % des jeunes juges sont des femmes, 95 % des juges aux affaires familiales sont des femmes. 80 % des séparations sont demandées par des femmes. Hormis la résidence alternée (12 % des cas dont 80 % sur accord parental), une norme unique est imposée : résidence principale avec hégémonie de fait du parent résident et contribution à l’entretien de l’enfant attribuée de manière discrétionnaire sans aucune base officielle opposable ; ceci laisse place à un sujet majeur de conflit parental (CNAF 2007), d’autant que les séparations entraînent une perte moyenne de 30 % du pouvoir d’achat pour chaque hémi foyer ; la question budgétaire est ainsi souvent vitale pour chacun des parents et la crise économique ne va pas arranger les choses. Les droits de visite et d’hébergement laissent bien peu de place à la possibilité effective à la coparentalité, malgré l’inscription dans la loi de ce principe premier en droit (loi du 4 mars 2002) et malgré le consensus apparent des politiques, professionnels et spécialistes. Les institutions semblent se contenter de mesures « symboliques » sans se préoccuper du réel. Les alternatives au conflit (médiation familiale) sont sous-prescrites (0,5 % en 2004) et tardivement, alors que l’offre de médiation est parfaitement couverte et que les conflits sont exacerbés par la qualité et la durée des procédures. La durée moyenne d’audience JAF est de 20 minutes et une vingtaine de dossiers sont traités par demi-journée et par juge. Les décisions judiciaires ne sont pas respectées (non-présentation d’enfant, éloignement géographique volontaire). Les tentatives de disqualification infondées de la part d’un parent ne connaissent aucune régulation et la situation d’exclusion parentale corollaire est avalisée sans mesures de renouement du lien ni inversion de résidence. Ces faits valent pour équivalent d’une tacite incitation institutionnelle à une véritable délinquance parentale, en contradiction avec le retour affiché d’une politique répressive accrue, y compris dans l’enfance.
Hormis la résidence alternée, 90 % des résidences principales sont accordées aux femmes qui ont une probabilité d’acquérir la résidence principale et une pension tendant vers 100 % lorsqu’elles la demandent. Les pères demandaient la résidence principale dans 15 % des cas il a une quinzaine d’années et avaient alors une probabilité de l’obtenir de 20 %. Force est de constater que ces données genrées n’ont pas été réactualisées malgré une évolution massive de la famille et la publication en juin 2008 d’une étude officielle sur le sujet (cette étude a de plus subi un embargo de deux ans avant d’être portée à la connaissance du public). Le taux genré de demandes de résidence alternée n’est toujours pas connu, divers indicateurs tendent à faire penser que les pères la demandent dans 30 à 40 % des cas. Les mères qui n’obtiennent pas la résidence principale ne l’ont souvent pas demandée alors que des enfants sont confiés régulièrement à des mères avérées maltraitantes.
Une norme intériorisée avec caution médicale (Gérard Neyrand) est ainsi imposée en dépit de tout autre considération avec un formatage institutionnel. Si la société recherche un accroissement de l’implication paternelle, la logique est totalement inversée lors des séparations, abusant de stéréotypes sexistes obsolètes et réactionnaires et opposant les sexes ; ceci est contre-incitatif et contre-symbolique d’une participation masculine dans la sphère privée (Hugues Fulchiron, doyen de faculté de droit).
Lors de l’audition de l’association [les papas = les mamans] en mars 2008 au ministère de la Justice, le directeur de Cabinet a dit qu’il fallait traiter « une maltraitance institutionnelle dans les séparations ». Reste à attendre des mesures pour une situation dramatique qui se pérennise depuis des décennies...
Les discours « savants » : garants d’une hégémonie maternaliste avec secondarisation de la place des pères et infériorisation/exploitation de la place des femmes
Il revient à la critique féministe humaniste d’avoir dénoncé en premier les injonctions médicales maternalistes issues du milieu de pouvoir médical (Badinter) ainsi que les sophismes utilisés dans ce sens, notamment l’infaillibilité supposée de l’instinct maternel avec son essentialisation corollaire quand ce n’est pas la biologisation dangereuse du discours. Avec les travaux du Dr Brocca, à la fin du XIXe siècle, l’infériorisation sociale de la place des femmes a été justifiée avec la question de la taille inférieure du cerveau des femmes supposées moins intelligentes à cause de leur mythique « nature maternelle » (Catherine Vidal) ; dans la foulée est née avec cet auteur l’anthropométrie crânienne qui allait justifier plus tard des discriminations majeures allant jusqu’au génocide nazi.
