La fin du Mordor
L'agonie du système s'accélère...
LA FIN DU MORDOR
Le Mordor (1) pourrait représenter ici le dernier avatar du système capitaliste en crise, la promesse implicite d’une horreur absolue, aveugle et triomphante, inéluctablement illustrée par la guerre, par ces milliers de réfugiés refoulés comme à la veille de la Seconde Guerre mondiale.
Miné par ses contradictions, ne pouvant trouver la clé d’une valorisation réelle du capital, le système capitaliste patauge, se débat en vain dans les sables mouvants de la finance. Les discours et les menées dans le domaine de l’Economie ne sont plus que vains subterfuges.
Au dernier moment le monstre ne va-t-il pas finir par s’effondrer subitement, comme dans les bons films d’horreur, vaincue par cette gangrène qui le rongeait depuis trop longtemps. Espoir ténu vite contrebalancé par l’émergence d’autres créatures encore méconnues et tout aussi mortifères. La révolte qui naît débouchera t-elle enfin sur la Révolution nécessaire ?
La politique de la Fed
La crise financière de 2008, née d’une crise plus profonde de tout le système économique (2), n’a pas été résolue. Malgré quelques frémissements, il n’y a pas eu de « reprise économique » et l’on sait aujourd’hui qu’il n’y en aura jamais. Aucun nouveau marché n’est en vue. Il n’y a pas de demande solvable et donc pas d’offre.
Aujourd’hui la seule solution, la moins désastreuse à court terme, est de mettre en marche la « planche à billet » en espérant, par une inflation « contrôlée » faire redémarrer la machine économique. Il est aisément compréhensible que ce retour au keynésianisme est sans issue. Faute de perspectives, on ne fait qu’accentuer les déficits des états. Celui des Etats-Unis, propriétaire de LA monnaie, le dollar, est, comme on le sait gigantesque. A tel point que, cernées, les autorités américaines en soient réduites à court terme, à vouloir remonter les taux directeurs, le loyer de l’argent, espérant des « véritables investissements » (pour produire et vendre quoi ?). Cette voie est intenable car elle dirige vers un deuxième obstacle connu tout aussi mortifère : une déflation accélérée et une nouvelle crise de type 1929 encore plus grave.
Pourtant, rappelez-vous, à entendre tous les chroniqueurs patentés des médias, tout allait de mieux en mieux. La reprise était là, palpable : le chômage baissait, la bourse montait, la production de gaz de schiste devait s’envoler, le faible coût de l’énergie était un plus et la consommation repartait etc… Aujourd’hui, cette musique est devenue une grossière rengaine déplacée, irréaliste et insupportable. On s’est aperçu depuis assez longtemps que la réalité était toute autre. Le chômage à 5% aux Etats-Unis était un aussi gros mensonge que la reprise en Espagne.
De telles fictions auraient dû être prises comme argent comptant. L’armée fantôme d’investisseurs et de consommateurs, par la confiance retrouvée, ne devait-elle pas surgir, prendre vie, et sauver le système…
En réalité les fameuses créations d’emplois aux Etats-Unis et ailleurs, n’ont été que des jobs précaires. Et nombre d’Américains ont été obligés d’en prendre deux – voire trois – pour tenter de joindre les deux bouts. Plus de 50 millions d’Américains sont à la soupe populaire ou pourraient y être (3).
Et voilà la Fed qui révise ses prévisions à la baisse. La manipulation des chiffres et des comptabilités n’y a rien fait. Et sur leurs cartes, tous ces généraux, agents de la Finance sans génie, n’ont déplacé que des pions sans réelle consistance.
Comme c’est bizarre… Vous trouvez ça bizarre ?
Dernièrement les taux directeurs n’ont pas été augmentés au grand soulagement des marchés à actions, à la spéculation financière, seule activité économique de l’heure. Mais ayant précédemment remontés, ces taux deviennent relativement chers. Le fait que la Fed ne les relève plus démontre simplement qu’il n’y a pas de croissance.
La politique de la BCE
Dans l’Union Européenne ce fut au tour de la BCE, conduite par Mario Draghi, de prendre des initiatives. En janvier 2016, après la frayeur d’une hausse possible des taux par la Fed, il rassurait les marchés boursiers, et donc la spéculation, en affirmant qu’ « il n’y a pas de limite à l’utilisation des instruments monétaires dont elle (la BCE) dispose ». Le message était clair : la banque centrale allait créer toujours plus de monnaie et baisser ses taux jusqu’à ce qu’ils soient… négatifs ! Ouf les cours de la Bourse purent reprendre un moment leur petite grimpette habituelle….
Mais en réalité cela sentait de plus en plus le roussi. Et c’est le feu au derrière, que Mario nous entraine dans sa danse sur un fil. Car le risque du krach devient omniprésent dès que, pour une raison encore inconnue, les taux seraient amenés à augmenter. L’incendie étant déjà dans la maison, on ne va pas chipoter. Tout devra être bazardé, enfin surtout ce qui est « chez le voisin » : adieu assurance-vie, dépôts garantis…Mais il est vrai que l’Union Européenne n’est pas les Etats-Unis. L’unité peut-elle se faire pour une telle politique ? En clair : comment va réagir l’Allemagne et son sourcilleux ministre Walter Schauble, défenseur de tous ces vieux Allemands retraités ? (4)
Qu’importe pour super Mario ! Il fonce et énonce début mars 2016 une politique faite de taux négatifs, de rachat d’obligations « pourries » grâce à sa « planche à billets » qui fonctionne désormais à plein régime, de baisse du taux de facilité de dépôt des établissements bancaires, de baisse également du taux de refinancement ramené à 0% , ainsi que du taux de prêt marginal (5).
Et surtout la BCE pourra racheter les obligations du CAC 40… Ce qui est intéressant pour une société qui a besoin de monnaie pour se redéployer…ou spéculer.
Mario l’illusionniste fait aussi sortir de son chapeau une « merveille » inédite : les TLTRO (targed longer-term refinancing operations). Il s’agit de prêts successifs qui seront lancés à partir de juin 2016, chacun d’une durée de quatre ans, que la BCE va accorder aux banques au taux de… - 0,4 % ! Ces prêts permettraient de compenser leurs pertes prévisibles à cause du taux de facilité de dépôt négatif. Comment en effet éviter aux institutions bancaires une baisse de rentabilité dans le contexte de taux faibles ?
Ce n’est plus de l’Economie mais plutôt une arlequinade digne de la Commedia dell’arte. Car d’un côté les banques vont facturer à leurs clients les taux d’intérêts négatifs et de l’autre la BCE leur rembourse l’argent qu’elles leur auront volé ! Mais qu’est-on allé faire dans cette galère…
Ces manœuvres sans perspectives accentuent l’atmosphère de fin d’époque qui s’en dégage. Ce qui arrachait déjà en janvier dernier un soupir au brillant chroniqueur libéral Dessartine lors d’une émission de télévision : le système est bien « au bout, du bout, du bout ! »
La crise pétrolière
Dans le contexte d’une crise qui n’a jamais été résolue, le moindre grain de sable peut prendre des proportions surdimensionnées…et faire couler définitivement la galère. Le pétrole représente ici à la fois un symptôme de ladite crise, c’est-à-dire un signe de la récession économique, et un accélérateur vers la faillite générale.
Le prix du pétrole a chuté, tombant de près de 100 dollars à moins de 40 dollars le baril en avril 2016. A en croire nombre de chroniqueurs « spécialistes » comme Nicolas Doze, le visionnaire de la vie en rose sur BFM, c’était une chance inespérée qui ne pouvait qu’encourager à la reprise. Mais hormis la vente d’avions et de quelques gros bateaux, globalement rien ne s’est passé sinon une chute de la Bourse. Pourquoi ? Qu’est-il donc arrivé ?
On admet qu’il y a deux raisons à la baisse du prix du pétrole :
1) la récession mondiale de l’économie. Des états moteurs comme la Chine ont moins de besoin en énergie ou en carburant puisque la machine de l’économie productive tourne désormais au ralenti.
2) La guerre économique que mène l’Arabie Saoudite et les investisseurs sur son territoire, au nouveau pétrole, le gaz de schiste américain. Les promoteurs de cette manne ont investi sans compter, épaulés en toute confiance par les banques. Les rendements n’étaient-ils pas garantis ?
Oui, jusqu’à un certain seuil : si des producteurs concurrents se mettaient à baisser le prix de leur pétrole, le gaz de schiste, lui, deviendrait trop cher compte tenu des lourds investissements nécessaires. Bingo ! C’est ce qui s’est produit, provoquant une sorte de « crise de subprimes du pétrole » aux Etats-Unis où les installations d’extraction de gaz de schistes en sont réduites à la fermeture entrainant les banques dans leur faillite.
De façon générale toutes les sociétés pétrolières, comme Total, perdent de l’argent. Et leurs déboires influent sur toute l’Economie provoquant la baisse sur les marchés à actions.
Mais dira-t-on, cette crise n’est-elle pas passagère ? Le marché n’est-il pas condamné à se rééquilibrer ? Ce serait en effet possible si une reprise économique apparaissait provoquant une demande mondiale en pétrole. Une telle perspective est absente à l’horizon. Par contre le pétrole iranien est à présent sur le marché, enfonçant durablement les cours. La Russie, quant à elle, s’est détourné de l’Occident et vend son pétrole en Asie.
Certains analystes – qu’on peut même juger d’un optimisme irrationnel – ne prévoient pas d’augmentation du prix du pétrole avant 2019…
Les cours des Bourses suivent servilement ceux de l’or noir. Le pétrole baisse ; les cours suivent immédiatement la même tendance. Reste la solution d’une entente ou d’une contrainte pour faire remonter les prix. Mais alors qui achètera le pétrole plus cher puisque que plus personne n’a de fric…
Ah que la vie d’un capitaliste est dure et compliquée.
Spéculation financière, paradis fiscaux, et vieille dentelles.
On comprend que dans un tel monde où tout investissement représente un risque, les capitalistes intelligents se soient recyclés dans la spéculation financière, dernier domaine de l’ « activité économique ». Un documentaire « du fer à la Finance » (6), prenant l’exemple du Baron Pierre-Antoine Seillère, nous montre les mutations, de la vieille industrie lourde vers les financières. Une des pratiques spéculatives particulièrement rentables, consiste à acheter puis à revendre une société quitte à licencier au passage tout ou partie du personnel. Merci patron ! Ces licenciements représentent souvent même sur le marché un gage de bonne gestion et redonne de la valeur à ladite entreprise. Ce sont les actionnaires qui sont contents ! Que voilà de bons investisseurs exemplaires… Dans ce documentaire, le ministre Emmanuel Macron, interrogé sur ces pratiques immorales qui laissent sur la paille des centaines et des milliers d’employés licenciés, déclare son impuissance puisque lesdites pratiques sont généralisées à l’échelle mondiale et que toute menace de rétorsion n’aurait pour effet que faire fuir ces « hommes d’affaires » avisés. Ne sont-ils pas aujourd’hui, comme notre nouveau Lecanuet, l’âme du libéralisme…en marche !
Un des exercices lié à la spéculation financière, est la recherche de l’exemption fiscale. De grandes sociétés, comme Total, y arrivent très bien et ne pait pratiquement pas d’impôt. En France la fiscalité a toujours été une pomme de discorde, provoquant même une Révolution. Celui qui pait toutes ses redevances et taxes n’a aucune chance de réussir et est perçu par ses collègues comme un benêt sans avenir.
Pour d’autres, moins puissants, peut-être trop imprudents, c’est plus compliqué. Le risque de passer de « l’optimisation fiscale » à la fraude fiscale n’est pas le fruit d’une simple imagination. Denis Healey, ancien chancelier de l’Échiquier, estimait déjà dans les années soixante-dix que la frontière entre la légalité de l’optimisation et l’illégalité de la fraude avait « l’épaisseur d’un mur de prison ». Mais, dans l’ensemble au cours de ces dernières décennies, il faut bien constater la mansuétude des services de répression de la fraude fiscale pour cette « élite » friquée. Les « paradis fiscaux » non seulement protégeaient les déposants mais leur proposaient toute une panoplie leur permettant d’occulter à leur Fisc national la réalité de leurs avoirs placés à l’étranger. Les délateurs, non seulement n’étaient pas protégés, mais encouraient la rétorsion de puissants groupes internationaux.
