Pourquoi donc ?
Simplement parce que la Culture induit des comportements, produit et est
produite par l’Expérience globale ou individuelle, simplement parce qu’elle
interroge le Monde et permet de créer sans que le Matériel n’interfère.
En cela, elle est aujourd’hui le noyau de la mécanique de globalisation,
dominée par le dogme dit néo ou ultra-libéral :
bien que ce système apparaisse autant bâtard qu’hybride des points de vue économique
ou idéologique.
Le travail de ces élites ( à entendre castes/classes dominantes) a commencé dés
le début du siècle dernier, le bouillonnement
industriel leur fait comprendre ce
qu’ils pouvaient tirer soit du contrôle de la Culture soit par sa substitution
par l’actuelle anti-culture. Les théories freudiennes et la crise de 1929 furent
le décor permettant ce constat par
nos élites.
Les gains de productivité engendrés par la Révolution industrielle eurent pour
conséquence une surproduction chronique que Marx avait prophétisé en parlant de baisse
tendancielle du taux de profit.
Réalisant cela, les élites économiques
comprirent qu’elles devaient opérer un élargissement de leurs marchés plutôt que des gains de
productivité . La globalisation, encore en marche, donnera à cette mécanique d’élargissement une dimension
globale dont notre monde contemporain témoigne.
L’enjeu peut se résumer ainsi : il faut dynamiser la consommation plutôt que la production, en
effet la consommation sera toujours inférieure aux possibilités de production. Dés
lors tous les moyens seront bons pour pousser/inciter à la consommation, le
marketing est né…aujourd’hui, nous en voyons les conséquences où même l’art politique n’est plus qu’affaire de
marketing soit de communication.
Mais dés lors que la Consommation devient la finalité (ou absence existentielle
de finalité dans les faits) de l’individu, la Culture entre dans sa phase
terminale dans la construction et de l’individu, et de l’Humanité. L’individu
consommateur ne peut cohabiter avec l’individu culturel : où tout au moins, le
système n’a plus besoin de l’être culturel.
Quel est notre monde aujourd’hui ? La globalisation, que produit-elle comme
décor ? des multinationales multipliant leurs marchés par deux, trois..par
cent…etc…faisant tomber les barrières douanières mais aussi les barrières esthétiques
ou culturelles …dans le but de « vampiriser
» l’individu, de capter, de diriger son énergie
libidinale, de le faire muter d’être culturel à clone-consommateur.
Prendre un consommateur à un concurrent est une
formule usuelle : le terme prendre quelqu’un témoigne à lui seul de la violence
et du processus vampirique (ou phénomène de possession
avec une grille de lecture religieuse) de ce qui nous apparaît somme toute devenu
commun mais surtout normal : le concept de concurrence impactant jusqu’à
nos conduites et nos rapports à l’Autre…Décor posé par le néocapitalisme ou dit
néo/ultra-libéralisme économique, avec son système de croyance : ses
dogmes, sa divine loi du Marché, etc…
Mais qu’est-ce donc que prendre un client à un concurrent, de le garder comme
client si ce n’est un phénomène d’ordre libidinal, une captation et dérivation
de l’énergie libidinale de l’individu.
Le Désir, au centre de la religion Consommation connaît une énergie mais aussi
une économie, qui le gouvernent inconsciemment : l’affect. Or nos élites ont compris qu’on pouvait non seulement le
capter mais aussi l’organiser , et là
où l’acte consommatoire tant il est habituel, et parait anodin, démontre le
pouvoir de contrôle donné à nos élites : cette captation-organisation est de fait destructrice.
Comme nos élites visent pour l’instant
au contrôle des individus et non à leur destruction, l’enjeu est de capter-organiser cette énergie
individuelle, de conquérir la libido des individus-consommateurs sans pour autant
la détruire mais bel et bien la contrôler.
Voilà le nouveau modèle d’individu,
de contrôle, de culture/anti-culture auquel l’Humanité est confrontée,
changement sans précédent depuis des dizaines de millénaires dans le rapport autant
au Monde qu’à l’Autre ou à Soi.
comment s’opère cette « conquête »,
cette « captation-organisation »,
comment les élites vampirisent l’individu-consommateur ?
La conquête, la captation se fait au
travers de dispositifs de contrôle des temps
et espaces d’existence de chacun,
plus clairement par mise en place d’un système de contrôle de l’espace-temps de vie individuel.
Le contrôle usait d’abord de moyens analogiques : cinéma, radio,
télévision. Ou plus simplement industries
de programme . Ces moyens aujourd’hui sont devenus numériques, mais leur
fonction demeure, à savoir : propositions de modèles de vie et de conduites-attitudes en orientant l’évolution
des désirs du Public : les individus-consommateurs que nous sommes
devenus. L’aspect strictement commercial revenant à vendre selon une formule
consacrée : du temps de cerveau
disponible aux différentes marques.
Mais aujourd’hui, nous assistons au développement accéléré de technologies
beaucoup plus redoutables, des technologies de contrôle computationnelles qui
permettent d’intégrer et de faire converger toutes les phases de production en
parallèle avec celles de la consommation. En plus simple : des technologies de
contrôle totale de la chaîne production-consommation.
