Peut-on entreprendre en étant de Gauche ?
Quand des discussions s’installent sur Internet (ou dans la vraie vie) entre contempteurs du social et défenseurs de la Sociale, un argument souvent utilisé de part et d’autres est la création et la gestion au quotidien d’une entreprise. Les défenseurs du social à ce moment là battent en retraite en refusant de s’expliquer ou de justifier leur manque de volonté entreprenariale ( y compris dans des entreprises sociales qui représentent moins de 50 000 salariés en France).
Pourtant cette question mérite sans doute d’être posée : quand on veut donner des leçons d’économie et de sociale à la terre entière, quand on pense que les patrons et les entrepreneurs sont des exploiteurs, quand on estime que le salarié est un mineur qu’il faut éternellement protéger, pourquoi ne pas créer soi même sa propre activité économique, embaucher des pairs, les payer généreusement et faire vivre enfin la démocratie sociale à l’intérieur de l’entreprise ?

La première excuse que présentent les nobles esprits de Gauche est économique : ils seraient pauvres, incapables de réunir les fonds qu’un capitaliste de naissance obtient lui aisément et donc ne pourraient pas créer leur entreprise.
C’est évidemment une très mauvaise excuse. Aujourd’hui pour créer une entreprise (au delà d'1 euro symbolique toujours possible) il faut trouver 7 500 euros. 7 500 euros c’est certes une somme, 7 mois de salaire d’un Smicard, mais la moitié du prix d’une Clio neuve, et cette somme peut être réunie avec d’autres personnes (qu’on appelle associés, ce qui devrait plaire aux gens de Gauche).
Evidemment on peut rétorquer que partir de zéro (ou presque) avec juste un petit capital social de 7 500 euros est risqué et qu’on peut tout perdre et ne rien développer.
La pédagogie de l'erreur.
C'est la première règle d'une économie ouverte : il y a des gagnants...mais aussi des perdants. Les pertes des uns étant normalement largement compensées par les gains des autres.
Il ne s'agit pas pour autant de loi de la jungle comme on voudrait nous le faire croire mais d'apprendre et de progresser de ses erreurs.
En France un entrepreneur qui rate une fois son entreprise ne pourra plus jamais entreprendre, dans d'autres pays on pense que si vous avez échoué une fois vous aurez compris pourquoi et de bien meilleures chances de réussir par la suite. Cela s'appelle l'essai-erreur et n'est jamais mis en oeuvre dans l'école française qui pense en terme d'élite et de champions nés. Notre pédagogie élitiste ne tient plus la rampe, l'école de Jules Ferry et sa méritocratie (qui engendre l'ENA et les résultats qu'on déplore aujourd'hui)
Le risque économique
L’autre solution entreprenariale consiste à investir une somme plus importante. Vendre par exemple son pavillon ou un bien immobilier (65 % des français sont propriétaires et il doit bien y avoir quelques personnes de Gauche dans ces propriétaires immobiliers) et reprendre une entreprise ou un fond de commerce. Ca tomberait d’ailleurs très bien puisque la France laborieuse et indépendante des 30 glorieuses est entrain de partir à la retraite (plutôt à 70 ans et après avoir travaillé 60 heures par semaine durant toutes ces années) et que les entreprises à reprendre sont donc fort nombreuses (et pas toutes condamnées à disparaître).
Malheureusement (ou fort logiquement) les gens de Gauche ne croient pas dans l’activité économique ou dans l’entreprise. Ils sont d’ailleurs la quintessence de l’esprit français qui veut qu’on consomme beaucoup (de services et d’aides apportées par l’Etat) mais qu’au grand jamais on ne risque le moindre de ses sous dans une activité économique (les livrets d’épargne sont là pour ça).
Cette aversion pour le risque est devenue la norme aujourd’hui en France. Tout le monde veut des livrets d’épargne, son bien immobilier, de l’argent de l’Etat ou des revenus faciles (35 h et tout le social) mais rarement en se remontant les manches. Les semaines de 60 heures et le risque de tout perdre ce n’est pas pour les nombreux français qui critiquent les patrons.
