Réponse d’un peuple en colère

Le refus de la loi indigne sur les retraites en était l’origine.
Mais au fil des manifestations, l’action s’est élargie, et les textes des pancartes sont cruels et insolent, visant surtout le chef de l’Etat.
Grâce au travail curieux et pointu d’une jeune photographe de presse indépendante, Fay Deghia, et à de nombreux autres, on peut en effet brosser aujourd’hui un tableau vivant et souvent plein d’humour de nos concitoyens énervés, avec raison.
Il y a d’abord la contestation en forme de jeu de mots, telle cette pancarte qui joue sur le mot « gouverne-ment » ou celle qui évoque une « ripoux-blique »…ou bien « re-traite : on n’est pas des veaux » et plus direct « grève ou crève…travailler plus pour mourir avant la retraite » et enfin « faisons awoerther la réforme ».
Plus développé, ce jeu de mot avec « le man-louche… celui qui a volé la poule de Jacques Martin veut faire expulser de prétendus voleurs de poules » ou bien : « Polemploi : t’as de beaux vieux tu sais »…et puis « ne pas confondre rabot des niches et nabot des riches » et enfin : « la retraite avant l’arthrite, la pause avant l’arthrose ».
Découvrons au passage ce joli mot : « sark…overdose » ou celui-ci concernant Hortefeux « dans la rue ! Même si on se Heurte aux feux de la police ».
D’autres textes sont de vrais moments de philosophie comme par exemple celui là : « ne pas lutter nuit gravement à votre avenir et celui de votre entourage »…« nous sommes tous des enfants d’immigrés » ou le très connu « nos vies valent mieux que vos profits »… » Et puis « le travail nous retraite, la retraite nous travaille » et enfin « qui sème la misère récolte la colère ».
Ces paroles sont emplies de sagesse comme cette belle phrase : « non à la pétainisation du régime »…ou « que l’autorité se borne à être juste, nous nous chargerons du bonheur »…ou bien « non à la prise en otage d’une population » et même : « citoyens, assumez votre citoyenneté avec bon sens et lucidité, nul ne le fera pour vous » et puis les paroles réalistes « viré à 55, retraité à 67, je fais quoi en attendant ? »
Le sexe n’est pas absent de l’inspiration des manifestants tel ce :
« Carla on est comme toi, on se fait niquer par le chef de l’état » à rapprocher du « pour la France d’en haut, des couilles en or, pour la France d’en bas, des nouilles encore »… ou encore plus cru : « la retraite c’est pour baiser, pas pour se faire baiser » puis par association d’idée : « remboursez la vaseline » et pour finir : « 67 ans ? Pourquoi pas 69 quitte à se faire baiser »
Mais c’est contre le chef de l’état qu’en fin de compte, la colère s’est dirigée : bien sur il a eu droit au « casse toi, pov’con » mais il a des slogans plus violents comme « honte à toi l’avorton, arrête de nous prendre pour des cons !!! l’argent c’est pas nous qui l’avons »…« sarko gigolo, sarko pipeau, sarko zéro mais sarko facho : la chienlit c’est eux » ou ce « la déchéance, c’est lui » un travailleur optimiste déclare : « Sarko, si tu fous le camp, j’veux bien bosser jusqu’à 100 ans » et enfin le très percutant : « président en ray-ban, la culture en cabane ».
Cette vidéo résume les raisons de la colère.
Son cher parti en prend aussi pour son compte, avec « UMP, Un Monde Pourri »
Les manifestants s’en prennent aussi au Medef dont les initiales sont détournées en « Mouvement Evidemment Destiné à Entuber les Français »
Une affiche détournée du film « le dictateur » le montre avec le slogan « dictateur, un métier de passion » un drapeau de corsaire avec Sarközy en tête de mort. Et une dernière lui propose « sarko, pour toi, la retraite c’est 2012 »
Une photo truquée le montrant déconfit, les cheveux en bataille, avec un pansement « prêt à battre en retraite(s) ? »
Puis en rapport avec la dernière débâcle de l’équipe de France au mondial du foot cette phrase tombe comme un couperet :
« Sarközi-Domenech, même bilan, la coupe est pleine »
D’autres pancartes sont plus cruelles : « le petit Nicolas : après la belle histoire, le cauchemar ».