Cette fuite à l’étranger, dans ces « paradis » avait fini par indisposer des états aux prises avec leur déficit national s’aggravant sans cesse. Si le Budget pouvait récupérer tout ou partie de ce pognon c’était quand même déjà ça de pris. C’est à quoi avait fini par s’atteler l’administration Obama qui somma la Suisse de lever le secret bancaire pour ce qui est des déposants américains. Et cette fois face à l’Empire, les prudents Helvètes ne purent qu’obtempérer.
La France, les institutions européennes, avaient dressé un tableau des « mauvais » paradis fiscaux. Bizarrement il n’y figurait aucune de ces places franches européennes que chaque puissance du continent entretenait depuis la nuit des temps de la Finance. Pour la France c’était Andorre et Monaco. Pour la Grande-Bretagne, Jersey, l’Ile de Man…Pour l’Allemagne, le Liechtenstein. En Italie, si San Marin n’est pas très connu, il reste la banque du Vatican, l’IOR (7), où l’on doit pouvoir placer son argent. Le Luxembourg, lui, attirait de tous côtés. Quant à la Suisse elle restait la reine du ballet. Non. La liste mis à jour du temps de Sarkozy était limitée à de petits pays sans appuis internationaux. Le président français, dans son style defunesque, avait déclaré péremptoirement qu’il n’existait plus de paradis fiscaux. La suite lui prouva bien sûr qu’il avait tort.
En réalité "La finance offshore étant au cœur du système financier international, et non à sa marge, son contrôle permet d'accroître la souveraineté d'un État. Aucune grande puissance ne peut donc se détourner de la question des paradis fiscaux. En contrôler un ou plusieurs permet d'acquérir un pouvoir sur l'activité des flux financiers et donc tirer un avantage par rapport à son voisin", (Vincent Piolet, Paradis fiscaux, enjeux géopolitiques - Editions Technip, septembre 2015).
La crise institutionnelle
La crise économique et financière mondiale a un impact sur les institutions de chaque pays. Sa traduction sur le terrain par un chômage promis à s’aggraver, a fait surgir en Europe mais aussi aux Etats-Unis, une vague de populisme, semblable à celle qui avait pu naître avant et après 1929. Des partis populistes de droite, ou apparemment inclassables comme le mouvement « 5 étoiles » de Pepe Grillo en Italie ont vu le jour, remettant en question le bipartisme parlementaire gauche-droite. Cette mise en cause devenait d’autant plus aisée qu’on percevait de moins en moins de différences entre ce que faisait la gauche ou la droite, se succédant régulièrement au pouvoir. Ce qui est mis partout en application, c’est la TINA, la politique de la Finance cherchant à vouloir diminuer toujours plus le coût du travail.
Dans la vie quotidienne, nombre d’institutions ou services publics comme la Justice ou la Santé montrent de clairs dysfonctionnements faute de moyens. L’unicité du service public a été remise en question en France, pays traditionnellement centralisé. On évoque des fonctions publiques régionales, comme en Espagne ou en Allemagne où les salaires et la qualité des services peuvent varier d’une région à l’autre.
On tente de mettre en cause le Code du Travail qui serait un frein pour la reprise économique. Comme si une plus grande facilité pour licencier, de nouvelles exemptions de charge (8) étaient en corrélation avec une reprise économique et l’embauche. Cette rengaine du patronat français montre surtout son impuissance et son manque de dynamisme.
Mais plus grave encore : en Europe c’est la zone euro et l’Union européenne elle-même qui sont remises en question. Tout va de plus en plus mal. C’est ce qui est perçu par un nombre grandissant d’Européens. Toute occasion est bonne pour montrer son désaveu de l’Union européenne. Comme le dernier référendum organisé aux Pays-Bas à propos de l’accord Ukraine-UE. Les Néerlandais n’ont pas raté cette occasion…
L’euro est une curieuse monnaie s’appuyant certes sur la puissance économique des plus grands pays européens, surtout celle de l’Allemagne. Mais elle est arrivée avant l’unité politique. Elle oblige des pays plus pauvres à s’aligner sur la politique du pays le plus riche, celui de Madame Merkel. La tentation est grande pour beaucoup de s’en débarrasser. Si pour la Grèce, perdu pour perdu, ce divorce d’avec l’euro aurait pu représenter, faillite à la clé, un nouveau départ, aujourd’hui le retour à une monnaie nationale permettrait, selon des penseurs comme Monsieur Sapir, une souplesse et une nouvelle compétitivité sur les marchés… La conséquence immédiate la plus évidente serait évidemment une baisse des coûts du travail et une misère encore plus grande pour les plus modestes. Mais dira t-on, « il faut ce qu’il faut pour sauver l’économie française »… et les intérêts d’une partie du patronat national.
