A propos du pouvoir d’achat
Si le pouvoir d'achat se définit comme "la capacité des ménages à pouvoir acheter des biens et services grâce à leur revenu disponible", il est fortement influencé par certaines charges, qui ne sont pas celles que l'on croit, ou que l'on veut nous faire croire.
Depuis 1980, le SMIG brut est passé de 353€ à 1498€, soit 4,2 fois plus. Pendant ce temps, le prix de l'essence est passé de 4,17 F( soit0,63€) le litre à 9,50F( soit 1,45€), à fin novembre 2018 , soit 2,3 fois plus.Si l'on tient compte du fait que les véhicules consomment beaucoup moins actuellement, on peut dire que le budget carburant pèse moins lourd sur le salaire aujourd'hui qu'il y a 38 ans. En effet, pour faire 100 km en 1980, il fallait 5 € ( avec une voiture de 7 ch), alors qu'aujour'hui il faut 8 € en moyenne, soit seulement 1,6 fois plus. Prendre pour cible le prix des carburants est donc une erreur.
Mais alors où passe l'argent ?
Il est une charge dont personne ne parle et qui pourtant a explosé, c'est le prix de l'eau . En 1980, à Paris, le m3 d'eau valait 0,40€. Aujourd'hui il est facturé 4€, soit 10 fois plus ( source Insee). Hallucinant ! Le prix moyen en France est de 4,15€, et quand on sait qu'une famille de 4 personnes en consomme 150 à 200 m3 , on arrive à une somme de 69€ par mois.
L'électricité a aussi augmenté plus vite que les revenus. Il y a 38 ans, le prix du kWh coûtait 2,2cts d'euro ( source Ademe), alors qu'en 2018, il est facturé en moyenne selon le type d'abonnement 15 cts , presque 7 fois plus cher. Soit une augmentation 3 fois plus forte que celle des carburants !
L'autre charge incontournable et incompressible est le logement. En pourcentage des dépenses totales, le logement peut représenter un tiers, quote-part maximum conditionnant l'accés au prêt immobilier, ou bien à la location d'un logement. Dans certaines régions, le prix de l'immobilier a explosé, de sorte que l'accession à la propriété est devenu impossible pour les classes populaires et même moyennes. Les impôts locaux ont augmenté aussi de manière significative pour financer des infrastructures souvent démesurées, à la gloire de certains élus locaux.
Il faut aussi mettre en lumière un nouveau poste de charge qui n'existait pas il y a 30 ans, et qui est devenu indispensable pour ne pas dire addictif dans le mode de vie actuel : les multimédias et la téléphonie mobile. Pour une famille de 4 personnes, on peut compter jusqu'à 4 ordinateurs, 4 smartphones, qui tombent en rade au bout de 4-5 ans, en raison de leur obsolescence programmée. La note est donc salée, d'autant qu'il convient d'ajouter les abonnements de téléphone et internet, et éventuellement des bouquets satellites pour la tv.. Le poste peut atteindre, tenant compte des amortissements des appareils, 2400€ par an pour une famille de 4 personnes, soit 200€ par mois.
Enfin, le budget loisirs et vacances est passé de 10% en 1960 à 16% des dépénses actuellement. Il représente en moyenne 662€ par personne. La diminution de la durée du temps de travail a favorisé logiquement la forte augmentation de ce poste.
Comment les français ont-ils fait pour éponger ces nouvelles dépenses ?
La réponse est simple, en rognant sur le budget alimentation. En 1960,les français consacraient 34% de leur revenu à l'alimentation, contre 20% seulement aujourd'hui. Soldes, discount, produits alimentaires bradés, tous les moyens sont bons pour faire baisser les prix, et d'ailleurs souvent au détriment des producteurs en amont. La malbouffe se généralise, et les problèmes de santé liés à une mauvaise alimentation se multiplient.
Pour apporter des solutions aux problèmes de pouvoir d'achat des français, il vaut mieux envisager une hausse conséquente des salaires, qui relanceraient la consommation, plutôt qu'une baisse des taxes. il ne faut pas oublier en effet que le budget de l'Etat est déficitaire et que la dette publique ne cesse de s'alourdir. Rien ne sert de faire de la démagogie ou du populisme. L'équation à résoudre réside dans la répartition de ces taxes de manière équitable suivant les revenus des citoyens. Cette question n'a jamais été abordée, les gouvernements successifs se contentant d'augmenter de manière aveugle la tva, la tipp ou la csg.
La hausse des salaires pourrait être assortie d'une exonération de charges permettant d'alléger la masse salariale des entreprises. Les plus grosses d'entre elles peuvent payer des salaires plus élevés, il suffit de diminuer ceux des cadres supérieurs, ainsi que les versements aux actionnaires.
Quant aux retraites, il n'est pas normal qu'un agriculteur ou un artisan ayant travaillé 42 ans touche 700€ par mois, en dessous du seuil de pauvreté. Il avait été acté que les retraites agricoles devaient atteindre 75% du Smig, mais on attend encore le décret d'application... Quant au minimum contributif ( pension de retarite minimum), il n'est que de 634€ par mois pour moins de 120 trimestres cotisés, alors que le seuil de pauvreté est de 855€ pour une personne seule (seuil à 50%), ou de 1026€ ( seuil à 60%). Il y a ici une anomalie scandaleuse !
En conclusion, si le niveau de vie a considérablement augmenté depuis 40 ans, il apparait que la notion de pouvoir d'achat est néammoins floutée par de nouvelles dépenses, ou par l'augmentation exponentielle de certaines charges. La fronde poujadiste actuelle, amorcée par le cheval de bataille des taxes sur le carburant, fait fausse route. Le vrai problème est l'insuffisance des revenus des classes pauvres et populaires, et l'impact inéquitable des taxes. Le gouvernement a du pain sur la planche, s'il veut éviter une nouvelle révolution, 230 ans plus tard que la première.
45 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON