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Comment la taxation carbone doit servir à financer la transition énergétique ?

Dans un article précédent, nous avons expliqué pourquoi il fallait affecter les recettes de la fiscalité environnementale aux investissements permettant la transition énergétique. Allons maintenant plus loin et regardons de quelle manière, cette démarche peut se mettre en place.

Examinons d'abord, la tentation actuelle du gouvernement français d'utiliser cette manne pour réduire le déficit. Si les recettes de la taxation carbone sont directement employées pour cela, celle-ci sera une charge pour les acteurs économiques (entreprises et ménages) sans profiter à l'économie, bridant notre compétitivité. Le prix politique de cette mesure sera élevé car les électeurs considéreront qu'il s'agit d'un nouvel impôt au profit de l'Etat, sans contrepartie pour eux.

Si, par contre, on se sert de cet argent pour faciliter les investissements dans la transition, les avantages se cumulent : création d'emplois, relance de l'activité économique, réduction des charges liées à l'achat d'hydrocarbures, limitation de notre dépendance commerciale à ses ressources importées, augmentation des impôts des entreprises et des salariés travaillant dans l'économie de la transition. Il y a donc ici un processus cumulatif multipliant les aspects positifs d'une démarche incitative.

Les avantages politiques de cette démarche ne sont, eux aussi, pas négligeables : tout en confortant la minorité écologique de l'électorat qui réclame une taxation carbone, elle va offrir des subventions à l'investissement aux ménages et aux entreprises, relancer les secteurs du bâtiment (isolation) et celui des énergies renouvelables, procurer des emplois. Les électeurs auront une vision favorable de cette politique.

 

Cependant, ces choix peuvent être "mal menés". Si on créé une taxation carbone globale que l'Etat récupère et redistribue d'une manière opaque ou inégalitaire, on rate les objectifs de l'opération.

 

Nous proposons ici, une méthode, celle des contributions incitatives, qui permet de "rentabiliser" les avantages attendus de cette démarche. Nous allons maintenant la décrire. Pour en expliquer les ressorts, on va s'appuyer ici sur une de nos propositions récentes : la contribution incitative sur le diesel. Nous renvoyons le lecteur à la lecture de ces articles, lecture nécessaire pour éclairer et préciser l'analyse que nous développons ici.

La précision fiscale de la démarche : la majorité des défenseurs de la taxe carbone imagine une fiscalité indifférenciée qui s'applique à toutes les émissions, d'une manière suffisamment forte pour dissuader les acteurs économiques.

Il s'agit d'une vision simpliste : les problèmes environnementaux sont complexes et étroitement connectés aux enjeux économiques. Il faut donc faire du "cousu main", être précis.

Illustration : la taxation sur le gasoil n'est pas seulement un problème d'émission de carbone, elle concerne plutôt l'émission de poussières nocives pour la santé. Mais le diesel est aussi un défi industriel : toute l'industrie automobile française doit ses succès des dernières décennies à des moteurs diesel performants.

Proposition : les recettes fiscales de l'augmentation du prix du gasoil sont affectées à des subventions à l'achat de véhicules hybrides ou électriques, subventions qui viennent s'ajouter au bonus dont profitent déjà les acheteurs de ces véhicules. Les constructeurs français étant performants dans l'électrique (Renault) et dans l'hybride (Peugeot), cette démarche les favorise, tout en accélérant le renouvellement du parc automobile.

C'est en multipliant les petites et précises démarches contributives que l'on atteindra les objectifs recherchés, non en instaurant une lourde et impopulaire taxe carbone, aux effets collatéraux dévastateurs.

 

La progressivité fiscale de la démarche : la majorité des défenseurs de la taxe carbone milite pour une fiscalité forte, pour qu'elle soit réellement dissuasive.

Il s'agit d'une représentation coercitive de cette fiscalité, celle d'une punition qui aurait pour conséquence un changement de comportement.

Les professionnels de l'éducatif (dont l'auteur de l'article fait partie) savent pourtant qu'une sanction n'a aucune chance d'aboutir sans accompagnement éducatif, sans se donner les moyens d'accompagner la sanction d'explications et de solutions qui permettent d'éviter la "récidive".

Nous défendons l'idée que la fiscalité doit être faible d'abord puis doit augmenter ensuite progressivement. Ce processus, annoncé d'emblée, assumée par les pouvoirs publics sur le long terme d'une décennie, rendra légitime et acceptable un impôt nouveau mais disposant d'une dynamique et d'une image originale.

Par exemple, pour mettre au même niveau, la taxation du diesel et de l'essence, nous proposons d'étaler ce rattrapage sur plus d'une décennie. A raison d'une augmentation d'un centime par an, cela se fera naturellement et graduellement. Cette mesure sera acceptée puisque les bénéfices de cette opération vont revenir aux automobilistes sous la forme de subvention à l'achat de véhicules hybrides ou électriques.

C'est en instaurant une fiscalité progressive que l'on va pouvoir créer une dynamique de changement : connaissant l'augmentation à la pompe du diesel, les acteurs économiques vont pouvoir anticiper, faire des choix rationnels en connaissance de cause. Une taxation carbone brutale et erratique va provoquer crispation, résistance, pression divers pour y échapper, sentiment d'injustice : cela sera contre-productif.

La justice fiscale de la démarche : les défenseurs de la taxe carbone défendent souvent des mécanismes de compensation (chèque vert) ou d'exonération pour les plus démunis. Ces approches posent des problèmes de seuils (où arrêter la compensation ou l'exonération ?) et ne permettent pas aux pauvres de participer à la transition.

Nous défendons une autre démarche : l'utilisation de l'argent récolté par la contribution doit être distribué en fonction des revenus de l'acteur concerné.

Un ménage en difficulté, ou une petite entreprise aux marges financières étroites disposera de subventions à l'investissement importantes. Un ménage aisé, ou une grande entreprise multinationale ne pourra pas en bénéficier. Entre les deux, une progressivité sera instaurée.

Ainsi, la contribution (l'impôt) sera payée par tous, en fonction des émissions et des pollutions engendrées, mais l'incitation à investir pour la transition sera proportionnelle à la richesse de chacun.

Par exemple, pour la taxation diesel, la subvention pour l'achat d'un véhicule hybride ou électrique, va varier. Un ménage gagnant plus de 10000 euros par mois ne pourra pas en profiter. Un particulier dont les revenus sont inférieurs à 1500 euros par mois va pouvoir disposer, au contraire, d'une subvention maximale qui va faciliter son achat.

C'est en instaurant une fiscalité juste que l'on va permettre son acceptation par la population. Dans la démarche décrite ici, personne n'est perdant, chacun est gagnant puisque le riche pourra investir dans la transition comme le plus démuni. 

 

Réussir la transition écologique, proposer une fiscalité environnementale de qualité sont étroitement liés. Nous avons voulu montrer ici que cela ne s'improvise pas et réclame une réflexion aboutie qui ne fait pas l'impasse sur la complexité des problèmes rencontrés. Précision, progressivité, justice : la démarche choisie est résolument conçue pour permettre une pédagogie du changement. C'est indispensable si nous voulons nous donner les moyens de sortir des ornières politiques, économiques et environnementales dans lesquelles nous nous sommes fourvoyés.


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3 réactions à cet article    


  • spartacus spartacus 12 avril 2013 12:25
    Quand allez vous comprendre que l’intervention étatique détruit et dérégule le marché libre ?

     l’Etat récupère et redistribue d’une manière opaque ou inégalitaire
    C’est toujours le cas ! Lisez Hayeck « la route de la servitude »Ça évitera d’écrire des poncifs ! Apprenez un minimum dans les livres d’économie.

    Quand allez vous comprendre que la contrainte par l’impôt est néfaste à l’économie ?
    Quand allez vous comprendre que la subventionite aiguë, n’est que de la fabrication d’opportunisme et n’a rien de social et de juste ?
    Bien au contraire de votre pensée collectiviste !


     « les recettes fiscales de l’augmentation du prix du gasoil sont affectées à des subventions à l’achat de véhicules hybrides ou électriques, subventions qui viennent s’ajouter au bonus dont profitent déjà les acheteurs de ces véhicules. Les constructeurs français étant performants dans l’électrique (Renault) et dans l’hybride (Peugeot), cette démarche les favorise, tout en accélérant le renouvellement du parc automobile.

