La perspective d’une crise immobilière suscite l’inquiétude
Les prix de vente des biens immobiliers ont explosé ces dix dernières années tandis que les loyers sont restés relativement stables, une situation insoutenable à terme. La baisse des prix déjà entamée au mois d’avril, pourrait s’accentuer avec la hausse des taux d’intérêt. La question qui tracasse : la bulle va-t-elle se dégonfler ou exploser ?
- Illustration Flickr CC abac077
A la une de l’hebdomadaire Marianne de cette semaine : « Immobilier, la bulle dont personne ne parle ». A l’origine de ce dossier, un rapport rendu par le Centre d’Analyse Stratégique le 29 avril dernier. Ses analyses servent le Premier Ministre pour l’éclairer dans ses décisions stratégiques. Ce dernier rapport pointe une évolution des prix de l’immobilier « apparemment déconnectée de celle des loyers ».
Selon ce rapport, « les loyers, à surface et qualité constantes, ont globalement évolué comme le revenu disponible moyen ». « En revanche, les prix d’acquisition réels ont doublé (en trente ans) et cette hausse généralisée ne semble pouvoir être expliquée que marginalement par l’augmentation du coût de la construction ou un déficit généralisé de construction », ajoute le CAS dans sa note d’analyse. Cette hausse s’est particulièrement accéléré sur les dix dernières années (voir graphique ci-dessous).
Pourquoi une telle hausse des prix ? Ce sont les anticipations à la hausse qui sont pointées du doigt dans le rapport. Les prix augmentent car les propriétaires en anticipant une future hausse des prix augmentent leur propre prix. Une psychologie de masse qui débouche sur une situation économiquement absurde : les ménages louent au même prix un bien qui coute deux fois plus cher. Des taux d’intérêts historiquement bas, en d’autres termes le prix d’un prêt immobilier, sur la dernière décennie ont alimenté ces anticipations à la hausse.
En observant ce graphique, réalisé par l’économiste Jacques Friggit, on constate l’ampleur de ce décalage entre prix de vente et loyers en termes réels, c’est-à-dire rapportés au revenu disponible des ménages. La crise de 2008 se traduit par une baisse substantielle puis une remontée spectaculaire à partir de juin 2009, au même niveau d’avant-crise.
Baisse des prix en avril, et après ?
La baisse des prix de vente amorcée en avril (-0,17% selon le baromètre SeLoger) devrait être selon les analystes, le début d’un retour à la raison. Marc Touati, responsable de recherche économique, financière et stratégique d’Assya Compagnie Financière, interrogé par lavieimmo. com pronostique une baisse de prix de l’ordre de 5 à 10 % en 2011, et de 20 % environ au cours des deux à trois prochaines années.
Plusieurs facteurs vont accentuer cette tendance baissière. La Banque Centrale Européenne va progressivement relever ses taux d’intérêts, renchérissant le coût des crédits. La persistance d’un chômage élevé et la stagnation du pouvoir d’achat vont également contribuer à déprimer la demande. Le Crédit Foncier prévoit déjà une baisse du nombre de ventes de logements de 4 à 5% pour 2011.
Dans les années 90, les prix étaient revenus à l’équilibre (voir graphique ci-dessus) graduellement. Le déséquilibre actuel est bien plus important que celui des années 90. La question est à quelle vitesse les prix vont-ils baisser. Une spirale déflationniste avec une baisse généralisée et rapide qui incite les propriétaires à vendre et les acheteurs à différer leurs achats, pourrait avoir des effets terribles sur le reste de l’économie. Cette spirale contracterait la consommation, avec à la clé une nouvelle récession.
Le pire dans cette histoire, est que la clé du dénouement se situe dans la tête des gens, dans la psychologie de masse. Comment les réagiront-ils à la chute des prix de l’immobilier ? Panique, consommation différée, ou je-m’en-foutisme ? Bien malin celui qui pourra le prédire !
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