Offre raisonnable d’emploi, une solution : tous députés !
Dans la nuit de jeudi 17 à vendredi 18 juillet, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi sur les droits et devoirs des demandeurs d’emplois. Le député communiste Maxime Gremetz parle d’une "régression du Code du travail". En outre, a été également adoptée la suppression, d’ici à 2012, de la dispense de recherche d’emploi (DRE), pour les seniors de plus de 57,5 ans.
Pourtant la séance avait mal démarré puisque le secrétaire d’Etat avait accusé la gauche de faire de "l’obstruction idéologique", l’opposition parlementaire ayant déposé près de 1 500 amendements alors que le texte ne comporte que trois articles. Source Saphir News
Qu’est-ce qu’une "offre raisonnable d’emploi ?"
Après de vifs débats, sa définition a été précisée le 6 mai. Elle évolue dans le temps. L’ORE est un poste compatible avec les qualifications du demandeur, situé dans sa zone de recherche et rémunéré à 95 % de son ancien salaire après trois mois d’indemnisation ; situé au plus à 30 km ou une heure de transport en commun et rémunéré à 85 % de son ancien salaire après six mois de chômage ; payé au moins du montant de l’allocation après un an.
Qui est concerné ?
2,64 millions de chômeurs en théorie. Mais seul un sur deux est indemnisé. Depuis la réforme de 2003 qui a limité l’accès aux allocations et la durée de celles-ci, le nombre des chômeurs non indemnisés a augmenté.
Les reproches des syndicats
Ils jugent ce projet "injuste" (car il sanctionne en priorité les chômeurs longue durée, les plus fragiles), "irréaliste" (une offre d’emploi ne peut être raisonnable pour une mère de famille sans permis comme un jeune célibataire motorisé) et "dangereux" (les employeurs pourront profiter de ce que chômeur est contraint, au bout d’un an, d’accepter un salaire équivalent à son indemnité).
On reproche aussi au gouvernement de fixer les obligations des chômeurs avant celles du service public pour l’emploi. Et de diminuer les chiffres du chômage plutôt que les chômeurs. Source Le Dauphiné.
"Ce texte n’a pas pour objectif de stigmatiser les demandeurs d’emploi. Au cœur de ce texte se trouve le nouveau projet personnalisé d’accès à l’emploi", a expliqué Christine Lagarde, ministre de l’Economie et de l’Emploi. Pas de quoi convaincre la gauche. Pour le député socialiste Michel Issindou, ce projet de loi "témoigne une nouvelle fois de votre volonté de bouleverser notre édifice social. Derrière un titre engageant se cachent de biens funestes intentions. Ce texte est inacceptable et dangereux", a-t-il lancé. Pierre Moscovici, parlait pour sa part de "traque" des chômeurs. Source Le JDD.
Deux amendements ont été néanmoins validés pour "protéger" le demandeur d’emploi. L’un prévoit la création d’un médiateur pour régler les conflits entre les chômeurs et le service public de l’emploi. L’autre garantit qu’aucun chômeur ne pourra être contraint de travailler à temps partiel si son Plan personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) prévoit qu’il recherche un travail à temps plein.
On pourrait en sourire si le sujet n’était pas si grave. Lorsqu’on connaît les délais indispensables à n’importe quel médiateur pour étudier un dossier (combien y en aura-t-il et de quels moyens disposera ce médiateur ?) et surtout la résistance des organismes à reconnaître leurs fautes, on imagine la situation financière et sociale de ceux qui auront été radiés à tort.
En clair, les députés de la majorité présidentielle ont souhaité durcir encore les conditions d’indemnisations qui rappelons-le ne sont versées qu’à environ 50 % des chômeurs. On pourrait à l’extrême se dire qu’il fallait pérenniser le système.
Ce doit être pour cela que les députés si prompts à sanctionner ces "fainéants" de chômeurs ont voté les conditions d’indemnisation de leur propre profession en cas de chômage :
Avant de quitter la présidence de l’Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, nouveau président du Conseil constitutionnel, a fait un joli cadeau à ses amis députés de tous les partis : une loi, votée en catimini par tous les groupes, permettant à tous les députés non-réélus en juin prochain, de continuer à percevoir leur indemnité parlementaire pendant encore soixante mois au lieu de six actuellement.
