Le PIB est-il périmé ?
Le monde « chiffré » correspond-il à la réalité ? Que nous apprennent réellement tous ces indicateurs économiques ? Comment interpréter le fait que nos élus justifient leurs politiques par les statistiques ?
Le Produit intérieur brut (PIB) est l’indicateur de référence en matière de comparaison entre Etats. En 2006, par exemple, la France se classait 6e derrière les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la Chine et le Royaume-Uni (source). Mais ces chiffres veulent-ils dire quelque chose ? Doit-on baser son action économique par rapport aux autres Etats ?
Le PIB est en effet un indicateur vivement critiqué car il ne donne aucune information sur les conditions de vie. Il renseigne simplement sur la valeur totale de la production de biens et de services marchands à l’intérieur d’un Etat pendant une année. C’est donc un indice purement quantitatif qui ne mesure pas la qualité de la vie comme peut le faire l’Indice de développement humain (IDH) élaboré par le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD) en 1990.
L’IDH n’est pas l’indicateur macroéconomique le plus efficace, mais il est de loin le plus connu après le PIB. Il mesure la qualité de vie à partir de trois critères : longévité (espérance de vie à la naissance), Education (taux d’alphabétisation et taux de scolarisation) et Niveau de vie (PIB/hab corrolé au pouvoir d’achat).
Cette même année 2006, la France était classée 16e selon cet indicateur (source). Comment se fait-il donc que le PIB soit toujours préféré à des indicateurs plus précis ? Ce choix est d’autant plus contestable qu’il ne respecte aucunement les impératifs écologiques : le PIB compte toutes les opérations ce qui voudrait dire que les catastrophes naturelles ou - plus généralement - l’économie de destruction/reconstruction enrichit notre économie ! Les marées noires de Bretagne ont-elles fait grimper le PIB français malgré la désertification touristique ?
Plus ridicule encore est cette manie de calculer le PIB par habitant comme si tous les habitants disposaient équitablement du fruit de la richesse globale ! Ces indices ne donnent jamais la répartition véritable de la richesse et passent sous silence le fait qu’une minorité s’octroie la majeur partie du gâteau. Ainsi, un Etat comme l’Irlande est passé en quelques années du statut de "quasi sous-développé" (pour un pays de la zone euro) à celui de "dragon celtique". Jouer avec les chiffres et si facile : les Irlandais étant environ 4 millions (contre 60 millions pour la France), il est donc logique que le chiffre par tête soit favorable à nos voisins !
De même, le modèle nordique n’est viable qu’à partir du moment où ils sont peu nombreux. Là encore, on pourrait critiquer le benchmarking (pratique qui consiste à s’inspirer de ce qui se fait ailleurs : voir ici) qui n’adapte plus, mais copie purement et simplement. Les situations ne sont pas les mêmes et il est nécessaire de comprendre que chaque territoire est unique et mérite une politique unique. Les modèles parfaits, clé en main, n’existent pas !
Il semblerait que Michel Rocard ait eu raison de déplorer l’ "absence totale de pensée économique des Français" ! Les citoyens autant que les élus mériteraient une meilleure formation de base, loin des dogmes de l’économie néoclassique. Cela leur permettrait de comprendre que le volontarisme politique peut corriger les tendances plutôt que les accompagner...
Posons-nous par exemple ces questions : la Chine est-elle riche ? Ne devrait-on pas suivre l’exemple du Bouthan et de sa recherche du bonheur plutôt que la recherche de l’argent comme d’une fin en soi ? L’Indice de bonheur humain a de quoi faire sourire, mais il est sans doute plus proche de la réalité que le PIB...
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