La BCE à François Hollande : touchez pas au grisbi !
Le 5 février 2013, François Hollande a fait une déclaration iconoclaste aux yeux de certains : il a suggéré que la zone euro se donne un objectif à moyen terme pour le cours de l'euro.
Deux considérations en particulier militent en faveur de cette suggestion :
- globalement, l'euro a atteint un niveau qui pénalise les exportations de la zone ;
- la succession des crises économiques, ainsi que leur violence et leur coût croissants, nous ont appris que l'autorégulation par le marché était un mythe et qu'il ne devait donc pas être interdit à la puissance publique de réagir en cas de dérive du cours des changes.
Les tirs de barrage n'ont pas tardé, de la part des " pays vertueux du nord de l'Europe " (air connu), dont la balance commerciale est déjà excédentaire, et de la part de la BCE qui n'apprécie pas que l'on piétine ainsi ses plates-bandes.
Dans la première catégorie on trouve en toute première ligne l'Allemagne, dont la politique de bas salaires menée depuis une dizaine d'années peut s'assimiler à une " dévaluation interne " (de l'ordre de 20 %). Ce sont alors les salariés qui font les frais du regain de compétitivité.
Jörg Asmussen, membre du Directoire de la BCE, rejoint cette école de pensée, lorsqu'il déclare, dans un entretien accordé au journal allemand Handelsblatt, en réponse à François Hollande : " Le cœur du problème se situe à l'intérieur du pays et non pas dans les taux de change." Pour le cas où François Hollande n'aurait pas bien compris, Jörg Asmussen enfonce le clou en encourageant la France a faire plus en matière de rigueur. Bon prince, il nous décerne tout de même un accessit : " Je suis content que le gouvernement français ait fait de l'amélioration de sa compétitivité une question centrale."
Il n'y a aucune raison d'opposer ainsi les mesures "internes" et les mesures d'ordre monétaire ou de change. Elles font, les unes comme les autres, partie du clavier dont doit pouvoir jouer la puissance publique, sans pour autant céder à la facilité.
Le cours des monnaies est dépendant de "fondamentaux économiques" mais aussi, et de plus en plus, de mécanismes purement spéculatifs mettant en jeu d'énormes masses d'argent sur l'ensemble de la planète. Avec la dérégulation des mouvements de capitaux, les fonds spéculatifs ont toute latitude pour jouer sur les monnaies, avec une force de frappe considérable. Dans le même temps, les Etats devraient se contenter de regarder le match ? Non, merci. François Hollande a raison : le cours de l'euro n'est pas un sujet tabou.
Pour accéder à l'article du Handelsblatt (en allemand ...) : http://www.handelsblatt.com/politik/international/notenbanker-asmussen-draengt-auf-schnelle-hilfe-fuer-zypern/7763016.html]Handelsblatt
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