Bien entendu cette généreuse "indemnité chômage" est totalement inconditionnelle, et l’heureux bénéficiaire de cette jolie rémunération sur cinq ans n’est tenu à aucun engagement quelconque, comme par exemple justifier de la recherche d’un nouvel emploi, d’une visite mensuelle auprès d’un conseiller ANPE, ou d’une activité justifiant cette "aide sociale", bref, tout ce qui est demandé à des chômeurs ordinaires.
(...) Les indemnités attribuées aux députés ont été définies par l’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958. L’indemnité de base est calculée "par référence au traitement des fonctionnaires occupant des emplois de l’État classés dans la catégorie présentement dite hors échelle. Elle est égale à la moyenne du traitement le plus bas et du traitement le plus élevé de cette catégorie", ce qui correspond au traitement d’un conseiller d’État ayant moins d’une année d’ancienneté dans son grade.
S’y ajoute l’indemnité de résidence, comme pour les fonctionnaires, au taux de 3 %. Selon l’article 2 de l’ordonnance précitée : "L’indemnité parlementaire est complétée par une indemnité dite de fonction. Le montant de cette indemnité est égal au quart du montant de l’indemnité parlementaire (indemnité parlementaire proprement dite majorée de l’indemnité de résidence).
Depuis le 1er février 2007, les indemnités mensuelles brutes sont les suivantes : • Indemnité de base : 5 400,32 €
• Indemnité de résidence (3 %) : 162,01 €
• Indemnité de fonction (25 % du total) : 1 390,58 €
Soit un brut mensuel de 6 952,91 €
Retenues obligatoires. Doivent être déduites du brut mensuel diverses retenues :
• Cotisation à la caisse des pensions pendant les quinze premières années de mandat : 1 153,08 €
• Contribution exceptionnelle de solidarité : 55,62 €
• Contribution sociale généralisée et contribution au remboursement de la dette sociale : 539,55 €
• Cotisation au fonds de garantie de ressources : 27,00 €
Soit un net mensuel de... 5 177,66 €
Source : Altermedia-Info
Vous saviez parfaitement en votant le texte, Messieurs les députés de la majorité présidentielle :
Qu’il existe en France des territoires tellement sinistrés en termes économiques et que même avec la plus grande des volontés il est impossible de trouver même un temps partiel.
Qu’aucun employeur ne souhaite embaucher des gens de plus de 50 ans au fait qu’ils sont moins dociles que des jeunes mais plus exposés aux risques de maladies.
Que les femmes ayant des enfants ou susceptibles d’être enceintes sont parmi ceux qui sont le plus exposés au refus d’embauche.
Que demander à quelqu’un d’accepter un poste situé à 1heure de transport ne signifie pas la même chose qu’on habite en zone urbaine ou en campagne.
Qu’accepter un poste à 95 %, 85 % puis le montant de l’allocation signifie que ce montant sera ensuite appliqué en cas de perte de cet emploi et de retour à l’Assedic.
Qu’il est déraisonnable voire sadique de demander à quelqu’un qui cherche simplement à travailler de formuler le moindre "projet". Et d’abord, projet de quoi ? Chaque chômeur doit-il avoir la fibre entrepreneuriale pour travailler. Nous aimerions vous entendre chacun à votre tour nous expliquer quel serait votre projet professionnel si vous perdiez votre mandat !
Que les négociations sur la pénibilité ont échoué puisque les syndicats d’employeurs n’ont jamais rien voulut entendre. Il va s’en dire que la "formidable" flexisécurité a été totalement occultée et que comme nous l’avions indiqué à plusieurs reprises, seule la flexibilité reste la norme.
Le constat est simple : outre le fait que vous vous êtes arrogé des conditions et des indemnités chômages particulièrement attrayantes et que vous avez réussi à bloquer toutes les tentatives de non-cumul des mandats, vous allez pouvoir partir en congés d’été l’esprit, somme toute, libre.
Que vous dire, Messieurs les députés qui ont voté ce texte, si ce n’est notre plus profonde indignation et total dégoût.
Crédit photo
AFP/Libération
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