Nicole Edelman, historienne, a largement travaillé sur la question de la répression des femmes par le discours médical et note la touche maternaliste constante.
La période suivant la Seconde Guerre mondiale a donné lieu à l’idéalisation maternelle par les médecins (Gérard Neyrand). Il est important de noter le lien avec le familialisme pétainiste qui en a fait le lit, les médecins ayant alors contribué largement à la glorification maternelle, base de la propagande maternaliste (« La Maternité épanouit la femme », livret distribué et commenté par les médecins, sages-femmes et pharmaciens à l’époque). Ce discours servit de tremplin au modèle « mère au foyer » des Trente Glorieuses.
Un renouveau du discours médical maternaliste a eu lieu à l’approche de l’an 2000 notamment avec le Dr Edwige Antier faisant « l’éloge des mères » sur une radio à forte audience (2004 Badinter).
Mais c’est certainement sous le prétexte des débats farouches sur la résidence alternée que des médecins ont repris le flambeau d’une hiérarchisation essentialisée des places parentales, notamment les Dr Maurice Berger et Annah Rotmann. En effet, sous prétexte d’incroyables catastrophes qu’entraînerait la résidence alternée, selon ces auteurs, c’est bien la prééminence maternelle, alias primat maternel, qui se joue au travers des « besoins de l’enfant », de manière outrancièrement sécuritaire (« les bébés ne sont pas une espèce protégée »). Force est de constater l’absence de toute preuve de leur discours ultra-alarmiste au « bénéfice » de nombreux et habiles sophismes théoriques et idéologiques. On peut noter pour illustrer : « les enfants risquent des destructions cérébrales irréversibles s’ils ne sont pas en la présence continue de la mère jusqu’à 6 voire 9 ans », « la folie de l’égalité des pères contamine les juges et les avocats », des appels au rapt international pour que « les mères protègent les enfants des risques de la résidence alternée », des insultes aux personnes ne partageant pas leur avis ainsi qu’un appel à la Bible ; nous sommes là confrontés à un climat digne des croisades... au passage l’abus de l’archaïsation et de l’amalgame genré est pratiqué largement au mépris de toute réalité de la diversité des comportements genrés et parentaux, soit un déni du réel ou encore d’un processus proche de la psychose.
De ces discours, Gérard Neyrand attire l’attention sur le fait qu’il s’agit de « l’imposition d’une norme unique » et que c’est « une position politique concernant l’ordre social ». On serait tenté de rajouter « autoritariste ».
Pour mémoire, au travers des places sexuées et parentales, se joue aussi l’ordre sexuel et l’histoire médicale a largement contribué à la répression sexuelle (Alain Giami), reprenant la répression théocratique enracinée dans l’Inquisition et sa barbarie.
Les discours théocratiques : les dogmes mariaux comme support historique et conceptuel d’une hiérarchisation parentale
Là encore, la critique féministe a largement dénoncé les dogmes mariaux comme justification de la place inférieure des femmes avec une sacralisation littérale de la maternité (Simone de Beauvoir, Elisabeth Badinter, Yvonne Knibiehler). On peut rajouter la justification implicite du patriarcat, mais aussi la répression de la sexualité féminine et également un rôle secondaire implicite du père réel au « bénéfice » d’un Père tout-puissant car divin...
La religion devrait rester à sa place dans des sociétés laïques, mais le poids des racines théocratiques dans les représentations sexuées, genrées et parentales reste très fort.
On croit pouvoir noter un recul élastique des positions du Vatican concernant la morale, la Famille et par là-même les places parentales. Le cent-cinquentenaire des apparitions à Lourdes, réactivant le dogme de l’Immaculée Conception, alourdit le poids actuel des racines théocratiques, d’autant qu’on voit émerger divers indicateurs de contre-laïcité au sein même de la gouvernance actuelle.
Si la religion catholique, dominante statistiquement en France, a été pointée, il en va de même dans les autres religions monothéistes pour les rapports masculin/féminin et les places parentales... notamment avec la montée des intégrismes religieux.
Le retour d’une sacralisation de la mère et de l’enfant dans les années 2000 dans les discours savants a été noté (notamment Julia Kristeva).
Glorification maternelle sous Vichy : un modèle contre-démocratique internationalisé et récurrent
La glorification maternelle a été la clé de voûte de l’Ordre Moral sous Vichy avec une abondante propagande relayée de manière corporatiste par les médecins, mais aussi par voie d’affichage. On a vu émerger l’institution officielle de la Fête des mères ; dans le même temps les pères étaient invités à « aller gagner de l’argent en Allemagne pour que les mauvais jours soient finis ». On reconnaît la consécration du stéréotype » assignation exclusive des femmes à l’enfance /confinement du rôle du père à un pourvoyeur financier ». La puissante propagande familialiste consommait 80 % du budget de la politique familiale et a entraîné un pic de natalité dès 1943, alors que les restrictions sévissaient et que nombre d’hommes étaient en Allemagne, prisonniers ou au STO. On serait tenté de résumer avec le fait que beaucoup d’idéologie médiatisée et peu de moyens financiers favorisent la natalité, obsession constante des politiques. Ce modèle, somme toute économique, n’a pas manqué d’intéresser historiens et politiques et la question s’est internationalisée, notamment la Fête des mères et via le mouvement mondial des mères, représenté à l’ONU dès 1947. Il semble qu’il soit difficile en politique familiale d’inventer autre chose, tant la « recette de cuisine » semble efficace et peu coûteuse ; et l’on revoit ce modèle réactualisé et remaquillé régulièrement. Cette vision du monde genrée est à lier avec les idéologies néfastes et le contexte de crise économique. L’exemple de Vichy est éloquent en soi.
Le poids des institutions : des idéologies et mesures discriminatoires au service d’un familialisme d’Etat déguisé et avare
Les indicateurs officiels de population et de comportement : strictement materno-centrés. Issus de la période vichyste, les différents instituts officiels de statistiques et de sondages influent sur le comportement des personnes avec une spécificité française : celle d’un intéressement explicite de la population aux questions de la natalité même si les mesures concrètes (financières) restent dans le fameux implicite. Il est recherché le taux de fécondité des femmes, le nombre d’enfants, le nombre d’enfants qui vivent avec un homme au foyer (sans distinction de lien de filiation), divers indicateurs de pouvoir d’achat, le nombre de familles monoparentales, le taux de pères séparés qui ne voient plus leurs enfants après séparation ou ne paient pas la pension alimentaire, mais on ne connaît pas le nombre officiel de pères en France. On ne peut imaginer autre chose qu’un désintérêt de la place du père.
Mesures financières institutionnelles : centrées sur UN parent. Hormis la double affiliation de Sécurité sociale, intervenue très tardivement, toutes les mesures financières touchant la famille restent centrées sur Un parent ; déduction fiscale (part par enfant), avantages familiaux dont l’attribution est rédigée « à la mère » en l’absence d’accord parental explicite. La résidence alternée a donné lieu récemment à l’attribution paritaire (sauf mention expresse du tribunal aux affaires familiales) des avantages familiaux. Malgré son apparente positivité dans ce modèle légiféré le plus abouti de l’égalité hommes/femmes, cette mesure a un effet pervers : elle rend d’autant moins attractive la résidence alternée pour les femmes...
Congés « parentaux » : un sous-salaire maternel aux effets pervers. Sous la pression conjointe des disparités salariales et des injonctions sociales maternalistes, ces congés parentaux sont pris à 98 % par les femmes. Hormis les quatorze jours « symboliques » du congé de paternité, rien n’est prévu pour aider les pères plus disponibles auprès de leur famille. Les solutions alternatives de temps partiels bi-parentaux spécifiques préconisés par l’association [les papas = les mamans], de simple bon sens, ne semblent pas avoir été envisagées par les pouvoirs publics. La bataille « idéologique » contre les 35 heures va aboutir à une augmentation des disparités, avec surcharge des mères et indisponibilité accrue des pères. Les différentes moutures de congés parentaux ont contribué à l’augmentation du taux record de natalité en France (deux enfants en moyenne), mais ont contribué à augmenter le risque de disparités parentales. La PAJE actuelle s’échelonne faiblement de 270 à 535 euros. Une augmentation des congés parentaux est prévue officiellement « pour que les hommes en prennent plus ». Cet effet d’annonce est un leurre : les femmes vont y avoir plus recours et l’effet nataliste va être au rendez-vous. La politique familiale récente est totalement transparente sur l’orientation du soutien à la natalité... La conciliation vie privée/vie professionnelle ne va pas être améliorée, ni pour les mères ni pour les pères, les disparités vont être accrues et la démocratisation de la sphère privée va être encore érodée.