Tout y est intégré : recherche, développement, design, conception, marketing,
production, logistique, distribution just in time avec réaction en temps réel ou un décalage
minimal aux codes barres en bout de chaine.
Intégration totale de tous les éléments de cette nouvelle anti-culture : publicité, création de l’envie, méthodes de
géolocalisation pour la logistique, et traçabilité
des clients.
Un contrôle total de l‘individu-consommateur qui ne se doute de rien et quoi
agir selon ses besoins et sa perception.
En quoi cela est-il nouveau et dangereux ? le contrôle strictement social est
dépassé, l’idéologie dominante via des moyens technologiques opère ce contrôle
via la Culture, jusqu’à l’anéantir en tant que telle devenant de fait
anti-culture de Contrôle et Conditionnement. Les singularités deviennent alors des particularités, et la Culture devient l’anti-Culture.
Le singulier naissant de l’Expérience, disparaît
derrière le Particulier né du Conditionnement et de réactions influencées.
La singularité est le cœur du sujet
individu, cette singularité cherche ses âmes-sœurs qui elles aussi sont des
singularités. Tout ce que l’individu cherche dans sa vie ce sont des
singularités autres. L’acte d’achat en cela, est une projection de cette singularité
dans l’absolu. Si cet acte d’achat ne permet plus la projection de cette
singularité mais se réduit à un réflexe conditionné d’acte consommatoire, le
singulier disparaît derrière le particulier. A l’échelle globale, c’est la disparition-destruction des singularités
individuelles soit de ce qui définit chacun, d’une manière à la fois systèmatique et systèmique.
En définitif, la
fin de l’Humanité en tant qu’ensemble d’individualités originales et
singulières pour une pseudo ou post-humanité comme somme d’individus identifiables
uniquement par quelques particularités
consommatoires. Une post-Humanité
sans Culture pour relier les individus mais une anti-culture pour les contrôler.
Cet évènement n’a rien d’anodin et nous assistons purement et simplement à la
disparition de l’Homme dans des sociétés, soi-disant, inspirées par les valeurs
des Droits de l’Homme :
Par le passé, nous connaissions des sociétés de type disciplinaires, le
contrôle y était principalement social : par exemple, on pourrait dire que dans
la société industrielle, le contrôle social ne passait pas par la Culture mais
par un contrôle de la production des ouvriers dans les usines, ou l’action des
militaires, ou bien encore celle des gardiens de prison…un contrôle d’une
société qui produit, qui agit, qui veille au respect d’un certain Ordre…mais
cela complètement indépendamment d’autres acteurs de la société : ceux du monde
de l’Esprit qui à l’époque capter-organiser la libido collective pour assurer le pouvoir du Roi, de l’Eglise, soit
les pouvoirs politiques et religieux.
Donc des sociétés
divisées en deux catégories : le monde de la Production et de l’Action et le monde de l’Esprit : complètement libre
dans la construction de la Culture de tout contrôle social : celui-ci
opèrant dans le monde de la Production et de l’Action.
Donc la possibilité de la Culture et de la culture
de Soi , soit un monde où l’individu se forge une expérience de lui-même
mais aussi du monde.
Les nouvelles élites inversant la hiérarchie historique Culture/Politique/Economie
ont mis fin à cette division de la société en deux mondes séparés, plus
simplement fin de la séparation entre monde
de l’Action et monde l’Esprit, entre espace-temps
de l’Acte, et espace-temps de la
Pensée où naît et évolue l’Humanité et la Culture.
Derrière, l’aspect conçu comme inéluctable de globalisation autant économique
que dans la perspective de la dite démocratie
libérale conçue comme un absolu : apparaît quelque chose de terrible
et terrifiant pour notre évolution future : la séparation entre monde de
l’Esprit, de la Pensée, de la Culture et monde de l’Acte, de la Production, du
Matériel est ELIMINEE, éliminée sur tous les plans : technique, économique,
politique.
Ces deux dimensions du Monde, mais aussi de la Vie et de l’Humanité ont permis
l’évolution de l’Humanité depuis Neandertal…cette séparation entre monde de l’Acte(matériel) et monde de la Pensée(spirituel) avait
permis la Culture, avait créé ou produit l’Expérience à l’échelle autant
globale qu’individuelle, mais avait aussi permis que le contrôle ne soit jamais
total, se contentant d’être social : un contrôle visible et définissable :
cette division du Monde avait certes produit du conditionnement culturel ou social (religieux,
idéologique, etc…) mais avait toujours laissé un espace pour l’expérience
individuelle, et donc la construction de perceptions individuelles du Monde, de
l’Autre.
Autant dire, que la fusion contrôlée de ces deux mondes dans une perspective de
contrôle autant total que global est un évènement colossal à l’échelle du Monde
et de l’Humanité…c’est la fin de la Culture, et en définitif de l’Humanité
telle que nous l’avons toujours conçue.
et à nouveau la même question : qui
du barbare ou du clone est le plus proche de l’Humanité ?