Les réductions d’impôts sont pour les riches
Dans l’article précédent (https://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/qui-sont-les-vrais-riches-en-224999), on a vu que les vrais riches en France ne sont pas ceux qui travaillent et ont un gros salaire, mais ceux qui vivent de leur patrimoine. Ces personnes ont des actions, des appartements et des entreprises qui leur rapportent de l’argent chaque mois sans qu’ils aient besoin de réaliser une activité ou de produire quelque chose. Ces supers-riches sont le plus souvent des héritiers.
Ce qu’on va voir dans cet article, c’est que ces super-riches sont aussi ceux qui bénéficient le plus de baisses d’impôts et qu’au contraire, ceux qui payent le plus d’impôts sont ceux qui ont un gros salaire et pas un gros patrimoine. Ce sont les travailleurs qui créent l’activité et la richesse qui en plus financent la solidarité nationale. Ceux qui possèdent le patrimoine sont les grands assistés du système.
Lien vers la vidéo : https://youtu.be/w0LWxDZlCVw
Sources :
Étude Insee sur les bénéficiaires des réductions d’impôts : https://www.insee.fr/fr/statistiques/4504961
Niveau de vie moyen par décile :https://www.insee.fr/fr/statistiques/2417897
Taux d’imposition : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F1419
Principe de décote : https://www.economie.gouv.fr/particuliers/decote-impot-revenu
Propagande sur l’observatoire des inégalités : https://www.inegalites.fr/Face-a-la-crise
La baisse des impôts c’est quoi ?
Depuis 1945, l’impôt sur le revenu en France repose sur deux piliers :
Le premier est la progressivité de l’impôt, plus on gagne d’argent plus le taux d’imposition est élevé.
Cela fonctionne par tranche :
Cela signifie que si on gagne 25 659 € dans l ‘année, on paye 0 % pour les premiers 10 064 € et 11 % sur ce qui reste. Donc 25 659 € - 10 065 € = 15 594€ on paye 11 % sur ce total soit 1 715,34 €.
Le deuxième pilier est le principe de redistribution horizontale pour les familles. Autrement dit plus une famille est grande et moins elle doit payer d’impôts. Dans la famille on compte l’argent gagné par tout le monde et on divise ensuite par le nombre de parts pour savoir dans quelle tranche on se trouve.
La dernière étude de l’Insee sur les impôts en France nous montre que les réductions d’impôt sur le revenu représentent un coût de 29,7 Milliards d’euros chaque année. Cela représente une baisse de 30 % du total des impôts sur le revenu.
Les deux mécanismes principaux permettant de réduire ses impôts sont le fait de faire une déclaration commune avec son conjoint, ce que l’étude appelle les dispositifs conjugaux ou la conjugalisation de l’impôt, et le fait de déclarer des personnes à charges, ce que l’étude appelle les dispositifs familiaux ou la familialisation de l’impôt.
En 2018, 15 millions de ménages ont vu leur imposition baisser par rapport à une situation où toutes les personnes du ménage auraient dû déclarer leur revenu tout seul.
Sur les 29,7 milliards de baisse, 19 milliards sont dû à la politique de baisse pour les familles, et 10,8 milliards sont dû au fait de faire sa déclaration avec son conjoint.
On voit à ce moment que le fait de faire sa déclaration avec son conjoint permet dans la majorité des cas de baisser ses impôts, mais dans un faible nombre de cas, ça les augmente. En effet, quand on est marié ou Pacsé, on est obligé de faire une déclaration commune. Et il arrive qu’on doive payer plus d’impôts à 2 que chacun de son côté si on a le droit à une décote tout seul alors qu’on y a plus droit à deux.
Par exemple en 2019, les personnes seules qui ont un impôt sur le revenu de moins de 1 611 € ont droit à une décote alors que pour les couples, il faut avoir un impôt sur le revenu de moins de 2 653 € pour avoir droit à une décote.
Donc si on prend deux personnes qui chacune devaient payer 1600 € d’impôts, elles ont droit à une décote si elles déclarent leurs impôts chacune de leur côté. En revanche si elles se marient elles auront 3 200 € d’impôts à 2 et n’auront plus le droit à une décote.
En France 2,4 millions de ménages sont perdants car ils perdent le droit à la décote en étant mariés ou Pacsés.
On va voir maintenant qui a le plus droit aux réductions d’impôts en France.
Plus on est riche, plus on a de cadeaux fiscaux
La suite de l’article Insee nous montre à qui profite le plus les baisse d’impôts. En France ce sont les plus riches qui ont le plus de cadeaux fiscaux et ceux qui se font le plus avoir dans l’histoire, sont ceux juste en-dessous. Les impôts tapent sur les gros salaires ou grosses retraites, mais pas sur les ultras-riches.
Pour bien comprendre il faut avoir en tête ce que gagnent les ménages français. Imaginez que l’on trie dans l’ordre croissant des revenus tous les ménages français, de ceux qui gagnent le moins à ceux qui gagnent le plus. Ces revenus sont rapportés au nombre de personnes du ménage, pour donner ce qu’on appelle le niveau de vie.
Ensuite on divise toute notre population bien rangée dans l’ordre croissant des revenus en 10. Les 10 % qui gagnent le moins en France gagnent en moyenne 700 € par mois. En fait ça s’étale entre 0 € et 935 € par mois et c’est en moyenne que ça fait 700 € par mois.
Les 10 % juste au-dessus gagnent en moyenne 1060 € par mois. Les 10 % juste au-dessus gagnent en moyenne 1270 € par mois etc.
Les 10 % qui gagnent le plus en France gagnent en moyenne 4760 € par mois. Mais en fait pour les 10 % les plus riches c’est très hétérogène. Parmi eux, les moins riches gagnent déjà plus de 3 200 € par mois. On ne sait pas combien gagne le plus riche de France, mais on sait que les 0,1 % les plus riches gagnent tous plus de 22 360 € par mois.
Il y a donc 2 catégories parmi nos 10% les plus riches :
-
Ceux dont les revenus viennent d’un salaire, certes élevé mais qui ressemblent aux autres ;
-
Ceux qui ont des revenus qui ne viennent pas de leur travail, mais de leur patrimoine et dont les montants sont complètements fous.
L’Insee nous montre dans son étude qui est gagnant ou perdant avec les réductions d’impôts dus au fait d’avoir un conjoint ou des enfants, en fonction de son niveau de vie, c’est à dire ce qu’on vient de voir.
Les gagnants avec réduction d’impôts sont en rouge, ceux pour qui ça ne change rien sont en vert et les perdants, ceux qui en couple n’ont plus le droit à la décote, sont en bleu.
Pour ceux qui gagnent le moins, les réductions d’impôts jouent peu puisque de base ils payent rarement des impôts même sans réduction.
Ensuite la part des gagnants augmente avec le revenu pour atteindre un maximum dans notre 4e tranche de revenu, c’est à dire au niveau des gens qui gagnent 1 500 € par mois environ.
À partir de ce moment, on a environ 2/3 des ménages qui sont gagnants. Mais c’est le moment aussi où on commence à avoir des perdants.
Les tranches sur lesquels les impôts ne font pas de cadeaux sont les couples avec un des deux conjoints qui gagne le SMIC ou en-dessous et l’autre qui a une paye de cadre ou de technicien supérieur. Ça fait qu’à deux, ils gagnent en moyenne chacun entre 1 800 € et 2 500 € par mois, mais plutôt un qui doit gagner moins de 1 500 € par mois et l’autre entre 2 000 € et 3 000 € par mois. Donc le premier aurait droit à une décote s’il déclarait ses revenus tout seul, mais il la perd en faisant une déclaration commune.
La part des perdants diminue ensuite à partir d’environ 3 000 € par mois. En effet, chez les couples il est rare d’avoir des énormes écarts de salaires. À partir de ces niveaux-là, aucun des deux conjoints ne devraient bénéficier d’une décote. Le plus souvent quand un des deux à un salaire faible c’est pour un temps partiel pour garder les enfants, mais dans ce cas le fait d’avoir des enfants compense la perte de décote.
Le phénomène le plus marquant ensuite concerne les très riches. On voit nettement que les 1 % les plus riches, ceux qui gagnent plus de 9 000 € par mois par personne en moyenne, sont ceux qui sont le plus souvent gagnants avec le système.
Si on résume, plus on est riche plus on est gagnant avec la décote, en revanche, le moment où on a le plus de perdants ce sont chez les salariés un peu aisés.
Maintenant regardons qui gagne le plus d’argent avec ces réductions d’impôts.
Ici l’Insee a représenté le gain que représente la baisse d’impôt toujours en fonction du revenu. On voit que nos 10 % les plus pauvres gagnent moins de 1 % de niveau de vie avec les réductions d’impôts.
Ensuite ça augmente progressivement jusqu’à obtenir un plafond autour de 4,5 % de gain niveau de vie. Ça baisse même un peu pour ceux dont on a vu qu’ils pouvaient être perdant tout à l’heure. On ré-augmente ensuite en gains pour les plus aisés pour dépasser les 5 % de gain de niveau de vie et on a le maximum pour les plus riches.
Donc avec les impôts, plus on gagne d’argent et plus la ristourne est importante. Rappelons que la ristourne totale coûte 30 milliards, regardons qui des pauvres ou des riches prend le plus dans ces 30 milliards.
On voit ici sur ce graphique que la ristourne accordée aux 5 % des français les plus riches coûte presque 6 milliards d’euros par an, soit presque 20 % du total. C’est normal que pour les plus pauvres on considère que la ristourne ne coûte rien puisque de base ils ne payent pas d’impôts. On voit ensuite que le coût de la ristourne est relativement équilibré chez tous ceux qui payent des impôts jusqu’aux 20 % les plus riches, pour lesquels ça commence à coûter plus cher, mais pour les 5 % les plus riches on arrive à des niveaux qui n’ont rien à voir avec les autres. Probablement si on descendait encore plus finement pour voir ce qui se passe pour les 1 % ce serait pire…
Donc concernant les ristournes des impôts concernant la déclaration avec conjoint et les parts fiscales dues aux enfants, ce sont les 5 % les plus riches qui en bénéficient le plus, qui gagnent le plus d’argent avec et qui coûtent le plus cher à la nation. Il ne faut pas oublier que parmi eux, les écarts sont énormes entre ceux qui vient de leur salaire et ceux qui vivent de leur patrimoine.
Les salariés toujours perdants
L’observatoire des inégalités a publié un article de propagande qui propose de faire payer la crise du coronavirus aux personnes aisées. Cet article dit que vouloir faire payer les ultras-riches c’est de la démagogie et qu’il faudra que toutes les personnes gagnant plus de 1 400 € par mois fassent des efforts. Comme toujours ce type d’article a pour but de mélanger tout le monde en oubliant qu’une partie infime de la population ne vit pas de son salaire, mais de son patrimoine et gagne des sommes folles.
C’est la philosophie macronienne, les riches n’ont pas besoin d’un président ils se débrouillent très bien tout seul. Cette phrase montre bien que le gouvernement français considère que les ultras-riches ne doivent pas payer pour le système parce qu’ils n’en ont pas besoin. Ils oublient facilement toutes les aides et cadeaux fiscaux dont ils bénéficient.
Prenons un exemple, on a vu que nos 0,1 % les plus riches gagnent plus de 22 360 € par mois, ça fait plus de 268 350 € par an. Les impôts proposent un simulateur de l’impôt sur le revenu. Si j’ai gagné cette somme par un salaire, alors j’ai déjà payé la CSG-CRDS et il reste à payer les impôts sur le revenu qui sont de 94 882 €.
Maintenant si j’ai gagné cette somme grâce à mes actions en bourse, il me reste à payer la CSG-CRDS et les impôts sur le revenu et le total fait 81 056 €.
Je paye donc 13 800 € d’impôts de moins si j’ai des actions plutôt que si j’ai un salaire. C’est la magie de la Flat-tax instauré par Macron pour ses amis les propriétaires plutôt que pour ceux qui travaillent.
Dernière chose, les impôts font partie du pouvoir d’achat des ménages, quand on veut que le pouvoir d’achat des ménages augmente, on peut se dire qu’il faut, soit augmenter les salaires, soit baisser les impôts. Seulement on observe que quand on baisse les impôts, les salaires n’augmentent pas et ce sont toujours les plus riches qui finalement se mettent cet argent dans la poche.
Prenons l’exemple d’une entreprise qui distribue des revenus. Elle distribue des salaires aux salariés qui travaillent dans l’entreprise et des dividendes aux actionnaires qui possèdent l’entreprise. Une partie des revenus des salariés et des actionnaires servent à payer les impôts sur le revenu.
Seulement on a vu que les bas salaires en France ne payent pas d’impôts sur le revenu et on sait qu’Emmanuel Macron a fait casser le code du travail avec les lois Macron et El Kohmri pour permettre aux entreprises d’embaucher à pas cher des personnes à temps partiel. On a donc fait privilégier les emplois précaires à temps partiel et peu payés qui ne payent pas d’impôts contre les CDI à temps plein qui payent des impôts.
Mais donc où est parti l’argent des salariés qui servait à payer des impôts ? Directement dans la poche des actionnaires. Finalement, ce sont toujours ceux qui possèdent le patrimoine, les actions et les entreprises qui profitent de la baisse des impôts et pas les salariés.
Les grands patrons sont donc aussi pour la baisse des impôts des moins riches puisqu’au final ce sont eux qui se mettent l’argent dans la poche.
Dans l'article précédent, on avait vu que les vrais riches sont ceux qui ne sont pas obliger de travailler pour gagner de l’argent mais ceux qui possèdent du patrimoine et qui attendent que l’argent rentre tout seul. Ici on a vu que ces ultras-riches sont aussi ceux à qui bénéficie le plus les baisses d’impôts. Tout est fait dans le système actuel pour qu’ils s’enrichissent plus chaque année, et on peut constater que ça marche très bien.
Pour payer la crise du Covid et renflouer les caisses de l’État, certains proposent d’augmenter les impôts pour les salariés aisés d’autres de faire payer tous les salariés. Mais en fait pour augmenter les impôts sur le revenu, il suffit d’augmenter les revenus. Il n’y a jamais eu autant d’argent circulant en Europe avec les plans de relance de la BCE. Jusqu’ici cet argent a toujours été à destination de ceux qui détiennent le patrimoine. Il suffirait donc d’arrêter d’avantager le patrimoine en l’arrosant avec tout cet argent où les baisses d’impôts et au contraire de le taxer fortement pour faire revenir l’argent chez les travailleurs pour relancer l’activité et remplir les caisses de l’État. Tant que la France et l’Europe seront dirigées par des banquiers et des gens qui vivent du patrimoine ça a peu de chance d’arriver.
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