Automobile : fer de lance ou semelle de plomb ?
L’industrie automobile semble bien continuer à faire la pluie et le beau temps de notre économie et ce n’est guère rassurant. Au ralenti l’an passé, les constructeurs français auraient plombé notre croissance. Ragaillardis depuis quelques mois, ils participeraient à la relance, jusqu’à quand ?
La palme de l’ambiguïté revient à PSA dont l’annonce de son plan de compétitivité est un modèle du genre. L’axe de communication est prometteur : vendre 4 millions de véhicules d’ici 2010, tripler sa marge et retrouver une place de choix face à la concurrence. Comment contester de si nobles objectifs ? Le problème, c’est la méthode puisqu’elle consiste tout simplement à... réduire les coûts ! Il fallait y penser ! Résultat, les nombreux sous-traitants français peuvent trembler eux qui sont déjà souvent exangues. Quant aux salariés, c’est encore plus simple, 7 à 8 000 d’entre eux en Europe de l’Ouest seront invités à quitter l’entreprise. C’est dire le coût économique à venir pour notre beau pays. Peugeot triplera ses marges mais à quel prix ?
Le prix c’est un des axes forts de stratégies de nos groupes, sans garanties. Si Peugeot envisage de vendre des véhicules d’entrée de gamme dans les pays émergents, on sait que Renault a choisi une voie plus radicale via le véhicule low cost. Une nouvelle étape vient d’être franchie par la marque au losange avec la réalisation d’un véhicule low cost entièrement fabriqué au... Brésil, la Sandero. C’est déjà la première fois qu’une voiture dite française ne verra jamais Paris, mais si elle était "réservée" à des marchés fermés on pourrait peut-être comprendre. Mais tout indique qu’elle sera bientôt proposée aux consommateurs européens, un consommateur européen dont on dit qu’il tend à se paupériser et qui possédera rarement plus de deux véhicules. De là à envisager un marché automobile plein de petites voitures pas fabriquées sur le sol national...
Car
finalement cette industrie automobile est venue à point nommée
remplacer les grands pans industriels liés à l’extraction et
l’exploitation de matières premières. Une aubaine alors pour recaser la
main-d’oeuvre et sauvegarder des régions dévastées. Petit à petit ces
grands groupes qui, au départ, intégraient toute la chaîne de
production se sont séparées des branches les moins rentables et ont
ainsi créé une économie parallèle de sous-traitance capable de beaucoup
de flexibilité, de baisse des coûts et même d’absorption des personnels
des constructeurs. Tout pouvait encore à peu près fonctionner tant
qu’une concurrence asiatique n’apparaisse et que ne venait pas à ces
fleurons de notre économie l’idée de passer les frontières pour aller
voir une main-d’oeuvre meilleure marché...
Car aujourd’hui que peut-on faire pour enrayer ce déclin inexorable ? Et par quoi le remplacer ? Une autre industrie de masse ? Laquelle ? Des services à la personne ? Impensables.
De plus, là où les constructeurs allemands jouent la
fiabilité, la puissance, la montée en gamme, le luxe, bref la
continuité de ce qui a fait leur force et leur renommée, les Français
jouent la rupture, les petits prix, l’utilitaire en même temps que le
famillial voire le sportif. Mais ils ne peuvent prétendre à
l’innovation et à l’environnement, pris par les Asiatiques qui ne
lésinent pas sur les moyens pour pénétrer les marchés comme en témoigne
la société chinoise CMEC qui présentait ni plus ni moins qu’un
copier-coller de la Smart.
Bien sûr, Renault lance également sa
nouvelle Laguna en attendant son, tardif, 4X4. Mais pas sûr que le
consommateur européen s’y retrouve, voire que le patriotisme
économique prôné il n’y a pas si longtemps ait encore une
signification. Alors gare au déferlement d’autres marques positionnées
sur d’autres critères, d’autres valeurs.
Car si à toutes ces fumeuses stratégies, on ajoute de mercantiles positions comme celle-ci : "Les
patrons de groupes automobiles européens ont décidé de s’unir pour
combattre le projet de l’Union européenne de réduire les émissions de
CO2 d’ici à 2012, a déclaré le patron de Porsche au Handelsblatt de
lundi, à trois jours de l’ouverture du salon auto de Francfort",
ça commence à faire beaucoup de raisons de se détourner de ces marques
omnipotentes. Notez que Porsche a raison de s’émouvoir puisqu’une
récente étude scientifique suisse le classe constructeur européen le
plus polluant.
Et pendant ce temps-là, à Tokyo, 7 constructeurs de
diesel (Toyota, Nissan, Nissan Diesel, Hino, Mitsubishi, Isuzu et
Mazda) se lançaient dans une inédite indemnisation de victimes de
pollution pour plus de 7 millions d’euros !
L’automne est une mutation, l’hiver une lutte, le printemps un épanouissement dit l’adage, ça promet pour cet hiver !
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