Une autre a repris la photo d’Obama, avec le portrait de Sarközi à la place et la mention « yes we lie »…ou celle-ci courte et efficace : « sarko, va te faire Fouquet’s »
Des pancartes se moquent des comptages : « je ne suis pas en train de manifester (selon la police) » et puis « avec le Christ 12 apôtres, 4 selon la police »
Et puis, il y a les pancartes citoyennes, parsemées de très belles choses :
« Y en à ras le bol de ces guignols qui ouvrent des prisons et ferment des écoles »… « Partage des richesses, sinon on se servira »…et dans le même genre « notre sort est entre les mains de la mafia de droite. Confisquons le pouvoir à la racaille capitaliste »…ou « les vieux dans la misère, les jeunes dans la galère » et puis ces phrases définitives qui pourraient être gravées sur le fronton des agences pole emploi : « on veut pas travailler plus, on veut travailler tous » et enfin : « le peuple de France ne sera jamais un peuple soumis ».
Celles qui citent de grands auteurs :
« Celui qui accepte le mal sans lutter contre lui coopère avec lui » (martin Luther)
Même la publicité s’invite dans les manifs : « la Rolex à 50 ans, la retraite à 60 »… « Pour la retraite à 60 ans parce que je le vaux bien » avec une variante : « sarko-woerth dehors, parce qu’ils ne valent rien »… Une marque de cigarette bien connue affiche un « sar-K.O.-zy nuit gravement à la démocratie ».et puis il y a les films plagiés comme ce « retraite story, des candidats bidons, un scénario pourri » ou ce « un raté presque parfait »
D’autres slogans sont plus directs :
« Vous, requins de la finance, fossoyeurs de nos entreprises, de nos emplois, soyez maudits »… ou « de l’argent il y en a, dans les caisses du patronat »… « Sarközi organise la spoliation des français »… ou « cotiser plus pour toucher moins »…ou « le patron a besoin de toi, tu n’as pas besoin de lui »
Il y a aussi « sarko t’es foutu, même les papys sont dans la rue »
L’insolence réaliste est aussi souvent de mise : « viré à 55, retraité à 67…je fais quoi en attendant ? »
Sur le chapitre de la justice, on peut relever çà :
« Police partout, justice nulle part »… « Pouvoir brutal indigne »
Question droit à la paresse, on voit fleurir des « grève à vie », ou « condamnés au travail à perpétuité ». on peut aussi aimer : « la retraite on s’en fout, on veut pas bosser du tout » ou encore : « la retraite en lambeaux, non, la retraite au landau, oui »
D’autres slogans assurent le tempo, et donnent envie d’en faire des chansons comme ce : « ils mentent, ils volent, pas besoin de ces guignols » ou bien « voulez-vous de vieux croutons pour vos petits lardons ». Ainsi que ce slogan : « 3 pas en avant, 2 siècles en arrière, c’est la politique du gouvernement ».
Cette colère populaire pourrait sous peu reprendre de l’ampleur, avant même 2012.
En effet, les scandales que le pouvoir tente d’étouffer se multiplient.
Après l’affaire Beettencour-Woerth-Sarközi, et l’affaire Karachi-Sarközi, les français pourraient être de plus en plus nombreux à s’inquiéter des liens, jusqu’à présent secrets, entre le monde de la finance, celui de la guerre, celui de la presse et celui de la politique, quel que soit son parti.
Tous les mois, se tient Place de la Concorde, dans les murs de l’hôtel Crillon, un diner peu banal, le diner du « siècle ». lien
Ce club, qui recouvre 600 personnes, organise chaque mois des rencontres "surréalistes," ou pendant, et après le repas, ces dames et ces messieurs, qui s’affrontent généralement avec beaucoup de conviction sur la scène médiatique, papotent en bonne intelligence à l’abri des regards.
Le dernier repas a eu lieu le mercredi 24 novembre, mais la fête a été gâtée par des manifestants citoyens, huant ceux qui entraient "bras dessus-dessous" : Nicole Notat, Martine Aubry, Juppé, des grands patrons (Claude Bébéar), des journalistes (Alain Duhamel, Pujadas, Arlette chabot, Elkabbach.
N’y a-t-il pas dans notre pays une déontologie citoyenne qui interdise de telles interférences entre le monde de la finance, de la politique et des médias ? La charte du journaliste nous éclaire là-dessus.
Sur cette vidéo, (partie 2) on peut découvrir la rencontre d’octobre, et sur celle-ci, la rencontre du 24 novembre et un compte rendu sur ce lien.
Les organisateurs avaient pris soin d’éteindre toutes les lumières de la place de la Concorde, mais les journalistes citoyens avaient amené du matériel d’éclairage.
Aux cris de « on veut du caviar » 300 manifestants se sont heurtés à des brigades de crs, et des manifestants ont été arrêtes.
Des œufs et de la farine ont été jetés, pour agrémenter le repas des convives, mais il est à parier que çà n’a pas été du gout des convives.
Prochain diner du siècle le 22 décembre 2010
Car comme dit mon vieil ami africain :
« Quand on mange avec le diable, il faut une très grande fourchette »
La photo illustrant l’article est de Fay Deghia
130 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON