Le système financier se porte bien, rassurez-vous
Les compteurs s’affolent, l’économie mondiale s’emballe. Certains économistes prédisent une fin de l’euro pour les années à venir[1] et pourtant les discours des grands dirigeants continuent à se vouloir rassurant. Où est la vérité ? Le système financier actuel est-il vraiment en mesure de s’effondrer ?

Entre la Grèce et l’affaire DSK, l’été n’aura pas eu besoin de la presse people pour sortir de sa quiétude cette année. Chaque jour qui passe continue d’apporter son lot de surprises. Récemment, Natixis a été contrainte de sortir du CAC40 et le Crédit Agricole (première banque française) est doucement invitée à quitter le Stoxx50[2]. Après une courte partie de yo-yo[3] laissant planer l’espoir d’une « reprise » ce mardi matin, les cours de bourse continuent leur inexorable plongée[4], mais personne ne peut affirmer comment ils se porteront ce soir.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes, l’économie mondiale a rarement été aussi instable. Les marchés financiers ne sont plus les seuls touchés par les tensions qui ont également atteintes les hautes sphères : « La démission vendredi de Jürgen Stark, chef économiste de la BCE, pour ‘raisons personnelles’, a fait éclater au grand jour les dissensions au sein de la Banque centrale » [5]. Mais point d’inquiétude nous dit-on, cette « crise » n’est qu’une parenthèse douloureuse dans un système où tout ne semble pas aussi maîtrisé qu’on le laisse entendre…
A l’échelle nationale, l’endettement n’a jamais été aussi fort. Un rédacteur a d’ailleurs relevé qu’il avait dépassé le montant observé au moment de la Révolution Française : « Nous sommes en 2011 avec une dette publique de 84,5% du PIB, donc supérieure à l'estimation de plus de 80% du PIB en 1797 »[6].
Notre commerce se retrouve indubitablement touché par cette incertitude latente. Les emplois sont dans la ligne de mire de nos directeurs et les travailleurs sont les premiers à essuyer les plâtres de cette situation versatile. On apprend que Philippe Varin, patron du consortium PSA Peugeot Citroën « a commencé à réduire son activité dans certaines usines et que le groupe va parallèlement adapter son volant d'intérimaires et de sous-traitance d'ici à la fin de l'année »[7]. Cette attitude qui sera sans doute suivi par d’autres chefs d’entreprise ne sera pas favorable à une reprise de l’emploi en France. Les marchés font douter les patrons et ces mêmes patrons alimentent le doute. C’est le serpent qui se mort la queue.
A tous les niveaux, l’état général de notre économie semble se disloquer petit à petit. La conduite d’un système financier gangrené par les profits et les bonus apparaît de moins en moins évidente, et pourtant…
Au regard de l’affolement des cours de bourse et des discours alarmistes des économistes, les dialogues de nos politiques et dirigeants contrastent de manière forte avec la situation observée. Conscient que la nature de leurs propos vise en priorité à rassurer l’esprit des investisseurs ainsi que la confiance générale des marchés, on apprend aux travers des interventions de Christian Noyer, gouverneur de la banque de France, que non, le milieu financier n’est pas en danger : « Quel que soit le scénario grec et donc quelles que soient les provisions à passer, les banques françaises ont les moyens d'y faire face »[8].
On ne note plus les réunions organisées cet été entre états membres pour décider des montants à débloquer pour maintenir la Grèce à flot et voilà qu’aujourd’hui, nous apprenons que les banques françaises peuvent à elles seules subvenir à toutes les scénarios les plus catastrophiques et inimaginables de la Grèce ? Comment ce tour de magie est-il possible ? Les tiroirs caisses de la France seraient-ils sans fond ? Combien de lapins les financiers cachent-ils encore sous leurs chapeaux d’argent ?
Toujours selon Christian Noyer : « S'agissant de la liquidité, le collatéral mobilisable au niveau de l'Eurosystème est de 5.000 milliards d'euros et aujourd'hui l'Eurosystème refinance les banques pour environ 500 milliards d'euros dans le cadre d'opérations de refinancement dont le montant est illimité ». Sur la question de la solvabilité, il ajoute : « les banques françaises ont déjà ajouté en deux ans 50 milliards d'euros à leurs fonds propres et vont continuer à les augmenter en vue de l'application de Bâle 3 »[9].
Alors que les français sont invités (sans sommation) à se serrer la ceinture pour supporter la santé d’un système dont ils ne sont pas responsables, les banques auraient généreusement épargnés pour faire face à la tempête ? Ajoutons également qu’à cette première soupape : « Les régulateurs internationaux ont décidé il y a un an de relever le ratio des fonds propres "durs" (capital social et bénéfices mis en réserves) des banques à 7 % de capital rapporté aux actifs pondérés des risques, afin de renforcer la solidité des banques face à de futures crises. Un deuxième coussin de sécurité, dit "Tier 2", de 3,5 % viendrait gonfler le ratio total minimal des fonds propres à 10,5 % »[10].
Avec ses 5 000 000 000 000 d’euros de réserve, les pieds de notre colosse seraient donc bien plus solides que nous le pensons. Si la réserve d’argent des banques est aussi importante, pourquoi observe-t-on alors de telles fluctuations sur notre économie ? Et pourquoi continuer à faire payer les populations si ils sont en capacité de se guérir eux-mêmes, la part de notre contribution à ces 5000 milliards d’euros étant minimes (pour eux) ? Et pourquoi une telle dissonance entre les discours des spécialistes, patrons et politiques ?
Le système financier s’apparenterait donc davantage à un cheval à bascule qu’à un château de cartes. S’il est aussi inébranlable que les dirigeants le prétendent, ce n’est malheureusement pas demain que nous pourrons observer une remise en cause de son fonctionnement et de ses pratiques parfois (pour ne pas dire souvent) douteuses…
[2] http://www.latribune.fr/bourse/20110906trib000647104/natixis-sort-du-cac40-le-credit-agricole-de-l-euro-stoxx50.html
[3] http://www.leparisien.fr/crise-europe/en-direct-bourses-le-cac-40-repasse-dans-le-rouge-13-09-2011-1605696.php
[5] http://www.lesechos.fr/investisseurs/actualites-boursieres/investir_00378293-la-crise-de-la-zone-euro-pese-sur-les-marches-les-financieres-chutent-217885.php
[7] http://www.boursier.com/actualites/economie/psa-va-tailler-dans-ses-effectifs-pour-reduire-ses-couts-10639.html?sitemap
[8] http://www.lexpress.fr/actualites/2/actualite/les-banques-n-ont-pas-de-probleme-selon-baroin-et-noyer_1029357.html
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