Les auto-entrepreneurs ou comment se responsabiliser
Autre possibilité pour les apprentis entrepreneurs : devenir auto-entrepreneur, tester ses capacités à vendre des produits ou ses services et apprendre ce qu’est l’indépendance économique.
Mauvaise pioche là encore puisque le gouvernement préfère les entrepreneurs du CAC 40 qui ont du répondant aux auto-entrepreneurs qu’on peut difficilement contrôler et moins encore sanctionner puisqu’ils sont pauvres et sans bien en général, le gouvernement a donc décidé de briser le statut du presque million d’auto-entrepreneurs.
Les raisons de cette hostilité à l’encontre les auto-entrepreneurs sont très simples à comprendre :
- Ils contribuent à réduire le salariat en prouvant qu’on peut être pauvre, seul et à son compte sans tendre la main tous les mois face à un patron ou à l’assistance de l’Etat
- Ils deviennent indépendants, travaillent sans code du travail et se rendent compte que l’assistance publique coûte très chère (la plus couteuse au monde comme vient de le souligner l’OCDE) pour un résultat médiocre et des gâchis phénoménaux.
- Ils sont incontrôlables par l’Etat car 1 million de personnes c’est une dispersion énorme de l’activité et face à cette fourmilière d’activités disparates il est impossible de règlementer et de contrôler réellement pour l’Etat (et l’Etat aime tout contrôler en France car il ne fait pas confiance aux français).
Le travail et les capitaux des autres, l'assitance pour tous.
La France aujourd’hui tient largement grâce au travail et aux capitaux des autres. Sans les qataris qui possèdent les plus beaux immeubles et entreprises à Paris, sans la capitaux du Golfe ou des fonds de pensions, sans le travail des petites mains en Asie qui fabriquent nos vêtements et nos Iphone, sans la main d’œuvre étrangère qui travaille dans le BTP, les cuisines des restaurants ou les usines, sans donc la sueur et le travail des autres nous serions confrontés au peu de richesses produites en 35 h, avec 5 semaines de congés payés et une activité durant une petite trentaine d’années (de 25 ans à 55 ans pour beaucoup).
Comme un enfant ne devient adulte que lorsqu’il quitte le cocon familial et doit se débrouiller dans la société et l’économie des hommes, un homme de Gauche devrait souhaiter se coltiner avec la réalité économique, le Droit du travail, les contrôles innombrables et la réglementation tatillonne qui constituent aujourd’hui la réalité du pays.
Seul le terrain économique et social donne un accès à la connaissance et à la maîtrise des grandes lois de l’économie et on aimerait qu’un peu plus de gens de Gauche mettent les mains dans le moteur de l’économie au lieu de se réfugier derrière leurs petits livrets de Caisse d’épargne ou dans leur bulle idéologique.
Grandir c'est choisir, au niveau économique aussi.
Si l'on a compris que le socialisme appartient au passé, qu'un milliard de Chinois mangent désormais à leur faim (et bénéficient même depuis peu d'assurances sociales) grace au libéralisme (qui n'est pas une idéologie mais une perpétuelle adaptation à l'environnement) les français vont rapidement devoir choisir entre l' économie planifiée et administrée qui est la notre (on taxe ce qui bouge, on règlemente ce qui bouge encore et on subventionne ce qui ne bouge plus) et une économie libre et ouverte où chacun doit donner le meilleur de lui même sous peine d'une sanction économique rapide.
Il ne s’agit pas de stipendier les salariés ou les fonctionnaires mais de leur demander de faire l’effort un jour de passer de l’autre côté de la barrière, de prendre quelques risques financiers afin de voir si leurs idées tiennent à l’épreuve des faits.
Pluttôt que de tenter (en vain) de changer les autres (qui sont 7 milliards désormais) pourquoi ne pas tenter une grande aventure : changer soi-même ?
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