Toujours est-il que le malaise est grand dans toute l’Europe et à l’heure où nous écrivons ces lignes, nous ne sommes pas sûrs de ce que fera la Grande-Bretagne, qui, elle, voudrait carrément quitter l’Union Européenne, ou de l’Italie où le fort courant « anti-européen » s’accentue.
Nouvelle politique et nouvelle gauche
Face à cette misère, à cette impuissance politique et institutionnelle, ne pouvait naître que la révolte. Elle surgit en Grèce où le bipartisme en était réduit au ronronnement et à la caricature : deux familles, l’une de gauche, les Papandréou, l’autre de droite, les Caramanlis, se succédaient en effet au pouvoir depuis des décennies. L’élite au gouvernement, d’où qu’elle vienne, avait accepté sans broncher toutes les manigances de la Finance européenne, notamment allemande, prête à tous les artifices pour rendre l’état grec convenable pour l’adhésion à l’Union Européenne. Les comptes étaient faux, la Grèce reconnue insolvable de fait. Le parti de coalition Syriza mené par Tsipras et son ministre Yannis Varoufakis avaient montré leurs biscoteaux, sûrs de leur science, et fait d’habiles propositions. Les appels à la raison qu’ils avaient pu lancer, se heurtaient à l’inamovible mur allemand. Non seulement la Grèce ne voyait aucune de ses propositions prises en considération, mais elle devait appliquer une politique imposée encore plus contraignante que ce qui avait été demandé au départ. Quant au FMI il allait de plus en plus souhaiter le dépôt de bilan et la faillite de l’état grec (9)
Cette conclusion était donc l’échec de cette nouvelle gauche en qui beaucoup voulait encore croire. La première leçon à en tirer réside dans le fait qu’on ne peut changer par des élections ou des sondages une politique financière commandée par le capitalisme international. Il aurait fallu un soutien populaire international à la Grèce, s’opposant radicalement à la Finance et des dirigeants plus déterminés à renverser la marmite. Mais de par leur essence politicienne, ils ne pouvaient l’être (10).
Cette nouvelle gauche rebondissait en Espagne avec le mouvement Podemos. Mais avant même la prise de pouvoir, la question électoraliste revenait sur le tapis : course aux places, stratégie d’alliances, dépassement du clivage droite-gauche… Tandis qu’un autre mouvement, clairement plus à droite, était né lui aussi : Ciudadenos.
D’où un nouveau questionnement. Et si cette « nouvelle gauche » ne représentait qu’un élément de la recomposition du traditionnel échiquier politique espagnol, partagé entre une gauche le Parti socialiste et une droite, le Parti Populaire, usées jusqu’à la corde ?…Un ravalement de façade en quelque sorte, avec des acteurs plus dynamiques pour mieux captiver un public blasé ?
Mais ailleurs aussi une nouvelle gauche naissait. Aux Etats-Unis, à côté du burlesque candidat républicain Donald Trump, chez les Démocrates, le candidat à la « primaire », Bernie Sanders, énonçant un programme « socialiste », remporte des succès inattendus face à Hillary Clinton, la candidate des banquiers.
En Grande-Bretagne le parti travailliste, dans l’opposition, a porté à sa tête Jeremie Corbyn, déclarant vouloir faire changer la politique des institutions bancaires.
Malgré les récriminations allemandes, le Portugal défie la logique de l’austérité budgétaire et augmente le salaire minimum. Tout comme en Californie, état US pourtant récemment encore en faillite. Mais que se passe-t-il donc ? Il semble bien, que les politiques d’austérité n’engendrant comme en Grèce qu’une plus grande récession, tout le monde ait compris, comme Monsieur Dessartine, qu’on en soit arrivé « au bout du bout ». Alors perdu pour perdu, on joue avec Mario, le jeu de la relance avec la « planche à billets ». Consommer, emprunter…par pitié : regardez comme les taux d’emprunts sont bas !
Mais cela ne marche guère car on n’a plus un rond et tout le monde sait qu’on en gagnera pas. Quand on en a, on peut tout juste payer nos dettes. La seule solution c’est d’ en finir avec le Mordor !
Imperturbables de nouveaux penseurs auront bien tenté de se faire une place. Jacques Attali a ainsi cultivé son image de « conseiller du Prince ». Trois mois avec Mitterrand, 30 ans dans les médias. Certains ont à présent du mal à tenir la route, et à vendre leurs bouquins, comme Paul Jorion, le lapin endormi, plein de bon sens, ne contrariant personne, que l’on traîne sur les plateaux faute de mieux.
De la révolte à la Révolution
Comme en Grèce, et encore mieux qu’en Grèce,c’est par l’action sur le terrain, par un mouvement d’occupation et de résistance aux injustices, que l’on peut changer les choses. Les « indignados » en Espagne se sont ainsi heureusement radicalisés. En France, le nouveau mouvement, celui que logiquement on attendait, anticapitaliste et radical, est peut-être en train de naître. « Nuit Debout » s’organise en plein « état d’urgence », défiant par la Démocratie Directe, les autorités. Il sera difficile de s’opposer à ceux qui veulent discuter de leur avenir, faire des propositions, manifester aussi leur colère, quand, en face, les gouvernements successifs ne font que remâcher leur impuissance, leur soumission au monde de la finance, leur absence de tout projet hormis celui, à peine caché, de misère généralisée. Il n’y aucune raison pour que la crainte gagne à présent les insurgés car les richesses, dans nos société, existent. Nous aurons toujours à manger. Et en plus on prendra l’apéro, le petit déjeuner, et les autres repas, chez les uns ou les autres.
(1) C’est ici une parabole avec la création littéraire de JRR Tolkien où le Mordor est le royaume du Mal qui doit être vaincu. Ici c’est la Finance, dernière séquelle du déclin capitaliste…
(2) La crise économique actuelle n’est pas née avec la crise financière de 2008. Celle-ci n’est qu’un symptôme d’une crise beaucoup plus profonde qui affecte depuis longtemps le système capitaliste. J’y fais référence dans « Tchok », écrit en 2013.
(3) http://www.businessbourse.com/ du 11/10/2015
(4) « L'Allemagne accuse la BCE de brûler l'argent de ses épargnants » L’Express/L’Expansion du 11/03/2016
(5) Il correspond à un taux d’escompte au jour le jour des prêts de la BCE auprès des établissements bancaires. Il a également été abaissé à 0,25 % contre 0,30 % auparavant.
(6) « Du fer à la Finance, l’empire De Wendel » de Marlène et Patrick Benquet – 60 min – France – 2014
(7) « Le procès du prélat de l’IOR pour malversations financières aura lieu en décembre » AFP 20/09/2013. Article repris par le journal « La Croix ».
(8) Au cours de ces dernières années, les entreprises ont bénéficié d’exemptions de charges tel la « niche Copé ». Tous ces avantages ont été globalement préservés voire augmentés par le gouvernement Hollande :Valls. Voir l’article « Le gouvernement sauve la « niche Copé » du rabotage fiscal » sur fiscalonline.com.
(9) WikiLeaks a récemment mis en ligne un extrait de la téléconférence qui avait eu lieu le 19 mars entre deux représentants du Fonds monétaire international (FMI). Le Fonds estime que le possible défaut de paiement de la Grèce pourrait coïncider avec le référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE (Brexit).Dans cette conversation publiée par WikiLeaks on apprend que le FMI envisage d’annoncer à l’Allemagne son intention de quitter la troïka des créanciers d’Athènes s’il n’arrive pas à s’entendre avec la Commission européenne sur la dette grecque.
(10) A partir du moment où, élu, l’on est tributaire des courants de l’opinion, facilement influençable et manipulable, on est condamné à l’impuissance et au retrait. Sans les politiciens, contre les populistes, c’est par un vaste mouvement né à la base, par la Démocratie Directe que les décisions radicales peuvent être prises et appliquées. La « démocratie » par les élections, dans le système actuel, n’est qu’un leurre.
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