« Dorénavant, les parachutes dorés seront en tenue de camouflage »
Nicolas Sarkozy avait promis de supprimer les parachutes dorés, ces fameuses indemnités de départ des dirigeants sociaux. Finalement, il a opté pour une réforme à la marge, qui présente un certain nombre d’insuffisances.
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« Si je suis élu président de la République, je ferais voter dès l’été 2007 une loi qui interdira la pratique détestable des golden parachutes », promettait Nicolas Sarkozy, dans un discours prononcé au printemps dernier.
Nous sommes en été, Nicolas Sarkozy est élu, et... les golden parachutes existent toujours.
Pour rappel, on désigne par golden parachutes, les indemnités versées aux dirigeants de sociétés, notamment lors de leur éviction. Les sommes en jeu sont souvent faramineuses : Philippe Jaffré, Jean-Marie Messier et Antoine Zacharias sont les « recordmen » français de la discipline, avec respectivement 30, 20 et 13 millions d’euros.
Mais c’est le récent golden parachute de Noel Forgeard (8,5 millions d’euros) qui a le plus ému l’opinion, certainement parce qu’il était totalement déconnecté des performances de l’interessé. Souvenons-nous que ce dernier a été débarqué d’EADS, suite aux mauvais résultats du groupe. Et c’est d’ailleurs à la faveur de l’émoi provoqué par cette affaire, que Nicolas Sarkozy avait promis de supprimer les parachutes dorés. Elles sont, disait-il, « contraires aux valeurs qui sont les [siennes] ». C’était le 19 avril dernier à Marseille.
Entre avril et juillet, ces dites valeurs ont manifestement changé, car, en lieu et place de la suppression promise, la réforme votée le 16 juillet se contente tout juste « d’encadrer la pratique ».
Apports de la loi
Cette réforme comporte deux volets. D’une part, elle modifie le régime fiscal des parachutes dorés. Ceux-ci, dès lors qu’ils dépasseront le million d’euros, ne seront désormais plus déductibles du résultat avant impôt. Pour une illustration de la règle, nous prendrons le cas de Carrefour et de l’indemnité versée à Daniel Bernard : en 2005 le groupe a déclaré un bénéfice avant impôt de 2 699,7 millions d’euros. En regard de la réforme, elle aurait déclaré 9 millions d’euros de plus de bénéfice imposable (2 708,7millions d’euros), soit l’équivalent du golden parachute de son ancien patron. Selon l’UMP Michel Bouvard, l’intérêt de cette mesure est que désormais, « la Nation » ne prendra plus en charge « une partie du coût de ces rémunérations ».
D’autre part, la loi réforme « le régime sociétaire » (droit des sociétés) des parachutes dorés. Dorénavant et selon les termes de Nicolas Sarkozy, le dirigeant « dont la gestion est un échec » ne pourra plus bénéficier d’une indemnité de départ.
Seulement, cette mesure ne s’applique qu’aux sociétés cotées en bourse et, de surcroît, elle peut être aisément contournée. En effet, cette disposition n’est pas applicable aux « indemnités de non-concurrence. » Ainsi, lorsqu’en contrepartie du golden parachute, le patron s’engage à ne pas travailler pour une société concurrente durant un certain temps (en général de 1 à 2 ans), il ne sera pas obligé de justifier de bons résultats économiques.
On peut dès lors imaginer que les chefs d’entreprises veilleront à ce que soit insérée dans leur contrat une clause de non-concurrence, histoire de contourner la loi. D’où la boutade du député communiste Jean-Pierre Brard : « dorénavant, les parachutes dorés seront en tenue de camouflage ».
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