    Exemple 1.
    Medemoiselle Michu travaille dur dans le privé, elle a acheté une Clio Diesel à crédit sur 5 s. Elle espère faire des économie, et garder sa voiture 8 ans pour profiter de 5 années sans crédit voiture pour affecter sa capacité d’emprunt dégagé dans l’achat d’un apport pour un appartement.

    Avec cette super mesure, qui modifie la donne, son carburant va lui coûter plus cher. Mademoiselle Michu va perdre du pouvoir d’achat et son carburant coûtera plus cher. Le rêve de mademoiselle Michu est d’avoir un appartement à elle. Elle veut économiser pendant 5 années pour cela ? La subvention de merde pour une nouvelle auto elle s’en tape le coquillard ! Elle ne veut pas prendre de crédit pour une auto même si c’est subventionné.

    Exemple 2.
    Que c’est super cette subvention pour Monsieur Durand. Il travaille à EDF et son électricité est déjà subventionné, il ne paye que 15% de la facture EDF. Subvention ou pas il aurait acheté de toute manière la belle voiture électrique. Bel effet d’aubaine, sur le dos de la collectivité.

    Résumé :
    Mademoiselle Michu contribue a payer contre son grès et par ses impôts pour permettre à Monsieur Durand  qui n’en demandait pas autan une subvention et lui crée un bel effet d’aubaine.
    Madame Michu ne peut utiliser son argent librement parce que des bobos sur la base d’analyses partiales ont décidé à sa place ce qui était meilleur pour elle qu’elle même !

    C’était surement les mêmes fumeux BOBO qui a une époque ont différencié les taxes sur la Gasole pour des raisons tout aussi fumeuses.

     »l’utilisation de l’argent récolté par la contribution doit être distribué en fonction des revenus de l’acteur concerné.« Encore une belle fumisterie BOBO !

     »Un ménage en difficulté disposera de subventions« 
    Vous avez vu un »ménage en difficulté« investir dans une voiture neuve électrique ? 
    Le ménage en difficulté il la met aux toilettes ta subvention. Par contre l’augmentation du carburant il la paye.

     »une petite entreprise aux marges financières étroites"
    Une PME de 3 personnes a une marge financière étroite. 3% du CA. Mais réalise un CA de 4 millions d’€uros. Chouette elle aura droit aux subventions ! Bel effet d’aubaine
    Une PME de 3 personnes n’a aucun frais et réalise des services donc une marge de 100% mais réalise 70 000€ de CA, 

    PS les bobos vous avez détruit le pays avec la fiscalité la plus ubuesque du monde !
    Le chômage de masse c’est vous les responsables. 

    • jymb 12 avril 2013 17:12

      Les mots taxes et fiscalité sont devenus insupportables dans un pays écrasé d’impôts de tous bords.
      La démarche sera crédible le jour où l’on défendra (par exemple) la diminution de la fiscalité sur l’essence pour convaincre positivement de remplacer son diesel. Et pas l’inverse qui n’est qu’un moyen parmi des dizaines d’autres de faire les poches, encore et toujours, de préférence en assénant de l’ « éducation » que j’interprète comme de la rééducation militante propagandiste digne de l’Albanie des années 70.


      • Le printemps arrive Le printemps arrive 13 avril 2013 08:05

        Et en plus, les constructeurs savent très bien fabriquer des moteurs économes en énergie, or comme au conseil d’administration de ces fabricants se trouve les pétroliers, comment voulez-vous qu’ils se coupent une entrée financière importante ?

        On se fout de nous en permanence car la seul écologie qui les intéresse, c’est celle de leur portefeuille !

        On doit se séparer du joug de la finance, de la compétitivité, de l’aliénation consumériste.

        De plus avec leur véhicule électrique et la location des batteries, il est évident que leur but est d’être maître du compteur énergétique.
        Notre autonomie est la mort de leur business, ils noyent le poisson avec sans cesse de nouvelles discussions sur le sexe des anges.

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