Construire sa maison : rêves et pièges
Le salon "Faire Construire sa Maison" se tiendra du 17 à 19 septembre à la Porte de Versailles, à Paris. C’est un rendez-vous annuel important pour tous ceux qui rêvent de faire construire leur maison, choix souvent par défaut alors que le prix de l’ancien flambe.
Si on ne doit en retenir que deux éléments, la loi peut être résumée à :
- le prix sur lequel s’engage le consommateur est définitif, et inclut toutes les prestations nécessaires à l’habitation ;
- en cas de défaillance du constructeur, un système de garantie assure au consommateur de ne pas perdre sa mise.
On peut aisément en comprendre les raisons. La construction d’une maison est l’achat d’une vie, dans lequel entre une bonne part d’irrationnel. Les consommateurs s’endettent pour 15, 20, et maintenant 25 ou 30 ans, pour des remboursements à la limite de leurs possibilités financières. En cas de soucis, une dépense indispensable non prévue, le constructeur qui fait faillite avec 10 ou 20% des sommes versées, c’est un désastre économique pour le ménage. Avec les conséquences que l’on peut imaginer.
La loi s’impose à tous, impossible d’y déroger, elle est "d’ordre publique". Les constructeurs se doivent donc de la respecter. Ils sont organisés autour principalement de deux syndicats professionnels : le plus important l’Union des Maisons Françaises (UMF, anciennement UNCMI) et la Fédération Française des Constructeurs des Maisons Individuelles (FFCMI). Le mot d’ordre proclamé par ces organismes est : confiance. La confiance est en effet nécessaire pour engager toutes ses économies dans la construction d’un toit pour héberger sa famille. D’autant que la construction d’une maison n’est ni simple, faisant appel à plusieurs corps de métiers, ni formatée, chaque maison ayant une histoire différente.
Pour restaurer la confiance perdue par les consommateurs - qui n’a pas entendu parler autour de lui d’une construction qui s’est mal passée ? qui connait des histoires de constructions qui se sont au contraire bien passées ? - l’UMF édite un contrat "type" se voulant être une garantie de sérieux.
Las ! Si la forme est là, le fond laisse à désirer. Sous le couvert de proposer un contrat "en béton", l’UMF n’hésite pas à prendre des libertés avec la loi, celle que pourtant, nul n’est censé ignorer.
Deux exemples des dispositions épinglées par le tribunal, à la demande de l’association de consommateurs "Association d’Aide aux Maitres d’Ouvrages Individuels" (AAMOI) :
- celle qui limite drastiquement l’accès au chantier : pour l’UMF, le client est le roi... des payeurs, mais n’a certainement pas son mot à dire sur le bon déroulement de la construction !
- celle qui indique qu’en cas de modification des plans suite à la demande du permis de construire, le contrat sera modifié. La loi ne dit-elle pourtant pas que le prix porté sur le contrat est "définitif" ? Et c’est bien ce qu’a rappelé le tribunal.
La loi de 1990 indique qu’en cas de défaillance du constructeur, le consommateur dispose d’une garantie. Bien utile pour faire face à la faillite du constructeur mais aussi à l’imprévoyance d’un professionnel qui se retrouverait dans l’incapacité de faire face à ses engagements. Durant les mois pendant lesquels le chantier est arrêté, les consommateurs doivent se loger tout en remboursant leur emprunt. Une situation que peu peuvent affronter longtemps. Et une fois asphyxié financièrement, on accepte tout pour récupérer les clefs de sa maison, quelque soit son état, bien ou mal construite.
Pour éviter cela, la loi prévoit l’instauration de garants. Ces organismes financiers ont la charge de faire face à la défaillance du constructeur, financière, mais pas seulement. Cette assurance n’est pas gratuite, elle représente 1 à 1,5% du prix de la maison, payé, in fine, par le consommateur. Ce n’est pas très cher payé pour se prémunir des risques de la construction... à condition que cette garantie soit mise en oeuvre .
Car c’est bien là que le dispositif pêche. Lorsque le garant est appelé à la rescousse, il commence par chercher toutes les raisons de ne pas faire face à ses obligations : le constructeur ne serait pas défaillant tant qu’il n’est pas en faillite (faux, le ministre a rappelé que la défaillance n’est pas seulement financière), les pénalités de retards ne sont pas dues pour telle ou telle mauvaise raison, la garantie ne couvre pas tout l’ouvrage (alors que le prix de la garantie a été, lui, calculé sur l’intégralité du prix), le consommateur doit payer une franchise de 5% (soit en moyenne 5 500 euros) avant que le garant ne lève le petit doigt. Le tout en parfaite contravention avec les dispositions légales.
Mais qui s’en soucie ? Les garants sont des organismes d’assurances, financés pour les plus importants d’entre eux par la Fédération Française du Bâtiment, et dont l’un des dirigeants de l’un des plus actifs sur le marché, la CEGI, n’est autre que le dirigeant de... l’UMF, le syndicat des constructeurs.
Le monde est petit, comme l’étendue de la garantie effectivement apportée. En cas de conflit, le choix est simple : plusieurs années de procédures judiciaires pour demander son dû, ou abandonner.
Alors que les garants, par leur responsabilité, et leur rôle de repreneur des constructeurs les moins prévoyants, ont pour vocation d’assainir le marché en faisant pression sur les constructeurs présentant des taux de sinistre élevés, ils ne sont devenus que de simples caisses enregistreuses.
Par leur inaction , ils coûtent doublement au consommateur : en augmentant le prix des maisons de celui d’une assurance qui n’est qu’exceptionnellement mise en oeuvre, et en permettant aux mauvais constructeurs de continuer leurs mauvaises habitudes, comme si rien ne devait jamais changer dans le monde viril et pas toujours correct des bâtisseurs de maisons.
Sur tous les visiteurs qui ressortiront du salon "Choisir sa Maison" avec de superbes prospectus, combien seront informés des écueils qui leur faudra éviter s’ils décident de faire construire ?
Selon l’association AAMOI, quelques règles de bon sens qu’on peut retrouver sur son site peuvent aider à éviter les mauvaises surprises :
- lors de la signature du contrat, l’ensemble de la maison, de ses équipements, de ses éléments de décoration (carrelage, peintures, ...) doivent être chiffrés. Inclus ou non dans le prix de la maison, ils doivent apparaitre et être détaillés ;
- toutes les signatures doivent être datées, et rien ne peut être fait avant que le plan définitif de la maison, et sa description technique, n’aient été réalisés ;
- aucun paiement ne peut être fait sans contrepartie : une attestation de garantie de remboursement lors du premier versement, une visite de chantier permettant de vérifier la réalité des travaux effectués par la suite ;
- à la réception, c’est le consommateur qui fait la liste des défauts restant à réparer, ce n’est pas le constructeur qui indique ce qui est un défaut ou non.
Dans tous les cas, il est conseillé au consommateur de ne pas affronter seul cette grande mais difficile aventure de la construction, et de se rapprocher d’une association de consommateurs qui pourra le conseiller.
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