Les institutions et les sexismes croisés : éternel « diviser pour régner »
Si les ministères de la parité sous diverses législatures ont prévu des mesures pour que les femmes accèdent à des métiers et responsabilités traditionnellement dévolus aux hommes, rien n’est prévu pour que les métiers de la périnatalité, de l’accueil de la petite enfance, de l’Education nationale primaire et de la justice familiale se masculinisent. Si la loi a prévu une requalification patronymique paritaire, rien n’est prévu pour une parité sémantique dès lors qu’il s’agit de « maternelle ». Pour réguler les séparations, rien n’est prévu qu’un prochain « statut du tiers » dont la mouture actuelle risque fort d’augmenter les conflits familiaux et l’exclusion des pères, malgré un principe de base positif (permettre à l’enfant d’accéder à un maintien de liens significatifs). Les discours savants et théocratiques disparitaires continuent de verrouiller au plus haut niveau de nécessaires évolutions de la législation et des pratiques institutionnelles… Le récent « droit opposable à la garde de l’enfant » ne prévoit de combler qu’une faible frange des besoins, alors que la natalité grimpe, les femmes vont être encore plus assignées au rôle de parent sur-responsabilisé ; les pères plus exclus. Un énième plan de lutte contre les disparités salariales va échouer, faute de prévoir des mesures de régulations efficaces. Le retour à une politique familiale traditionnelle va augmenter également les disparités, au-delà d’effet d’annonce.
Les médias : distorsion des représentations et sacralisation : l’arène de la question du genre les jeux du cirque
Autre lieu de pouvoir, les grands médias traitent massivement des disparités genrées et parentales en augmentant les tensions, audimat oblige. Pour illustrer, les magazines féminins relaient volontiers, tout comme les publicités, l’image lénifiante de mères empreintes d’un bonheur benêt présentées seules avec l’enfant. La question de la victimisation des femmes et des mères reste omniprésente. La presse masculine n’aborde pas de sujets familiaux ou de réflexions sur le masculin (Christine Catelain Meunier). Passons sur la presse érotique qui véhicule une misogyne implicite. L’excellent magazine Robin pour le masculin sensible, qui sortait de l’ornière, a été coulé par la distribution de presse. Les émissions TV de grande écoute se pourlèchent, par exemple, de combats entre des associations radicales de pères s’opposant de manière navrante avec des associations radicales de femmes sur la question délicate de la violence intra-familiale. Les médias de réflexion ne répugnent pas non plus à caricaturer ces questions. La société du spectacle frappe même ces questions et l’on peut se rappeler à l’occasion que Guy Debord comparait le spectacle à la religion de la marchandise. On a assisté à un véritable black-out médiatique de dix-huit mois sur les questions familiales entre la période préélectorale présidentielle et la mise en place du secrétariat d’Etat à la Famille...
Conclusion
Redéfinir ensemble les rapports féminin/masculin
"C’est au sein du monde donné qu’il appartient à l’homme de faire triompher le règne de la liberté ; pour remporter cette suprême victoire il est entre autres nécessaire que par-delà leurs différenciations naturelles hommes et femmes affirment sans équivoque leur fraternité." (Simone de Beauvoir)
C’est grâce aux légitimes luttes des femmes pour l’égalité, avec le soutien graduel d’hommes de pouvoir, que les hommes ont pu trouver enfin d’autres places, notamment à travers l’implication paternelle, profond tabou anti-maternaliste. Les indicateurs français de cette implication croissante et aujourd’hui massive démontrent que les hommes sont engagés dans la démocratisation de la sphère privée, véritable révolution anthropologique.
Si cette démocratisation se heurte à des résistances farouches à tous les niveaux de pouvoir, comme le démontre malheureusement cette communication, il reste aux hommes à avancer sereinement en assumant la confrontation à la sensibilité.
Sur le fond, il s’agit de lever le morcellement des questions du genre et de redéfinir les rapports masculin/féminin plutôt que chaque genre séparément à partir de problématiques souvent aiguës et entachées de lourdes souffrances, dont le risque de dérives victimaires est important, d’autant qu’il aboutit à un conflit navrant de victimes.
Concrètement une solution peut être que les hommes choisissent de travailler moins pour éduquer mieux... et aimer plus.
Diffusion autorisée en reprenant les 2 lignes suivantes (source et auteur)
Article rédigé par Gérard Révérend, président et l’association [ Les Papas = Les Mamans ].
Article original http://www.lplm.info/spip/spip.php?article=1225
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